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Le blog de Frédéric Delorca

Articles avec #peuples d'europe et ue tag

Blague espagnole

1 Juin 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

sangria"Un médecin danois dit :
"Au Danemark, la médecine est tellement avancée que nous enlevons les testicules à une personne, nous les greffons sur une autre et en six semaines cette dernière est déjà capable d'aller chercher un travail ".

 

Un médecin allemand dit :
« Ca ce n'est rien, en Allemagne, on enlève une partie du cerveau d'une personne, on la greffe sur une autre, et en quatre semaines cette dernière est déjà capable d'aller chercher un travail ".

 

Un médecin russe dit :
"Ce n'est rien, la médecine est si avancée que nous extrayons la moitié du coeur d'une personne pour la greffer à une autre et au bout de deux semaines, les deux sont à la recherche de travail ".

 

Le médecin espagnol réplique alors :
"Rien à voir avec nous ; vous êtes tous très en retard ! Regardez : nous en Espagne, nous prenons une personne sans cerveau, sans coeur et sans testicules et nous en faisons un président ...  et maintenant tout le pays est à la recherche de travail !!!!" "

Tenez, en parlant de blagues :

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Die Linke plonge, gros problème pour le Front de Gauche

14 Mai 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

assnatPas de chance pour le Front de Gauche (FdG) : leurs alliés "naturels" en Europe ont gagné dans le mauvais pays et perdu dans le bon. Ils ont gagné en Grèce (Syriza) mais ça ne devrait pas servir à la gauche française puisque la Grèce a de bonnes chances de quitter la zone euro, et donc elle ne sera plus un allié de Paris pour faire pression sur la Banque centrale européenne comme le souhaiterait le FdG. En revanche l'allié du FdG outre-Rhin, Die Linke, perd les élections dans le pays vraiment utile pour la construction de l' "alter-Europe" dont il rêve : l'Allemagne. Hier en Rhénanie du Nord-Westphalie Die Linke est passée sous la barre des 5 %, elle ne sera pas repésentée au parlement de cet Etat, et disparait  donc des écrans radars.

 

Le FdG français va-t-il en tirer des conclusions quant à sa stratégie politique ? Deux possibilités. Soit il revient à une stratégie plus nationale de rupture unilatérale avec les traités européens. Soit il se met davantage à la remorque des sociaux-démocrates (en France et en Allemagne) qui sont les seuls à avoir le vent en poupe à la fois à Paris et à Berlin, et les seuls à même de faire semblant encore pendant quelques mois de préparer une "Europe de la croissance".

 

 

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Retour de Sicile

7 Mai 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

Retour de Catane Syracuse et Taormine.

 

Le théâtre grec de Syracuse défiguré par de tréteaux. Les guides parlent des visiteurs illustres : Platon, Eschyle. Evidemment ils oublient mon préféré : Aristippe de Cyrène. L'histoire est toujours injuste.

 

Les colonnes du temple d'Athèna enchâssées dans les murs de la cathédrale Sainte Lucie. La côte magnifique entre les Jardins de Naxos et les hauteurs de Taormine. L'Etna, le château d'Ursino à Catane...

 

J'ai parlé pendant une heure en espagnol avec un crypto-chauffeur de taxi entre Catane et Taormine, atteint d'une infirmité cardiaque depuis l'enfance, qui donc ne pouvait travailler dans un emploi "normal", et percevait seulement 200 euros de l'Etat ce qui l'obligeait à avoir cette activité "tolérée" comme complément de salaire. Dans son discours sa haine de l'Etat italien rejoignait sa colère contre l'Union européenne. La Sicile est livrée à elle-même. Les vieux sont édentés. Les trains privatisés ont des wagons des années 50...

 

 


 

 

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Elections en France, en Grèce, en Serbie, les peuples, les oligarchies

7 Mai 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

Il y avait des drapeaux algériens sur les Champs Elysées hier pour fêter la victoire de François Hollande, et des "youyous" au meeting de Mélenchon à Marseille trois semaines plus tôt. La xénophilie de la gauche d'un côté, de l'autre Sarkozy à 48 % et non à 45 malgré l'ultradroitisation de son discours dans l'entre-deux-tours, et beaucoup de votes blancs comme Mme Le Pen l'avait recommandé à ses électeurs. On est en plein dans les problématiques soulevées par Algalarrondo l'an dernier.

