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Le blog de Frédéric Delorca

Articles récents

Le référendum catalan

6 Septembre 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Espagne, #Peuples d'Europe et UE, #Les rapports hommes-femmes

J'avais salué en 2015 le charisme d'Inés Arrimadas. Aujourd'hui elle a fait ce qu'elle a pu contre la loi inconstitutionnelle d'organisation d'un référendum sécessionniste votée aujourd'hui en dénonçant l'ambiance de menaces et de tension qu'entretiennent les nationalistes catalans. Ce référendum ne servira à rien car seuls les indépendantistes iront aux urnes. Déjà aujourd'hui le PSC, Ciudadanos, le PP et une partie du Podemos catalan ont quitté l'hémicycle avant le vote. Cela me rappelle l'indépendance de l'Abkhazie qui n'avait été votée en son temps que par une moitié des députés, car les élus partisans du maintien dans la Géorgie n'avaient pas siégé (encore les Abkhazes étaient-ils plus légitimes à s'opposer aux loyalistes géorgiens que les catalanistes aux hispanistes, car en Abkhazie ces sécessionnistes se battaient pour rester fidèles à une fédération multiethnique utile à l'équilibre mondial, l'URSS, quand les catalanistes ne se battent que pour leur nombril). Dans le Caucase, tout cela se paya d'une guerre civile sanglante. Ce genre de guerre est improbable en Europe, mais l'intolérance des sécessionnistes est la même.

Et l'intolérance nourrit la haine. Voulez-vous une preuve : à propos d'Inés Arrimadas, justement. Le 3 septembre à 23 h 07, une femme de Badalona (près de Barcelone) de 45 ans, qui se décrivait comme "philologue réceptionniste" et qui a été gestionnaire de qualité dans un grand groupe, écrivait sur Facebook après avoir vu Arrimadas combattre le référendum catalan à la TV : "Je sais que les critiques vont me tomber dessus de tous les côtés, je sais que ce que je vais dire est machiste et tout ce que vous voulez, mais en écoutant Arrimadas dans le débat de T5 tout ce que je puis lui souhaiter c'est que quand elle sortira cette nuit, elle soit violée en groupe parce que c'est tout ce qu'elle mérite cette chienne dégoutante". Peu de temps après Tinsa la principale société d’évaluation des prix de l’immobilier en Espagne qui l'employait par interim a fait savoir qu'elle mettait fin à son job chez elle. Je me suis demandé ce qui a pu passer par la tête de cette femme visiblement dans une situation économique précaire d'imaginer ce genre de truc sur la présidente du groupe Citoyens au Parlement catalan. Est-ce un effet de la culture porno ? Un effet qui toucherait même les femmes ? Hélas on peut supposer que la dame exprimait le point de vue de beaucoup de beaufs catalanistes. Un site la qualifie de feminazi... Un souvenir du temps où le président de la Generalitat au début des années 30 était un admirateur de Missolini ? (avant que la Catalogne ne défende vaillamment la République en 36).

Bon il faudrait aussi que je parle de la pitoyable tournée des premiers ministres est-européens initiée par Macron en août mais d'autres l'ont fait mieux que moi sur You Tube.

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La canalisation de Plotin

6 Septembre 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Souvenirs d'enfance et de jeunesse, #Philosophie et philosophes, #Grundlegung zur Metaphysik

Quand je préparais ma licence de philo à 20 ans à la Sorbonne, il y avait dans notre cours un jeune normalien qui voulait faire sa maîtrise sur Plotin, philosophe néoplatonicien de l'antiquité tardive. Je trouvais cela étrange parce que mon entourage ne jurait que par les philosophes modernes (postérieurs à Descartes). En plus Plotin me paraissait ennuyeux avec ses hypostases et son végétarisme.

L'historien anglais ER Dodds évoque dans son célèbre livre sur l'irrationnel chez les Grecs une anecdote survenue à Plotin au début de sa carrière et que raconte son disciple Porphyre - je lisais cela la semaine dernière. Comme un prêtre égyptien venait à Rome, il lui aurait proposé de lui révéler quel Dieu animait sa vie intellectuelle et morale. Plotin accepta. Ils firent donc un rituel de canalisation qui m'a rappelé ma canalisation d'Isis chez une médium en novembre 2014, et ils le firent dans l'Isiacum de Rome parce que c'était le seul endroit pur (Dodds précise que les temples égyptiens étaient les seuls où l'on ne pouvait entrer qu'après avoir jeûné, et je crois que nos églises devraient s'inspirer de cette règle). Le prêtre fit son rituel, et une entité apparut qui révéla que Plotin était inspiré par un Dieu et non par un simple daimon (une entité inférieure). Mais au moment d'interroger l'entité sur le nom du dieu, l'assistant fut pris d'une sorte de folie (peut-être mêlée de jalousie dit Porphyre) et tua les oiseaux postés en défense, ce qui fit échouer la canalisation.

Un des aspects intéressants de l'anecdote est le rôle que jouent les oiseaux dans l'histoire. Il paraît qu'ils avaient une fonction apotropaïque. En étranglant les oiseaux, on empêchait la parole de l'entité de se donner en toute sécurité ou en toute pureté. C'est une historiette bien étrange...

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Les nouvelles sanctions contre Pyongyang, la transition cubaine, le massacre des Rohingya

5 Septembre 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme, #Le monde autour de nous, #Asie

Je ne cesse de dénoncer la manie anglo-saxonne des embargos. Il faut le faire à nouveau après l'annonce par Trump de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord, alors que toutes les exportations de minerais de ce pays sont bloquée depuis plusieurs mois. Poutine s'est opposé à ce projet qui pourrait avoir des conséquences humanitaires graves. Il a raison.

Même s'il y a eu une croissance économique en Corée du Nord grâce à l'économie parallèle, le peuple y est pauvre. On parle de Pyongyang, mais il semble que seule une nomenklatura de privilégiés habite cette ville et l'on ne sait rien des campagnes. Les sanctions économiques les frapperaient durement sans avoir aucun impact sur le programme nucléaire gouvernemental. Il faut arrêter cette politique de matamore.

