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Le blog de Frédéric Delorca

"post-" female

4 Février 2010 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Les rapports hommes-femmes

Dans ma petite ville de la banlieue nord ce matin, je jouais les commissaires politiques, chargé d'évaluer le programme du service culturel pour la Journée de la femme (cette vieille invention bolchévique à laquelle la France n'a adhéré que tardivement, bien arès l'ONU). Comme on pouvait s'y attendre ce programme comportait beaucoup de films et livres subventionnés par la culture dominante sur le thème "les africaines voilées, excisées, violées, mariées de force et bafouées... mais heureusement libérées par l'homme blanc !" ("le schéma colonial classique, c'est un homme blanc qui enlève des femmes de couleur des griffes d'hommes de couleur" comme disent les sympathisants des post-colonial studies) .
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J'ai voulu tirer le programme vers quelques auteurs classiques anarchistes et marxistes, d'Emma Goldman (chère au défunt Zinn) à Alexandra Kollontai, mais ce sont des sources souvent épuisées sur Amazon. Et puis vers la queer theory. Judith Butler (qui a eu les honneurs d'Actuel Marx il y a peu, signe que cette revue est à l'affût des modes), Marie-Hélène Bourcier, Beatriz Preciado, toutes ces philosophies "post" (post féministes, post gender), très chic, à la fois subversives et derridiennes, comme les postcolonial studies, qui occupent des départements universitaires entiers aux USA - à mon avis ce sont des impasses théoriques mais je pense que les administrés de notre ville ont aussi le droit de savoir que cela existe,car ce sera peut-être à l'arriere plan de leur paysage culturel vulgarisé dans 10 ans. A vrai dire leurs expérimentations ne sont pas complètement dénuées d'intérêt. J'éprouve notamment une certaine sympathie pour Beatriz Preciado qui se gave de testostérone pour réaliser du "méta-générique" en acte, sur sa propre chair, là où Butler se borne à faire de la critique des structures mentales. En voilà au moins une qui ne se paie pas de mots.

 

Sur Facebook, on trouve de tout. En ce moment, dans l'univers lesbien, je croise des femmes qui sont aux antipodes de Preciado. Pas du tout des filles qui veulent dépasser les genres. Des filles bi- et fières de l'être, qui vivent en couple avec d'autres femmes, mais qui mobilisent tous les clichés (réputés machistes) afférents à la féminité de notre époque, notamment une esthétique porno chic (gros seins, lèvres pulpeuses, taille fine) pour draguer aussi bien les hommes que les femmes. Elles vivent surtout aux Etats-Unis. Pour en faire une sociologie à la hache on a le sentiment d'un capital scolaire faible (aucun livre n'est cité), et d'une localisation plus californienne que côte Est. Elles ont des profils de poupée Barbie, leur soin à cultiver une image de Vénus parfaites est extrêmement impressionnant et doit les occuper à temps plein. Qui sont-elles ? Sont-elles le cauchemar des queer studies ? leurs filles illégitimes, les batardes de la révolution conceptuelle, la honte de l'intelligentsia philosophique universitaire ?  Allez savoir...

Bon je m'éloigne peut-être un peu de la Journée de la femme avec tout ça... Mais peut-être pas tant que cela finalement.

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Contre la désindustrialisation de la France

3 Février 2010 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La gauche

Est-on capable de mener une grande opération de solidarité avec ces salariés pour qu'ils l'emportent face à la logique du Cac40 ? Peut-on lancer de grands mouvements nationaux autour de mouvements sociaux comme celui-ci ou les gens vont-ils se contenter (au mieux) de créer un groupe de soutien sur Facebook ?engrenage.jpg

FD

"Passé cette date, nous prendrons possession des lieux", peut-on lire dans le communiqué.


Total qui emploie sur le site 620 personnes dont 260 équivalents temps plein employés par des sous-traitants, n'a pas souhaité faire de commentaire.


Lundi, le groupe pétrolier a reporté à fin juin la décision définitive sur l'avenir de la raffinerie lors d'un Comité central d'entreprise extraordinaire.


L'annulation du grand arrêt quinquennal, obligatoire pour la bonne exploitation de l'usine, et la création d'un futur centre d'assistance technique et d'un centre de formation avaient également été annoncées lundi par Total.


Les syndicats ont vu dans ces annonces la fin de l'activité raffinage de Dunkerque.

Total doit publier ses résultats le 11 février. Les analystes anticipent en moyenne un bénéfice net de huit milliards d'euros au titre de 2009.


Une réunion intersyndicale nationale se réunira vendredi pour décider d'un éventuel appel à la grève dans les six raffineries exploitées en France par Total.


La CGT s'est déjà prononcée en faveur d'un arrêt de travail de 48 heures dans le courant de la semaine du 15 février.

L'an dernier, Total avait déjà provoqué la colère de ses salariés en raison du lancement d'un plan de restructuration de son raffinage, avec 555 suppressions de postes en France, quelques jours après avoir annoncé des bénéfices record de 14 milliards d'euros au titre de 2008.


Les raffineries européennes sont actuellement en difficulté en raison de la chute des marges de raffinage et du manque de débouchés pour l'essence."

