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Le blog de Frédéric Delorca

Articles avec #abkhazie tag

Le sang de Prométhée et la plante magique de Médée

4 Septembre 2020 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Abkhazie, #Antiquité - Auteurs et personnalités, #Cinéma, #Divers histoire

Divertissons nous un peu des tristes nouvelles du moment. J'ai appris ceci en travaillant sur les mémoires d'un ancien combattant abkhaze pendant le confinement : non seulement le Caucase était connu pour être la patrie du titan Prométhée, mais il existe en Abkhazie une grotte de Prométhée dans laquelle se passent des phénomènes "spirituels" étranges. Or je regardais tantôt ce film de 1963 qui fit les délices de mes 11 ou de mes 12 ans, "Jason et les Argonautes" - film au demeurant très chrétien car, quoiqu'il mettre en scène très délicatement les jeux des Olympiens, il annonce aussi leur fin prochaine...

J'ai été étonné de voir que ce film à un certain moment évoque subtilement le lien de la Colchide (dont une partie est l'Abkhazie actuelle, ce dont, comme je l'avais évoqué dans mon livre il y a dix ans, même les observateurs russes présents avec moi il y a 10 ans avaient conscience) avec le Titan supplicié. C'est lorsque la sorcière-prêtresse Médée donne au héros Jason un baume magique issu du sang de Prométhée.

Quand on regarde d'où vient cette histoire de baume, on trouve Apollonios de Rhodes, le poète alexandrin exilé par Ptolémée II, qui, à 18 ans (encore un surdoué précoce, un peu comme Lucain sous Néron), composa les Argonautiques. Apollonios y décrit en détail ce remède et explique même comment la magicienne le recueillit "par ses enchantements" du suc d'une fleur née des gouttes du sang de Prométhée dans une coquille, "au bord de la Mer Caspienne". Il précise que pour ce faire elle s'est lavée sept fois dans des eaux "qui ne tarissent jamais" (comme l'âne d'Apulée s'immerge sept fois à la mode pythagoricienne dans la mer pour être sauvé par Isis) et a appelé sept fois sa nourrice d'enfance.

En 1961, Christian Lacombrade, helléniste de l'université de Toulouse, soulignait que toute cette affaire révélait "l'engouement du public (d'Apollonios de Rhodes) pour la magie", bien plus intense selon lui à l'époque hellénistique qu'à l'époque classique. Il remarquait aussi que, non seulement Apollonios s'inspirait, dans la description de la plante, de l'herbe magique que Circé donne à Ulysse dans l'Odyssée, mais aussi que le détail du rituel suivi par Médée pour la cueillir ressemble à ceux que Théophraste exposait à propos des fabricants de philtres, et que l'Alexandrin recopiait peut-être dans son poème un grimoire occultiste de son époque (voilà qui intéresserait sans doute les divers naturopathes et aromatothérapeutes qui se mobilisent contre le fascisme sanitaire en ce moment).

Dans ses "Coupeuses de racines" (ouvrage dont ne subsistent que quelques fragments) Sophocle décrivait Médée recueillant le suc des plantes (selon Macrobe). Apollonios a donc repris une longue tradition concernant la magicienne. Le tragédien rattachait-il déjà une plante de Médée au sang de Prométhée ? On ne le saura jamais avec certitude, mais dans une autre tragédie, "Les Colchidiennes", il mentionne Prométhée quand Médée conseille Jason devant une épreuve.

Moi qui vous ai souvent parlé des stoïciens avant ma conversion, y compris dans un billet d'août 2010, huit mois après mon voyage en Abkhazie, où j'abordais leur cas juste après celui des Argonautes (voir ici), je ne puis rester insensible au fait que le stoïcien Cléanthe (330-232 av JC) se serait lui aussi intéressé à la "plante prométhéenne" et aurait écrit selon un fragment analysé par l'exégèse allemande qu' "il pousse sur le Caucase,  une plante que l'on appelle prométhéenne. Médée la recueillit et la réduisit en poudre pour s'en servir contre les antipathies de son père". Lacombrade imagine même la possibilité d'une rencontre entre l'athénien Cléanthe et Apollonios à Alexandrie. En tout cas les deux naviguaient dans le sens des théories des grandes correspondances cosmiques qui allaient exalter le néo-platonisme au IIIe siècle de notre ère et qui connaissent un très grand succès de nos jours.