A part cela on nous parle de la transition politique à Cuba. Au terme d'une série d'élections locales et nationales, le premier vice président du Conseil d'Etat Miguel Diaz Canel, un ingénieur qui a dix ans de plus que moi devrait succéder à la tête de l'Etat à Raul Castro qui continuera de contrôler le parti. Pas de changement brutal à prévoir, une vidéo de Diaz Canel est sorti sur les réseaux sociaux où il demande plus de répression des médias indépendants. Je ne sais pas si "Cuba hurts" (Cuba fait mal) comme disait Eduardo Galeano, mais en tout cas elle ne s'alignera pas sur les intérêts du Pentagone et de WallStreet de si tôt.

Dans la série "je me répète", il me faut à nouveau parler des Rohingya, comme je l'avais fait en 2013 sur le blog de l'Atlas alternatif et sur ce blog.Russia Today hier avait des mots très ironiques contre Aung San Su Kyi, prix Nobel de la paix birmane aujourd'hui au pouvoir. ll y a de quoi, car les massacres que subissent ces musulmans de Birmanie depuis dix jours sont terrible.

On devrait faire une liste des crimes dont les prix Nobel de la paix se sont rendus coupables directement ou par leur complicité active et passive : Kissinger responsable du coup d'Etat chilien et des milliers de morts qu'il a engendrés, Lech Welesa qui, sur le tard, soutint la guerre de Bush en Irak (avec son cortège de destructions qui continuent encore), Barack Obama avec sa guerre des drones, celle de Syrie et celle d'Ukraine. Aujourd'hui Aung San Su Kyi et le massacre des Rohingya. Tout cela devrait justifier la mise à la retraite d'office de l'ensemble de l'académie Nobel.

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L'honneur assassiné de Léontine de Villeneuve

21 Août 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #XIXe siècle - Auteurs et personnalités, #Divers histoire, #Les rapports hommes-femmes, #La droite, #Cinéma

Dans le livre qu'il a écrit contre Deleuze "Apocalypse du désir" mais que je ne vous recommande pas car je le trouve un peu trop labyrinthique, Boutang voit dans le cavalier blanc du chapitre 6 de l'Apocalypse de Jean la figure du désir immédiatement adhérant à l'instant et sans but, désir pur et enfantin, à la différence du désir de guerre, du désir de mathématisation des rapports humains et du désir de néant qu'incarnent les trois autres cavaliers.

Châteaubriand éprouve à l'égard de cette forme de "désir pur" la même méfiance que Boutang. Il dit l'avoir vécu à 60 ans en 1829, dans sa vieillesse, sur le chemin de Cauterets (en Bigorre) et le compare au "repos inopiné" de Palinure dans l'Enéide qui s'était mal fini.

Il allait rencontrer dans la station thermale une de ses admiratrices de 26 ans, Léontine de Villeneuve, qui le lisait depuis deux lustres et entretenait une tendre correspondance avec lui depuis deux ans. Hélas pour le grand écrivain (que je soupçonne d'être un peu mythomane comme comme Malraux), celui-ci n'hésita pas à la diffamer dans ses Mémoires d'Outre-tombe en faisant croire qu'elle l'avait forcé à la raccompagner chez elle dans ses bras alors qu'elle n'avait que 16 ans (sic). Boutang dit que la plénitude de l'instant précède souvent un meurtre. Là c'est l'honneur de Mlle de Villeneuve (devenue ensuite comtesse de Castelbajac) que Châteaubriand tua.

La petite fille de Léontine a publié plus tard en 1925 ses lettres sous le titre Le roman de l'Occitanienne et de Chateaubriand, et tenté de rétablir la vérité.

"Il a fallu l'étrange passage des Mémoires de M. de Chateaubriand pour troubler mes souvenirs, écrivait à plus de 40 ans Léontine après être tombée sur cet extrait des mémoires dans  un journal. En présence de ce vrai et de ce faux.ainsi mêlés, et je puis ajouter ainsi travestis, l'effroi m'a saisie (*). Je me suis demandé si je me trouvais réellement vis-à-vis de moi-même dans cette personne dont je ne reconnaissais pourtant ni les sentiments, ni les actions. Mais ma fierté a pu se relever lorsque j'ai traduit chaque ligne de cette page au tribunal de l'exacte vérité. "

Elle expliquait plus loin que la différence d'âge (puisqu'il pouvait être "deux fois son père") l'avait poussée à vivre à Cauterets en toute innocence son amitié avec le grand homme et lui faire lire sa poésie, elle qui ne voulait vivre que de cet imaginaire là, et pour cette raison n'était toujours pas mariée. Chateaubriand qui apprit à ce moment-là qu'il était évincé du pouvoir, fit miroiter à Léontine la perspective qu'elle pourrait intégrer à titre permanent le cercle d'amis qu'il comptait fonder à Rome. Après avoir refusé cela parce qu'elle devait tout de même à son père de se marier, Léontine, le lendemain même, propose quand même d'aller attendre l'écrivain à Rome tandis qu'il irait règler des questions politiques à Paris. L'attendre, mais en tout bien tout honneur, pour intégrer ce groupe d'amis qu'il voulait réunir. Car, elle le dit dans son texte, elle est légitimiste, et politiquement plus à droite que Châteaubriand (trop libéral à son goût). Et dans ce milieu là on ne badine pas avec l'honneur !

"Vous me retrouverez entre les murs d'un couvent, sous la sauvegarde de la protection religieuse. Là, ma réputation sera mise à l'abri... Je ne parle pas de mon honneur : personne n'aura jamais le pouvoir d'y porter atteinte. Vous pourrez venir me voir tous les jours dans cet asile où nous nous donnerons hautement le nom d'amis, même en présence de Mme de Chateaubriand. Et, plus tard, lorsque les années seront venues pour moi comme pour vous, pourquoi ne deviendrais-je pas une nièce d'adoption qui se consacrerait à soigner et à consoler votre vieillesse?" lui aurait-elle dit... Et Chateaubriand refusa ce beau projet sacrificiel puis quitta Cauterets. Ils allaient s'écrire plusieurs fois encore (alors que dans ses Mémoires Chauteaubriand fait comme s'il connaissait à peine la jeune sylphide). Ils se revirent même en 1838 à Cauterets, puis rue du Bac à Paris juste avant la mort de l'auteur du Génie du christianisme. La correspondance publiée montre bien que la version de Léontine était la bonne.