 

belote.jpgDerrière Hollande la gauche bobo, les classes moyennes des grandes villes, et puis un certain monde rural de tradition socialiste (dans le Sud-Ouest), ou qui a récemment lâché la démocratie chrétienne (Bretagne). Jean-Luc Mélenchon avec sa campagne flamboyante a réussi un peu à rallier quelques ouvriers au premier tour, pas beaucoup. Une bonne partie sont restés proches du FN (plus du tiers ont voté Marine Le Pen au premier tour) et de la Droite populaire (plus de 40 % derrière Sarkozy).

 

Mélenchon fait aujourd'hui le pari de les arracher en juin à la logique du vote utile qui a profité à Hollande. Pas gagné d'avance. On a le sentiment qu'un gros tiers de la classe ouvrière reste proche d'une droite dure, un tiers fluctue entre le PS et la droite d'un élection à l'autre, un autre tiers est plutôt voué à l'abstention. Très peu ont vocation à croire en un discours Front de Gauche (FdG), lequel n'est crédité que de 7 % d'intentions de vote sur l'ensemble de la population aux prochaines législatives, ce qui peut faire du 10 % si les électeurs de Sarkozy s'abstiennent et s'il n'y a pas trop de vote PS.

 

Le FdG pourrait ramener à lui une frange de l'électorat ouvrier de la droite populaire et du FN s'il tenait, comme je l'évoquais dans le Programme pour une gauche française décomplexée, un discours républicain, national et protectionniste qui, sans jouer avec les clichés xénophobes comme le fait Marine Le Pen (sur les fantasmes de l'islamisme, le hallal etc), réhabiliterait la notion de souveraineté populaire et de démocratie dans les frontières définies d'un pays, et non pas dans les frontières mouvantes d'un vaste empire européen manipulé par les banques. Mais il s'aliènerait alors sa composante bobo (petits profs, petits fonctionnaires) qui est la base de ses militants, ainsi qu'une bonne partie de sa clientèle dans les ZEP lesquelles ne veulent pas entendre parler de frontière (idem pour la clientèle PS dans les  mêmes banlieues). Dès que j'aurai cessé mes fonctions en Ile de France, je vous raconterai quelques anecdotes que j'y ai vécues en rapport avec cette problématique.

 

Les micro-partis souverainistes ne sont pas bien placés non plus pour incarner un tel discours. Debout la République (DLR), qui est le plus structuré d'entre eux, hier soir a publié un communiqué dans le pur style du RPR des années 1980, accusant M. Sarkozy d'avoir porté à l'Elysée un socialiste (comme si le mot par lui même était une insulte) et appelé à construire une alternative gaulliste. Pas un mot pour un électorat potentiel de gauche. Preuve que ce parti veut rester un grouspuscule de droite et rien de plus.

 

Ces données montrent qu'une voie républicaine entre boboïsme et xénophobie sera difficile à défendre.

 

Les Grecs ne sont pas tout à fait dans cette configuration puisque l'appauvrissement de la classe moyenne y est tel que l'équivalent du Front de Gauche Syriza (mais sans le PC qui fait 8 % tout seul !) dépasse de peu le Parti socialiste, tandis que le total  Pasok+droite classique s'élève à moins de 50 % (oublions pour un temps la poussée des néo-nazis d'Aube dorée, bien qu'elle soit symptômatique de la poussée xénophobe dans ce pays aussi). J'ignore si la gauche là bas a plus de stratégie qu'en France mais pour l'heure sa poussée a pour effet immédiat de compliquer la tâche des banquiers. L'ingouvernabilité prévisible du pays va obliger l'Union européenne à imposer une ingérence coloniale croissante à Athènes (qui peut aller jusqu'à faire revoter les Hellènes), ce qui ne fera que compliquer le soi-disant "sauvetage" de ce pays, nourrir la spéculation contre l'Espagne, et l'Italie, et donner de nouveaux maux de têtes aux fédéralistes bruxellois et aux oligarchies financières de tout poil.

 

Cela peut-il donner des arguments à François Hollande pour négocier un desserrage de l'étau du Mécanisme européen de stabilité ? Allez savoir... Je note qu'un ministre allemand commence à parler de relance salariale dans son pays.

