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Le blog de Frédéric Delorca

Limoges la socialiste et le nouveau paysage politique

20 Août 2010 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

J'étais lundi soir à Limoges, une ville que je ne connaissais que vaguement pour y avoir fait mes "trois jours" en 1992. Une ville amusante où l'on peut se retrouver au carrefour de rues qui n'ont que des noms républicains : boulevard Carnot, boulevard Garibaldi, cours Camille Jullian. Pas étonnant que le Front de gauche y réalise ses meilleurs scores.

 

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Limoges porte en elle le temps où la politique française était organisée suivant un axe gauche-droite assez simple : la grande bourgeoisie de droite (orléaniste ou plus légitimiste) s'appuyant sur une petite bourgeoisie entrepreneuriale et une paysannerie elle aussi largement conservatrice (avec éventuellement des tendances bonapartistes). Une petite bourgeoisie d'Etat (bureaucrates, enseignants) socialiste. Une classe ouvrière qui, quand elle n'était pas apolitique était communiste ("guidée" par quelques petits bourgeois de même orientation).

 

Je relisais des textes de 1981-82. Tout ce mépris de la bourgeosie de droite pour la petite bourgeoisie socialiste censée être inapte à gouverner. J'avais oublié qu'un dirigeant socialiste (Mermaz ou Mexandeau, je ne sais plus) avait même cru devoir préciser que les socialistes n'étaient pas des barbares et qu'ils savaient utiliser les couteaux à poisson (ce que moi qui suis un barbare ne sais pas faire, je précise).

 ps.jpg

On n'imagine plus ce genre de hiérarchie de nos jours, ni même la possibilité de clivages aussi rigides. Et cependant notre vie politique reste très structurée sur ce modèle, de l'échelon muncipal à l'échelon national. Tout juste a-t-on accepté que la gauche puisse s'enrichir d'une tendance supplémentaire (les Verts), que la mouvance communiste se recompose en courants pluriels qui vont du trotskisme à l'écolo-altermondialisme, et que le centre droit (Modem) s'éloigne un peu de l'orléanisme classique, mais grosso modo, le paysage reste à peu près le même... alors que la société, elle, ne s'y retrouve plus guère...

 

Je regarde avec curiosité les mouvements qui essaient de sortir du vieux cadre politique. Des groupes de toutes sortes apparaissent un peu partout : ça va des ex-refondateurs du PC qui refusent de rejoindre le Front de Gauche aux souverainistes de droite qui tendent la main aux patriotes de gauche pour préparer la sortie de l'Union européenne. Des volontés plus ou moins sincères de subvertir les vieux schémas. Beaucoup s'enferment dans un esprit groupusculaire bien adapté à l'individualisme de notre temps. Par exemple je regardais hier la galaxie souverainiste sur Facebook. Je crois qu'aucun mouvement de cette galaxie n'a une vision complète des partis, clubs et associations qui évoluent dans cette mouvance. La voie lactée à côté de ça est une structure très simple !

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Ceux qui m'amusent sont ceux qui réclament un "Chavez français". Comme si cela pouvait se décréter. Chavez est l'enfant d'une tragédie nationale : le Caracazo, comme Caton d'Utique fut en un sens l'enfant des guerres civiles romaines. Les situations extrêmes font naître des comportements extrêmes. Dans le cas de Chavez, ce fut l'extrême moralité de son discours télévisé à l'issue de la tentative de coup d'Etat avorté. Le personnage est né là, il s'est forgé dans cet instant. N'en déplaise à Mélenchon qui rêve d'une révolution bolivarienne par les urnes, il n'y a pas eu de Caracazo en France, pas d'insurrection populaire, pas de répression brutale. Certains petits intellectuels de gauche du fin fond de leur piaule, confortablement emmitouflés dans leur couette en rêvent, mais cela n'a pas eu lieu et nul ne sait si cela a la moindre chance de se produire. Tant que le capitalisme sauve sa peau dans les pays riches sans complètement liquider le système de redistribution (prélèvements obligatoires 44 % en France contre 43 % en 1990), il y a de fortes chances pour que, à gauche comme à droite, les clubs et les groupuscules continuent de proliférer sans que le système politique n'éclate. On peut encore tranquillement voguer d'élections en élections avec 50 % d'abstention, des gens qui croient de moins en moins à la chose publique, et un Chavez français qui continuera de cultiver son jardin dans le fin fond du Limousin.

