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Le blog de Frédéric Delorca

Qui cherche trouve

16 Novembre 2009 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Les jeunes gens s'effraient de cette chose très naturelle qu'est la copulation sexuelle, le mélange des organes au delà de la limite individuelle. Ils se demandent pourquoi, comment, avec qui, quand. Les vieux sont terrifiés par cette autre banalité biologique qu'est la mort : ce grand silence des organes, ce moment où ça se refroidit, où ça se liquéfie. Rien de plus anodin que ce second dépucelage qui peut venir de n'importe où - un pot de fleur qui vous fracasse le crâne, une petite rupture de vaisseau sangin. On appelle ça "trouver la mort" comme si la mort se trouvait comme un porte monnaie. Trouve-t-on la mort aux objets trouvés ?

Chaque semaine je vois mon fils grandir. Il aura deux ans en avril. Sa mère et moi éduquons son cerveau à coordonner ses organes, pour que le tout soit un organisme autonome dans quelques années, et nous faisons grandir lesdits organes alors qu'il dépériraient sans l'assistance parentale. Evidemment je ne puis m'empêcher de songer que nous faisons cela pour que cela un jour périclite dans 80 ou 90 ans, et qu'entretemps ce garçon aura vécu dans l'angoisse plus ou moins bien refoulée de cette fin inévitable. J'y ai songé dès la fécondation - c'est un luxe donné aux gens de notre époque, avant on ne choisissait même pas "to procreate or not to procreate". Il y a comme une bravade absurde à vouloir avoir un enfant. Une bravade contre laquelle Onfray, Cochez et tant d'autres nihilistes se sont élevés. Et pourtant la capitulation nihiliste ne convainc toujours pas grand monde, de quelque élégance qu'elle se pare. Précisément tout ce qu'il y a d'absurde dans le pari de la vie est séduisant. C'est peut-être la dernière grande folie que l'on puisse s'offrir.

En lisant Internet j'apprends qu'un acteur célèbre a failli trouver le porte-monnaie de la mort sur un quai à Saint Tropez. Un "malaise" à 84 ans. Le patriarche thodoxe de Serbie, lui, a trouvé son porte-monnaie en dormant ce matin. Trois jours de deuil à Belgrade. Du temps où j'allais à Belgrade je ne pensais jamais à la mort. Elle était purement abstraite. Même si je songeais au décès des victimes "collatérales" de nos bombes, la liquéfaction des orgaes ne m'effleuraient pas. Je ne voulais que vivre, découvrir, expérimenter, comprendre, témoigner, me prouver à moi-même des tas de choses, et accomplir des tâches utiles à mon époque. C'est depuis que je ne vais plus au devant des populations en guerre que je pense beaucoup au trépas. Encore une réalité bien normale et somme toute banale. J'ai lu quelque part que presque aucun des atomes qui composaient mon corps il y a 10 ans (dans l'avion pour Belgrade) n'existe encore de nos jours (et a fortiori pour ceux de mon corps d'enfant). Tout est mort (sauf les atomes des os). Un autre individu s'est substitué à celui de 1999, même si les cellules du cerveau (elles aussi renouvelées) par le processus de la mémoire, ont gardé le sentiment d'une continuité du "moi". Le philosophe Eric T. Olson développe toute une analytique un chouia scolastique sur la conservation de l'identité dans le temps. Etrange mécanisme qui touche aussi les animaux. Bizarrerie de tout ce foisonnement biologique à la surface de notre petite sphère bleue.

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