Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Frédéric Delorca

Articles récents

Les journaux intimes préformatés

14 Août 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Ecrire pour qui pour quoi

Tout en écoutant les lourdeurs des commentaires de Depardon sur son petit film "Empty quarter" (mis en DVD par Arte en 2005), je chargeais hier les scans de mon journal intime de 1985 sur des espaces privés gratuits mis à disposition par certains sites. Je découvrais au passage d'autres sites qui proposaient aux gens d'écrire des journaux intimes en ligne, et j'étais affligé par l'absence totale de liberté laissée aux auteurs : on les enferme dans des modèles pré-définis dont on leur remplit la vue d'entrée de jeu, on les incite à écrire des pages courtes et, sous l'empire de ces injonctions, les pauvres sont enclins à rédiger des billets brefs et au fond très impersonnels comme sur des blogs. Là comme ailleurs le système Internet et notre époque révèlent leur profond mépris de l'individualité, leur volonté imperturbable de l'encadrer et l'assêcher jusqu'à ce que mort universelle s'ensuive.

 

P1010968Décidément sur ce sujet je resterai de la vieille école. 28 ans après les débuts de mon journal je continue de l'écrire (et souvent de le gribouiller) sur des pages de cahiers d'écolier, sans limite d'espace, sans aucun modèle à singer, libre de faire courir ma plume comme si je dessinais  -et il faut absolument que l'écriture intime soit un exercice de dessin, pleine et sereine par moments, illisible et tendue à d'autres. En faire un travail de dactylographie sur un écran lumineux c'est la priver de sens.

 

Lorsque les "scans" c'est à dire les photos des 10 premières années de ce journal bizarroïde seront en ligne comme des albums, je me demande bien à qui je les confierai. Mais nous en sommes encore loin. C'est un travail de bénédictin.

Lire la suite

Les "postures bourgeoises et atlantistes version guerre froide" de M. Hollande

13 Août 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La droite

p1000121.jpgC'est l'ancien Premier ministre M. Fillon qui le dit aujourd'hui dans  Le Parisien à propos de la politique de M. Hollande en Syrie :

 

"«Que notre président normal comprenne qu'il n'y a rien de normal dans le monde dont il est désormais l'un des principaux responsables. Qu'il prenne des risques, qu'il abandonne ses postures bourgeoises et atlantistes version guerre froide», insiste-t-il. Au passage, l'ancien Premier ministre se démarque de Nicolas Sarkozy, qui a récemment fait un rapprochement entre la situation en Syrie et celle en Libye avant la chute de Kadhafi, semblant privilégier une intervention étrangère. «J'ai toujours pensé qu'une telle intervention militaire serait une très grave erreur stratégique», écrit  François Fillon qui craint «un nouvel Irak»."

 

Fillon chasserait-il sur les terres de Villepin désormais ?

Lire la suite

Le réel de la fiction

12 Août 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La Révolution des Montagnes

Tous les gens qui conjecturent autour de la Syrie en ce moment et s'envoient à la tête sur Facebook des cadavres de femmes décapités par des bombes en se demandant si l'obus était gouvernemental ou islamiste m'emm** presque autant que les cyniques ou les lâches à la Hollande qui nourrissent la guerre civile avec une parfaite bonne conscience. Que tous ces gens poursuivent leurs ratiocinations brutales loin des écrans de mes ordinateurs.

 

Hé, en ce moment je me sens plutôt l'âme du romancier solitaire ; voyez ces lignes de Flaubert écrites à Louis Colet l'avant-veille de noël 1853 : "C'est une délicieuse chose que d'écrire ! que de ne plus être soi, mais de circuler dans toute la création dont on parle. Aujourd'hui par exemple, homme ou femme tout ensemble, amant et maîtresse à la fois, je me suis promené à cheval dans une forêt par un après-midi d'automne, sous  sous les feuilles jaunes, et j'étais les chevaux, les feuilles, le vent, les paroles qu'ils se disaient, et le soleil rouge" etc. Il venait d'écrire le récit d'une promenade à cheval de madame Bovary et de son amant.

