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Le blog de Frédéric Delorca

Articles avec #philosophie et philosophes tag

Bertrand Russell à propos des nationalités

19 Janvier 2008 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

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Il est difficile d'exposer exactement le principe des nationalités. En gros, il proclame que n'importe quel groupement géographique qui désire constituer une unité gouvernementale a le droit d'être un Etat unique indépendant. Mais dans la pratique, il comporte des restrictions. Quand en 1917 une seule maison de Pétrograd, s'appuyant sur ce principe, se déclara nation luttant pour son droit à la liberté, on trouve qu'elle allait trop loin, et même le Président Wilson ne l'encouragea pas. L'Irlande avait le droit d'invoquer le principe contre l'Angleterre, mais les comtés de Fermanagh et de Tyrone ne pouvaient l'invoquer contre le reste de l'Ulster du nord-est. Ainsi, une des restrictions de ce principe consistait en ce qu'il ne devait pas intéresser un territoire trop petit. Une autre restriction était que le territoire ne devait pas se trouver en Asie ou en Afrique ; cela parut évident à tous les gens bien-pensants, jusqu'à ce que les Russes eussent été battus par les Japonais. Et enfin, il fallait que le territoire en question n'ait pas d'importance internationale exceptionnelle, comme Suez ou Panama.

Pour les libéraux, jusqu'en 1871, ces restrictions ne furent pas évidentes, car à leur sens, une nation était une entité mystique, possédant une âme presque aussi définie que celle d'un être humain. C'est ce sentiment qui assura un contenu valable au principe de nationalité.


Bertand Russell, Histoire des idées au XIX ème siècle, un livre publié dans l'entre-deux-guerre. Gallimard, Paris, 6 ème édition 1951, p. 303
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Un mot sur la philosophie

13 Janvier 2008 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Il est assez évident à mes yeux que la philosophie a pris fin au XIX ème siècle, en même temps, dans un sens, que la religion, lorsque l'une et l'autre se sont révélées pour ce qu'elles étaient, c'est à dire des exercices littéraires de constitution d'une ontologie (l'une et l'autre étant d'ailleurs à maints égards complémentaires). plato-copie-1.jpg

Aujourd'hui, il n'est plus utile de chercher à être philosophe dans le sens où Deleuze ou Badiou ont cherché à l'être, c'est-à-dire dans une tentative de produire, en quelque manière que ce soit, une ontologie sérieuse - sans quoi on se voue à ne produire que du charabia. La référence à ces philosophes m'intéresse par conséquent non pour le contenu ontologique de leur discours, mais pour le geste qu'ils incarnent, un geste soustractif, le retranchement du réel et de tout ce qui peut relever de l'apparence commune. Cet exercice-limite  qui porte soi-même aux limites de sa propre rationalité m'intéresse de par le mouvement de translation qu'il implique, et me paraît plus achevé chez Deleuze que chez Badiou, parce qu'il se doublait chez le premier d'une véritable esthétique monacale, esthétique indissociable de l'exigence éthique qu'il s'imposait à lui-même.

Voilà donc ce qui m'intéresse chez les philosophes de la fin du XX ème siècle. Mais, je le répète, à mon sens il ne faut plus chercher à philosopher, mais seulement à penser, et à prolonger la philosophie ancienne sur des terrains autres, par exemple le terrain de l'action politique, mais aussi peut-être la littérature (assumée comme telle). Je n'en dirai pas plus pour l'heure, tout cela sera peut-être explicité dans le courant de cette année.
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Deleuze

13 Janvier 2008 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Je regardais ce matin à nouveau des passages de l'abécédaire de Gilles Deleuze (qu'Arte diffusait autrefois, quand j'étais jeune). J'ai regardé la lettre "C"  "Culture". Je ne saurais dire combien je dois aux écrits et à la personnalité de Gilles Deleuze qui était un auteur central de mes 20 ans (autour de 1990). C'est lui qui, à mes yeux, a toujours le mieux défini la visée du travail d'écriture. Même si j'ai effectué mille détours depuis lors par des auteurs et des activités qui peuvent paraître à l'opposé même de ce que défendait Deleuze, mon orientation profonde est toujours restée celle-là.

Cette année je m'apprête à publier deux ouvrages, deux ouvrages dont j'ai fait des sortes d'instruments de "clôture", clôture de phases de ma vie, clôture de manières de pensée. J'ai toujours aimé l'idée nietzschéenne selon laquelle il faut écrire pour se débarrasser de ses idées. En les faisant basculer dans le "domaine public", dans l'objectivation et l'exposition aux regards, on s'allège d'un fardeau. Un jour Cioran disait dans une interview que l'homme qui écrit est quelqu'un qui se vide en permanence et qui, pour cette raison, n'a jamais grand chose à dire.

Il m'a donc fallu me vider de certaines choses par ces deux livres dont j'espère qu'ils trouveront un éditeur prochainement.

Lorsque cela sera fait, il faudra ressaisir le projet proprement spirituel (d'une spiritualité sans spiritualisme, une spiritualité matérialiste) qui selon moi doit puiser aux sources de Deleuze, à l'humour, et à la légèreté de Deleuze, à son sens du mouvement. Je ne vous ai pas parlé du livre de Badiou sur Deleuze. C'est un tort. Je devrai le faire un jour. 