Notre époque qui aime ajouter le crime au crime, le mensonge au mensonge, en 2008, sortit le film "L'Occitanienne",  dans lequel Châteaubriand et Léontine s'enlacent et se caressent longuement au milieu d'images suggestives du flot rageur du gave qui roule ses galers (j'aurais encore préféré une version avec Rocco Siffreddi et Clara Morgane...). Tant pis pour ce qu'était réellement Léontine de Villeneuve, son idéalisme littéraire, et sa vertu royaliste rigide. L'important n'est pas de rendre justice aux gens du passé, à ce qu'ils ont vécu ni ce en quoi ils ont cru. Léontine n'est plus ici qu'une jeune fille de notre époque qui aurait abusé d'une correspondance sur Facebook, et, arrivée dans la chambre de l'écrivain auquel elle était prête à se donner et même à qui elle voulait donner un enfant (ce qui, suivant les critères du XIXe siècle, est le comportement d'une catin...) réaliserait que tout est plus compliqué qu'elle ne l'avait initialement pensé. Notre époque n'aime pas rendre justice aux êtres, ni au passé... seulement idolâtrer ses propres valeurs, sa propre médiocrité...

Le réalisateur du film a le culot d'écrire en postface du film dans le générique que Léontine fut profondément blessée de "l'entrefilet" que Châteaubriand lui consacra dans ses mémoires ! (comme si lui, l'homme de notre époque, prétendait lui rendre justice et réparer l'offense faite à la jeune femme de 1829 en lui versant à son tour un pot de chambre sur la tête). Mais qu'eût elle dit du film alors ! Léontine n'avait pas été blessée du peu de place que l'écrivain lui accordait dans son livre mais du fait qu'il ait laissé entendre qu'elle voulait coucher avec lui, comme une fée des forêts un peu follette, alors que, comme ils étaient membres de la bonne société aristocratique tous les deux, et ayant de nombreux amis en commun (elle y insiste pour éclairer l'arrière-plan de leur rencontre), elle avait placé leur complicité littéraire à un tout autre niveau... Est-ce si dur à comprendre de nos jours ?

(NB : je n'ai pas le temps de développer ce point, mais il faut bien voir que notre temps aveuglé par sa fascination pour le désir charnel, et soucieux de rendre justice aux femmes - mais pas à la femme idéaliste, seulement à la femme sexuellement disponible, et mécontente de n'avoir pas assez de pages dédiée à son égo dans les mémoires d'un écrivain - non seulement ne comprend rien à l'honneur aristocratique et la vertu chrétienne qui le soutenait - à la différence de l'aristocrate romaine païenne antique qui selon Paul Veyne se donnait au noble le plus offrant dans un adultère sans état d'âme -, mais encore ne comprend rien à toute la beauté dont l'art littéraire se parait au début du XIXe siècle, beauté que Châteaubriand ne croyait pas ternir en se vantant d'avoir séduit une sylphide, mais qu'une aristocrate encore vierge aurait bien sûr anéantie en vautrant sa délicate poésie dans une sombre coucherie prénuptiale avec l'idole de son tabernacle épistolaire).

(*) c'est moi qui souligne

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Invitation yézide

20 Août 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Aide aux femmes yezidies

Je suis invité au mariage d'une jeune yézidi irakienne en Allemagne. Mon hôte m'écrit dans son anglais approximatif : "The sister of my man with her husband and son were kidnapped by ISIS, and they have a sad story. I am sure at least 50 survivors will attend the wedding and i promised them to not speak or do any thing make them sad, it will be only Yazidi traditional dances and a dinner, my people need hope and i want to give them this hope that they really need it now."

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Chavez et la sorcellerie

16 Août 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Grundlegung zur Metaphysik

Traduction de l'interview du journaliste hispano-venezuélien David Placer auteur du livre "Los brujos de Chavez", une enquête menée auprès d'une soixantaine de personne, entretien publié dans le journal mexicain "El Universal" du 28 mai 2016.

- Qu'est-ce que révèle le livre?

- Il explique comment la politique et la superstition ont entremêlées au Venezuela, dans un phénomène politique unique dans lequel la Santeria cubaine a servi à exercer un contrôle sur les dirigeants politiques et militaires. Il offre une vision jusqu'ici inédite montrant comment Chavez et  le chavismese sont tournés vers Santeria pour accumuler et conserver plus de pouvoir.
 

- Comment influencé Castro a influencé Chavez?

- Chávez avait un caractère profondément superstitieux. Il a grandi dans les plaines vénézuéliennes écouter des histoires de fantômes et d'esprits. Et Fidel Castro, voyant en lui cette personnalité nettement croyante et superstitieuse, a profité de cette faiblesse. Il l'a rempli de babalawos  [hauts prêtres] de la santeria cubaine censé le le guider dans ses voies spirituelles. Mais ces conseillers qui ont accompagné non seulement Chavez, mais aussi les officiels chavistes de haut rang, les gouverneurs, les militaires et chefs d'entreprises publiques, étaient des espions. Cette révélation surprenante dans le livre est faite par Raúl Baduel, ancien ministre de la Défense [vénézuélien], et qui était compagnon et ami de Chavez [Baduel a rompu avec Chavez depuis 2007].


- A la mort de Chavez, comment le phénomène s'est-il prolongé dans le chavisme?

- Maduro a hérité de cette superstition présidentielle si présente au Venezuela parmi nos dirigeants. Le président est un disciple de Sai Baba, qui était le chef jusqu'à sa mort d'une sorte de secte en Inde. Et Maduro a également dit que l'esprit de Chavez lui apparaît partout: dans le métro, à la Caserne de la Montana [où les restes de Chavez reposent] et même sous la forme d'un petit oiseau. En plein palais présidentiel Miraflores, il y a des éléments de Santeria comme une tête d'alligator, des bonbons et des pétales de rose sur l'épée de Simon Bolivar. Et de tout cela je peux en témoigner de mes propres yeux parce que j'étais dans les salles du palais présidentiel et j'a pris des photos de tous ces éléments qui ne sont pas explicables autrement dans une perspective différente de celle de Santeria.
 

- Qui a été la vénézuélienne Cristina Marksman pour Chavez ? 

- Ce fut la première sorcière, soeur de sa maîtresse pendant plus de 10 ans, Herma Marksman, et elle lui lirait les lettres, lui faisait prendre des bains dans les rivières pour éloigner les mauvais esprits.
 

- Que vous a dit Baduel de la pratique de la Santeria?
 