 

Tout cela est très vrai. Je n'ai écrit qu'un roman dans ma vie, j'ai retenu le nom du personnage principal (parce que j'ai eu du mal à le trouver), et oublié, cinq ans après, celui de son héroïne, car je le voulais quelconque. Mais je me souviens de ces personnages comme s'ils avaient existé, et je me souviens des scènes que je leur ai fait vivre, spécialement des plus dures à écrires, de celles qui me touchaient le plus, de l'évolution complexe de leur relation, de leur quête. J'ai été en eux. En cela ils furent autre chose que mes enfants. J'ai été eux dans le sens que dit Flaubert, et bien sûr j'ai été les situations qu'ils vivaient. Tout cela m'a marqué autant voire plus que ce que j'ai vraiment vécu dans la vie "ordinaire". On ne devrait pas essayer d'oublier ce qu'on a écrit, ne serait-ce que parce que dans le morne vécu que nos sociétés ultranormées, ultraformatées nous réservent, seule notre création présente encore quelque chose de vraiment imprévisible et de vraiment humain.

 

Peut-être au 1er janvier enverrai-je mes voeux à mes personnages ? Il m'arrive d'avoir envie d'ajouter une suite à ce roman, juste pour éprouver la joie de retrouver les personnages qui le peuplaient. Mais cela sonnerait faux. Quel dommage que je n'aie pas la force d'inventer de nouveaux personnages, une nouvelle histoire ! Parce que je suis moins oppressé, moins "dans la seringue" (comme dit un mien ami) du non-sens que je ne l'étais en 2006-2007. Je ne sais. C'est toujours une chance que d'avoir encore devant soi un roman à écrire.

Lire la suite

"L'art pour l'art" de Flaubert

9 Août 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #XIXe siècle - Auteurs et personnalités

flaubert.jpgFlaubert en 1870, dans sa religion de l'art pour l'art (si hostile aux autre cultes : socialisme, catholicisme) angoissé à l'idée que le support de cette religion - la France, Paris - puisse être balayé par l'invasion prussienne (la hantise que la France devienne un pays bigot affaibli comme l'Espagne, ou "un pays plat et industriel comme la Belgique"). Cette crainte lui arrache même une petite sympathie nostalgique pour la République (dans une lettre Sand, notez qu'il dialogue mieux quand mêm avec la gauche - Sand - qu'avec la droite), quoiqu'il raille la mode du retour à 1792 dont il est témoin (comme de Gaulle dans ses mémoires raillera la "mode révolutionnaire" de 1945-46, une mode qui a bien failli s'emparer à nouveau des médias à un moment de la campagne de Mélenchon cette année).

 

Je me suis décidé à acheter sa correspondance que jusque là je m'étais contenté de parcourir dans les bibiothèques. En fait je cherchais les souvenirs de G. Sand qu'Amazon tarde à me livrer, mais ils sont introuvable dans la plus grande librairie d'une ville moyenne française.

 

Une pensée pour les tentatives d'utiisation de Flaubert par Sartre et Bourdieu, celle de Bourdieu notamment trop prise dans une grille de lecture assez "inutile et incertaine" comme aurait dit l'autre...

 

C'était quoi alors cet "art pour l'art" (auquel Nietzsche aussi adhéra à sa manière) ? Un sorte d'hypersensibilité à toutes les formes d'injustice (Flaubert a toujours le mot "Justice" à la bouche), de facilité, de lâcheté, un refus de la démagogie (notamment d'évolution du monde à l'"américaine", déjà il s'en préoccupait, peut-être sous l'influence de Tocqueville), le choix de Voltaire contre Rousseau, de l'élitisme, dans un esprit de complet désintéressement (Flaubert ne vivait pas de sa plume, et sa vision de l'art est incompatible avec l'utilisation cuistre et superficielle qu'en font les bourgeois. Le tout dans une recherche intransigeante d'une totale exactitude formelle.

 

Flaubert pensait que la victoire prussienne annonçait le triomphe du positivisme, et donc un déclin inévitable de la civilisation française (quelque part Flaubert qualifie sous Napoléon III la France de première nation du monde, ce à quoi sans doute beaucoup de Français souscrivaient à l'époque). A-t-il eu raison ? Les année 1860 furent-elles le sommet de ce sommet de ce que pouvait réaliser l'art littéraire français ?

 

Je n'ai sans doute pas la sensibiité assez affutée pour en juger. Un lecteur anonyme a bien voulu en passant par ce blog m'y traiter courageusement de "bourrin" et il y a sans doute du vrai là-dedans.

 

Dans un précédent billet j'ai dit que le positivisme n'avait été que le poil à gratter de la période suivante. Il n'a pas vaincu, tout comme les Prussiens n'ont pas fait de Paris un "nouveau Varsovie". Il y a encore eu le symbolisme, Mallarmé etc. Mais la mécanique de la modernité industrielle était là, avec son travail incessant,  sa manière bien particulière de rythmer le temps et d'asservir par ce biais les sensibilités, c'est indéniable.