 

Autres élections hier : en Serbie (législatives et présidentielles). Là le parti souverainiste ("Parti progressiste") de M. Nikolic passe juste devant les européistes de M. Tadic avec chacun un quart des suffrages. Le Parti socialiste (ex communiste) qui a joué la balance entre l'un et l'autre ces dernières années s'en sort bien à 14 % des voix (en net progrès). L'ex président Kostunica est dans les choux à 7 %, de même que l'extrême droite intransigeante de Seselj qui ne sera même pas représentée au Parlement (preuve que l'époque de Milosevic est bien révolue dans ce pays). La montée de M. Nikolic profite peut-être du malaise grec et de l'alternance française qui mettent à mal le dispositif bruxellois et discréditent un peu l'européisme à Belgrade comme ailleurs.

 

Mais dans ce pays comme chez nous les eurocrates ont plus d'un tour dans leur sac, et la partie de poker est loin d'être terminée... Affaire à suivre donc...

 

 

 

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François Hollande élu président de la République

6 Mai 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

hollande.jpgMonsieur François Hollande, candidat du parti socialiste, vient d'être élu président de la Répubique française. Ce faisant il met fin à cinq années de sarkozysme, cinq années qui furent parmi les plus noires de l'histoire de notre pays parce qu'ells furent notamment caractérisées par le retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN, son alignement systématique sur les thèses des néo-conservateurs américains, la ratification du traité de Lisbonne contre le peuple, un haut niveau de corruption politique et morale au sein du gouvernement de notre pays avec une surenchère dans la démagogie populiste (entre autre la xénophobie, mais pass seulement) et le mépris de la chose publique.

 

La fin du sarkozysme va assainir l'ambiance, car elle place au pouvoir un homme plus modeste, sans doute plus honnête, bien que son entourage soit loin de l'être toujours, et qui ne fera sans doute pas de l'entourloupe, et de méthodes marketing abjectes, une forme légitime d'exercice du pouvoir. Mais évidemment nous savons que le Parti socialiste reste un parti européiste, atlantiste et néo-libéral. Bien qu'il soit relativement plus à gauche que ses homologues européens, ses dirigeants ne sont pas en mesure à eux seul d'impulser une politique de résistance à la droite européenne, ni de défense de la relance économique.

 

Il va falloir que des forces politiques se structurent en France pour obliger M. Hollande à refuser le mécanisme européen de stabilité et imposer un logique de résistance au système bancaire.

 

Selon moi, le Front de Gauche peut être un facteur important de ré-orientation de la politique européenne. La bonne campagne de M. Mélenchon a arraché la gauche noniste à la logique de la fragmentation et rallié à la politique de nouvelles franges d'électeurs grâce à une revitalisation de l'imaginaire républicain. Mais le score électoral de cette coalition au premier tour ne peut suffire à peser sur le nouveau président, ni sans doute à créer un effet d'entraînement en Allemagne comme JL Mélenchon l'espérait. Une augmentation du nombre de députés FdG serait sans doute un atout supplémentaire à l'issue des élections législatives, mais cela ne peut remplacer l'absence de stratégie qui continue malgré tout à caractériser le FdG face aux institutions européennes, tout comme face au système financier et militaire occidental (on a trop vu pendant cette campagne M. Mélenchon improviser d'une semaine sur l'autre, et parfois d'une façon contradictoire, ses positions sur de nombreux dossiers, comme celui de la politique à l'égard de la Syrie).

 

Il faut que soit au sein du FdG (mais est-ce possible ?), soit en dehors de lui, se structure une force politique plus claire dans ses orientations stratégiques, qui, éventuellement en partenariat avec lui, pèse sur le nouveau président de la République pour exiger de lui la rupture nécessaire avec la logique  mortifère du système financier, de l'Union européenne, et de l'OTAN.

 

Pour ce faire, il faudrait que la mouvance souverainiste républicaine (MPEP, DLR, UPR) rompe avec la logique groupusculaire et sectaire qui l'inspire depuis plusieurs années, définisse un programme unitaire, et présente des candidatures communes aux prochaines élections législatives sans attendre les élections européennes qui n'auront aucun impact sur la vie politique nationale. Le pourra-t-elle à un mois de l'élection des députés ? On peut en douter, et cependant la France ne pourra pas durablement infléchir le cour des événements planétaires sans cet effort de fédération des forces antisystémiques.

