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Le blog de Frédéric Delorca

La présence au monde du quadra

30 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le quotidien

forum.jpgQuestion de quadragénaire : je m'interroge beaucoup en ce moment sur la question de la présence de l'homme mûr au monde (ses proches, les plus éloignés). Son rapport à sa génération, à celle qui l'a précédé, à celle qui suit (là encore aussi bien ses proches que la multitude). Le monde romain, société certes très patriarcale et aristocratique, mais qui s'est posé de nombreuses questions à la lumière de la philosophie grecque sur la responsabilité du citoyen dans la société, sur la liberté collective etc, nous fournit un cadre de réflexion toujours intéressant sur ce thème, je crois, un cadre d'ailleurs davantage constitué d'exemples, d'anecdotes, que de grands exposés didactiques. Prenez par exemple cette anecdote de Plutarque sur César qui, croisant des saltimbanques sur une route qui chérissaient énormément leur singe, leur demanda s'ils n'avaient pas d'enfants dans leur pays puisqu'ils en venaient à cajoler autant un animal. L'anecdote montre à la fois le côté très répandu dans toutes les sociétés humaines à toutes les époques de l'affection aussi bien pour les animaux que pour la progéniture (avec une priorité de la seconde sur les premiers, n'en déplaise à Brigitte Bardot), et le fait que dans un système de valeur élaboré comme celui des gréco-romains, cela était jugé parfaitement légitime, au point qu'on prête ce propos à un grand aristocrate et un grand homme d'Etat. (Bien sûr les amis des sciences humaines constructivistes, culturalistes et relativistes, me diront que certaines cultures ont prôné l'indifférence aux enfants ou aux animaux, mais les exceptions ne devraient pas accaparer excessivement notre attention, bon je l'ai déjà expliqué mille fois, n'est ce pas). Voyez là dessus ma précédente remarque sur Epictète. Le fait que de telles normes aient existé n'implique pas que l'homme ne garde pas (et heureusement) sa liberté de faire tout autre chose, mais peut aussi légitimer le plaisir à en perpétuer et réactiver l'effectivité, quitte à en "adapter" un peu librement le sens au contexte contemporain.

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Aafia Siddiqui

27 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

aafiasiddiqui1.jpgToujours dans ma série de billets consacrés à des femmes remarquables, après avoir fait l'éloge de Malala Yousafzai, militante communiste pakistanaise grièvement blessée par les Talibans (mais ardemment soutenue par les Occidentaux), je serais à blâmer si je ne disais un mot d'une autre pakistanaise pour laquelle ses concitoyens manifestaient aujourd'hui. Il s'agit de Aafia Siddiqui, 41 ans, docteur en neurosciences, formée au MIT, enlevée entre mars 2003 et juillet 2008, elle et deux de ses trois enfants (le troisième, un bébé, ayant été peut-être tué), détenue dans les prisons secrètes de la CIA pour son appartenance présumée à Al Qaida et de son mariage - est-il avéré ? - avec un des auteurs du 11 septembre (voir les travaux d'Andy Worthington sur elle et sur les détenus de Guantanamo, la presse mainstream prétend qu'elle avait juste "disparu") et condamnée à une peine de 86 ans de prison par un tribunal de New York en Septembre 2010, pour avoir tenté de tirer sur un de ses interrogateurs américains en Afghanistan en 2008 (et qui d'ailleurs lui ont aussi tiré dessus, puis n'ont guère pris garde à soigner ses blessures, to say the least), alors que beaucoup d'éléments plaident pour l'erreur judiciaire . Selon l'accusation, elle a été arrêtée en 2008 par la police afghane, dans la province afghane de Ghazni, en possession de notes et de matériel soupçonnés d'être destinés à des projets d'attentats contre la statue de la Liberté et d'autres sites new-yorkais.

Voilà, lisez sur cette affaire, faites vous une opinion, voyez s'il faut agir ou pas.

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Le jour de Clare Daly

24 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Débats chez les "résistants"

Ces derniers temps, chaque jour est le jour d'une femme sur le front du courage politique : avant hier celui de Medea Benjamin, hier celui de Randa Kassis, aujourd'hui celui de Clare Daly, député du parti socialiste d'Irlande.

