Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Frédéric Delorca

Philosophical memories

4 Décembre 2010 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Mon ex-prof de philo de Terminale m'écrit ce matin :

 

"Cette année, en L, une élève intéressante à qui j'ai proposé de la présenter au concours général. Verriez-vous un inconvénient à ce qu'elle prenne éventuellement contact avec vous à ce sujet par l'intermédiaire de votre Blog? Car de mon côté je ne manque jamais de citer votre exemple, notamment pour ce qui concerne l'excellence de vos performances et de votre préparation."

Il fait référence au fait que j'avais décroché un premier accessit au concours général en philo en 1988, comme je le raconte dans un de mes bouquins. Ca me fait tout drôle de me dire que le concours général - cette vieille institution qui n'est pas seulement républicaine puisqu'elle existait déjà sous Louis XVI dit-on - perdure encore. Ils ont même un site ici. Quoi ? Cela n'a pas disparu ? Il est une planète quelque part où des gens sont encore fiers d'avoir fait l'ENA ou Normale Sud ? un endroit où l'on croit encore aux diplômes ? Il y a encore des jeunes femmes et des jeunes hommes dans des lycées qui préparent le concours général ? Quoi ? Ces gens croient encore au savoir ? Ils ne croient pas seulement au fric ? Ils pensent qu'on peut construire une pensée ? Qu'on peut se bâtir un style ? Qu'il ne suffit pas de balancer des vidéos de Dieudonné ou de Thierry Meyssan sur Internet pour exister dans le monde ?

 

platon.jpg

Doit-on s'en réjouir ? Je n'ai pas aimé le système scolaire. Je n'ai pas aimé les buffets de l'association des lauréats du concours général. Ce milieu de jeunes arrogants et de vieux déclinants qui vous disaient :"Oh vous êtes lauréat en philosophie, la matière reine, félicitations !" Tout ce vieux Paris élitiste me sortait par les oreilles en 1989-90. Aujourd'hui le Paris bobo qui lit Houellebecq ne me plaît pas davantage. Je ne sais pas trop quelle société il me faudrait, ni de quel rapport au savoir je rêve.

 

J'ai dit que cette jeune femme pouvait bien sûr m'écrire. Mais je redoute ce qu'elle me dira. Je redoute de retrouver dans ses mots l'espèce d'enthousiasme naïf que j'avais à son âge pour les grands auteurs. J'espère au moins qu'elle sait mâtiner cela d'une dose de scepticisme. Je ne sais pas trop si les enseignants ont  raison, de nos jours, de continuer à enseigner aux jeunes Aristote, Descartes et Hegel. Peut-être feraient-ils mieux de leur apprendre à faire du feu avec deux morceaux de silex, ce sera peut-être plus utile à leur avenir. Peut-être nous autres, les anciens, les anciens combattants des batailles perdues, ferions-nous mieux de fermer nos gueules, plutôt que de prétendre enseigner quoi que ce soit à la génération qui arrive.

Partager cet article

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :

Commenter cet article