Une interview faite par le site de droite Enquête et Débat (ci-dessous). Autour de la 29ème minute, Taddeï y parle de son envie d'inviter Asselineau à son émission. Le reste est consacré aux critères de choix des invités.
Ce genre de vidéo me pose beaucoup de questions. J'ai écrit une quinzaine de bouquins sous deux identités différentes. J'ai une vision politique et philosophique du monde, une vision toujours en mouvement, mais qui se nourrit quand même de principes et de lectures. Bien sûr on peut me trouver nul (le très faible taux de reprise de mes billets sur le Net - et de mentions de mes livres - tend à prouver que c'est le cas), mais du point de vue objectif du fonctionnement de la machine éditoriale (pour laquelle je travaille puisque j'ai quatre éditeurs), on peut aussi se demander si je ne devrais pas faire plus d'efforts pour faire connaître ce que je fais (en étant plus didactique dans mes billets, plus conciliant avec des alliés potentiels etc.) en vue d'être retenu par des médias plus importants comme celui de Taddéi (sans garantie d'y parvenir, mais au moins essayer).
Cependant quand je vois des nuls qui sont invités à Ce soir ou jamais je me dis que cela ne donne pas envie d'en être. On m'objectera bien sûr qu'il y a aussi des gens brillants dans cette émission. Donc l'argument a ses limites. Mais plus profondément il y a ce problème de l'entrée dans le "format médiatique" (le règne de l'image, de la parole courte et percutante etc). Faut-il essayer de mettre son grain de sel dans ce maelstrom ? (et notez au prix de quelles contorsions Taddeï justifie ses choix d'invités, c'est significatif de la mélasse dans laquelle il baigne) Je me souviens des critiques de Deleuze, Guattari, Bourdieu, etc sur la forme de la parole télévisuelle. Je crois qu'il faut rester fidèle à ce point de vue là. Ne pas chercher à adapter son style au mode de pensée de ce milieu, même pour séduire les plus libéraux d'entre eux (dont Taddei fait partie). Ca peut passer pour un combat d'arrière garde, comme celui de Zweig (dont je parle beaucoup en ce moment) qui refusa toute sa vie durant de toucher une automobile, mais après tout à l'heure du déclin des quatre-roues le conservatisme de Zweig ne passe-t-il pas aujourd'hui pour avant-gardiste ?
Vous savez j'ai connu des hauts fonctionnaires qui ont l'esprit mieux fait que la moyenne des invités de Taddeï et qui riaient de son émission en ces termes : "Les gens dans ce genre d'émission parlent, parlent, disent n'importe quoi, sans éléments de preuve solides, ne s'écoutent pas, ça bavasse dans tous les sens, et puis à un moment ça s'arrête, on ne sait pas pourquoi, il n'y a pas de conclusion possible, ils n'ont donné à personne les moyens d'avancer, ça a juste fait du spectacle". Il faut refuser cette conception médiatique du débat démocratique. Accidentellement on peut être conduit à parler dans ce genre d'arène, mais il ne faut pas formater son style de pensée et d'écriture en vue d'y accéder.
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