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L'ornière

23 Avril 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

Je pense cet après-midi à tous ces déclassés, tout ce "lumpenproletariat" (comme disent des gens sur Facebook), qui est sorti d'on ne sait où hier pour aller clamer sa haine et voter FN plutôt que d'entendre les perspectives économiques, politiques et sociales assez élaborées que Mélenchon lui proposait.

 

engrenage.jpg

Comme me l'écrit une de mes correspondantes belges : "Je vous enviais tellement d'avoir un type comme lui (Mélenchon), capable de mobiliser les foules, de parler aux medias et aux citoyens, de répondre et expliquer et argumenter (avec humour en plus !), porteur d'une alternative que nous espérons et cherchons  depuis si longtemps, et cette occasion n'a pas été saisie !"

 

Il est certain qu'avec ce vote FN la France ne sort pas grandie aux yeux des autres peuples. Le "rayonnement" national en prend un coup.

 

Ces petits esprits qui ont voté Marine étaient-ils déjà sur le pont du bâteau depuis des semaines, sousestimés par les sondages, ou étaient-ils assoupis dans les cales pour se réveiller le jour "J" ? Ont-ils durablement enterré l'unique chance de "révolution citoyenne" à l'islandaise qui se présentait à nous ou l'histoire repassera-t-elle les plats ? J'ai un peu peur que la dynamique reste du côté du FN aux prochaines élections législatives puis européennes... La France de gauche s'est donné beaucoup d'espoirs éphémères, en 1995, en 2005, puis avec cette campagne. Mais notre pays retombe facilement dans les ornières. A tous les niveaux il a perdu beaucoup de sa force, de sa créativité, de son inventivité par rapport à ce qu'il était encore au XXe siècle (malgré les guerres mondiales). C'est un pays qui, d'une élection à l'autre, mobilise pour Chirac, pour Sarkozy, pour le Pen, dans une grande confusion, un pays qui ne sait plus qui il est ni ce qu'il veut, un pays qui ne réfléchit plus, en pleine errance.

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Les Balkans et la modernité austro-hongroise

4 Septembre 2011 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

Après avoir décrit la réception du nouveau commandant militaire (autrichien) de la ville de Visegrad par le pope, le hodja (prêtre musulman), le rabbin et le directeur de la medersa lors du placement de la Bosnie-Herzégovine sous le protectorat des Habsbourg en 1878, Ivo Andric, prix Nobel de littérature en 1961, raconte, dans son roman « Le Pont sur la Drina » de 1945 (p. 152 de la version de poche actuelle), que Kusturica adaptera bientôt à l'écran :

 

visegrad.JPG« A l’automne, les soldats (autrichiens) commencèrent à quitter la ville. Petit à petit, sans qu’on le remarquât, leur nombre diminua. Seuls restèrent les détachements de gendarmerie. Ils s’installèrent dans des appartements, en vue d’un séjour permanent. Dans le même temps commencèrent à arriver des fonctionnaires, des employés de l’Administration de grades plus ou moins importants, accompagnés de leurs familles et de leurs domestiques, suivis d’artisans et de spécialistes dans certains domaines et métiers encore inconnus chez nous. Il y avait des Tchèques, des Polonais, des Croates, des Hongrois et des Allemands.

 