 

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Maximes de Goethe

23 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #XVIIIe siècle - Auteurs et personnalités

goethe.jpgGoethe est un auteur qui a été très unanimement admiré par des gens aussi divers que Napoléon et Nietzsche. Son recueil de maximes publié chez Rivages en 2001 est rempli d'opinions de bon sens ou d'avis qui sans être absolument vrais,ont quand même quelque chose de pertinent. Par certains côtés il me rappelle Julien Benda, en moins aigre.

 

"A bien y regarder, toute philosophie n'est que le sens commun dans une langue amphigourique"

 

"Les Allemands, et ils ne sont pas les seuls, ont le talent de rendre les sciences inabordables"

 

"Les mathématiques ne sont pas à même d'évacuer les préjugés, elles ne peuvent tempérer l'obstination, atténuer l'esprit partisan, elles n'ont aucun effet."

 

"Nos adversaires croient nous contrer en répétant leur opinion sans faire cas de la nôtre".

 

"Classique ce qui est sain, romantique ce qui est malade".

 

"Il n'y a pas d'art patriotique, pas plus qu'il n''y a de science patriotique."

 

"Dans le domaine de l'idéal tout dépend de l'élan, dans le domaine du réel tout dépend de la persévérance"

 

"Que personne ne pense qu'il est attendu comme le Sauveur"

 

"On n'apprend pas à connaître les gens quand ils viennent vers nous ; il faut aller vers eux pour comprendre ce qu'ils sont"

 

"Personne n'est plus esclave que celui qui se croit libre sans l'être"

 

"Tout comme il y avait autrefois à Rome, outre les Romains, tout un peuple de statues, de la même façon il existe en dehors de ce monde réel un monde de folie qui est presque plus puissant et c'est là que vit la grande majorité des gens"

 

"Il y a plus à faire quand on est vieux que quand on est jeune"

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Ce qu'un élu du peuple devrait faire en matière de relations internationales

23 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Ecrire pour qui pour quoi

assnatJe me suis souvent demandé si je ne ferais pas mieux d'essayer de militer dans un parti politique plutôt que de rester une voix dans le désert. Faire tous les compromis qu'il faut, avaler toutes les couleuvres, jusqu'à me retrouver dans quelque assemblée officielle comme l'avait fait Galloway en se retrouvant à la Chambre des Communes au Royaume Uni, et, du haut de cette tribune là, jouer les poils à gratter, fournir un travail quotidien de témoignage au service des sans-voix, plutôt que de rester avec les intellos antiguerre égocentriques qui ne savent que défendre leur chapelle et se tirer mutuellement dans les pattes (et plus souvent encore s'ignorer mutuellement).

Un type comme Nigel Farage au Parlement européen par exemple a la tribune idéale. A sa place je passerais mon temps à harceler les pouvoirs en place : pour les pousser à prendre fait et cause pour des solutions négociées en Syrie, pour des enquêtes internationales sur les crimes commis par les Occidentaux et leurs alliés en ex-Yougoslavie, en Irak, en Libye, en Afghanistan, au Pakistan, au Yémen, pour une alliance avec les pays non alignés, pour la défense des droits des Rohingyas en Birmanie, pour celle des Mapuche eu Chili, pour un travail sérieux de la défense de la souveraineté du Congo, pour un abandon du soutien aux fantoches au pouvoir au Libye et pour une politique réaliste à l'égard des milices. Je défendrai toutes sortes de positions hétérodoxes mais cohérentes entre elles et qui peuvent réellement faire avancer l'intelligence collective au niveau européen et mondial, et tant pis si on ne m'accorde à chaque fois que deux minutes pour m'exprimer ou si je n'ai qu'Internet pour diffuser les documents relatifs à mes interventions. Et je créerais des réseaux autour de ce poste de député, qui me feraient remonter en permanence de l'info dans une logique de contre-information, et à partir desquels on mettrait en place de vrais systèmes de solidarité internationale.

Bon, on ne peut pas dire que des cohortes de gens me poussent à faire ça en ce moment (litote), mais c'est bien sûr ce que je ferais si une nouvelle vie m'était donnée.

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Le débat syrien

23 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Sur LCP ci dessous, le journaliste myope de service aveuglé par le "terrain" façon BHL (sauf que BHL n'a même pas besoin du terrain pour s'aveugler). Les vieux dignitaires sceptiques (Dumas et Poniatowski). La militante antibachariste laïque Randa Kassis, ex responsable du Conseil national syrien, qui ne veut plus d'intervention militaire occidentale, ni de livraison d'armes, et propose une troisième voie (comme Stambolic autrefois en Yougoslavie).

