Une bonne raison de boycotter la redevance : "George et Fanchette"
Tenez, une bonne raison de refuser l'augmentation de deux euros de votre redevance que propose la pauvre Mme Filipetti, et même de ne pas payer de redevance en jetant votre TV aux orties : le téléfilm (financé par votre taxe) "George et Fanchette" que diffuse France 5 ce soir et qui prétend saisir un moment de la vie de George Sand en 1848.
Le cinéma contemporain ne sait rien restituer du XIXe siècle et surtout pas ses génies (vu que tous ceux qui tiennent le haut du pavé de la création aujourd'hui ne sont que de vils mollusques insipides). Alors on fait jouer le rôle d'Aurore Dupin-George Sand par l'archibanale Ariane Ascaride qui prend des airs de femme terne et posée. Ce que n'ont pas compris les idiots qui ont fait ce film, c'est qu'un grand écrivain est tout sauf un être ordinaire aux bonnes manières. George Sand, telle qu'elle se décrit elle-même dans ses mémoires est tout le contraire de cela. Oui c'est un être réfléchi, profond, et qui sait très bien assumer ses responsabilités et mener des projets à long terme. Mais c'est aussi, elle le dit elle même, une femme qui ne tire pas son bonheur de ce qui réjouit d'habitude les autres individus de son sexe, mais qui, à l'inverse, se laisse emporter d'enthousiasme par bien des détails de la vie qui laissent les autres indifférentes. Vous vous souvenez de son ivresse devant les paysages des Pyrénées, de sa migraine devant la croix en feu des funérailles de Louis XVIII. Tout le charme du personnage est là, dans ce côté imprévisible, sa capacité à s'engloutir dans des détails.
Elle a perdu son père lorqu'elle était encore en bas âge, sa mère était mi-comédienne mi-prostituée, elle avait gardé d'elle le côté fillette qui attire à elle tous les oiseaux de la forêt, un côté un peu fou, un peu chamane... Tenez j'ouvre encore au hasard son "Histoire de ma vie", p. 584 et tombe sur cette phrase : "J'étais trop mal vêtue, et j'avais l'air trop simple (mon air habituel , distrait et volontiers hébété) pour attirer ou fixer les regards." Un air volontier hébété. Oui. cela se voit très bien dans le portrait au crayon que Musset fit d'elle. C'est une rêveuse, un personnage décalé, c'est ce qui fait toute sa séduction, et qui justifie son ancrage dans l'écriture c'est à dire dans l'autre monde, dans l'au-delà de l'ici-bas, dans le dialogue avec la postérité.
Quel rapport avec les airs de brave fonctionnaire du ministère de la culture (voire de prof de français de troisième) qu'arbore Ariane Ascaride (ou qu'on fait arborer à Ariane Ascaride parce que personne sur le tournage n'a même idée que George Sand pût être autre chose que cela) et qui, à eux seuls, discréditent tout le film ? Je préfèrerais cent fois qu'il n'y eût sur nos écrans que des films américains imbéciles et violents plutôt que pareilles insultes à la grandeur de notre histoire littéraire et qu'on cessât de prélever dans nos poches de quoi financer pareils navets...
Le bal des célibataires
On se souvient du livre de Bourdieu "Le bal des célibataires". Je connais pas mal de gens en Béarn, notamment dans ma famille, qui sont restés célibataires chez leurs parents toute leur vie. Telle aurait d'ailleurs été probablement ma condition si je n'avais eu l'idée folle de croire en la connaissance et d'aller tenter ma chance dans les grandes écoles à Paris.
Je me demande si les sociologues de l'université de Pau se sont penchés sur cette question récemment (je n'ai pas l'impression qu'ils fassent beaucoup connaître leurs travaux hors de leurs murs). Ce statut de "Tanguy" doit avoir une drôle d'influence sur la perception du monde et du temps. Une enfance indéfiniment prolongée dans des meubles et des décors qui vieillissent. Le refus d'aller affronter l'altérité, d'aller y prendre des responsabilités. C'est peut-être une glorieuse forme de résistance à la modernité, quoique les néo-libéraux s'en arracheraient les cheveux (arg ! quelle entrave à la mobilité du capital productif humain !).
