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Le blog de Frédéric Delorca

Gbagbo, la Corée du Nord, la Biélorussie

20 Décembre 2010 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

Vous le savez, j'aime bien répercuter sur le Net des infos qui vont à contretemps des médias dominants, ce qui ne signifie pas forcément que je sois alors "du côté" des gouvernements auxquelles ces infos peuvent rendre service, mais simplement parce que je ne supporte pas cet instinct grégaire aux dimensions planétaires prêt à se repaître de mensonges ou de caricatures généralement sur le dos de petits pays ou de petits peuples que personne n'a vraiment intérêt à soutenir.

 

emiliano_zapata_en_la_ciudad_de_cuernavaca.jpg

J'ai eu envie aujourd'hui d'écrire sur la Côte d'Ivoire, parce que la manière dont on traite le point de vue de Laurent Gbagbo ne me plaît pas. Non que je croie que Gbagbo a raison, mais j'estime que l'on doit pouvoir trouver quelque part et entendre dans son intégralité la version des faits d'un responsable politique qui draine des millions de gens derrière lui.

 

J'ai donc consacré trois heures à ce sujet-là. L'envie m'est venue en lisant une interview de Me Vergès, bien que celle-ci ne soit pas très précise sur les élections ivoiriennes (et que le journaliste y confonde "dalton" et "daltonien"). J'ai écouté avec attention l'interview du sociologue pro-Gbagbo Dedy Seri et j'ai fait un petit article "patch work" avec tout ça.

 

M. Seri n'est pas un grand orateur, mais il mérite d'être entendu. Il y a semble-t-il, "comme un petit problème", dans la façon dont la commission électorale a géré la publication des résultats. Evidemment ce "petit problème" qui met en cause sa légitimité et la légitimité de tout le processus, n'est pas mentionné sur Wikipedia ni dans les grands médias et n'est débattu nulle part. Il faut interroger la composition de cette commission, la façon dont elle a annoncé les résultats à l'hôtel du Golf siège de l'opposant à Gbagbo, s'interroger sur sa forclusion à le faire, sur les pressions qu'elle a subies, sur cet échaffaudage juridique qui voulait que le Conseil constitutionnel prît la relève. Trop ennuyeux ? Les gens n'aiment pas réfléchir sur les faits, les journalistes n'aiment pas les collecter. Ils croient juste que le seul fait valable est que M. Ouattara a gagné... Quelle époque !

 

Et puis toujours ce deux poids deux mesures : quand les malversations servent nos alliés, au Burkina, en Guinée, dans le camp de M. Ouattara, elles sont bonnes. Quand elles proviennent de nos adversaires, elles sont diaboliques... Bêtise manichéenne quand tu nous tiens !

 

Parlons aussi de la Corée du Nord, "régime paranoïaque et dangereux" (comme celui de M. Gbagbo). Dimanche un docte expert comme on en a vu tant pendant la guerre de Yougoslavie, nous expliquait, cartes à l'appui, sur BFM TV comment le régime nord coréen serait renversé s'il y avait une guerre, en mentionnant juste au passage le "petit conflit" nucléaire que les populations auraient sans doute à subir dans ce contexte - mais pour la bonne cause évidemmet puisque la Corée du Nord serait finalement vaincu. Je retrouvais dans sa voix une forme de petite jouissance tranquille que j'ai aussi entendue dans la voix d'Alexandre Adler à propos de la guerre du Kosovo jadis. Un spectacle parfaitement obscène en vérité.

 

Alors parlons-en de la paranoïa de la Corée du Nord. Tout le monde s'est indigné en novembre du fait qu'elle tire sur des soldats sud coréens. Personne n'a dit qu'elle avait averti la Corée du Sud (particulièrement belliqueuse depuis l'élection de son actuel président), de ne pas effectuer d'exercices militaires dans la zone en question qu'elle considérait comme appartenant à ses eaux territoriales. "Paranoïa" ? Du bon sens, je trouve. Aujourd'hui, personne ne le dit (tout comme personne ne cherche à faire la lumière sur cette histoire de naufrage d'un navire sud-coréen aux causes hâtivement attribuées à Pyongyang), mais le molosse sud-coréen a voulu "laver" son honneur national, en refaisant des exercices militaires dans la même zone contestées (on parle juste de nouveaux exercices en des termes vagues). Le monde retient seulement que la Corée du Nord "se dégonfle", qu'elle nous prive donc du spectacle visiblement tant attendu de la chute du régime de Pyongyang dans un feu d'artifice de "petites" bombes nucléaires. On pourrait quand même dire que sur ce coup là le régime de Pyongyang n'est quand même pas si "parano" et délirant qu'on ne le prétend. En revanche le régime sudiste m'inquiète un peu plus. Le manichéisme de notre époque sur ce dossier ne serait peut-être pas si obscène s'il ne s'asseyait allègrement sur les centaines de milliers de cadavres de la guerre déclenchée par l'Oncle Sam dans la péninsule coréenne il y a 60 ans, tout comme les gloussements antiserbes de nos journalistes il y a 11 ans s'asseyaient sur les cadavres de la résistance serbe au nazisme. Légèreté et amnésie historique, ça fait quand même beaucoup.

 

Et finissons par la Biélorussie. Aporrea.org à l'occasion de la réélection de son président hier rappelle que ce pays est le plus industrialisé d'Europe de l'Est, une oasis que le capitalisme n'a pas ravagée parce que 51 % des gens sont employés là bas par des entreprises d'Etat. Du coup le PNB n'y a pas reculé en 15 ans comme il l'a fait dans tous les pays alentours. En outre j'aurais envie d'ajouter qu'il est le seul pays d'Europe à faire partie du Mouvement des non alignés. Ca ne fait pas de M. Loukachenko un saint (d'ailleurs quel gouvernement dans cette région mérite-t-il une auréole ?), mais quand même cela aussi mérite une place dans le regard que nous posons sur la carte de l'Europe, si nous voulons penser le monde d'une façon indépendante des think tanks étatsuniens.

 

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