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Le blog de Frédéric Delorca

Bourdieu et la négativité

5 Avril 2010 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Débats chez les "résistants"

On ne débat plus beaucoup de Bourdieu maintenant. Huit ans après sa mort, son héritage est soit marginalisé soit dissout dans des pensées molles "éclectiques".

 

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Un internaute sur mon réseau Facebook a écrit : " "Celui qui ne souscrit pas aux normes de la bienséance est condamné à l'alternative du silence ou du franc-parler scandaleux" (Bourdieu)"

 

Beaucoup de gens écrivent des trucs comme ça pour montrer qu'ils sont cultivés. Ils nous ressortent des paroles d'autorité de grands prophètes (universitaires ou autres), manient le name dropping pour se remonter le moral.

 

Dans cette phrase de Bourdieu je ne puis m'empêcher de reconnaître des travers que j'ai bien connus de son vivant. Il était un peu trop enlisé dans une vision de l'ordre social qui, au nom de l'anti-essentialisme, ne voyait que des "rapports" partout et de la dépendance mutuelle (sa lecture de Norbert Elias le confortait là dedans). Du coup il avait trop tendance à ne voir que des jeux différentiels (les stratégies de "distinction") et des façons de se poser en s'opposant (par le scandale ou le silence). Or on peut aussi s'opposer d'une façon plus constructive . Mais Bourdieu aimait mieux déconstruire que construire, cela faisait partie de son fond nihiliste très répandu dans toute la pensée poststructuraliste.

 
Et cela encourageait une vision désespérée non seulement de l'ordre social, mais aussi des moyens de le transformer. Désespérée, et vaguement hystérique.
 
Je préfère encore cette parole du politicien antisystème qui dans une de ses conférences dit à la suite de Socrate qu'il ne faut s'attacher qu'à ce qui est "vrai, bon et utile", des valeurs simples, trop simples et "essentialistes" ("naïves" eût dit Bourdieu en reprenant la définition husserlienne du "naïf") mais qui sont les seuls véritablement fondements d'une construction politique. Or du vrai, du bon, de l'utile, la société dans ses couches les plus dynamiques, les plus intéressantes, nous en livre chaque jour, sans tomber dans l'alternative nihiliste du "silence ou du scandale". Reste à trouver l'art de catalyser cette positivité là.

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