 

Aujourd'hui il n'y a plus "d'art pour l'art" bien sûr. Il n'y a plus chez les critiques que la recherche des "motivations socio-psychologiques", la volonté de se rincer l'oeil ou de compatir dans une débauche de bons sentiments, la recherche de messages politiques, et chez les auteurs l'abdication de tout élitisme, la passivité devant la bêtise et l'injustice, la volonté de plaire à tout prix, de se faire un nom, de ne pas "investir pour rien" etc. Bref rien qui relève d'aucune justesse de regard ni de ton, encore moins de l'élégance stylistique.

 

En tout cas cet "art pour l'art" avait quelque chose d'éthiquement irréprochable (c'était d'ailleurs son ambition, presque platonicienne) et constitue toujours une sorte de point abstrait de référence pour accéder à une lucidité supérieure, une sorte de point d'Archimède sur lequel on gagne à asseoir son jugement. Par exemple si l'on veut se faire une opinion sur la Commune de Paris. Quand Flaubert y voit un grand retour au Moyen-Age (et dans la bouche d'un Spinoziste post-révolutionnaire comme lui, ce n'était pas un compliment), la remarque interpelle, et donne à réfléchir...

Lire la suite

Un mot de Flaubert

9 Août 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #XIXe siècle - Auteurs et personnalités

A propos des succès de Thiers :

 

"Les prostituées, comme la France, ont toujours un faible pour les vieux farceurs"

 

(Lettre à George Sand, 18 décembre 1867)

Lire la suite

Agapé

8 Août 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Ma correspondante turque qui planche sur Comte-Sponvile m'écrit ce soir que des traducteurs chinois lui écrivent parce qu'ils ne savent pas traduire chez ce philosophe le mot de "amour charité/agapé" !

 

Blaise_Pascal.jpg

Quel cauchemar ! quelle barbarie ! Tout le monde a l'air de se résigner "ben oui, mot trop chrétien, trop classique, intraduisible". En Turquie, en Chine, on capitule. Un mot métaphysique, ça n'a plus d'intérêt à notre époque. Je hurle, j'exhorte : allez voir dans vos langues comment furent traduits Pascal et Denis de Rougemont ! On ne peut pas laisser ce mot orphelin, on ne peut l'égorger au coin d'une rue ! non ! Le monde meurt s'il perd ce mot !

Lire la suite

George Sand vue par Debû-Bridel

8 Août 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #XIXe siècle - Auteurs et personnalités

Sand.PNGJ'écoutais tantôt à la radio la conférence de 1954 "George Sand, homme politique", par le sénateur "gaulliste de gauche" (mais ex maurrassien) et "grand résistant" Jacques Debû-Bridel. Dans cette conférence Debû-Bridel célèbre la radicalité populiste de George Sand en 1848 mais blâme son choix de soutenir Jules Favre (avec qui elle avait travaillé 22 ans plus tôt au cabinet de Ledru Rollin) contre Gambetta en 1870. Il est vrai qu'il y a quelque chose de pétainiste dans ce négociateur de la paix avec Bismarck. Lorsqu'il remarque que les ouvriers que Sand avait appelé à descendre dans la rue le 16 avril 1848 furent accueillis par la Garde nationale au cri de "A bas les communistes" le sénateur ajoute qu'à l'époque on parlait déjà des communistes mais que les choses étaient plus simples car alors ils n'étaient pas liés à une "puissance étrangère" (sic). J'ai trouvé cela amusant, et somme toute assez vrai. Pour lui ce 16 avril eût pu être un succès pour les Républicains et les socialistes mais il remarque à juste titre que les journées qui réussissent sont célébrées par la postérité comme des "révolutions" et les journées qui échouent condamnées comme des "émeutes".

 

Je veux bien revisiter un peu le XIXe siècle avec Mme Sand et viens de commander "Histoire de ma vie". Je m'étais enthousiasmé pour la Confession d'un enfant du siècle  de Musset et Choses Vues d'Hugo à 16 ans, puis j'ai un peu négligé cet univers là, en grande partie sous l'influence de mon époque. Il convient de revenir à ce siècle un peu bizarre à nos yeux de révoltes ouvrières, d'utopies saint-simoniennes, et de résistance au cléricalisme omniprésent. Pourquoi ne pas le faire avec Mme Sand ? Ne lui prête-t-on pas toutes les qualités : bonne amante sensuelle (mais fidèle avec ça, même dans sa relation chaste - par la force des choses - avec Chopin), bonne mère, bonne aristocrate par son père (descendante du maréchal de Saxe), et par sa mère bonne fille du peuple qui aime à faire des confitures ? Je trouve un peu sot son amour candide et rousseauiste des paysans, mais c'est une écrivain de génie, alors il doit quand même être bien agréable de passer quelques heures en sa compagnie. Je vous dirai.

