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Le blog de Frédéric Delorca

Puppet on the string

9 Juillet 2008 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Billets divers de Delorca

La semaine dernière j'ai rencontré une nana de ma promo de Sciences Po (1991) qui bosse au siège d'une grosse société de services dans le 16 ème arrondissement (c'est là qu'on s'est retrouvés), comme chargée du marketing de la boîte (quelque chose dans ce goût là). Au bout d'une heure de langue de bois sur son boulot, elle a fini par avouer qu'en fait son job consiste surtout à organiser les délocalisations des activités vers l'Asie et que ça la faisait tellement gerber qu'elle balance toutes les saloperies qu'elle voit quotidiennement dans sa boîte totalitaire sur un blog dont tout le monde autour d'elle ignore l'existence même son mari. Cette fille fait partie de ces gens qui, issus d'une école où on apprenait quand même quelques trucs, ressentent une "pénurie culturelle" dans leur espace professionnel et sont ravis de m'entendre parler d'Epicure sur un mode plus interactif que France Culture. Elle s'est construit toute une mystique de la "rencontre" avec des gens "improbables" comme on l'aime à Paris. Elle se plait à raconter sa dernière conversation avec des types qui tiennent un squat rue de Rivoli. Elle collabore avec un des directeurs du Cac40. Elle vote Ségolène Royal. Bref, elle pédale dans le vide. Je lui ai dit qu'elle se donnait bonne conscience avec ses squats et son blog narcissique. Ca lui a fichu un coup de l'entendre, parce qu'elle croit un peu à ce que je dis (bizarrement elle admire les types qui comme moi ont publié chez L'Harmattan). Elle a répondu : "Que faire d'autre ? Je ne vais pas poser une bombe ou flinguer tout le monde dans ma boîte ? Tu fais quoi, toi, politiquement ?"  Ca m'aurait pris tellement de temps pour lui exposer ma vision des enjeux, des méthodes... Une sociologue qui forme des éducateurs sociaux m'a dit à propos de cette nana dont je lui contais les activités : "C'est une prostituée, une vendue. Bourdieu l'a dit. Toute cette élite est vendue. Ses plans squats sont l'équivalent des sorties en boîte SM pour se faire fouetter après avoir bien torturé le corps social à longueur d'années". Jugement trop sommaire sans doute. J'ai pensé à Diana Johnstone qui disait qu'en France à tout le moins par rapport aux Etats-Unis nous avons la chance d'avoir des dirigeants cultivés. Ca doit valoir aussi pour les entreprises. Mais j'aurai plus vite fait de tuer l'âne de cette reine du marketing à coups de figues pourries, comme ils disent dans Astérix en Corse, que de la faire sortir de son anarchisme d'opérette si utile au système qu'elle sert. A la prochaine révolution, les balayeurs de son bureau lui épargneront-ils le sort de la princesse de Lamballe ?

Je me suis mis à lire Beigbeder et relire Houellebecq (ses deux auteurs fétiches) pour mieux comprendre son univers mental.

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J
Bonjour,Jugement assez violent, culpabilisant, je trouve, sur la dame en question. J'aurais plutot tendance à voir les gens comme des victimes. Par ailleurs, j'ai fini par penser que, s'il faut porter des jugements sur les gens, il faut toujours le faire dans le cadre d'un champ donné. Identifier la position de la personne dans un champs et adapter la "violence" de la critique en fonction du carctère plus ou moins dominé de la personne dans le champ. Voilà, je suppose que ça vient d'un mélange peu heureux de Bourdieu et de Rawls.JD
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F
<br /> Oui, je suis assez d'accord. L'exercice du blog se prête au billet d'humeur, qui, comme les aphorismes de Nietzsche, n'est jamais tout à fait vrai ni tout à fait faux. On jette juste un éclairage<br /> cru sur une réalité. On peut ensuite nuancer.<br /> <br /> Pour cette fille, que je ne connais pas trop, on pourrait sans doute construire toute une analyse complexe de sa famille, de ses parents, de sa scolarisation...<br /> <br /> Mais attention à ce que la nuance ne tue pas le constat de fond... Et attention à ce que l'on ne crée pas un fatalisme sociologique artificiel avec un monde où il n'y aurait que des<br /> victimes. Notre époque valorise les victimes à l'excès et tout le monde finit par se dire victime à un degré ou un autre.<br /> <br /> Reconnaître à cette femme qu'elle fait partie des bourreaux, c'est aussi lui reconnaître une chance (un libre-arbitre qui lui permettra) de ne plus en faire partie, un jour peut-être. C'est pour<br /> cela que j'ai cité Diana Johnstone c'est-à-dire dans mon esprit l'hypothèse que, peut-être, on pourrait sensibiliser les dirigeants et en faire autre chose que des princesses de Lamballe.<br /> Je ne désespère pas d'ailleurs qu'elle parvienne à faire des choses plus utiles qu'un blog anonyme pour résister aux pires défauts du système actuel.<br /> <br /> <br />
E
Bon, ça me rassure pour mon désintérêt total pour ces deux auteurs...
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