Pourquoi Sophocle et Cléanthe s'intéressèrent-ils tant à Médée et aux Argonautes ? On l'ignore.

Quoi qu'il en soit, pour ma part, je suis moins surpris de retrouver la sorcellerie des plantes et des astres (Médée est aussi la prêtresse qui fait tomber la Lune du ciel) autour des montagnes abkhazes qui en sont saturées (même le récit de mon ancien combattant en parlait) que de dénicher dans un peplum des années 60 une si grande fidélité érudite à un poème alexandrin des années 270 av JC... En tout cas jetez y un coup d'oeil si vous aimez les mythes et les origines de notre culture. Je le poste en lien ci-dessous.

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L'Abkhazie agace toujours les Russes

24 Mars 2020 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Abkhazie

L'élection présidentielle en Abkhazie (que les Abkhazes appellent Apsny, le pays de l'âme), qui s'est tenue dimanche (après quand même une tentative de coup d'Etat en janvier), a été remportée par le chef de l'opposition Aslan Bzhaniya avec 56,5% des voix, face au vice-Premier ministre, ministre de l'économie d'Abkhazie, Adgur Ardzinba, 35,42%, et à  l'ancien chef du ministère des Affaires intérieures de l'Abkhazie Leonid Dzapshba - 2,22%. Le taux de participation a dépassé les 71%. Pas d'effet "coronavirus" donc dans ce pays.

Le site russe Pravda.ru donne la parole au député à la Douma et spécialiste des Etats de l'ex-URSS (CEI) Constantin Zatouline, qui critique le fonctionnement clanique persistant du pays qui selon lui y encourage les logiques de vendetta et les lois du silence, et le fait que les Russes ne peuvent toujours pas y acheter des propriétés (la législation réserve le foncier aux locaux, et toutes les entreprises doivent être à 51 % abkhazes, donc pas de place pour les spéculateurs capitalistes venus de l'étranger !).
Sur les réseaux sociaux comme ici les Russes blâment la paresse des Abkhazes, le fait que tout ce qui a été fait dans ce pays est l'oeuvre des Géorgiens avant 1992. Apparemment les Russes apprécient l'air pur de la région, mais pas trop l'attitude des autochtones à leur égard.

Ca rejoint des propos que j'ai entendus sur place en 2009. Dans tous les commentaires les touristes russes disent que les Abkhazes sont paresseux et des voleurs, qu'ils n'ont rien reconstruit chez eux depuis la guerre, qu'ils ne nettoient même pas leurs maisons, qu'ils gaspillent l'argent que Moscou leur donne et ne font rien pour le tourisme. L'Abkhazie malgré sa très belle nature serait vouée à perdre ses visiteurs au profit de la Crimée, qui est aussi très belle et où les gens auraient un esprit plus positif...

Je crois que le jour où les Russes cesseront de voir l'Abkhazie à travers des jolies filles qui se filment en mode selfie sur les bords de la Mer Noire (et il y a des vidéos sur You Tube en tenue plus légère que celle ci-dessous), ils progresseront dans leur compréhension de l'essence de ce pays.

A comparer avec les déclarations du militant circassien de Kardino-Balkarie e( ex héros de la guerre patriotique abkhaze) İbrahim Yağan à la Voix de la Circassie en février 2012 : "Il existe de nombreux conflits, notamment entre clans, dans la société abkhaze. L'administration russe joue un rôle important dans ce dossier... Les activités des bureaucrates russes en Abkhazie sapent la structure étatique non seulement de l'Abkhazie, mais aussi de la Russie... Malgré le potentiel de l'Abkhazie, il n'est pas possible d'offrir aujourd'hui une vie meilleure que la vie dans les campagnes russes. Parce que ce serait un exemple indésirable pour les dirigeants russes."

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Elections en Abkhazie

5 Septembre 2019 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Abkhazie

Le premier tour des élections présidentielles en Abkhazie s'est tenu le 25 août dernier. J'ai trouvé instructif de voir que parmi les observateurs, il y avait l'ambassadrice du Nicaragua à Moscou et Soukhoumi Alba Azucena Torres (une poétesse), un ancien premier ministre slovaque Jan Charnogursky, président dans son pays d'une association des Amis de la Crimée, un député du parti de droite de la droite allemande AfD Stefan Keuter (d'Essen), l'Autrichien Patrick Poppel de l'Institut Souvorov, et des représentants de la Biélorussie, de la Russie, de la Chine et du Venezuela. La vice-présidente du Venezuela Delcy Rodriguez avait reçu le président abkhaze en janvier dernier.

