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Le blog de Frédéric Delorca

Vive l'art !

29 Juillet 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Ecrire pour qui pour quoi

Chers amis lecteurs, je suis enclin à vous écrire ce soir sur le ton de la confidence. Sans doute ne devrais-je pas car je ne sais pas qui me lit, et les regards malveillants sont nombreux. Mais le choix de la sincérité est signe de liberté, il montre que je ne crains pas les jugements, même les jugements des idiots, de ceux qui veulent me nuire. D'ailleurs ma sincérité sera bien innocente et peu compromettante car je n'ai sur le coeur que des idées pures, tournées vers le Bon, le Beau et le Vrai, en bon platonicien (bon, je sais qu'on condamne parfois à boire la ciguë pour cela, mais tant pis, ces valeurs euphorisent le coeur et donnent l'illusion de l'invincibilité, c'est bien connu, alors suivons notre daimon ! Je rigole bien sûr...).

 

Il est bon de voir qu'au coeur des vacances estivales quelques personnes tapent sur Google "Delorca" "blog de Delorca", en plus de celles qui accèdent à ce blog directement parce qu'il est dans leur signet. Qui sont ces personnes ? Des gens de ma famille ? Des militants ? Des gens qui ont lu mes livres ? Des habitués de ce blog ? des inconnus ? Qu'y cherchent-ils ? Un prolongement du travail fourni sur le blog de l'Atlas alternatif ? quelque chose de plus artistique ?

 

La question revient en boucle sous mon clavier depuis six ans. Je n'y trouve pas de réponse complète, ce qui est normal, et dans un sens, je crois que je ne cherche pas de réponse, parce qu'au fond ce n'est pas très important. Les lecteurs comptent pour le sentiment d'interaction avec le monde, avec autrui, l'humanité au fond de nous a besoin de ça, mais ce n'est pas de nature à vraiment surdéterminer ce qu'on écrit, qui dépend de paramètres différents des attentes des lecteurs.

 

Il faut parler de ce qui est, du monde réel et imginaire (en distinguant bien les deux), de ce qui doit être, dans nos actes, et nos grilles de lecture. On ne peut pas être un simple "journaliste", il faut être un homme à part entière, donc un philosophe, et, un peu, si possible, un artiste, et ce blog est là pour nous y aider - pour m'y aider, et peut-être aussi pour aider certains lecteurs, s'il est vrai que, comme disait Nietzsche, écrire c'est lancer une flèche à quelqu'un, on ne sait pas qui, qui la rattrappera un jour, et la lancera à son tour.

 

1couv_montagnes-copie-1.jpgDans le courant de l'année, quand je bosse, j'ai tendance à oublier que je suis romancier. Auteur d'un roman que certains ont aimé, voire adoré (mon éditeur par exemple), et qui en a laissé d'autres indifférents (rappelez vous par exemple le jury du premier roman de Draveil, des vieux bourgeois avait dit un lecteur de ce blog, peut-être...). J'aurais pu en écrire d'autres. Je l'aurais peut-être fait si des critiques littéraires avaient soutenu celui-ci, et peut-être ces critiques m'auraient-ils lu si j'avais fourni des efforts titanesques pour leur faire connaître ce livre plutôt que d'aller écrire sur le stoïcisme ou sur l'Abkhazie. Je n'ai peut-être pas été assez persévérant. Les choix sont si difficiles mes amis ! A tout moment quand on a un peu de temps libre il faut se demander : dois-je le consacrer à ma famille , à des amis, à jouer les essayistes ou les romanciers, à rencontrer de nouvelles personnes ou cultiver les réseaux existants, à défendre ce qui a déjà été écrit ou à explorer d'autres univers, à écrire sur le Népal, sur la Bolivie, à lire, à dénoncer une nouvelle injustice, à s'intéresser à quoi ? A presque 42 ans je suis à un point où, sans être célèbre (et donc en restant libre de ce fait) je peux vouloir valoriser beaucoup de savoir-faire ou beaucoup d'investissements dans des domaines variés, et sans savoir, à chaque instant, si les choix que je fais (souvent désinvoltes, c'est le prix de la liberté) ne sont pas les plus imbéciles.

