Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Frédéric Delorca

Une émission sur de Gaulle sur France culture

12 Août 2008 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La droite

Ce matin une émission sur De Gaulle sur France Culture (d'autant plus facile à faire que l'option gaulliste en France est morte et reléguée au registre de la nostalgie).

Ce que ces productions apologétiques nous font oublier, c'est que De Gaulle, en tant que possibilité sociologique, est un phénomène banal dans n'importe quel pays doté d'une certaine tradition étatique, et même dans ceux qui n'en ont pas. Le phénomène De Gaulle, au départ, à la racine, c'est la figure de l'officier rebelle, idéaliste, qui, au nom d'une vision patriotique différente de celle que cultive le reste de l'armée, prend une initiative personnelle.

Je le répète, le phénomène est banal, et c'est l'absence du phénomène qui est presque anormale  - on notera que le monde anglosaxon a été relativement épargné, transformant plutôt ses militaires en politiciens civils (Dwight David Eisenhower, Westley Clark) à cause de sans doute du fait qu eces pays n'ont jamais été véritablement vaincus ni humiliés sur leur propre territoire.

Les pays arabes, les Japonais, les latino-américains ont eu des De Gaulle. En 1941 quand la Serbie attaquée par les Allemands fut prête à signer l'Armistice, un groupe d'officier a pris le pouvoir à Belgrade pour l'en empêcher. Ces gens étaient des De Gaulle. J'ai même appris que la République espagnole, humiliée par les fascistes et les libéraux occidentaux, a eu son propre De Gaulle, le général José Riquelme, gouverneur de la place de Barcelone en 1939, qu, en octobre 1944,i appela, sans le feu vert gouvernemental à la reconquête de l'Espagne par le Val d'Aran (un épisode vite enterré par les Occidentaux et le PC pour cause de logique des blocs).

Ces généraux sont dits "visionnaires" quand ils gagnent, et "fêlons" quand ils perdent. Mais toutes les armées en produisent. Ils sont le produit même de l'ethos militaire comme disent les sociologues. Si De Gaulle n'avait pas existé, peut-être la France en eût elle produit d'autres, en 1942, en 1944, pourvu que l'Angleterre et les Etats-Unis encouragent un peu le mouvement. De Gaulle était surtout et avant tout cela, au début, une des réalisations parmi tant d'autres de la figure de l'officier idéaliste rebelle. Le hasard a fait aussi que c'était par ailleurs un homme de culture, assez intelligent pour saisir les occasions offertes, et assez constant dans sa vision politique (sauf sur les colonies, et quelques autres sujets). Mais le 18 juin 1940 n'est pas un phénomène si exceptionnel qu'on le pense.

Plus étrange (et cela surprend les Anglosaxons) est justement la propension française à idéaliser l'événement, puis à idéaliser son auteur, comme ils l'avaient fait avec Jeanne d'Arc. Ce besoin du sauveur. La France a toujours été un pays étrange, prompt à diviniser son chef (le roi ou l'empereur) comme à le renverser au nom de l'Egalité. Voyez même le silence respectueux du peuple parisien (si révolutionnaire pourtant) au passage de la charette de Marie-Antoinette vers l'échaffaud (un silence qui embarrassa tant Robespierre). La France fut toujours ainsi : à la fois la Commune de Paris, et le Sacré Coeur expiatoire, non pas tant "deux Frances" juxtaposées que deux Frances entremêlées, plus entremêlées qu'on n'a pu le croire, au coeur même de chaque Français. Je parle bien sûr de la France historique, celle d'avant les journaux télévisés et les supermarchés, la France où les gens se parlaient encore et avaient l'impression de partager une réalité commune.

De la France d'aujourd'hui j'ai du mal à penser quoi que ce soit. Ce matin je voyais dans la vitrine d'un libraire un livre co-écrit par Ségolène Royal et Alain Touraine. Savez-vous qu'Alain Touraine fut l'homme qui soutint tous les interventionnismes dans les années 1980-90 : en 1989 il appelait à l'envoi de troupes françaises en Roumanie (mais oui !), en 1991 il approuvait la guerre américaine contre l'Irak, comme guerre pour la défense de la "société civilie" (sic - on voit quelle société civile l'interventionnisme a produit à parti de 2003 !). Mme Royal amie d'Alain Touraine, ou Nicolas Sarkozy ami de George W. Bush, choisissez votre camp !

Pour revenir à nos généraux fêlons, il semble qu'il n'y en ait plus en France, non seulement en acte, mais même en pensée ou en intention, la lettre du groupe Solon publiée contre Sarkozy et le reformatage des armées n'étant qu'un embryon de fêlonnerie qui ne mérite guère qu'on s'y attarde. Le premier militaire qui s'efforcerait de penser quelque chose contre l'état actuel de son pays serait immédiatement désavoué par son épouse, ses enfants, ses amis, ses collègues, si bien qu'il n'ose plus guère le faire, même s'il est à la retraite (les officiers à la "général Gallois" sont bien rares). Il préféra se faire historien des temps anciens. Il y a peu un général (je crois le gouverneur militaire de la place de Paris) expliquait dans Paris Match que les militaires français sont de grands sentimentaux qui ont besoin de sentir qu'on les aime. Telle est la victoire de la société (c'est-à-dire du libéralisme) sur la "Grande Muette".

FD

Partager cet article

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :

Commenter cet article

P
Ah bon. Moi qui pensais que seuls les bidasses à étoiles pouvaient mettre fin aux ignominies capitalo-sarkozyennes.Vais trouver autre chose.Patrice Hénin
Répondre