Est-ce que la situation périphérique d'une région peut pousser tout le monde vers une attitude régressive, involutive (en Espagne on parle d' "involucionismo"). Les garçons incités à rester chez eux à ne rien faire, les filles de même, devenant de ce fait moins coquettes, moins séduisantes, moins intéressantes (une copine béarnaise me disait il y a trois ans "Oh là là j'étais à Paris pour un salon porte de Versailles. Comme les filles sont apprêtées ! Je comprends qu'elles trouvent que nous les Béarnaises nous sommes des paysannes !)." Un cercle vertueux d'involucionismo se crée alors qui favorise le passéisme, la passivité et la sous-natalité. De quoi faire rêver les obsédés de l'empreinte carbonne non ?
En Espagne aussi les "Tangy" sont nombreux, qui ne veulent "ni travailler ni étudier". Le pays privé de son droit au crédit voit son chômage grimper à 25 % (près de 40 % en Andalousie). De quoi déchaîner de nouveau cercles "involucionistas" à n'en plus finir. L'involucionismo est l'avenir de l'Europe.
A propos de Bourdieu, Tobie Nathan s'énerve contre son livre ("les Héritiers") qui décrivait les acteurs de mai 68 comme des grands bourgeois, alors que lui venait de la cité de Gennevilliers (mais d'une famille qui n'était pas dépourvue de capital culturel, notons le). Se peut-il qu'il y ait eu un biais statistique qui ait fait manquer à Bourdieu les "rank and file" du mouvement étudiant (car Nathan reconnaît qu'il faisait partie des sous-fifres) ? Ou bien son livre se désintéressait-il des seconds couteaux ? Il y a bien longtemps que je ne l'ai pas revu, donc je ne sais plus. Nathan est quand même très bon pour démystifier le milieu académique (à propos de Devereux notamment). Mais il faut reconnaître que psychologie est un terrain de bidonnage particulièrement fécond.
George Sand aux funérailles de Louis XVIII
En septembre 1824, George Sand est à l'enterrement de Louis XVIII. Malheureusement son témoignage dans "Histoire de ma vie" est coupé. On n'aura donc pas la totalité du tableau, mais il y a quand même des bribes intéressantes. Elle est venue avec une amie qui a réussi à avoir au culot les meilleures places dans la basilique Saint-Denis pour 16 personnes. Elles sont toutes vêtues de noir parce que toutes les femmes en France, même bonapartistes ou libérales, ont décidé par effet de mode de partager le deuil. La petite Aurore-George n'a pas voulu jouer les "esprits forts" comme elle dit.
Communiste dans l'âme, elle n'éprouve évidemment aucune tristesse dans ce deuil. Elle observe que la Restauration n'est pas mise en péril par le décès du roi car les libéraux attendent beaucoup de Charles X. Comme souvent dans ses récits, elle se laisse happer par les détails. Cette grande croix en flammes et ces rangées de cierges sur fond de velour noir dans la basilique lui font mal aux yeux pendant deux heures et lui donnent la migraine. Une cantatrice italienne à côté d'elle, Mme Pasta, dit que c'est comme l'enfer ou une cérémonie de sorciers. A un moment elle voit Louis-Philippe qui a des airs de jeune homme guilleret.
Voilà. Sand m'amuse toujours avec ses fausses naïvetés, ses petites marottes qui sont toujours très féminines (alors pourtant qu'elle dit détester la compagnie des femmes qu'elle trouve trop "nerveuses" et inquiète pour des choses puériles). Ces funérailles sont pourtant un sacré événement : premières funérailles royales après la profanation de Saint Denis par les révolutionnaires, encore un effort surhumain, digne de la Corée du Nord aujour'hui, que fait la monarchie en ce temps là pour faire "comme si rien ne s'était passé", pour réparer l'irréparable... Tout ce théâtre d'ombres, quand essaie d'exister encore ce qui n'est déjà plus, et depuis très longtemps.