 

Pour finir, une petite phrase entendue hier soir. Comme je disais à un ami (assez peu politisé) : "Je n'aime pas que la France appartienne à un empire occidental - l'OTAN - opposé à tout le reste du monde, il faut que la France soit moins occidentale, plus non-alignée", il a répondu : "Pour que ton idée marche, il faudrait découper la France, la sortir du reste de l'Europe et la placer au milieu de l'Océan au niveau de l'équateur". Peut-être une réponse de bon sens... On regrette le temps où Staline détournait le cours des fleuves...

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G
<br /> <br /> Le lien hypertexte vers les<br /> membres politiques de l'EIF<br /> <br /> <br /> <br />
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F
<br /> <br /> Merci Gilles d'avoir signalé ici un sujet en effet capital : ce futur marché euro-américain. Si peu de gens se battent contre ça...<br /> <br /> <br /> <br />
G
<br /> <br /> <br /> Je suis d'accord avec toi, c'est assez décourageant, tous ces électrons libres qui contribuent à une agitation thermo-électronique, mais qui ne créent aucun courant d'intensité suffisante pour<br /> changer le cours des choses.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Pendant ce temps là, les lobbies grouillent d'activité et imposent leurs points de vue : <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Un seul exemple parmi tant de lobbies : l'European Internet Foundation (EIF)<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> http://www.eifonline.org/en/articles/memberspages/political-members.cfm<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Où l'on remarque la présence de Daniel-Cohn-Bendit, vrai agent des États-Unis.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Groupe parlementaire informel travaillant sur les sujets de la « société  de l’information », l’EIF est présidée par la député social-démocrate allemande Erika Mann. C’est en cette<br /> qualité que Mme Mann et plusieurs de ses collègues accueillaient le 1er février 2005 Bill Gates lui-même, de retour de Davos et sur le chemin du « Microsoft’s government leaders forum» qui devait<br /> se dérouler ensuite à Prague. <br /> <br /> <br /> Cette visite tombait précisément au moment où un tir de barrage du Parlement européen remettait en cause une proposition de la Commission sur les brevets de logiciels ardemment<br /> défendue par Microsoft et par bien d’autres grandes entreprises comme Philips, Siemens ou Nokia. L’opposition parlementaire, galvanisée par le lobbying tenace des défenseurs des<br /> logiciels dits « libres » (la Free Software Foundation Europe et Linux en particulier) exerce une forte pression sur la Commission pour qu’elle revoie sa copie. <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> L’EIF s’inscrit dans ce que l’on pourrait appeler le lobby pro-atlantiste à Bruxelles dont sa présidente est un des relais. Mme Mann anime en effet le Transatlantic Policy Network.<br /> La convergence politique trans- atlantique qui est un cheval de bataille du TPN figure également en bonne place sur l’agenda de Peter Mandelson, actuel commissaire européen en<br /> charge du commerce extérieur. Le 2 décembre 2004, devant le congrès annuel du TPN, ce dernier faisait cette déclaration programmatique : <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> « nous devons nous concentrer sur la suppression des barrières réglementaires et structurelles qui bloquent les affaires et freinent l’innovation, la croissance et la prospérité des<br /> deux cotés [de l’Atlantique]. Il faut s’intéresser de plus prêt à la convergence régle- mentaire et à la reconnaissance mutuelle des normes. Il faut se pencher sur la réalité<br /> concrète des courants d’affaires transatlantiques: comment les entreprises interagissent ; comment nos économies s’imbriquent et parfois se heurtent l’une l’autre ». <br /> <br /> <br /> <br />
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