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La mode Alain Badiou

11 Janvier 2008 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Il existe une mode Alain Badiou en ce moment. Badiou ayant vendu si l'on en croit Le Monde aujourd'hui 17 000 exemplaires de son dernier ouvrage De quoi Sarkozy est-il le nom ?, c'est à dire beaucoup plus que le nombre habituel d'amateurs de "bonne littérature" que Debray dans son dernier article évalue à 10 000 (http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3232,36-997937,0.html). Même la pauvre Clémentine Autain se sent obligée d'en faire la publicité sur son blog.

 

J'ai été en contact email avec Badiou en 2000 quand nous agissions contre l'interventionnisme de l'OTAN au Kosovo.

 

J'aime ses textes sur Saint-Paul, sur les utopies révolutionnaires. Moins ses considérations sur les mathématiques (mais c'est sans doute l'influence de Bricmont). Badiou c'est d'abord et avant tout le beau style philosophique, un tantinet obscur (dont les charmes lassent généralement, passé le cap de la trentaine). Je n'ai pas vraiment l'intention de lire son dernier pamphlet - sauf si un gentil lecteur m'en envoie un exemplaire - la sarkozymanie, dans le registre de la haine comme dans celle de l'admiration, n'étant pas ma tasse de thé. Mais bon, si Badiou aide les bobos à oser contrer le sarkozysme pourquoi pas... Qu'il aide aussi le PS à retrouver sa gauche ce ne serait pas plus mal. En attendant, un morceau de Badiou en langue anglaise, pour faire plus exotique - la suite est sur You Tube... 

 

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Débat intellectuel

30 Novembre 2007 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Michel Serres, dans des entretiens avec Bruno Latour, déplorait le climat de guerre civile qui a toujours soustendu le débat intellectuel français.

J'y songeais en lisant le passage d'un texte récent de Grégory Rzepski et Henri Maler sur Alain Finkielkraut et Serge Halimi. Ce texte et la version sonore des propos de Finkielkraut peuvent être consultés sur http://www.alterinfo.net/-Touche-pas-a-BHL-,-par-Ruquier-et-Finkielkraut_a14154.html.

Je crois avoir suffisamment lu, et même parfois fréquenté personnellement ,certains intellectuels parisiens depuis dix ans, pour pouvoir confirmer - et ce passage de Rzepski et Maler l'illustre - qu'en effet des moeurs belliqueuses animent ces intellectuels. Les "dominés", comme Halimi, refusent souvent de se rendre dans des émissions où ils savent qu'ils se retrouveront à 10 contre un (l'animateur étant généralement de mêche avec ses adversaires). Etonnamment, et symétriquement, les "dominants" s'en plaignent et se sentent eux-mêmes victimes d'une "terreur" bolchévique face à l'intransigeance de leurs opposants (un peu comme les partisans du "oui" au référendum sur le traité constitutionnel européen voyaient dans leurs adversaires des sortes de chevaliers de l'Apocalypse qui amèneraient en Europe la guerre et le chaos).

Je ne crois pas qu'il y ait dans ces comportements de la tartuferie ou de la vaine rhétorique. Chacun des deux camps semble vivre sincèrement dans la crainte de l'autre. Et chacun, c'est exact, se replie sur diverses formes de sectarisme. Les proches du Diplo, de l'Acrimed, de PLPL ont raison de dire que l' "élite" proche des grands médias évolue en cercle fermé. Les "dominants", quant à eux, n'ont pas tort de voir dans le Diplo, ou dans l'émission de Mermet, des sortes de citadelles, où l'on ne peut pénétrer qu'en donnant des gages d'allégeance extrêmement lourds, et qui n'acceptent pas facilement la contradiction en leur sein (nombre de mes proches, y compris des gens très à gauche, en ont fait l'amère expérience).

Faut-il se féliciter de ce qu'une guerre intellectuelle existe en France et fonctionne comme un miroir (parfois déformant) de la lutte des classes réelle nationale et mondiale ? Ou faut-il souhaiter quelque chose de mieux pour le débat d'idée ? Je vais oser une expression qui va scandaliser certains marxistes : les idées ont besoin d'autonomie, il faut à leur service refuser toute forme d'embrigadement. Le travail de l'intelligence a besoin de vérité, et, si la vérité ne peut se trouver sur le terrain de la compromission, elle ne peut pas non plus triompher sans esprit d'ouverture et de dialogue. Plus on diabolise l'autre, plus on limite ses chances d'accéder au réel et de pouvoir le penser dans toutes ses dimensions. Dans l'ordre du travail de réflexion, la confrontation de points de vue opposés loyale, sans insultes nu procès d'intention,  est nécessaire à l'affinement des connaissances, à la justesse des analyses.

Finkielkraut a raison de louer l'ouverture d'esprit de Castoriadis. La logique d'embrigadement qui ne cesse de prévaloir en France, du côté des dominants comme des dominés, est le meilleur moyen de ne jamais faire progresser l'intelligence de notre époque.

Comment dépasser ce blocage ?

J'ai fait l'apologie il y a peu du Dissident, parce que c'est un homme d'action, un homme qui joue. Il échappe de la sorte à la logique des mobilisations façon "Le Monde Diplomatique" qui ne servent qu'à valoriser de petites organisations sans prise réelle sur l'évoliution du monde. Mais l'action n'est pas la seule réponse. Il faut aussi repenser complètement la structure du champ intellectuel, peut-être la remettre en cause de fond en comble, ne plus vouloir être un intellectuel, pour retrouver un sens plus profond de la discussion et de l'intelligence.

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