Je lis Sand parce que je n'arrive pas à avoir par Parutions.com les livres dont je voulais faire la critique. Alors je picore dans Sand comme je butinerais dans Custine. Juste pour le plaisir d'avoir la compagnie de gens que j'aime bien. C'est un peu loin du vote du budget du gouvernement Hollande par le Sénat, du taux de chômage en Espagne, de la trêve en Syrie, mais ce n'est pas moins intéressant. Ces gens des années 1820 ont un point commun avec nous : ils vivent dans un moment où l'histoire retient son souffle : entre l'épopée napoléonienne et le temps des nouvelles révolutions.
Comme nous mêmes nous trouvons sans doute dans une dernière respiration entre la première déferlante de la vague néo-libérale (dans les années 1990) et l'arrivée d'un monde sans doute très profondément différent de celui du XXe siècle (pour le meilleur et pour le pire). Ces périodes d'entre-deux sont toujours intriguantes. Les esprits rassemblent des morceaux de la culture du passé en essayant de l'ajuster à ce qui pourra advenir, sans avoir d'idée précise de la forme que les événements peuvent prendre ni de la direction dans laquelle le rouleau compresseur va se mettre en branle...
Au fait, je repense à Louis-Philippe. Je trouve vraiment qu'on ne peut pas avoir de sympathie pour la branche orléaniste. La trahison de Louis XVI par Philippe-Egalité, quand on y songe, est une affaire horrible, et bien avant même que ce dernier ne vote la mort du roi. Songeons aussi au cadavre de la princesse de Lamballe éventré traîné sous les fenêtres du Palais Royal sous les fenêtres de Philippe Egalité qui n'y trouve rien à redire. D'ailleurs un bien drôle d'endroit que ce Palais Royal propriété des Orléans. Pourquoi y ont-ils toujours laissé proliférer la prostitution ? Et pourquoi Napoléon voulut-il y installer son Conseil d'Etat ? Je me demande ce qu'il aurait mieux valu en faire... Peut-être le brûler ? Rien de ce qui touche à cet endroit ne me dit rien de bon. A ma connaissance il n'y a que Stefan Zweig pour en chanter la louange dans ses mémoires (ainsi que celle des écrivains illustres qui l'habitèrent), car il y demeura quelques mois.
Mal-être bourgeois
Ayant quitté Brosseville, je retrouve des milieux que je n’aime pas beaucoup, milieux de juristes, de magistrats, de fonctionnaires où le surmoi écrase tout le monde. En septembre j’entends une documentaliste qui dit à un magistrat « si vous voulez, je peux faire des recherches documentaires pour vous », le magistrat « ah non, c’est mon travail, je ne veux pas que vous perdiez de l’énergie avec ça, je le ferai ». Puis au réfectoire, la cantinière à 13 h 15 sert des gens à table parce qu’il n’y a pas beaucoup de monde. Quand elle s’approche de la table d’une magistrate, celle-ci lui lance « Pourquoi vous faites ça ? Pourquoi vous venez me servir à table ? Est-ce que ça fait partie de vos attributions ? Je peux venir chercher mon assiette à la cuisine vous savez, ça me fera faire de l’exercice » (la femme est maigre comme un clou et n’a pas spécialement besoin d’exercice of course).
Je croise cette attitude des juristes de tout poil à l’égard des subordonnés en permanence. L’éternel « ne vous embêtez pas, c’est à moi de le faire, c’est moi qui dois souffrir etc ». J’en avais déjà parlé sur ce blog il y a cinq ans. Peut-être est-ce leur façon d’intégrer une culpabilité qui pèse sur l’Etat en général, ou sur la moyenne bourgeoisie je ne sais pas.
Je trouve cela horripilant. Leur mal-être, leurs manières modestes, leur façon de se disculper en permanence des injustices du monde par ce refus apparent des hiérarchie, qui est aussi une façon pour eux de ne rien devoir à la classe inférieure, et de n’avoir en fait pas d’échange avec elle (puisque 80 % de l’échange possible passe par la prestation de service - précisons dans l'anecdote ci-dessus que la cantinière a répondu "mais çe me fait plaisir de vous servir à table", l'idée qu'on puisse se faire plaisir et se réaliser comme être social, utile au monde, dans ce genre de prestation est évidemment étrangère à la moyenne bourgeoisie). Ca va avec leur incapacité d’aller voir concrètement ce qu’il se passe hors de leur bocal habituel, leur refus de savoir ce qu’il se passe à Bani Walid etc. Peut-être tous ces gens rêvent-ils d'être entourés de robots, auxquels, comme à leurs ordinateurs, ils n'auront surtout pas à dire "merci".