 

 

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L'art de la bonne conscience

23 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

debray-copie-1.jpgPéan interviewé dans l'Humanité Dimanche sur son livre sur le Kosovo ce weekend. Le journaliste de l'hebdo communiste lui demande pourquoi les va-t-en-guerre de l'époque, à l'origine directe de la création d'un Etat mafieux à Pristina, ne se sont jamais remis en cause. Messieurs du Part communiste, vous êtes vous remis en cause ? avez vous pensé à mettre en jugement les membres de votre direction qui ont décrété à partir du 1er avril 1999 - c'est à dire quand les bombes de Westley Calrk se sont mises à viser plus explicitement les infrastructures civiles - qu'il ne servait à rien de manifester ? Avez vous demandé à votre eurodéputé M. Wurtz pourquoi sur les chaînes de TV il se pavanait en répétant comme le ministre de la défense du gouvernement auquel il appartenait que les Serbes commettaient un "génocide" au Kosovo, bref s'alignait sur la propagande de guerre du gouvernement auquel son parti appartenait ? Croyez-vous que je mens à ce sujet ? Relisez mon livre "12 ans", celui dont les intellos antiguerre "oublient" de parler.

 

Péan lui-même oublie de faire la moitié du boulot dans son interview. Pas un mot sur les Serbes, les Goranis, les Roms, bref tous les non-albanais expulsés du Kosovo en juin 1999 par l' "Armée de libération du Kosovo" albanaise. Pas un mot sur le révisionnisme historique infâmant dont les Serbes furent l'objet... Il remarque que le gouvernement "de gauche plurielle" fut le plus ardent à vouloir cette guerre tandis que Chirac freinait des quatre fers. Oui c'était une guerre de centre gauche, le Nouvel Obs, Libé et le Monde, aimaient plus nos bombes que le Figaro. Cohn-Bendit s'étranglait de haine, BHL voulait une intervention terrestre pour envahir Belgrade. Je n'ai pas oublié messieurs... Il n'y avait que la vieille droite, à l'époque, pour rappeler qu'il y avait un monument à l'amitié franco-serbe dans le jardin de Kalmagdan, en souvenir des centaines de milliers de Serbes morts pour une vision commune de l'avenir de notre continent que Paris et Belgrade avaient partagée jadis. Péan a inclus dans son livre les lettres de Chirac qui tente en vain en 98-99 de calmer le jeu. A la veille des bombardements, je me souviens, le maire gaulliste du IXe arrondissement de Paris Kaspereit avait appelé le président pour lui demander de faire quelque chose pour les empêcher. Chirac "attends, je consulte mes conseillers, je te rappelle". Dix minutes plus tard, Chirac reprend le combinet : "Je ne peux rien faire". Quand France Info annonçait les "bavures de l'OTAN"  - "un train bombardé par erreur", "un quartier résidentiel écrase par nos bombes", les bombes à fragmentation sur la place du marché de Nis, bien évidemment ce n'étaient pas toutes des "bavures" - il y avait une affiche électorale en bas de chez moi. Celle du parti au pouvoir qui nous serinait chaque jour que c'était une guerre de la "civilisation contre la barbarie", nous maintenait dans la veulerie et le mensonge, jour après jour, sur le cadavre de l'idéal yougoslave minutieusement anéanti par nos missiles Tomahawk. Sur cette affiche, la tronche d'un certain François Hollande...

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Mon CR sur "Sahélistan" de Samuel Laurent

19 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Lectures

Publié  ici sur Parutions.com

 

 

Requiem pour la Libye

Samuel Laurent   Sahélistan
Seuil 2013 /  19.50 € - 127.73 ffr. / 370 pages
ISBN : 978-2-02-111335-8
FORMAT : 15,4 cm × 24,0 cm

L'auteur du compte rendu : Juriste, essayiste, docteur en sociologie, Frédéric Delorca a dirigé, aux Éditions Le Temps des Cerises, Atlas alternatif : le monde à l'heure de la globalisation impériale (2006) et publié récemment Abkhazie, à la découverte d’une "République" de survivants (Éditions du Cygne, 2010).
 