 - La Santeria et la sorcellerie ont été utilisés par de hauts responsables du chavisme avec la conviction que, avec elle, ils pourraient obtenir plus de puissance. L'un des passe-temps des hiérarques supérieurs est d'invoquer les esprits, généralement ceux des Libérateurs. C'est un passe-temps qui continue à Miraflores (le palais présidentiel). Les administrateurs eux-mêmes me l'ont avoué. Ces épisodes ne sont pas seulement exposés par Baduel, mais aussi par une grande partie de cercle intime de Chavez.


- Voulez-vous dire que les grandes décisions ont été influencés par Santeria?


- Sans doute. Chaque fois que Chavez avait une réunion importante ou un voyage, il courrait chez sa sorcière principale, Cristina Marksman.Devenu président il a fait la même chose avec ses babalawos. Il était un homme qui comptait beaucoup sur ces pratiques pour prendre des décisions ou organiser des réunions.


- Quel lien y a-t-il entre la mort de Chavez et les os de Bolivar?


- Il y a une croyance répandue, non seulement parmi les adeptes de la Santeria et du Palo, qui qui sont ceux qui effectuent des rituels avec des os humains, que l'exhumation des os de Simón Bolívar [en 2010] a eu des conséquences fatales pour Hugo Chávez. La cérémonie, diffusée à la télévision tôt le matin, et où Chavez a parlé aux os de Bolivar, a été comprise de cette façon, non seulement par les opposants adeptes de la santeria et du palo, mais par les chavistes eux-mêmes. C'est ce qui est connu dans les milieux populaires comme "la malédiction de Bolívar". C'est là une conviction sans aucun fondement scientifique.
 

Selon ces croyances, la malédiction est tombée Chavez. Mais il est curieux que, après la publication du livre, un certain nombre de sorciers de l'opposition ont pris contact avec moi. Ils me demandent de révéler le lieu d'un des sortilèges réalisés par Chavez, parce qu'ils comprennent que grâce à cet endroit, le chavisme reste au pouvoir. C'est là aussi une perception sans fondement scientifique ou rationnel, mais une partie de Vénézuéliens sont convaincus que tous ces sortilèges, toute la sorcellerie présidentielle, a eu des conséquences pour le pays.
 

- Il y avait un plan pour diffuser Santeria au reste du pays? 

 - En effet. Santeria cubaine a commencé dans la hiérarchie des chavisme et s'est diffusée jusqu'auxbases sociales du pays. Dans les ports, à l'aéroport, dans les ministères et les entreprises publiques où prédomine le chavisme, domine également la Santeria. Elle est devenue la religion officielle du régime. Et les chavistes le savaient: s'ils étaient adeptes de la Santeria, étaient plus susceptibles de monter quand leurs chefs étaient aussi des santeros. Le but était d'avoir une religion officielle, parce que l'Eglise catholique a toujours été très critique du chavisme.

- Le phénomène a-t-il été sapé par la crise au Venezuela?
 

- Il reste plus vivant que jamais. Tous ces éléments sont encore à Miraflores et Nicolás Maduro et plusieurs de ses dirigeants continuent de consulter les sorciers et les voyants. C'est une caractéristique intrinsèque et en temps de difficultés cette dépendance aux rituels et l'occulte augmente. L'incertitude leur fait demander de la certitude. Ils doivent s'autoconvaincre que les problèmes disparaitront ainsi.

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Les Indiens hispanisés des Caraïbes

6 Août 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #XVIIIe siècle - Auteurs et personnalités, #Divers histoire

Les westerns nous ont montré des Indiens habitués à traiter avec la civilisation anglo-saxonne mais, au XVIIIe siècle,il y en avait aussi en Louisiane française qui s'habillaient à la Louis XV, et en Floride espagnole certains qui avaient été baptisés par des prêtres castillans. Quand le Père jésuite de Charlevoix fait partie d'une embarcation (un bateau nommé "Adour" bien qu'il eût un équipage breton) qui échoue en 1722 sur une des "Iles des Martyrs" à 150 kilomètres de la Havane, il est cerné par des "Sauvages" qui détestent les Anglais (mais les Français se sauvent en disant qu'ils sont alliés des Espagnols), tribu dont le chef se fait appeler Dom Antonio, mais dont les bonnes manières s'arrêtent malheureusement là (voir le récit ci-dessous). Charlevoix ne saura jamais à quelle ethnie ils appartenaient. Voici deux pages de son récit savoureux.

- Dommage que Gallica n'ait scanné que 3 tomes de sa description de l'Amérique française (au point que la fiche Wikipedia sur Charlevoix affirme qu'il n'existe que trois tomes de cet ouvrage), vous ne trouverez le tome 6 qui relate l'année 1722 que sur Google Books.Quel incroyable bonhomme que ce Charlevoix auquel on doit aussi une histoire du Japon et une du Paraguay ! -

 

 

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Vénézuéla, Yézides, Assemblée, Cristina

28 Juin 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Revue de presse, #Le monde autour de nous

Dans la série "Les médias vous manipulent" les Vénézuéliens font remarquer ceci : on vous parle de la crise économique chez eux à longueur d'année. Mais chez leur voisin colombien 1 000 enfants meurent de faim par an, alors qu'aucun ne meurt au Venezuela. Lequel des deux pays mériterait-il le plus de ce fait que les caméras de nos chers journalistes soient braquées sur lui ?

Mardi 27 juin à Caracas un hélicoptère de la police vénézuélienne a lancé des grenades sur le siège du tribunal suprême de justice et mitraillé le ministère de l’intérieur, à part ça l'opposition est très pacifique, Mais oui mais oui. (On avait parlé d'un  meurtre de juge il y a peu, il y aurait aussi beaucoup à dire sur les attaques de journalistes). Les forces spéciales de la Force Armée nationale bolivarienne ont été déployées pour arrêter ce groupe factieux.

 

Il y a une sorte d'acharnement invraisemblable dans la cruauté en ce moment au Proche-Orient. Les 25-26 juin, les troupes de Daech à Mossoul ciblaient la base médicale de la Yazidi American Women Organization d'Adlay Kejjan dont on a déjà parlé sur ce blog.

Bon à part ça, on constate un fort lobbying du journal Le Monde en ce moment pour la PMA. Méluche, lui, préfère s'en prendre aux couleurs mariales du drapeau européen à l'Assemblée, nourrissant une dialectique théâtrale avec l'ex-écolo arriviste de Rugy qui fait office de président (mais bon, on a déjà eu Bartolone, donc on est habitué à voir le perchoir choir et déchoir).