La victoire des nationalistes au Pays basque espagnol
Aux élections de dimanche dernier, le Parti national basque (PNV) de droite remporte 34,6 % des voix, et la gauche abertzale (25 %). Celle-ci bénéficie de la fin du terrorisme d'ETA, mais échoue a faire aussi bien en voix qu'aux élections générales de 2011, et perd notamment des suffrages dans son fief de Guipuzcoa qu'elle gouverne (certains croyaient à tort qu'elle dépasserait le PNV).
Beaucoup de médias mainstream ou contestataires (comme Russia Today) se méfient de cette montée des nationalistes basques d'autant qu'elle pourrait se trouver en phase avec l'évolution actuelle de la Catalogne.
Je voudrais juste apporter ici quelques nuances à cette vision négative. Je suis très loin d'être un inconditionnel du catholicisme nationaliste basque. Je sais qu'il est mal né (arrimé au romantisme allemand au XIXe siècle et tourné contre la montée du socialisme porté par les ouvriers venus du Sud de l'Espagne).En outre en tant que Béarnais je connais les tendances de ce nationalisme à phagocyter à un vision "euskarocentrique" (et un tantinet victimaire) toute l'histoire de la Gascogne avant la conquête romaine et toute son économie actuelle.
Mais rappelons quand même qu'à partir des années 30, le PNV fut du bon côté de la barrière : allié des républicains en 1936 puis auréolé du prestige de la résistance anti-franquiste, même si on doit lui reprocher son atlantisme dans les années 80-90 (et rappelons en outre qu'en 1986, le Pays basque avait voté contre le maintien de l'Espagne dans l'OTAN, malgré le soutien du PNV au "oui" au référendum).
Le Pays basque, sous le PNV jusqu'en 2009 puis sous les socialistes a profité d'un taux de croissance supérieur au reste de l'Espagne (après une reconversion industrielle réussie) pour continuer à mener une politique keynésienne quand le reste du pays (et l'Europe) choisissait l'austérité pour renflouer les banques. On comprend que l'entité basque (alors que le Pays basque n'a jamais voté pour la constitution espagnole) se pose des questions sur son appartenance au reste de l'Ibérie quand celle-ci pour sa part continue de valider la politique d'austérité du gouvernement Rajoy (voyez le vote majoritaire de la Galice en faveur du Parti populaire).
J'attire votre attention sur cet extrait d'un article de la Voz de Barcelona en avril dernier :
""La situation en Catalogne est beaucoup plus dramatique qu'au Pays Basque". Par ces mots de l'historien Fernando Garcia Cortazar analyse la situation politique actuelle et les nationalismes en Espagne. Le professeur d'histoire contemporaine à l'Université de Deusto (Bilbao) les a prononcés, mardi, en commémoration du bicentenaire de la Constitution de Cadix de 1812 organisé par Impulso Ciudadano.
Auteur à succès, García de Cortázar - ses livres populaires de l'histoire sont toujours des best-sellers -, a rappelé qu'au Pays basque, ceux qui ne sont pas nationalistes, n'ont jamais été abandonnés par le gouvernement, les médias et les centres culturels contrairement à la Catalogne: "Au Pays basque ce sont les nationalistes basques qui sont dans la clandestinité et qui se cachent à l'université, par exemple."
Le propos montre que le Pays basque est devenu une sorte de petit frère, à l'école du "grand frère" catalan en matière de sécessionnisme.
Cela dit on aurait bien tort aussi d'exagérer l'importance de l'indépendantisme de la Catalogne. Il est clair qu'Artur Mas, actuel président de la Generalitat, joue avec une rhétorique sécessionniste, mais c'est aussi parce qu'il sait que son référendum (promis à la population) sera invalidé par le Tribunal constitutionnel à Madrid et sera désamorcé comme le plan basque Ibarretxe en 2008. En ce moment le même journal (Voz de Barcelona) parle d'une dévaluation de la notation de la Catalogne (alors que celle du Pays Basque reste stable) par Moody et du risque de problèmes de financement pour les grandes entreprises catalanes en cas de choix de l'indépendance. Tout cela sent la vaine agitation comme les "déclarations de souveraineté" basque et catalane du début des années 1990.