J'avais fait partie il y a dix ans d'une équipe d'observateurs des élections présidentielles dans ce pays, mais à l'époque il s'agissait de simples citoyens coachés par une association russe. De cette expérience était né mon livre sur l'Abkhazie publié aux éditions du Cygne..

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Le faux-moine abkhaze du père Tikhon

22 Juin 2019 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Abkhazie, #Christianisme

Je lisais tantôt dans "Everyday Saints and Other Stories" du père Tikhon (Chevkounov) qu'on dit être le confesseur de Vladimir Poutine, l'histoire vraie d'un brigand qui s'est fait passer pour un orphelin dont la mère - une religieuse - avait été brûlée vive par des brigands en Abkhazie (voir ici). C'était en 1986, le jeune homme a usurpé une identité authentique après avoir volé des richesses dans un monastère à Omsk (en Sibérie), puis s'est réfugié au Monastère des grottes de Pskov (au Nord Ouest de la Russie). Chevkounov l'a démasqué grâce à une révélation divine qui l'a conduit à faire un tournage à Osmk (pour une vidéo qu'il souhaitait présenter en Géorgie) où les méfaits du faux moines lui ont été rapportés, ce qui lui a permis par recoupement de percer les mensonges de son protégé. 

C'est une histoire édifiante sur le thème du risque permanent de retomber dans le péché, puisque, le faux moine s'étant finalement converti pour de bon, finit quand même ses jours assassiné par la mafia en 2001 pour avoir continué de traiter un peu trop avec elle... Un avertissement en ce qui concerne mes propres mauvais penchants. 

Elle a attiré mon attention parce qu'elle révèle que, dans les années 1970-80, il était possible de se déplacer sans papiers particuliers en Abkhazie soviétique, ce qui était rare à l'époque, et qu'il existait une filière permettant à des moines orthodoxes de s'installer dans les montagnes à l'Est de Soukhoumi. L'orphelin Augustin dont le jeune brigand avait usurpé l'identité avait vu sa mère périr par le feu après avoir été couverte de kérosène par des chasseurs éméchés qu'elle avait accueillis dans une scène digne de Viridiana de Buñuel qui en dit long sur la dureté des moeurs caucasiennes.

J'avais croisé en 2013 un photographe, M. Poli, qui avait été impressionné par le monastère de Nouvel-Athos (Novi Athos). Pour ma part, lors de mon voyage dans ce pays en 2009, je n'avais hélas guère pu m'intéresser à cet aspect des choses.

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Derechef : comme c'est chic !

25 Mars 2019 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Actualité de mes publications, #Abkhazie

Comme c'est chic ! Une phrase du livre de Frédéric Delorca "Abkhazie" est citée par le Wiktionnaire comme illustration de l'emploi du mot "derechef" aux côtés d'Honoré de Balzac, Alexandre Dumas et Paul Nizan...

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Global CST épinglée pour avoir armé les factions du Sud-Soudan

18 Décembre 2018 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous, #Colonialisme-impérialisme, #Abkhazie

Après avoir développé son influence en Amérique latine (Pérou-Colombie) et en Afrique (Guinée, Togo) au début des années 2010, le vendeur de mercenaires israélien, ancien général, Israel Ziv fait maintenant l'objet de sanctions du département du Trésor américain (confiscation d'avoirs et interdiction de transaction) pour avoir vendu illégalement des armes au Sud Soudan, tant au gouvernement qu'à l'opposition, pendant la guerre civile de 2013-2017 (qui a fait 400 000 morts) pour un montant de 150 millions de dollars sous couvert de faire de l'agribusiness.

Mawien Makol, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a qualifié ces nouvelles sanctions d'"injustifiées", ajoutant qu'elles avaient en réalité pour but de faire échouer le récent accord de paix signé au Soudan du Sud. Ziv clame son innocence. Mais ce n'est pas la première fois que ses activités troubles sont épinglées. Ainsi l'activiste israélien Eitay Mack  avait déjà dénoncé en 2017 les ventes d'armes d'Israel Ziv via sa société Global CST à la Birmanie où elles ont servi à persécuter les Rohingyas, les Shans et les Kachins. D'une manière générale si vous faites une recherche en tapant "Eitay Mack" sur Google vous aurez une vision générale de l'aide militaire israélienne à différents dictateurs du Tiers-monde.