Pour finir pour travailler votre espagnol une interview de Cristina sur l'élection de Macron en France, la social-démocratie, la situation de l'Argentine.

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La vague macronienne nauséeuse

13 Juin 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La gauche, #Programme pour une gauche décomplexée

Mélenchon m'agace sur l'international mais contre la vague Macron il a les mots justes. Ce ramassis de jeunes cadres supérieurs de PME arrivistes qui débarquera bientôt au Parlement n'aura pas l'envergure pour constituer une base parlementaire intéressante et souffrira sous le joug monacal des règlements de l'assemblée nationale. Mais Marcon s'en fout : il cassera le code du travail, et peut-être même insèrera l'état d'urgence dans la loi par ordonnance. Toute la dimension dictatoriale de la Ve république se révèle, une fois de plus, à grand renfort de culte de la personnalité médiatique.

Le noyau dur des 30 % de bobos stupides indécrottables qui forment aujourd'hui la base du consensus politique français et des faiseurs de rois, une fois de plus se fait abuser, tandis que les classes populaires s'abstiennent.

Un mérite à cette situation : les vendus du parti socialiste passent à la trappe. Hélas pas tous. Les pires d'entre eux - Valls, El Komri, Touraine -, ceux qui étaient déjà prêts à arborer l'étiquette "En Marche" alors qu'ils devaient leur existence politique au parti socialiste, ont plus de billes aujourd'hui pour sauver leur peau que les ex-frondeurs restés fidèles à leurs idéaux comme Hamon. Il n'y a pas de morale en politique... Et les électeurs sont biens sots. "A vomir" comme disait Guaino des électeurs bobos et de droite catho - Guaino a eu bien des défauts, notamment quand il cautionna la forfaiture du traité de Lisbonne, mais au moins il est intègre sur ses idées, comme Morano et une certaine base de l'UMP (attaquer l'électorat catholique pour son pétainisme, il fallait l'oser, et c'était juste). Guaino va sans doute rejoindre M. Montebourg dans l'élevage des abeilles. Peut-être aussi Mme Bechtel, bras droit de Chevènement, qui avait mené son mandat avec tant d'application dans l'Aisne pour ne recueillir que 6 % des voix au final.

"A vomir" les électeurs. Peut-être. Mais plus encore les médiacrates qui ont fabriqué Macron et qui aujourd'hui gloussent de voir les députés sortants s'inscrire au chômage, alors que nous, citoyens ordinaires, leur sale tronche, on doit la supporter depuis vingt ans - je pense à cet hippopotame d'un grand journal parisien qui nous a abreuvé de mensonges notamment sur la Yougoslavie (elle est co-responsable des 10 à 15 tonnes d'uranium appauvri de l'OTAN versées sur la Serbie et le Monténégro et des 30 000 nouveaux cancers par an qu'elles provoquent) et hier à la TV pouffait sur le thème "pas facile pour un vieux député de se reconvertir". La garce !


Il va falloir maintenant se battre pour défendre les acquis sociaux et les libertés publiques (face à l'état d'urgence). Le pourra-t-on ? Au Venezuela on se bat, et la droite flingue un magistrat qui avait eu le malheur de condamner à de la prison un leader de leurs rangs. La Corée du Sud, elle, a fait son virage à gauche, et demande l'arrêt du projet de bouclier anti-missile américain (une bonne nouvelle pour la paix dans la région). Si seulement notre peuple lui aussi en venait à se ressaisir !

Une future députée macronienne pas très crédible...

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Mon papier sur la Russie au Proche-Orient

15 Mai 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Proche-Orient

L’histoire est riche en revirements. Entre la première et la seconde guerre du Golfe, le Proche-Orient aura connu ou subi une hégémonie occidentale (et principalement étatsunienne) comme  auparavant dans les années 1950 : Washington pouvait isoler le régime de Bagdad, parrainer le processus de paix entre Israël et les Palestiniens, et même, après le 11 septembre, entreprendre une « guerre contre le terrorisme » avec le soutien pratiquement unanime des gouvernements de la région, guerre clandestine – celle des drones, et des prisons secrètes de la CIA – et guerre ouverte incluant le renversement de Saddam Hussein et la menace déclarée d’imposer un « regime change » en Iran.

La suite de mon article est sur "Le Courrier du Maghreb et de l'Orient" ici.

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Histoire : Les Yézidis et l'URSS

13 Février 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Divers histoire, #Aide aux femmes yezidies

Puisque nous approchons du centenaire de la révolution bolchévique, un extrait du Bulletin périodique de la presse russe 8 septembre 1923 p.6 à propos des Yazidis du Caucase.

Conférence de Yézidis et de Kurdes à Tiflis.

La Pravda (30-8) annonce la clôture d'une conférence organisée par les Yézidis et les Kurdes de Transcaucasie. La Conférence, à laquelle le gouvernement soviétique a donné , tout son appui, s'est ouverte à Tiflis en présence d'une cinquantaine de délégués. Les Yézidis, qu'on désigne encore sous le nom d'Adorateurs du diable en raison des cérémonies bizarres qui accompagnent leur culte, forment avec les tribus kurdes des minorités nationales en Arménie soviétique. Les principaux groupements yézidis habitent le voisinage du mont Alagheuz et forment plusieurs villages le long de la frontière russo-turque.

Au début de la Conférence, les représentants du parti communiste de Russie rappelèrent aux délégués l'état de mépris et d'isolement dans lequel tous les régimes avaient tenu Kurdes et Yézidis. Il leur fut donné l'assurance que le gouvernement soviétique, défenseur des minorités nationales et des peuples opprimés, ferait tous ses efforts pour donner à chacun la possibilité de travailler et de vivre, tout en profitant des bienfaits de la culture soviétique.

En réponse, les délégués Yézidis déclarèrent qu'après des siècles d'oppression, d'alarmes et de persécutions, ils ont enfin trouvé de la tranquillité sous le régime soviétique.