Il semblait au début qu’ils avaient échoué là par hasard, selon les caprices du vent, et qu’ils venaient vivre ici de façon provisoire, pour partager plus ou moins avec nous la façon dont on avait toujours vécu dans ces contrées, comme si les autorités devaient prolonger pendant un certain temps l’occupation inaugurée par l’armée. Cependant, de mois en mois, le nombre d’étrangers augmentait. Ce qui surprenait le plus de gens de la ville et les emplissait à la fois d’étonnement et de méfiance, ce n’est pas tant leur nombre que leurs incompréhensibles et interminables projets, l’activité débordante et la persévérance dont ils faisaient preuve pour mener à bien les tâches qu’ils entreprenaient. Ces étrangers ne s’arrêtaient jamais de travailler et ne permettaient à personne de prendre le moindre répit ; ils semblaient résolus à enfermer dans leur réseau – invisible, mais de plus en plus perceptible – de lois, d’ordonnances et de règlements la vie tout entière, hommes, bêtes et objets, et à tout déplacer et transformer autour d’eux, aussi bien l’aspect extérieur de la ville que les mœurs et les habitudes des hommes, du berceau à la tombe. Ils faisaient tout cela avec calme et sans beaucoup parler, sans user de violence ou de provocation, si bien que l’on n’avait pas à quoi résister. Lorsqu’ils se heurtaient à l’incompréhension ou à des réticences, ils arrêtaient immédiatement, se consultaient quelque part sans qu’on le vît, changeaient seulement d’objectif ou de façon de faire, mais parvenaient quand même à leurs fins. Ils mesuraient une terre en friche, marquaient les arbres dans la forêt, inspectaient les lieux d’aisances et les canaux, examinaient les dents des chevaux et des vaches, vérifiaient les poids et les mesures, s’informaient des maladies dont souffrait le peuple, du nombre et des noms des arbres fruitiers, des races des moutons ou de la volaille. (On aurait dit qu’ils s’amusaient, tant ce qu’ils faisaient paraissait incompréhensible, irréel et peu sérieux aux yeux des gens.) Puis tout ce qui avait été fait avec tant d’application et de zèle s’évanouissait on ne savait où, semblait disparaître à jamais, sans laisser la moindre trace. Mais quelques mois plus tard, et même souvent un an après, lorsqu’on avait complètement oublié la chose, on découvrait tout à coup le sens de toute cette activité, apparemment insensée et déjà tombée dans l’oubli : les responsables des quartiers étaient convoqués au palais et se voyaient communiquer une nouvelle ordonnance sur la coupe des forêts, la lutte contre le typhus, le commerce des fruits et des pâtisseries, ou encore sur les certificats obligatoires pour le bétail. Et avec chaque ordonnance, l’homme en tant qu’individu se voyait imposer plus de restrictions et de contraintes, alors que la vie collective des habitants de la ville et des villages se développait en se structurant et en s’organisant.

 

Mais dans les maisons, chez les Serbes comme chez les musulmans, rien ne changeait. On y vivait, on y travaillait, on s’y amusait à la manière d’autrefois. On pétrissait le pain dans la huche, on grillait le café dans la cheminée (…).

 

L’aspect extérieur de la ville, par contre, changeait rapidement et de façon visible. Et ces mêmes gens qui, dans leurs foyers, perpétuaient en toute chose l’ordre ancien, sans songer à le modifier, acceptaient plutôt bien ces changements dans la ville. »

 

On a là un exemple intéressant de colonisation « douce ». Plus douce sans doute que la réquisition de la main d’œuvre ou les confiscations brutales de terre dans les colonies africaines ou asiatiques des pays européens à la même époque. Mais on ne peut négliger le fait que cette dimension « indolore » existait aussi dans les pays du Sud et qu’elle produisit sans doute beaucoup plus d’effets déstabilisateurs encore que les actions violentes.

 

Le rapport des Balkans (et peut-être de tous les pays méditerranéens) à l'Europe suit ce schéma depuis plus de cent ans.

 

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Une trace yougoslave effacée : "Ca commence par un péché" (1954)

24 Juillet 2011 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

La chronique cinéma de La Vie parisienne de juillet 1956 relève ceci:

 

ca-commence-par-un-peche.jpg"Un film yougoslave, Ca commence par un péché, fait actuellement les délices des amateurs de sensualité rustique.

 

On ne doit pas s'embêter au pays de Tito, pensent les spectateurs en assistant aux assauts désordonnés que Peter Carsten livre aux très belles (et peu rebelles) Ruth Niehaus et Laya Rakz.

 

En quoi d'ailleurs ils se trompent, car le scénario de Ca commence par un péché est tout bonnement tiré d'une nouvelle de notre Maupassant, La Fille de ferme".

 

Ca commence par un péché (The beginning was sin en anglais) est un film du cinéaste Frantisek Cáp, né en Bohème et mort en Slovénie, qui a 41 ans lors de la sortie de ce film en Yougoslavie (en 1954). Sa fiche sur  Internet Movie data base précise qu'il est sorti le 8 juin 1956 en France. Pour cinéfiches, ce n'est pas un film yougoslave, mais allemand...