A circonstance exceptionnelle, personnage exceptionnel. La guerre de Libye et du Sahel (qui aujourd’hui se prolonge du Mali au Cameroun), «notre» si belle et si chère guerre de Libye, aura fait émerger un personnage singulier : Samuel Laurent.

L’homme a de quoi surprendre. Employé par des sociétés privées pour explorer les pays dangereux et y évaluer les risques des investissements, il a fait du danger sa profession. Et c’est un observateur plein de bon sens, autant que de franc parler. Comme si la vérité ne pouvait plus venir aujourd’hui ni des journalistes professionnels, ni des services de l’État mais du milieu des affaires, seul prêt à accepter qu’on appelle un chat un chat. Surtout l’homme a un talent incroyable pour s’attirer la confiance des protagonistes des guerres, même ceux dont les opinions sont aux antipodes de ses convictions. En un clin d’œil, il sait se faire des réseaux qui le mèneront au contact des pires ennemis des Occidentaux, dans les endroits les plus improbables et plus risqués.

Ce talent, Samuel Laurent l’a mis au service de la description d’une nation qui se meurt, d’un cadavre en décomposition : celui de la Libye. Ecoeuré par la bêtise d’un Bernard-Henry Lévy et d’un Nicolas Sarkozy qui ont précipité ce pays dans le chaos sans en évaluer les conséquences, autant que par la lâcheté de nos médias complices de cette catastrophe, dont ils n’osent pas nous révéler le vrai visage, Laurent nous embarque aux quatre coins de cette contrée soumise au règne des milices, des mafias et des fanatiques, de Tripoli à Benghazi et jusqu’au fin fond du grand Sud Libyen, contrôlé par Al Qaida Maghreb Islamique (d’où sont lancées les opérations contre le Mali et le Niger).

L’auteur nous fait tout voir : les massacres des Noirs toubous au nord de la frontière tchadienne, les tortures à Misrata, les trafics de drogues à la passe de Salvador, le QG de la milice Rafallah Sahati, et celui des djihadistes d’Ansar al-Charia. Il ne le fait pas dans l’abstrait, sur la base de «on-dit», mais en se rendant sur place, en rencontrant les acteurs des combats au risque de prendre une balle dans la tête, toujours ancré dans le témoignage de première main. Sans jamais verser dans les balivernes de la propagande antiguerre (parfois symétriques hélas de la propagande de nos armées) qui s’est sentie obligée en 2011 de faire l’apologie de la «résistance» kadhafiste, ou de noircir artificiellement les anciens combattants d’Afghanistan, Laurent se fie à son sens des rapports humains pour trier le bon grain de l’ivraie. Son analyse conduit souvent à des conclusions surprenantes quand il explique que, plutôt que de s’appuyer sur les planches pourries et pseudo-libérales de Moustapha Abdeljalil et Mahmoud Jibril, les actuels «gouvernants» (au sens formel du mot), qui «couvrent» en secret les pires terroristes, «l’Occident» (puisqu’il faut appeler ainsi l’actuel bloc atlantiste) sauverait sans doute ce qu’il lui reste à sauver en négociant avec des guerriers islamistes comme Abdelhakim Belhaj (l’ancien gouverneur militaire de Tripoli décrit à tort selon lui comme un allié d’Al Qaïda) ou Mohamed el-Gharabi (le chef des Rafallah Sehati, la principale brigade qui assure une bonne part du maintien de l’ordre à Benghazi).

Il est difficile d’évaluer le bien fondé des jugements de Samuel Laurent puisque, précisément, il est malheureusement le seul parmi les Occidentaux à être allé aussi loin dans la tentative de rencontrer et de comprendre les véritables pouvoirs qui contrôlent aujourd’hui véritablement la Libye. Personne ne peut contrer ses dires, et donc personne ne peut non plus les jauger au vu d’éléments contradictoires. Peut-être d’ailleurs l’auteur ne dit-il pas tout ce qu’il sait (et puis d’abord, au fait, pourquoi ce choix de sortir un livre maintenant, au risque de ruiner ses chances de poursuivre le métier exercé jusque là ?).