Après la lecture de nombreux rapports, les délégués décidèrent de demander au gouvernement soviétique d'Arménie d'ouvrir des écoles nationales dans tous les villages yézidis d'Arménie. Avant de clôturer la Conférence, un rapporteur yézidi attira l'attention des délégués sur le fait que la publication du livre yézide (Chame)  (La Lumière) a été faite pour la première fois sous le régime des Soviets. (1)

(1) Le code de la doctrine des Yézidis contenu dans le « Livre » a été traduit de l'arabe en anglais par MM. Layard et Badger. Ce Livre, qui se réduit à quelques feuillets, paraît avoir été écrit à une époque relativement récente. M. J. Menant, de l'Institut, a donné sur les Yézidis une étude d'ensemble dans le vol. 5 des Annales du Musée Guimet.

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Scorsese et le martyre, Berl et le silence

9 Février 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Cinéma, #1910 à 1935 - Auteurs et personnalités, #Grundlegung zur Metaphysik

Vu le dernier film de Scorsese "Silence", film astucieux mais sans intérêt sur le plan moral. Le cinéaste s'y regarde trop le nombril au prisme de la religion. Depuis La dernière tentation du Christ, il aime mettre en scène les doutes des croyants, mais, contrairement à ce que veut faire croire son film, l'engagement religieux ne peut se borner à glisser au milieu du scepticisme de la fin de vie une amulette interdite dans un cercueil. Cela dit, il met un certain talent "technique" au service du sujet considérable que représente le martyre des chrétiens au Japon au XVIIe siècle (voir ici notamment p. 175 et suiv).

Tous les martyres sont impressionnants, et ils sont le propre de beaucoup de religions. Ils m'impressionnent quand ils ne se font pas avec des ceintures d'explosifs car là, ce n'est plus du martyre, c'est de l'assassinat. J'ai découvert celui de religieux mandéens (sabéens) au XVIIIe siècle il y a peu : en 1782 les musulmans de Perse ne parvenant pas à obtenir par l'argent et la ruse les livres sacrés de cette secte jettent leur clergé en prison et les torturent. Plusieurs sont tués, empalés,mutilés, on leur coupa les membres en commençant par les doigts, corps égorgés, yeux brûlés au fer rouge, têtes coupées selon le témoignage de J. de Morgan. Le Gauzevra Adam auquel les Perses avaient coupé le poignet droit s'enfuit en Turquie avec le livre "Iniani" sous le bras qu'il recopia en cachette de la main gauche.

Je lis Emmanuel Berl en ce moment qui fut une sorte de Montaigne du XXe siècle. Il a raison de dire qu'au fond tous les athées, de Nietzsche à Picasso, furent de grands religieux. Sauf que ces gens là plaçaient leur Dieu trop loin et trop haut pour le croire susceptible d'imposer des lois à l'homme. C'est qu'il leur manquait la foi aux démons (ou plutôt la connaissance des démons), un peu moins d'orgueil, un peu d'humilité dans la façon d'observer des phénomènes comme la voyance et la médiumnité les auraient ramenés aux dures réalités du "deuxième ciel" et ils auraient alors compris pourquoi les lois morales existent. Voyez par exemple la séance où Malraux va voir une médium spirite pour lui faire dater un tapis antique et en ressort comme s'il sortait d'un labo d'analyse scientifique, telle que Pauwels la raconte. Un peu de modestie et de curiosité sans préjugés auraient ouvert à Malraux des boulevards d'élévation spirituelle. Idem pour Kant s'il avait eu l'honnêteté minimale de témoigner de sa fascination initiale (qu'il confesse dans ses lettres) devant l'intuition de Swedenborg sur l'incendie de Stockholm, plutôt que d'enterrer tout cela sous une tonne d'arrogance ironique dans "Rêves d'un visionnaire".

J'aime bien quand Berl dans "A contretemps" fait l'éloge du silence et transforme la phrase de Jésus "Que votre oui soit oui, que votre non soit non, tout le reste vient du Mauvais" (Mt 5:37), en "Dites oui oui dites non non et tout le reste vient des démons". Moi aussi j'aimerais avoir la sagesse de ne pouvoir parler que pour dire "oui" ou "non".

Un fervent musulman a commenté un billet récent de ce blog. Il y a des tas de religions comme l'Islam, le bouddhisme etc dont je me dis que plus je les connais et moins j'en sais sur elles. Mais j'ai une méthode bien à moi pour approcher ces sujets. Je ne creuse que ce qui m'est indispensable, quitte à devenir très pointu sur d'infimes détails (comme vous avez pu le remarquer sur ce blog avec mes remarques sur le pythagorisme), car le sens profond est dans le détail, sans jamais rechercher l'encyclopédisme ni l'académisme. Pour le reste il faut accepter de ne rien comprendre.

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La Transnistrie et l'histoire de l'antisémitisme

6 Février 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Transnistrie, #Grundlegung zur Metaphysik

En 2013, j'ai déjà signalé le lien entre la Moldavie et l'extermination des Juifs par les nazis à propos du bordel de Soroca, que décrit Malaparte dans Kaputt. Le lien est très fort aussi pour la Transnistrie dont le nom même, appliqué par les Roumains au pays, est le terme administratif utilisé par les nazis pour la zone au delà du Dniestr pou la mise en oeuvre du programme d'extermination.  Mais le rapport de la Transnistrie, et de la Moldavie à l'histoire de l'Antisémitisme, est plus ancien encore, évidemment.

Si vous avez lu mon livre sur ce pays, vous savez sans doute que je me suis rendu à Dubossary qui est un village transnistrien à majorité moldave. Or, en lisant aujourd'hui le livre du théosophe anglais George Robert Stow Mead publié en 1903 "Did Jesus live in 100 BC ?", j'apprends que selon le Times du 2 mai 1903, la populace de Chisinau a assassiné "environ 60 juifs et juives" et en a blessé "environ 500 de plus" avec "plusieurs cas de viols trop horribles pour une description détaillée" en raison d'un supposé "meurtre rituel" perpétré par les Juifs de Dubossari, et ce malgré la publication de la preuve absolue du caractère mensonger de l'accusation (à cette époque on accusait les Juifs de sacrifier des enfants et manger leur chair).

Une lecture du journal "L'Aurore" du 17 août 1903 p. 2 sur Gallica me donne ces éléments : 

"Les horribles massacres qui ont eu lieu à Kichineff ont été présentés par M. Krouchevau, l'éditeur du journal antisémite Bassarabets comme les représailles d'un prétendu crime rituel.