Global CST avait aussi préalablement encadré les Géorgiens durant l'attaque contre l'Ossétie du Sud en 2008, puis aidé trois ans plus tard l'Abkhazie sécessionniste selon un article d'Haaretz du 5 mai 2011 et selon l'agence abkhaze Apsnipress, qui affirmait que sept membres de cette société, dont Israel Ziv et le major général Meir Klifi l'ancien secrétaire militaire de Netanyahou ont rencontré le premier ministre Sergueï Chamba à Soukhoumi en avril 2011. Ce n'était pas la première fois que cette société était accusée de double jeu, puisqu'en 2008 un interprète de cette société qui travaillait avec le gouvernement colombien, Shai Killman, avait vendu des secrets militaires à la guérilla des FARC.

La firme du général de réserve Israel Ziv n'est pas coupée de l'appareil militaire israélien. Outre Meir Klifi, elle compte aussi parmi ses dirigeants Ephraim Sneh , ancien vice-ministre travailliste de la défense. Il est étrange que, compte tenu de ses liens avec Netanyahou, l'administration Trump ait pris des mesures aussi radicales contre elle aujourd'hui.

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Les réfugiés syriens en Abkhazie

4 Juillet 2018 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Abkhazie, #Revue de presse

Lors de son voyage en Abkhazie au printemps dernier, Loïc Ramirez, journaliste au Grand Soir, a rencontré Dana Barsbai, une circassienne née en Syrie sur le plateau du Golan, serveuse au restaurant le Barista dont les touristes russes font l'éloge sur le Net, ainsi que Thaer Hagibek, scénographe pour la télévision publique, et son copain Omar.  Il en a fait un article publié dans Courrier de la Russie dans lequel il explique que le gouvernement abkhaze a dépensé 500 000 euros pour les réfugiés de Syrie, et raconte comment les réfugiés en 2012-2013 ont été logés gratuitement à l'hôtel Aïtar à 20 minutes du centre-ville de Soukhoumi. Plus de 500 réfugiés ont bénéficié de ce programme qui ferait rêver beaucoup de "migrants" en Occident. Selon Loïc Ramirez cette politique généreuse serait en partie due au souci de l'Abkhazie de renforcer sa démographie face à la Géorgie.

Je crois me souvenir cependant qu'en 2014 ou 2015 l'Abkhazie avait été aussi généreuse dans son aide aux populations du Donbass. Le souvenir de l'internationalisme prolétarien se conjugue avec le sens de l'hospitalité caucasienne dont j'avais bénéficié aussi sur place (j'en parle dans mon livre). Bien sûr c'est une générosité liée à des intérêts spécifiques, mais tout de même cela représente un effort important pour ce pays pauvre où l'emploi fait défaut et qui dépend du soutien de Moscou, car après tout ces réfugiés ne parlent même pas la langue autochtone.

Voilà qui explique en tout cas que Damas ait emboîté le pas du Venezuela et du Nicaragua pour reconnaître la petite république circassienne autoproclamée..

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"Auction of souls", "L'Arménie martyre" (1919)

1 Juin 2018 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Cinéma, #Abkhazie, #1910 à 1935 - Auteurs et personnalités, #Christianisme

Il est une image qu'on trouve parfois sur des profils de militants chrétiens sur des réseaux sociaux, celle ci-dessous.

Elle est en fait extraite d'un film américain "Auction of souls" (ou "Ravished Armenia"), diffusé en France sous le titre "L'Arménie martyre". Une petite recherche sur Gallica nous en dit un peu plus sur ce film.

Par exemple la Revue Comoedia du 7 décembre 1919 :

Jeudi prochain 11 décembre, à la Salle Gaveau, sera projeté au profit des orphelins de l'Arménie un film qui constitue une noble — et douloureuse — propagande.

Mme la duchesse de Rohan patronne l'œuvre et le film sur lequel on nous donne les renseignements suivants:

Ce drame a déjà été donné sous le titre d'Auction of Souls (Ames vendues aux enchères) en Amérique, et à Londres, et a produit partout une profonde impression ; le martyre de l'Arménie y est représenté de la façon la plus émouvante.