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Mise au point de l'association "Initiatives citoyenneté défense"

2 Février 2010 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

Le bureau de l'association Initiatives citoyenneté défense m'a adressé la remarque suivante à propos de l'article "Une option historique qui a échoué : le patriotisme de gauche":

"Notre association a vocation de susciter et favoriser l'implication citoyenne (et notamment des progressistes...) dans les questions de défense; comme l'indique l'objet de ses statuts. Largement ouverte à toutes les bonnes volontés républicaines, il se peut qu'elle comporte parmi nos adhérents des citoyens se reconnaissant dans ce courant de pensée du "patriotisme de gauche". Au risque de faire un peu simple, disons qu'il peut donc y avoir des "miettes de cette option là" - ce qui est tout à fait légitime - parmi nos adhérents, mais l'association ne saurait être en tant que telle "une miette de cette option là".

Peut-être la phrase de Jaurès en exergue sur notre site: "l'organisation de la défense nationale et l'organisation de la paix internationale sont solidaires" peut-elle prêter à confusion (mais elle est à considérer dans son contexte historique), et nous en prenons bonne note dans le cadre de la refonte en cours de notre site."

Les lecteurs de ce blog sont donc priés de bien vouloir corriger ma remarque un peu rapide du précédent billet en fonction de cette utile mise au point.
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Une option historique qui a échoué : le patriotisme de gauche

2 Février 2010 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La gauche

valmy_.jpgIl est une option historique qui est aujourd'hui complètement disqualifiée  : le patriotisme de gauche. Elle pouvait paraître raisonnable. L'idée était de constituer une communauté nationale solidaire, fondée sur la justice sociale, qui vit en bonne harmonie avec ses voisins sans trop se mélanger avec eux, loin de la tyrannie capitaliste - qui incite à l'exploitation et à la guerre - mais aussi à l'écart des grands projets révolutionnaires internationalistes.

La IIIème République française a failli incarner cette option. Mais le capitalisme l'a poussée sur la voie du colonialisme sous Ferry, et de la guerre dans les années 1910 (à une époque où elle était déjà plus à droite que du temps de Ferry).

La seconde république espagnole aussi au début des années 1930 baignait dans cette ambiance patriote "de gauche" comme je le découvre quand je lis les mémoire de mon grand père. Peut-être aussi la République de Weimar à ses débuts. L'aristotélisme d'Hannah Arendt, surtout dans ses pages contre l'impérialisme, me paraît lui aussi se rattacher à ce courant de pensée.

Je retrouve ce trait aussi chez les communistes français alliés au gaullisme pendant la seconde guerre mondiale - j'y songeais à propos de la résistante communiste que j'ai rencontée, et qui parlait de son foulard avec le papillon tricolore signe de reconnaissance des filles résistantes pendant la guerre. Ces gens étaient des patriotes de gauche, dans le même sens que l'était Clémenceau en 1880 (du temps où il était encore anticolonialiste). Leur façon de raisonner en fonction des emblèmes et des frontières de l'Etat-nation les a largement empêché de comprendre l'élan anticolonialiste des années 1945-46 (sauf quand cet élan était aux ordres de Moscou comme Ho Chi Minh, et encore, ont-ils été vraiment solidaires d'Ho Chi Minh en leur for intérieur ?).

Peut-être ce "patriotisme" là, présent au sein du PCF issu de la résistance, et dans les tendances "jauressiennes" du PS, eût-il encore quelques chances de l'emporter en 1981 avec le projet de "socialisme à la française" incarné par des gens comme Claude Cheysson.

Deux facteurs, tous deux liés à la mondialisation du capital, ont compromis cette option dans les pays riches.

Le premier, c'est le néo-colonialisme : la résistance à la décolonisation (en Algérie), la Françafrique, l'organisation de l'immigration massive en provenance du Tiers-monde sous Pompidou et Giscard, ont largement dynamité l'idéal de relative autharcie qui sous-tend le patriotisme de gauche, en même temps qu'il le ramenait sans cesse à ses péchés de complicité avec le colonialisme depuis la fin du 19ème siècle. Le second facteur, bien sûr, c'est l'européisme, devenu l'alpha et l'oméga des socialistes de tous les pays d'Europe après 1983.

Jean-Pierre Chevènement aura incarné une dernière fois en 2002, après la participation de la France à la guerre de Yougoslavie (1999) et d'Afghanistan (2001) une chance pour ce patriotisme de gauche, abreuvé du souvenir de Valmy, mais ce ne fut qu'un feu de paille.

Aujourd'hui il existe des miettes de cette option là, dans le blog anti-européen La lettre volée, dans l'association Initiatives citoyenneté défense, chez certaines recrues du parti des travailleurs déçues du chevènementisme (je ne sais plus quel est son nouveau nom). En Russie des gens comme Natalia Narotchnitskaïa (citée dans mon précédent billet) incarnent aussi cela. Ce courant partout où il essaie encore de survivre ne me paraît guère solide. Il n'intéresse ni les milieux issus de l'immigration postcoloniale, ni la petite bourgeoisie européenne (qui est pourtant son électorat "naturel") plus intéressée à rêver d'une improbable "Europe sociale" ou d'un monde sans frontière.

Voilà donc une option politique qui semblait viable sur le papier mais qui n'a pas tenu le choc face aux mouvements de fond du capitalisme. Aujourd'hui il faut sans doute imaginer autre chose. Prende acte d'une tendance à la globalisation des imaginaires des Occidentaux (même si cette globalisation est biaisée par le consumérisme et l'impérialisme). Seule une profonde crise systémique (d'ailleurs ouvertement souhaitée par beaucoup) aurait des chances de pousser les gens à se replier sur les symboles nationaux, mais même dans cette hypothèse ces chances me paraissent des plus faibles. Il est devenu bien trop aléatoire de miser sur pareille évolution. Ainsi voyons nous s'éloigner le seul cadre intellectuel possible dans lequel le patriotisme eût pu avoir des effets acceptables.



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