Les faits ont été relatés : quelques semaines avant les fétes de Pâques on avait trouvé S, Doubossari,. non loin de Kichineff, le cadavre d'un adolescent de dix-sept ans, Michel Ribalenko, assassiné de façon mystérieuse et dont le cadavre présentait cette particularité que le col était criblé de coups de canif, comme si l'assassin s'était complu à faire couler goutte à goutte le sang de la victime. Il n'en fallut pas plus au Bessarabets pour annoncer que Ribalenko avait été tué par les Juifs qui l'avaient saigné pour préparer les mazzi (pain azyme). La légende fut acceptée par la  oule avec enthousiasme, et nous connaissons les atrocités qui suivirent.

Un agent de la police secrète d'Odessa ne fut point convaincu par les "révélations" du Bessarabets. Il avait passé sa jeunesse parmi les juifs ; il connaissait à fond leurs moeurs, parlait même leur jargon et l'accusation qui pesait sur eux le laissa sceptique. Il s'affubla du costume des juifs polonais et fréquenta les petites synagogues, les restaurants et les bazars où les juifs s'assemblèrent, et il fut bientôt convaincu que bien loin de pétrir le pain azyme avec du sang chrétien les israélites ne touchaient pas au sang des animaux. un jour il vit un juif corriger d'importance son fils parce que l'enfant lui avait servi un bifteck saignant. Ce juif était convaincu qu'en avalant une goutte de sang de boeuf il avait commis un grand péché devant l'Eternel... Il fallait chercher ailleurs l'auteur de l'assassinat.

Existait-il des gens qui eussent intérêt à supprimer Ribalenko, se demanda alors Matviev.

Pour résoudre cette question, il mit de côté l'habit juif polonais et s'accoutra du costume d'un paysan de la Bessarabie : blouse blanche, hautes bottes et bonnet d'astrakan. Il entra en relations avec le grand père de la victime, Kouzma Ribalenko, un riche paysan qui possédait beaucoup de terrains, de vignes et d'argent comptant. Un peu avare, il n'aimait guère sa famille et s'en plaignit à son nouvel ami en la lui présentant sous les traits les plus noirs.

Matviev sut s'insinuer dans les bonnes grâces du vieillard à force de petits cadeaux et d'attentions. Il apprit bientôt que Kouzma Ribalenko détestait par dessus tout son ex-gendre, un certain Timotchouk, veuf de la fille de Ribalenko, qui avait eu de son premier mariage un fils, Ivan, qui était avec le malheureux Michel l'héritier du grand-père.

- Ce Timotchouk, disait le vieux au détective, n'a jamais su travailler et maintenant que Michel est mort et que son fils Ivan devient l'unique héritier, il me tuera pour entrer plus vite en possession de son bien.

Ces confidences furent un trait de lumière pour Matviev.

Le détective eut recours à un troisième travestissement ; il s'habilla en journalier qui cherche de l'ouvrage chez les gros paysans. Il devint un habitué des cabarets et lia connaissance avec jardinier, Antone, gardien de la propriété contiguë à celle qui avait été le théâtre de l'assassinat de Michel Ribalenko".

Après avoir courtisé la fille de Tomotchuk, Matviev, dans le rôle du gendre potentiel, apprit de
Antone le jardinier qu'en effet Tomotchouk avait tué l'adolescent. Il leur reprocha à lui et son compagnon de n'avoir pas mis à profit le crime rituel pour piller les juifs de Doubossari.

"Nous avons été plus avisés à Kichineff, du le jardinier, nous leur avons appris ce qu'il leur en coûtera de cribler nos jeunes garçons russes de coups de couteau... Vous êtes des pleutres, des timorés, des imbéciles..."

"Piqué par ces sarcasmes, ajoute le journal, Antone se rebiffa :
- Ah ! tu nous prends pour des pleutres ? C'est toi qui un imbécile !... Tu crois que ce sot les juifs ui ont tué Michel Ribalenko ?

Ha ha ha ! Eh bien ! non, tu n'est pas malin ! ... Mais c'est Timotchouk et moi qui avons fait le coup, imbécile !" Et le jardinier de raconter comment le 16 février au soir Antone avait saigné l'adolescent pour faire croire qu'il s'agissait d'un rituel juif.

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Le malaise du Biafra et la guerre de religion au Nigéria

29 Janvier 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

L'apôtre John Suleiman appelle les chrétiens à l'auto-défense armée face à Boko Haram. Les services de sécurité fédéraux l'ont convoqué hier. Un leader spirituel musulman, le sultan de Sokoto avait demandé son arrestation. D'autres prédicateurs chrétiens avaient pourtant eux-aussi tenu le même genre de discours que John Suleiman. Il est vrai que ce Suleiman va peut-être un peu plus loin que les autres. En 2016, quand des villageois chrétiens de l'Etat de Kaduna ont été massacrés par les éleveurs peuls musulmans (fulani), John Suleiman avait prophétisé que le gouverneur Nasir El-Rufai mourrait sous quatre jours.

Le journal biafrais Biafra Telegraph s'indigne de l'impunité des fondamentalistes musulmans au Nigeria, et du refus du premier ministre britannique de s'engager pour les chrétiens persécutés dans ce pays, tandis que les militants du mouvement indépendantiste Peuple indigène du Boafra (IPOB) dont 20 membres furent tués le 20 janvier lors de leur manifestation pro-Trump sont inculpés de complot contre l'Etat devant une cour de Port Harcourt (le grand port pétrolier du Sud-Est); Leur procès a été ajourné jusqu'à demain. Ils sont 38.

Le leader de l'IPOB et directeur de Radio Biafra Mazi Nnamdi Kanu reste emprisonné et encourt la prison à perpétuité. Des médias britanniques ont affirmé que les journalistes étrangers ont été interdit d'accès à son procès qui a eu lieu début janvier devant la cour fédérale d'Abuja. Le Gatestone institute (un think mainstream) avait tenté d'attirer l'attention l'an dernier sur le Biafra, et vanté l'action d'Amnesty International qui serait, selon cet instut, la seule ONG à s'intéresser à la répression anti-biafraise (notamment à l'assassinat de manifestants d l'IPOB en mai 2016 et les arrestations et tortures éxtrajudiciaires).

Conscient de la montée des revendications biafraises, l'ex-président nigérian Obasanjo a reconnu que les Igbos (l'ethnie du Biafra) devraient pouvoir accéder à la présidence du pays en 2019, mais en même temps a soutenu pour cette date la candidature de leur principal ennemi, l'actuel président Muhammadu Buhari. Celui-ci, sympathisant de la charia, n'a cessé depuis deux ans de discriminer les Igbos dans les nominations à la tête de l'Etat comme dans les investissements publics. Une discrimination qui ne fait que favoriser l'indépendantisme.