Ce film a été établi d'après les témoignages publiés par lord Bryce et M. Henry Morgenthau, et notamment d'après les souvenirs personnels d'une Jeune Arménienne, Aurora Mardiganian, qui, après avoir fait l'infernal voyage des déportations, enlevée par les Turcs et enfermée dans un harem, a réussi à s'échapper et à se rendre en Amérique. Mlle Aurora Mardiganian est d'ailleurs l'héroïne du film. ALADIN.

La même revue un peu plus tôt 30 oct 1919 regrettait que la diffusion du film ait été interdite au moins jeunes mineurs dans l'Ontario. Paris aimait depuis longtemps, dans le domaine du spectacle, se poser en antithèse des Etats-Unis "puritains".

Sans surprise on notera que la Revue royaliste l'Action française 8 décembre 1919 en p. 4 synthétisait toutes les critiques positives de la presse anglaise à propos de ce film :

"Appréciations dans la presse anglaise, sur le film "L'Arménie martyre", qui sera donné jeudi 11 décembre à huit heures et demie du soir à la salle Gaveau

Bioscope - "ce film est le plus remarquable qui ait jamais été édité en Amérique"
Evening Standard - "Toute femme anglaise devrait se faire un devoir d'assister à la représentation d'Auction of Souls".
Evening News - "La production cinématographique la plus étonnante sous tous rapports que j'aie jamais vue."
Kinematograph Weekly - "Il n'a jamais été présenté sur l'écran de ce pays un film plus puissant,plus convaincant et plus poignant. Cette production est d'une technique et d'une habileté insurpassables"
B. Blais Esq. - "Je ne puis qu'exprimer un désir : c'est que ce film soit vu par chaque homme et chaque femme du monde civilisé"

Je ne sais pas trop si dans les cours d'histoire du cinéma aujourd'hui on parle beaucoup de ce film. La même année sortait à Paris "J'accuse" d'Abel Gance célèbre pour sa scène sur les fantômes des morts de la guerre qui hantent la conscience d'un poilu,et "Une idylle aux champs" de Charlie Chaplin.

Il avait été tourné en Californie, nous apprend la fiche Wikipedia.

Je me suis un peu intéressé à cette duchesse de Rohan qui patronnait la diffusion de l' "Arménie martyre" en France. C'était une poétesse, âgée à ce moment là de 66 ans. Elle venait de recevoir peu la légion d'honneur du maréchal Foch, en mai 1919, au cours d'une cérémonie dans son hôtel particulier près des Invalides, pour y avoir soigné les blessés de guerre (elle l'avait mis à la disposition de la Croix Rouge), et, le même mois, la croix de la reconnaissance italienne "en remerciement des mois passés dans les ambulances du front en Vénétie". Son mari, le duc était député de Ploërmel en Bretagne. Elle était fille d'un marquis du Périgord. Un de ses fils périt dans la Grande guerre à hardecourt.

Comment la duchesse a-t-elle été sensibilisée à la cause arménienne ?

La duchesse connaissait l'Europe de l'Est. En octobre 1909 (source la revue "Les modes") elle avait effectué un voyage dans le Caucase, en Crimée et en Roumanie, en compagnie de une de ses cinq enfants la princesse Marie qui épousa un descendant de Murat l'acolyte de Napoléon (la petite fille de cette dernière fut l'épouse du ministre de Chirac Albin Chalandon, le monde est petit). La presse de l'époque nous apprend qu'elle y avait rendu visite à la reine de Mingrélie SA la princesse Salomé Murat (à propos de la Mingrélie je vous renvoie à mon livre sur l'Abkhazie). Elle avait écrit une partie de son voyage dans son chalet Herminissia dans la montagne de Kuibia. Le récit fut publié en 1910 chez Calmann Lévy sous le titre "Les dévoilées du Caucase". Le journal "Gil Blas" du 17 juillet 1910 ironique le décrit comme "un voyage en famille minutieusement papoté. L'auteur eût oublié quelque part son ombrelle qu'elle n'aurait pas négligé de nous en faire part". La Croix du 22 juillet 1910, plus déférente le qualifiera de "si aimable, si varié de ton, si spirituel sans prétention et si noble de pensée". On peut supposer que ses attaches mingrèles, auprès de sa belle famille les Murat avait sensibilisé la duchesse à la cause arménienne. Mais on n'en sait pas plus au vu des archives disponibles sur le Net sur ce qu'elle en pensa précisément ni le cheminement précis qui permit au public parisien de découvrir "L'Arménie martyre" à la salle Gaveau.

Le film est in extenso ci dessous.

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