 

P1010600-copie-1.jpgJe ne sais plus trop ce qui, ces derniers temps, m'a rappelé que j'étais un romancier. Peut-être ce détail : de retour de Pau, j'ai été contacté sur Facebook par le profil d'une crêperie de cette ville que je ne connaissais pas. C'était juste une démarche publicitaire, mais je leur ai parlé de mon roman, et il paraît qu'il y a une chance qu'ils acceptent d'en mettre quelques exemplaires en vente dans leur établissement. Joyeux mélange des genres, nourriture et ouvrages. Cela ferait un point de vente de ce livre, il y en a peu en France, mon éditeur n'ayant jamais eu les moyens de le faire connaître. J'aime que cet ouvrage soit un intermédiaire entre moi et ma ville natale que je peine de plus en plus à reconnaître. Que le fil de plus en plus ténu qui me relie à mes origines et au passé tienne à la fiction et à une crêperie, voilà une très belle chose.

 

Oui, j'ai un peu envie de me sentir romancier quoique la reconnaissance sociale ne soit pas au rendez-vous de ce côté là. A-t-on besoin de reconnaissance lorsqu'on est dans la création ? En zappant devant la TV tantôt je tombai sur un concert de Jim Morisson, bel exemple de radicalité. Il en faut un peu pour s'envoler, et le rôle du romancier (j'emploie le mot "rôle" à dessein, puisque je n'ai pas de "vocation") peut y aider. Parce que la radicalité "humaine", profonde, ne peut pas se limiter à répéter tous les deux mois dans un essai "halte à l'impérialisme", "halte à l'européisme libéral" etc : ça c'est juste de la radicalité "mécanique", fadouille, qui fatigue et décourage tout le monde à la longue.

 

L'action politique, elle, (nécessaire pour assumer des responsabilités concrètes à l'égard de ses semblables) reprendra à la rentrée. Un journaliste connu m'a proposé d'assister à une réunion de lancement d'un média alternatif solide. Peut-être une perpective intéressante ? En revanche je laisse tomber le collectif de sensibilité "indignado" pour lequel j'avais commencé à recruter des correspondants début juillet et qui me semble aussi creux qu'un discours de Clémentine Autain (et surtout bien fourbe : les mecs pendant mes vacances ont complètement défiguré sans m'en informer un projet d'agence de presse du Sud alternative sur lequel ils m'avaient fait bosser début juillet).

 

Donc oui, allez, vive l'art ! Vive la liberté de la création ! Passons cette soirée dans cet état d'esprit pour changer un peu...

 

Je lis en ce moment le "Journal atrabilaire" de Jean Clair "de l'académie française", et "Sexe et caractère" de Otto Weininger (un livre assez fasciste, et donc assez désagréable à lire pour moi mais qui fut très influent jadis, j'aurais dû le lire plus tôt, entre 17 et 25 ans quand je m'intéressais à la psychologie, cependant mieux vaut tard que jamais, et je ne désespère pas que mes connaissances en sociologie et en darwinisme, ainsi que mon expérience personnelle m'aident à trouver quelque chose de pertinent à dire sur ce bouquin que je me serais contenté de percevoir à travers la grille de lecture dictée par mon époque à 20 ans). Il faudra que je vous reparle de tout ça.

 

Bon allez, trêve de bavardage ! la nuit est déjà bien avancée, allons nous coucher !

 


 

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E
<br /> j'ai calé sur le Jean Clair après une trentaine de pages. mais je ne me sais plus si c'est parce qu'autre chose de mieux m'en a distrait ou si je l'ai trouvé mauvais.<br />
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F
<br /> <br /> Je l'ai commencé par le milieu comme le conseille Deleuze pour tous les livres. Ce n'est en effet pas terrible - j'ai lu d'autres trucs de lui, pas très bons non plus à part son appel contre la<br /> guerre de l'OTAN dans les Balkans en 99. D'ailleurs Elizabeth Lévy l'aime bien, ce qui est un signe que ce doit être nul. Mais il y a deux ou trois "topos" (topoi) dedans que je veux réutiliser.<br /> <br /> <br /> <br />