Ce qui est certain en tout cas, c’est que par-delà l’analyse politique, le témoignage sur le terrain est fort, écrit dans un style magnifique et entraînant, ciselé au scalpel, d’une précision de géomètre. Il livre l’image d’un pays qui s’enfonce. Un pays naguère prospère où l’on ne ramasse plus les ordures dans les rues et où plus aucune vie normale n’est plus possible, tout étant suspendu au pouvoir terrifiant d’ados armés de fusils automatiques auxquels les villes, mais aussi les forêts, les côtes et le désert appartiennent désormais. Vitupérant contre l’Occident qui laisse se développer cette anarchie à quelques centaines de kilomètres de ses côtes, Samuel Laurent met en garde les Européens : en livrant la Libye (et les armes de Kadhafi) à Al-Qaïda, puis en décidant de fermer les yeux sur ce qui s’y passe, vous vous exposez aux pires atrocités sur votre propre sol, et la crise malienne n’est qu’un pâle avant-goût de ce qui vous arrivera dans quelques années. Mais qui a encore des oreilles pour entendre l’avertissement ?...


Frédéric Delorca
( Mis en ligne le 18/06/2013 )
 

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Face to face, and back to back

17 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

Ce soir un homme s'est arrêté à 20 h en face de l'AKM (Centre Culturel d'Atatürk) à Istanbul. D'autres personnes l'ont rejoint.

 

Canan me dit que l'image est plus forte que tous les rassemblements syndicaux qui étaient prévus.

 

La révolution turque est pleine de belles images. Je soupçonne beaucoup d'Occidentaux de penser que justement ce ne sont "que" des images, que, comme les "Indignados", ça n'ira pas au delà du symbole. Qui peut le savoir après tout ? Mais je sais que c'est ce que les gens pensent ici.

 

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Défense nocturne de la "Grande culture" d'antan

14 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Ecrire pour qui pour quoi

Je viens d'un monde où la "culture respectable" formait un tout cohérent. Les gens dans ce monde-là n'allaient pas glaner des connaissances ici et là sur le Net, puis collectionner des savoirs pointus dans une logique de "distinction" (un savoir de geek). La culture était un bloc canonique avec ses points de passage obligés : Goethe, Balzac, Shakespeare, Flaubert, Kant, Platon, que sais-je encore. On n'était pas forcés d'aimer ces références, mais on était forcés de les respecter et de "tenter de les lire" si l'on voulait être soi-même respectable. Elles formaient un tout, inspiraient un style, fournissaient des images à nos vies. Tout le monde était d'accord là dessus.

 

Il y a peu je regardais des DVD de la série Magnum (années 80), qui est empreinte d'un regard un peu distancié, amusé, mais très déférant au fond à l'égard de cette "grande culture". C'était un monde où aucune journaliste de Canal + ne se serait permis d'émailler son propos, comme je l'entendais récemment de ponctuations du type "souvenez vous, nous vous en avions déjà parlé le mois dernier", parce que l'actualité ne nous imposait pas sa dictature, et aucun journaliste ne se serait senti autorisé à imposer à son public de se souvenir de ce qu'il y avait dans cette futile actualité un mois plus tôt.

 

vrcg-copie-1.jpgCette "grande culture" était discriminatoire, machiste et raciste, mais elle gardait une vocation universaliste comme celle de l'Empire romain, qui, ne l'oublions pas, unissait autrefois les deux rives de la Méditerranée (il y eut des empereurs gaulois, ibères, mais aussi arabes). Elle entretenait dans les élites beaucoup d'hypocrisie, de mépris, et de sentiments détestables, mais proposait aux plus jeunes une Forme, une façon d'être tournée vers l'exigeance et la beauté.

 

Moi qui étais un fils d'ouvrier, à moitié métèque, je risque de survivre dans le monde d'aujourd'hui comme un  dernier témoin et peut-être un ultime serviteur de ce monde culturel qui, à l'époque, me prenait de haut et auquel j'inspirais au mieux de la condescendance paternaliste, un peu comme ces supplétifs des légions romaines francs, goths, burgondes qui, après avoir mis à terre l'Empire, firent rouvrir les arènes et restaurèrent les institutions qu'ils avaient détruites parce qu'elles étaient au fond pour eux le seul moyen de former une société digne de ce nom.