La gauche, les nations, les valeurs universelles
Une polémique autour du PRCF (un petit groupe dont sans doute les lecteurs de ce blog n'ont jamais entendu parler) a conduit ce dernier récemment à prendre ses distances (à juste titre selon moi) à l'égard de toute perspective d'action commune avec le Front national même sous forme de pétition. Cela nourri des controverses, notamment avec des gens que je connais qui ont rejoint a mouvance du POI. Parmi ceux qui restent sur la rive "Front de gauche", un d'eux m'écrivait hier "La rupture entre le comité Valmy et le PRCF est un dommage collatéral de la guerre de Syrie. Il y en aura beaucoup d’autres, en France comme au Liban comme dans tous les pays."
J'ai trouvé un peu cavalier qu'on compare un grand drame national comme celui que connaît (itérativement) le Liban depuis plusieurs décennies et les petites querelles d'intenautes engagés. Bien sûr il faut savoir remettre les combats d'activistes dans leur juste proportion, mais il me semble que je devais quand même dire un mot de celui-ci sans verser dans l'anecdotique, car il y a un air du temps actuel favorabe au FN (et à d'autres mouvements à droite de la droite) dont il faut tout de même un peu parler.
Aujourd'hui par exemple Acrimed cite sur Facebook une lettre qu'ils ont reçue dont on peut mentionner deux lignes : "En quoi, critiquer l’immigration de peuplement, est-il un crime, alors que la majorité des citoyens européens (de souche) en ont soupé, de la racaille arrogante et fanatisée ? Criminogène et pathogène, de surcroît? / Ne seriez-vous pas mieux inspirés, de fondre vos récriminations, sur les véritables responsables de cette invasion organisée ? Ah mais... c’est que... Dame ! On ne s’en prend pas aussi facilement à la... Synagogue !" Peut-être cette lettre est-elle une réaction à l'article de Henri Maler et Blaise Magnin publié le 18 octobre.
Bon, ne nous voilons pas la face. La montée de la droite de la droite en France et dans bien d'autres pays a des causes multiples. Il est idiot de la traiter avec des imprécations creuses comme le fait M. Mélenchon. Lui-même a une responsabilité très lourde dans ce processus, car comme beaucoup de gens à gauche de la gauche il a manqué de clarté sur l'analyse du rapport entre globalisation et Etat-nations, sur les frontières (et donc la question de la régularisation ou non des sans-papiers), sur l'euro, sur l'ingérence. Toute la gauche ou presque (à l'exception de gens comme Chevènement et encore souvent avec mollesse, et avec un oeil dans le rétroviseur) ont cru pouvoir traiter ces questions cruciales avec des anathèmes internationalistes. Seule leur bonne conscience les intéressait (et accessoirement la petite clientèle qu'ils se constituaient dans les mairies de banlieues), lançant ainsi avec une inconscience folle ce qu'il reste de prolétariat d'origine européenne vers le vote frontiste.
Il serait plus que temps que la gauche (MM. Laurent, Mélenchon, Montebourg) posent à nouveaux frais la question des nations (avant que celle-ci ne leur explose à la figure). Mais cela ne peut se faire à coups de clichés (favorables ou hostiles), avec des insultes ou avec des marinières. Il faut poser par exemple la question de l'ingérence, qui n'est pas simple : accepte-t-on que des médias marchands de canons gardent une hégémonie sur l'information à ce sujet ? Qui va-t-on former et encourager à faire de l'info alternative là dessus ? Comment ? Passé le problème de l'info restera la question philosophiques : oui ou non défend-on la souveraineté des nations du Sud ou pas ? Si oui comment faire pour ne pas laisser tomber pour autant les forces qui en leur sein, ou dans leur diaspora (et qui souvent ont la double nationalité) veulent faire avancer des valeurs "occidentales" en leur sein ? ces valeurs "occidentales" d'ailleurs sont-elles occidentales ? peut-on les présenter autrement ? leur trouver une universalité qui les fasse échapper à toute récupération possible par l'OTAN ? et où et comment collecter des fonds pour la promotion de ces valeurs (celles de la libération des femmes, de la défense de droits collectif et individuels, du droit de l'environnement) sans les laisser glisser sous la coupe des grandes fondations américaines ou nord-européennes ? Il y a des concepts à repenser, des modes d'action nouveaux à définir, ce que la gauche refuse d'examiner par pur nombrilisme moralisateur.
