Pure événementialité
6 Octobre 2014 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Grundlegung zur Metaphysik
Un lecteur de ce blog que j'ai déjà rencontré il y a quelques années m'écrit, après avoir parcouru mon post du 30 septembre, qu'il est le cousin germain d'Irène Jacob...
Quand je faisais de la philo, on parlait de la "pensée de la pure événementialité", pensée du surgissement, qui est typique du courant Héraclite-Nietzsche-Heidegger (au fait, encore des révélations terribles sur le nazisme de ce philosophe autour de la publication de ses carnets, Books ce mois-ci et Finkielkraut dans Répliques en parlent, mais bon ça cela concerne sa vie "non philosophique"). Un lecteur qui vous dit "je suis le cousin d'Irène Jacob", c'est de l'événementialité pure, comme quand un médium vous sort dans un café "ton grand père est mort quand tu avais 14 ans" parce que cela fait "voir" qu'on est dans un monde où rien n'est prévisible, où toutes sortes de réalités cachées peuvent surgir sur un mode très étrange au moment où on s'y attend le moins.
Ce matin, je regardais un docu sur les médiums ici qui disait que ce sont surtout les femmes qui vont voir les médiums, par exemple celles qui viennent de perdre un enfant, et qu'elles obtiennent des résultats (l'enfant leur parle). Le commentateur disait que c'est parce qu'elles ont un rapport plus viscéral et intime à la vie que les hommes. C'est possible. Je me demandais pourquoi les intellectuels, eux, ne prennent pas la peine d'aller comme moi prendre une bière avec un médium et laisser les révélations se révéler... Pour mille raisons bien sûr, différentes d'un individu à l'autre. Une d'entre elles est que l'intellectuel est dans la "mécanique", l'enchainement causal rationnel. Je repensais à Nietzsche qui disait quelque part que les événements d'un intellectuel, ce sont les idées (Deleuze eût dit "les concepts") qui viennent le frapper par en haut, par en bas. Ca ne peut pas être un événement extérieur, sauf quand ils en viennent à étrangler leur femme comme Althusser ou attraper le choléra comme Hegel ("le grand Hegel frappé par le choléra", grand thème kierkegaardien). Il faut juste être crétin comme moi pour aller prendre un verre avec un médium, recevoir un événement "extérieur" de lui, et vouloir en faire un livre.
Mais que l'événement soit intérieur ou extérieur, sa force vient toujours du fait qu'il vous prend du côté où vous vous y attendiez le moins. Je m'attendais plus à ce qu'un émir me propose 600 000 euros qu'à ce que ce lecteur soit le cousin d'Irène Jacob. L'événementialité du réel est source d'espoirs, ou de peurs terribles (en ce moment, c'est plus la peur qui me gouverne que l'espoir), ou encore d'un grand sentiment d'impuissance. Sur le versant "cousin de la grande actrice", c'est plus l'impuissance qui s'impose : l'événement est énorme, mais on ne peut rien en faire, il est juste là pour vous signifier que tout est possible et rien n'est possible.
La première fois que j'ai vu une médium, c'était le 25 juin 2011. Comme avec le type qui m'a parlé de mon grand père, à l'époque je ne croyais pas du tout en ces phénomènes paranormaux. J'ai eu recours aux services de cette fille en croyant qu'elle pratiquait la sophrologie. Si j'avais su qu'elle était médium, je me serais enfui en courant... Et j'ai finalement eu recours à nouveau à ses services (avec succès) pour renaître de mes cendres cet hiver 2013-2014... comme quoi...
A l'époque donc, en 2011, si je n'ai pas donné suite à ses pseudo-séances de sophrologie c'est parce que j'étais aspiré par toutes sortes de projets que j'avais avec la chanteuse Nathalie Cardone (elle aussi une fille "inspirée" dans tous les sens du terme). Comme le fait de connaître le cousin d'Irène Jacob, le fait de prendre un pot de temps en temps avec Nathalie Cardone relevait pourtant de la même événementialité qu'on pourrait qualifier d' "anti-pragmatique". Une événementialité qui n'est là au fond que pour vous montrer qu'il n'y a rien à faire, qu'il ne faut rien essayer de faire, sauf ressentir le côté étonnant, improbable et imprévisible de se trouver à prendre une bière avec quelqu'un ou d'avoir une possibilité d'avoir un autographe de quelqu'un qu'on n'aurait statistiquement jamais dû croiser, le ressentir et s'en réjouir. Pour ma part je suis d'autant plus content de connaître le cousin d'Irène Jacob (et d'apprendre aujourd'hui qu'il l'est) que le souvenir de cette actrice dans mon esprit est associé à deux films très liés au monde des médiums... Cela tisse une trame imaginaire où tout renvoie à tout. C'est agréable...
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