L'instabilité générale du pays plaide aussi dans ce sens. Certaines régions du Nigéria sont au bord du chaos en ce moment sous l'empire de l'extrémisme des fondamentalistes musulmans. A Kano, au nord du pays, une femme kamikaze qui  portait un bébé sur son dos s'est fait exploser le 13 janvier. Dans cette ville les meurtriers de la commerçante chrétienne igbo (originaire donc du Biafra) Bridget Agbahime, 72 ans (à qui des jeunes musulmans avaient coupé la tête à cette femme de pasteur parce qu'elle avait demandé à un d'entre eux de faire ses ablutions loin de son commerce) ont été libérés...

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Justice ou injustice : des Kurdes au Botswana...

29 Janvier 2017 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Grundlegung zur Metaphysik, #Le monde autour de nous, #La gauche, #Peuples d'Europe et UE

Justice divine, justice terrestre... Moi qui travaille beaucoup sur l'histoire des religions en ce moment, je ne peux manquer de m'interroger sur l'articulation entre les deux. Prenez les Kurdes : du point de vue terrestre leurs cause paraît juste, et d'autant plus depuis qu'ils remportent de belles victoires militaires contre Daech. Pourtant bien des éléments les condamne au regard des textes sacrés. Leurs sites sur Internet à la gloire de Marx ont des liens avec des sites pornos (si si, j'ai vu ça il y a huit jours !). L'activiste Nurcan Baysal (dont on a déjà parlé ici) écrivait la semaine dernière sur le site T24 un billet contre l'atteinte au patrimoine historique de la capitale du Kurdistan turc Dyarbekir / Amed que représenterait le projet d'Erdogan de réaménager la ville à la mode ottomane. L'article défend les statues assyriennes de lions à tête humaine, tout comme beaucoup de sites kurdes irakiens prônent le retour au zoroastrisme. Voilà qui place Erdogan dans le sillage abrahamique et les Kurdes dans le camp de l'idolâtrie... Tout comme la promesse de Mélenchon d'inscrire le droit à l'avortement dans la constitution ne doit pas le placer très haut dans l'échelle de la justice divine, c'est le moins qu'on puisse dire, même si sa défense des pauvres le situe haut dans la justice terrestre... Cela me rappelle les mots de Claudel qui reconnaissait dans son journal que les bolchéviques malgré leurs horreurs anti-chrétiennes avaient au moins rêglé son compte au démon de l'argent comme le catholicisme n'avait jamais pu le faire...

Notez que, du point de vue de la seule justice terrestre elle-même, on peine aussi à faire la part du bon et du mauvais. Prenez la cause sahraouie. Le Maroc qui a quitté l'Union africaine (ou son ancêtre) en 1984 à cause de cette question postule à une réintégration malgré l'hostilité de l'Algérie et de l'Afrique du Sud. Est-ce une cause juste ? Presque tous les Marocains pensent de bonne foi que les Sahraouis ne sont pas un peuple, comme les Israéliens considèrent que les Palestiniens n'en sont pas un. Qu'est-ce qu'un peuple ? Les Californiens allergiques à Trump prétendent de plus en plus en être un et l'on parle de sécession à San Francisco. Le patron de Facebook qui a exproprié des indigènes d'Hawaï avait l'air de ne pas considérés les pactes ancestraux qui régissaient leurs terres comme émanant d'un "peuple" sujet de droit...

Question complexe que celle du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Bertrand Russell dans un livre d'histoire des idées, rappelait que Wilson n'avait pas été jusqu'à le reconnaître aux habitants d'un quartier qui prétendaient faire sécession de leur pays pour ne plus y payer d'impôts... Cette semaine le Petit Quotidien, journal pour les enfants, bourre le crâne de nos chères petites têtes blondes en faisant sa "une" sur une info de la plus haute importance "un cerf mange du maïs dans une forêt au Kosovo". Le seul but de l'info apparemment est d'apprendre aux enfants où se trouve le Kosovo et leur faire croire que c'est bien un Etat. Promis si vous m'élisez président un jour j'obligerai le Petit Quotidien à faire se "Une" sur les belettes de Transnistrie...

En parlant de Transnistrie, avez-vous vu que le nouveau président socialiste moldave dont on a déjà parlé dans ces pages, en visite à Moscou cette semaine, laisse entendre qu'il pourrait dénoncer le traité d'association avec l'Union européenne en 2018 après les élections législatives ? La Moldavie regarde vers l'Est, Trump dénonce le traité trans-pacifique et soutient le Brexit, le Kenya s'apprête à emboiter le pas de la Gambie, du Burundi et de l'Afrique du Sud dans le retrait de la cour pénale internationale (CPI). Les institutions transnationales pro-occidentales ont du plomb dans l'aile. Même si Soros arrivait à renverser Trump ou Poutine il n'est pas sûr que cela suffirait à inverser la tendance.

Bien sûr ce n'est pas parce que l'on dynamite ces bureaucraties ou ces clubs inféodés à l'oligarchie que le monde ira mieux. La manie des murs des populistes au pouvoir à Washington et à Budapest n'annonce pas forcément des lendemains meilleurs pour l'humanité, bien au contraire. Mais on ne sait plus à quelle info se fier pour l'évaluation des bienfaits des politiques publiques. Un institut privé cette semaine publie un palmarès de la corruption et prétend que les régimes populistes nationalistes sont plus atteints par ce fléau que les pays sous contrôle des organismes internationaux. Elle explique qu'en Afrique le pays le plus vertueux est le Botswana... Comme par hasard c'est "l'élève" le plus pro-occidental du continent avec le Sénégal (notamment sur la question de la coopération internationale). Pour savoir si le Botswana est vraiment très intègre et si les régimes "populistes" ne le sont pas, il faudrait peut-être savoir si Soros (ou un de ses semblables) a financé ce palmarès. Mais même si le palmarès est acheté (donc corrompu) est-il faux pour autant ? De même un régime réputé corrompu comme celui de la Biélorussie (dont les syndicats étaient en visite à Cuba cette semaine) est-il nécessairement injuste alors qu'il maintient, par exemple, des niveaux de loyer très bas pour les pauvres ?

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