Hollande, Google, Pulvar, Bartolone, le 9-3
Tout le monde le sait désormais : François Hollande ne fera pas ployer les grandes puissances financières. Il n'en a même pas l'ambition. Aujourd'hui il veut soustraire les oeuvres d'arts à l'impôts de solidarité sur la fortune. Demain il se couchera devant Google qui le menace si la France soumet ce groupe à l'impôt. Au fait, quelqu'un sait-il ce que cela coîte à un gouvernement de créer son propre Google comme l'ont fait je crois les Chinois ? Bien sûr nul ne se pose la question en France.
Notez que Mme Filipetti (dire qu'elle a fait Normale Sup la pauvre !) m'a bien fait rire aujourd'hui avec cette sortie : "Je suis un peu surprise par le ton de cette correspondance, qui s'apparente à une menace. Ce n'est pas avec des menaces qu'on traite avec un gouvernement démocratiquement élu". Vous avez bien lu "démocratiquement élu". Parce que lorsqu'un gouvernement n'est pas "démocratiquement élu" (Cuba, la Syrie, l'Iran, la Biélorussie, le Laos... euh, peut-être aussi le Qatar, le Kazakhstan, la Chine, que sais encore), alors là oui, on fait ce qu'on veut. Menace, chantage, humiliation, pas de problème.
Remarquez on le fait aussi, quand même, avec des gouvernements démocratiquement élus : voyez l'Argentine - Mr Mélenchon qui s'y trouve égraine une liste édifiante de pressions extérieures que ce pays courageux affronte.
Alors non vraiment, point d'estime pour M. Hollande qui ne mérite pas notre considération. Je rappelais il y a peu sur un blog ami que François Hollande était tête de liste de la liste du PS aux élections européennes en 1999 quand nous bombardions la République fédérale de Yougoslavie au nom des valeurs du drapeau bleu à étoiles jaunes (je me souviens de sa tête sur les affiches au moment même où nos avions larguaient leurs bombes, une tête ne peut pas vous revenir après cela). Bien sûr l'anecdote ne parle à personne, parce que moins de 100 000 individus en France à ce moment-là avait concommittamment au bout du fil des correspondants qui voyaient pleuvoir des Tomahawks à leur fenêtre pendant que les candidats français dissertaient sur notre belle Union.
M. Hollande ne peut nous inspirer qu'une indulgence : celle qu'on doit à quelqu'un qui aréussi à se faire élire sous une étiquette de centre gauche dans un pays de plus en plus agressivement de droite (ce matin M. de Villepin avouait que M. Coppé durcissait son discours parce que les campagnes dans son parti se gagnent de plus en plus à droite). Mais c'est bien peu. Et ce ne sont pas les lunettes à 15 000 euros de Mme Pulvar qui me feront changer d'avis (avec Mme Benguigui ces deux nous donnent la vérité du système gauche caviar actuel). Pour ma part désormais je change de chaîne à la TV quand je vois ces misérables socialistes sur mon écran.