 

Un cinéaste né dans la bohème autrichienne, et mort dans la Slovénie yougoslave est-il un yougoslave ? Grande question. Il semble que pour les Français de 1956 en tout cas, le film fût sans équivoque yougoslave. Certes il est sorti à Vienne un mois avant de sortir à Ljubjana, mais si c'est le critère, il faudrait le qualifier plutôt d' "autrichien" (car les Allemands de RFA ne l'ont découvert, comme les Français, qu'en 1956). Pour Wikipédia, Cap est tchécoslovaque. Les acteurs sont allemands, la production est à la fois allemande (Saphir films) et yougoslave (Triglav films basé en slovénie). Incontestablement l'empreinte germanique est forte, chacun se fera sa propre opinion sur la manière opportune de classer cette "oeuvre".

 

Si le public parisien se rinçait l'oeil devant ce film en rêvant de liberté sexuelle yougoslave, celui-ci ne semble guère avoir marqué l'histoire du cinéma puisqu'on ne trouve même pas un résumé de l'intrigue sur le Net.

 

En slovène, le titre de "Ca commence par un péché" s'écrit "V zacetku je bil greh". Chose étrange, en 1962, un film sortira avec les mêmes acteurs sous le titre Greh. Peut-être une adaptation pour la TV du film de 1954. Le pitch est un peu différent de la description de la Vie parisienne. Si celle-ci juge que Ruth Niehaus n'était pas "rebelle", selon Movies.tvguide elle est "raped" (violée) par Carsten... Le film a-t-il été "durci" dans le remake de 62 ou la version initiale a-t-elle été édulcorée par le machisme hédoniste de La Vie parisienne ? Pour le savoir il faut sans doute se reporter à la nouvelle de Maupassant qui inspira directement le scénario initial.

 

Au sujet de ce film on ne peut que se perdre en conjectures. Le compositeur de la musique était Bojan Adamic, un slovène, il y a une danseuse gitane, les personnages ont des prénoms yougoslaves. On peut supposer que cette transposition de Maupassant en Slovénie donnait au public allemand une image pittoresque de leur arrière-cour balkanique. Que le public français ait dû attendre deux ans pour découvrir ce film n'est pas très surprenant (d'ailleurs sans doute n'aurait-il jamais vu cette bizarrerie qu'il croyait purement yougoslave si elle n'était inspirée d'une nouvelle hexagonale). Qu'il en ait fallu autant en RFA est étrange.

 

Je suis évidemment, à titre de curiosité, preneur de toute information supplémentaire sur ce film disparu de nos archives.

 

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NB : puisque nous parlons de Yougoslavie, je signale que je suis choqué par la présentation que le magazine Philosophie de mois-ci fait de Peter Handke :

 

"Peu d'écrivains auront autant marqué leur époque, tant par le tempo de leur prose que par leur aptitude à saisir les émotions. Depuis quinze ans, cependant, l'Autrichien Peter Handke s'est en partie discrédité par ses déclarations sur le conflit en ex-Yougoslavie. Pour prendre du recul sur son parcours, à l'heure où il publie quatre nouveaux livres en France, nous l'avons rencontré dans sa retraite des environs de Paris."

 

L'incise sur la Yougoslavie dans cette introduction est scandaleuse. A supposer même que Handke ait tort sur la Yougoslavie (ce que je ne pense pas), il est totalitaire de coller ça dans la moindre présentation de cet auteur. Une revue littéraire aurait-elle eu la goujaterie dans les années 60 de présenter Malraux comme quelqu'un qui s'est "en partie  discrédité par ses écrits sur les communistes dans les années 1930" ? Ses opinions politiques sur tel ou tel sujet n'ont pas à figurer dans la présentation de cinq lignes d'un auteur car une oeuvre ne se résume jamais à cela, et même lorsque la politique semble consubstantielle à l'oeuvre, il faut alors laisser à l'écrivain le bénéfice du doute, surtout sur un sujet aussi complexe que la Yougoslavie. Je suis aussi en total désaccord avec la présentation faite par un documentaire sur l'histoire récente du Kosovo diffusé par une chaine parlementaire la semaine dernière. Un mensonge répété cent fois ne fait pas une vérité.

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