 

J'ai beaucoup écrit sur ce blog au cours des dernières années sur des grands personnages du 19e et du 20e siècle. J'ai même ressorti Etiemble, ce vieil érudit des années 70 qui nous faisait sourire (parce qu'il était "has been" et parce que son culte des lettres à l'époque me faisait violence) quand il apparaissait sur les plateaux de TV d'Apostrophes de Pivot, et dont j'ai redécouvert, il y a peu, le phrasé, et les combats politiques ô combien nobles. Hier soir je jetais un coup d'oeil à une nouvelle série d'Arte, "Odysseus" qui, plus que de nous parler du monde d'Homère, utilisait celui-ci comme prétexte aux projections de notre époque. "Plus belle la vie chez Ulysse", tel aurait dû en être le titre. Avec une scène de coucherie toutes les 5 minutes (parce que c'était français, en version américaine c'eût été trois décapitations par quart d'heure), et entre les deux pas grand chose, ou plutôt oui : le vide sidéral qui emplit la tête des scénariste, et de la plupart des créateurs parce qu'il n'y a de toute façon plus rien à dire ni plus rien à penser. "Français encore un effort" pour vous réapproprier la culture moribonde à laquelle le siècle dernier croyait encore un peu, voilà le défi qu'on voudrait lancer. Hé quoi, vous avez 28 ans et écoutez sur You Tube "REM", "Kim Carnes" et autres veilleries chéries par vos parents. Pourquoi ne vous feriez vous pas un devoir, aussi, de lire et de respecter tout ce qu'eux mêmes ont dû se coltiner ? Allez, chiche. On verra bien si après, quand vous aurez fait cela, il y a encore autant de vide sur Internet et sur la TNT...

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Le collectif "Code Pink" au Yémen

12 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme, #Barack Obama

Vous le savez, je suis devenu un inconditionnel de Medea Benjamin et de son collectif anti-guerre "Code Pink". Trop enthousiaste peut-être d'ailleurs car si un jour ce collectif fait un faux pas, des petits teenagers sur le Net ne manqueront pas de me reprocher d'avoir dit du bien de lui, mais peu importe. Ces dames, après s'être rendues en Afghanistan rencontrer les Pachtounes que les drones d'Obama bombardent sont en ce moment au Yémen dans un but similaire.

 

Voyez le reportage de Jodie Evans sur leur site posté aujourd'hui même : "Nous avons été accueillis par Abdul Rahman Barman, un avocat qui représente HOOD, Abdulelah Haider Shaye et la plupart des prisonniers de Guantanamo et des survivants  des drones américains.Bien qu'il soit l'un des hommes les plus occupés au Yémen, il a eu la gentillesse de mettre de côté le temps de parler et de partager des histoires, des informations et des photos avec nous (...)  Nous avons appris comment l'ancien président Saleh a profité de la présence croissante d'Al-Qaida dans la péninsule arabique - ou mieux connu sous le nom d' AQAP - et  exagérait délibéréament la menace pour les Etats-Unis pour assurer son propre financement. Nous avons également appris par des fuites câbles américains de 2012 que Saleh a donné aux États-Unis «une porte ouverte au terrorisme». Cette stratégie est contre-productif et a aidé AQAP à grandir. Quand un être cher est tué sans raison par nos politiques antiterroristes, et sa mort se voient déniée par les deux gouvernements yéménite et américain, les Yéménites pensent qu'il n'y a pas d'autre moyen que de se venger et de se joindre à un groupe militant.  (...) Dans certains cas, même de voir le recrutement se passe dans les prisons, où les petits voleurs deviennent des agents d'Al-Qaïda, motivé par la vengeance de nouveau. (...) Le Yémen est si beau. Les rues sont pleins de bruits de klaxon, d'explosions de pétards lors d'un mariage lointain et d'aboiements des chiens. Ici, dans la vieille ville l'électricité vient de sauter eti nous sommes dans la nuit noire. Ce qui me reste de meilleur de la journée a été la générosité et la gentillesse des Yéménites que nous avons rencontrés. Ils sont reconnaissants que nous leur montrions ici un autre type de soutien que celui auquel ils sont habitués par la communauté internationale, à l'écoute et en solidarité avec le droit des personnes yéménites à l'autodétermination."

 

code pink yemen

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Epictète et la nature humaine

10 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Il est un point excellent dans le stoïcisme qu'on retrouve jusque dans sa version la plus tardive (à laquelle je préfère la première, celle de Zénon et Chrysippe, plus anarchiste), et que ni Chomsky ni les psychologues évolutionnistes ne récuseraient, c'est son souci de philosopher à partir de la nature de l'homme et des animaux.