M. Bartolone nous explique que la France ne tiendra pas les engagements de déficit que nous impose l'Union européene. Il est bien placé pour le savoir dans l'état où se trouve la Seine-Saint-Denis, et dans l'état où il la laissera, dans 10 ans, quand le contribuable local devra payer la facture des dizaines de collèges qu'il fait construire avec de ruineux "partenariats publics privés" (PPP). Au fait, amis lecteurs, je vous informe que je suis très déterminé à publier mon livre sur mes trois ans en Seine-Saint-Denis, malgré les censures éditoriales dont je fais l'objet. Vous y comprendrez mieux notamment, le combat que j'ai mené avec d'autres contre l'actuel président de l'Assemblée nationale. Ceux qui crachent sur le Front de gauche en permanence au nom de la vision "plus haute" - et en fait plus groupusculaire - qu'ils prétendent avoir de la politique devraient au moins avoir la décence de reconnaître, à l'actif de ce mouvement, le mérite d'avoir conduit des luttes comme celle-là. Certes il avait quelque chose de poiticien puisque le FdG dans le 9-3 voulait reconquérir une majorité, mais il s'y trouvait aussi une vision de la société derrière. Quand le FdG aura disparu du 9-3 qui protègera sa population contre les PPP ? Les champions de la polémique sur Internet ? Réfléchissez lecteurs, gardez les pieds sur terre :
HRW sur Syrte, vent nouveau des contestataires, histoires d'escarpins
Le Nouvel Obs résume l'enquête de Human Rights Watch sur la mort de Kadhafi - une des scènes les plus médiatisées du Web, nos enfants en sont sans doute reconnaissants à nos chers journaleux, comme dirait Poutine, c'est le mauvais goût occidental dans toute sa splendeur. Eléments nouveaux : la grenade qu'a fait exploser un de ses gardes du corps, et les 60 collaborateurs de Kadhafi exécutés sur place. Pas un mot sur la balle qui aurait été tirée dans la tête du dictateur (une thèse à laquelle je n'ai jamais trop cru, vu l'état de la tête dans le linceul, mais je peux me tromper). Et finalement le mystère qui reste entier. Kadhafi est-il mort des coups de poings qui ont fait saigner les plaies ouvertes par la grenade, et quid de la nouvelle blessure constatée le soir sur les vidéos.
Le mystère reste entier, comme sur la mort de Milosevic, et celle d'Arafat (pourquoi n'avons nous plus aucune nouvelle dans les médias alternatifs ou dominants de l'autopsie réalisée début septembre ?).
Au bas de l'article du Nouvel Obs, un commentateur écrit "Où était la cour pénale internationale quand les Kadhafi ont pris le pouvoir en Libye" ? L'individu ignore qu'en 1969 (date à laquelle il n'était sans doute pas né), il n'y avait pas de CPI. Mais la magie internautique lui donne malgré tout le pouvoir de livrer son opinion. Bah oui, y a pas de raison. Avec des lecteurs comme ceux-là, avec une "opinion publique" comme celle-là, les journalistes auraient bien tort de soigner leurs articles.
A part ça il paraît qu'un vent nouveau souffle sur les plaines des militants "alternatifs". Monsieur Tonneau a sa fiche sur Wikipedia en russe et dialogue avec des conseillers de Chavez, un collectif anti-ingérence revendique des milliers d'adhérents, et Edgar le blogueur devient une nouvelle Lady Gaga avec 600 "likeurs" à ses billets sur Face de Bouc. Et dans la série des Français célèbres à l'étranger, on peut désormais ajouter un ami du Réseau Voltaire qui parle sur les ondes de la TV iranienne.
Tenez, même en Belgique ça bouge ! Le Parti du travail belge gagne des voix aux municipales et le collaborateur de l'Atlas alternatif Antoine Hermant devient conseiller municipal de je ne sais plus quelle ville sous cette étiquette (bon bien sûr vous aurez noté la dose d'ironie que je glisse dans toutes ces infos). Bon j'aurais pu vous parler aussi du 20 % du PC tchèque aux sénatoriales de dimanche, aussi peu porteur d'avenir que le score du PTB, mais peut-être un signe quand même d'un certain ras-le-bol en Bohème (j'en profite pour rappeler aux petits nouveaux ma position sur Julius Fucik, et dire mon ras le bol, à propos de la RDA cette fois-ci, des rediffusions de la Vie des autres, encore sur les écrans de D8 avant hier, moi, de la RDA c'est ceci que je retiens)
Les temps changent vous dis-je, le monde va changer de base !!! Pour quelle nouvelle base au juste ? Ca nul ne le sait.
Au fait, en parlant de base, et de socle de nos démarches, saviez vous que les Andalouses au début du XIXe siècle se torturaient les pieds pour se pavaner sur la grande avenue de Séville dans des souliers minuscules. Un supplice digne des Chinoises, si j'en crois Custine. Mais pourquoi Diable fallait-il en ce temps là que les dames eussent des pieds réduits ? Si quelqu'un a une idée, qu'il me le dise en commentaire. Pour une fois ça me changera des insultes.