 

A part ça, ce soir Michel Onfray jugeait que la maître de Camus, Jean Grenier était un personnage "pas très sympathique" parce qu'il n'aimait pas sortir le soir (si si, réécoutez sa conférence à l'Université populaire de Caen, c'est exactement ce qu'il dit). De même qu'il n'aimait pas Kant parce que celui-ci n'avait pas eu de vie sexuelle. L'ennui c'est que ce genre de caractéristique concerne les trois quarts de la haute intelligentsia, qui, par définition, pour aimer la lecture et l'écriture, doit avoir des penchants monastiques... J'en conclus qu'Onfray est plus proche des noceurs paillards, mais le niveau de sa pensée est en conséquence...

Lire la suite

Alep, les docus TV ouverts aux dissidents, l'Espagne, la fille qui connaît la Défense

7 Août 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Il est profondément douloureux de voir un pays de culture ancienne comme la Syrie tomber dans le chaos. Une guerre de tanks et d'artillerie dans une grande ville comme Alep (même si elle a été vidée de ses habitants) est une catastrophe qui va détruire pour longtemps tout ce qui faisait sa force et sa beauté. A cela s'ajoute l'horreur médiatique, ce mensonge institutionnalisé qui veut faire croire qu'il y a les bons et les mauvais dans ce combat, et que tout le mal incombé au régime dictatorial. En vérité c'est une très sale guerre, comme toutes les guerres civiles, avec des exactions énormes des deux côtés,  et une guerre dans laquelle nous devrions être neutres, ce que nous ne sommes pas. Et dire que M. Sarkozy (je suis bien gentil de l'appeler "Monsieur") continue de verser de l'huile sur les flammes dans ce pays, même tout dépouillé de la fonction présidentielle qu'il se trouve. Un vrai nouveau José Maria Aznar. Pauvre homme !

 

Je n'épiloguerai pas, cela ne sert à rien. Une fois de plus l'opinion publique occidentale est piégée et désarmée. Et une fois de plus les rares petits collectifs qui tentent de faire de l'info alternative, comme celui que j'ai tenté d'aider en juillet se discréditent tout seuls : citoyens dormez sur vos deux oreilles et consommez.

 

0013

Cet après midi il y avait un reportage sur la fin de l'URSS sur la chaîne parlementaire. Tranquillement parmi les intervenants ont donnait la parole à Chomsky qui disait qu'Eltsine était "un dictateur "alors que Gorbatchev eût pu amener la démocratie sociale à l'URSS, et que l'Ouest avait préféré à partir de 1991 soutenir la dictature. Ce soir Arte montrait un documentaire très favorable à la politique de nationalisation des multinationales par Castro après sa prise du pouvoir à Cuba. Est-ce parce qu'il s'agit dans les deux cas d'histoire "ancienne" qu'on donne la parole à la gauche sur ces sujets ? Je l'ignore.

 

De toute façon la gauche n'inquiète personne en ce moment. L'Espagne est en train de couler, et Izquierda unida n'est créditée que de 8,5 % selon les derniers sondages. La zone euro va peut-être se défaire sous le poids de mécanismes économiques un peu obscurs, et la gauche n'y aura été pour rien. Il faudrait que je vous parle de mon dernier déjeuner à la Défense avec cette femme dont je vous ai parlé en 2008. Elle travaille dans ces tours, voudrait publier un livre sur les gens (ses collègues) qui là-haut, décident des dégraissages d'effectifs en Inde ou à Shanghaï. Mais elle ne le fera pas. Parce que mon éditeur ne l'accueille pas à bras ouverts. Les égos, toujours les égos. Quand on ne leur offre pas le tapis rouge les gens se replient sur leur quant à soi. Dommage. Elle était probablement une des meilleures connaisseuses du capitalisme actuel, tel qu'il fonctionne tous les matins au dessus de nos têtes, avec toute sa bêtise et sa médiocrité, pas celui que filme Cédric Klapisch. One more missed opportunity...

Lire la suite