Je lis dans Epictète (Diatribai Entretiens ch XXIII I, 23, 1) le texte ci dessous - je suis désolé de vous le livrer en anglais mais je ne le trouve pas sur le Net dans notre langue sauf en version orale que vous pouvez écouter ici (mais je n'aime pas la voix de la dame). Notez le lien classique qu'il établit entre paternité et engagement politique. L'épicurisme d'Onfray et de Marx ne tient pas face à un texte comme celui-là.

P1020711" Even Epicurus is sensible that we are by nature sociable beings; but having once placed our good in the mere outward shell, he can say nothing [p. 1077] afterwards inconsistent with that; for again, he strenuously maintains that we ought not to admire or accept anything separated from the nature of good, and he is in the right to maintain it. But how, then, arise any affectionate anxieties, unless there be such a thing as natural affection towards our offspring? Then why do you, Epicurus, dissuade a wise man from bringing up children? Why are you afraid that upon their account he may fall into anxieties? Does he fall into any for a mouse, that feeds within his house? What is it to him, if a little mouse bewails itself there? But Epicurus knew that, if once a child is born, it is no longer in our power not to love and be solicitous for it. On the same grounds he says that a wise man will not engage himself in public business, knowing very well what must follow. If men are only so many flies, why should he not engage in it?

And does he, who knows all this, dare to forbid us to bring up children? Not even a sheep, or a wolf, deserts its offspring; and shall man? What would you have, that we should be as silly as sheep? Yet even these do not desert their offspring. Or as savage as wolves? Neither do these desert them. Pray, who would mind you, if he saw his child fallen upon the ground and crying? For my part, I am of opinion that your father and another, even if they could have foreseen that you would have been the author of such doctrines, would not have thrown you away. [p. 1078]"

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La musique de la révolte turque

8 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Il y a des musiques qui servent de toile de fond à de grands événements, et qu'il faut connaître si l'on veut connaître les choses autrement que par les seuls mots. Lili Marleen pendant la seconde guerre mondiale en Europe, "Maria" de Blondie pendant la bombardement de la Yougoslavie par l'OTAN, et... Eyvellah au milieu du printemps turc qui a lieu en ce moment. J'ajoute à cette chanson les paroles en version anglaise. Et un petit documentaire. Tous mes remerciements à Canan.

 

 

To your pepper, your gas,

Your batons, your sticks,

To your harsh kicks,

I say bring it on, bring it on

 

Attack me shamelessly, tirelessly

My eyes are burning but I don't bow, nor do I lessen

 

I am still free I said

I am still right I said

to you

I am still human I said

Do you think I would give up, tell me

 

To your pepper, your gas,

Your batons, your sticks,

To your harsh kicks,

I say bring it on, bring it on

 

Your slap in our face

Your grudge against our voice

Cheers to all of you

Bring it on bring it on

 

Raise your hand without hesitation and fear

The squares belong to us, don't forget it, this nation is ours

 

I am still free I said

I am still right I said

to you

I am still human I said

Do you think I would give up, tell me

 

To your pepper, your gas,

Your batons, your sticks,

To your harsh kicks,

I say bring it on, bring it on

 

Your slap in our face

Your grudge against our voice

Cheers to all of you

Bring it on bring it on

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Antifascistes contre extrême droite

6 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Débats chez les "résistants"

Le meurtre du jeune étudiant de Sciences Po, hier à la gare de RER Haussman. Les voix qui s'élèvent pour la "dissolution" des groupes d'extreme droite (attention de ne pas aller trop loin dans la répression d'un courant de pensée auquel je suis hostile mais qui a sa liberté d'expression comme tous les autres).

 

Certains jeunes d'extrême gauche (car c'est dans la jeunesse que la tentation de la violence est forte, qu'elle soit verbale ou physique) qui fantasment sur l'Italie des années de plomb, sur Rouillan, sans se rendre compte qu'un conflit ouvert entre milices d'extreme gauche et d'extreme droite dans un pays où la plupart des classes populaires en milieu semi-rural votent FN se terminerait par la victoire de la réaction comme en Italie en 1922. Si nous étions dans la Russie des années 1860 les jeunes étudiants de gauche essaieraient d'aller haranguer la France pro-FN démoralisée par la mondialisation libérale, ce qui serait peut-être un moyen de recoudre le tissu social. Mais le fossé sociologique entre les deux Frances est trop grand. Et c'est sur les épaules du faible gouvernement social-dem (par ailleurs écrasé par la politique d'austérité prônée par l'Allemagne), certes pourvu de la main de fer de M. Valls (mais les ministres de l'intérieur socialiste, de Weimar, comme de la IVe République en 1947 ne peuvent pas à eux seuls apaiser la tempête qui monte) que repose la pacification des esprits. C'est demander beaucoup à des gens qui ont peu.

 

Schneidermann ce matin met en garde les fausses symétries créées par les journalistes. Une spécialité de ce milieu et de tous les pouvoirs conservateurs. Les médias aussi pourraient jouer un grand rôle pour apaiser le climat, mais ils n'ont hélas pas été formés à cela. Continuons pour notre part à défendre les espaces de dialogue, même de dialogue conflictuel. Pourquoi le gouvernement ou les municipalités ne créeraient ils pas des forums de débat "live" (pas sur Internet qui favorise l'hystérie) entre les deux Frances prêtes à en découdre dans la rue ?

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Fabius, Hollande et Cameron, comme en 1956 à Suez

5 Juin 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

M. Fabius, toujours aussi malhonnête, dit que du gaz sarin a été utilisé en Syrie, mais ne dit pas par qui. C'est M. Obama qui doit lui donner des leçons de vérité en lui demandant des précisions à ce sujet. Mais on voit bien ce qui est à l'oeuvre dans cette affaire : une alliance franco-britannique  qui tourne à plein régime pour elle-même et par elle-même sans le parrainage des Etats-Unis. Donc l'aventure libyenne de Sarkozy-BHL n'était pas un simple coup de folie. C'était une façon de rôder l'alliance franco-britannique (ce fut d'ailleurs présenté comme tel), et l'aventure syrienne prolonge ce délire. Bizarrement nos amis britanniques ne se pressent cependant pas pour nous aider au Mali. Pourquoi ?

boatPendant ce temps le Sahel se délite. Le Niger est au bord du coup d'Etat, la Mauritanie n'a plus de président, le président tchadien si effrayé de subir le même sort, fait arrêter tous ceux qui s'opposent à lui. Accessoirement au Cameroun on tue les derniers éléphant avec les armes de Kadhafi, vive le beau Sahara, devenu une gigantesque foire de toutes les contrebandes. Un Kosovo puissance dix !

Voulions-nous la même chose au Proche-Orient ? La partie semble perdue pour les Occidentaux puisque Bachar El-Assad reconquiert des positions, et l'Irak menace d'abattre les avions israéliens qui survoleraient son territoire pour aller bombarder d'Iran. Et Israël doit se taire devant la livraison d'S-300 russes à la Syrie (silence diplomatique dues aux bonnes relations entre Bibi et Poutine nous dit-on).

Soit, mais comme la conférence de paix voulue par Washington et Moscou ne donnera sans doute rien, nul doute que nos pieds nickelés Hollande-Cameron reprendront du service pour décider de livrer (contre l'avis de l'Allemagne, mais who cares about European Union as far as foreign policy is concerned ?) des armes à l'ASL (et à Al-Nosra/Al Qaida aussi). Et nous verrons ressurgir le Hezbollah avec son désir de réveiller l'insurrection au Sud-Liban et au nord d'Israël, et nous verrons aussi la FINUL directement menacée par cette insurrection, et les Iraniens et les Russes livrer toujours plus d'armes, et le sud la Turquie connaître une destabilisation (M. Erdogan n'a pas fini de se faire du souci, à l'heure où les manifestants de la place Taksim lui demandent aussi, ne l'oublions pas, de cesser son ingérence en Syrie).

MM. Fabius, Hollande, Cameron allez donc vous installer au Qatar et à Doubaï chez vos amis, mais cessez d'entraîner dans la France dans des opérations dignes de Suez en 1956, cette opération franco-britannique d'un autre âge concertée avec Israël pour renverser Nasser et reconquérir le canal nationalisé. Je sais qu'à travers le monde le business et le colonialisme sont de nouveau à la mode. Mais les peuples ont encore le droit de mettre leur veto à ces délires.

 

 

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