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Le blog de Frédéric Delorca

Articles avec #souvenirs d'enfance et de jeunesse tag

Interviewé sur Radio Galère

5 Mai 2025 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Actualité de mes publications, #La gauche, #Colonialisme-impérialisme, #Souvenirs d'enfance et de jeunesse, #Atlas alternatif

J'ai été interviewé le 30 avril à son domicile par Bernard Genet, du collectif Comaguer, pour la radio marseillaise Radio Galère.

Bernard est un militant intéressant, fin, discret, au contact très agréable. Il y a ici une description de son itinéraire politique.

Né en 1940, d'un père est ingénieur chimiste, spécialiste  du caoutchouc,homme de la droite traditionnelle, qui était lui-même pupille de la nation car il est le fils d’un pharmacien gazé pendant la guerre de 14-18. Ce père après un séjour à Montluçon , il trouve un emploi chez Dunlop à Marseille et l’inscrivit en 6ème au lycée Marseilleveyre, lycée innovateur animé par des protestants et des communistes. Après avoir intégré HEC dont il sort en 1962, il est élève officier dans la marine, puis suit une formation en sociologie et géographie à la Sorbonne (on a discuté de cette époque où Bourdieu commençait à percer au CSE). Chargé d'études au Port autonome de Marseille nouvellement créé, il y crée une section CFDT. Converti à l'écologie radicale par les travaux de FOS, il milité dans  comités Larzac.

Au début des années 2000 il a créé le comité Comaguer qui regroupait communistes et anarchistes. Il était alors proche du préfacier de l'Atlas alternatif.

Point noir et "red flag" pour le chrétien que je suis : son épouse oeuvre au planning familial local (elle travail pour Moloch...). On est toujours dans le dilemme posé par le théoricien américain que nous connaissons bien : soit vous êtes pour la mort des enfants par avortement (en étant de gauche) soit pour la mort de enfants à Gaza (en étant de droite).

L'interview sera diffusée le mercredi 14 mai 2025.

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Les démons de Tel Quel (une page d'histoire)

26 Mars 2025 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Divers histoire, #Lectures, #1950-75 : Auteurs et personnalités, #Grundlegung zur Metaphysik, #Souvenirs d'enfance et de jeunesse

Rien de tel qu'un démon pour dénoncer d'autres démons. Avec le journal de Jacques Henric "Les Profanateurs" qui vient de sortir chez Plon, on plonge dans ceux de la revue Tel Quel dont les effluves empoisonnaient ma jeunesse du temps où j'écoutais France Culture.

Par exemple en 2002 il révèle l'homosexualité d'Aragon lors d'un colloque au centre Pompidou et ses fantasmes sur les SS ce qui exaspéra Régis Debray. A la page du 26 juin 1976, il raconte l'histoire de Louis Dalmas (un type que j'ai croisé le 8 février 2001 au comité de rédaction de Balkans Infos), qui a épousé une ex-cover girl serbe fondatrice du premier sex-shop de Paris en 70 (qui a maintenant 93 ans). "Le bonhomme semble naïf, un peu con, plus con que méchant, d'une vulgarité sans nom", commente-t-il (c'est en effet l'impression qu'il m'avait laissée, ainsi que sa revue bien qu'il y publiât certains de mes articles). Le 2 juillet 1977 il dénonce un mensonge de Kristeva qui dans le Nouvel Obs fait croire qu'elle est arrivée en France comme dissidente, alors qu'elle y est arrivée comme "étudiante communiste bulgare reçue par le Parti communiste français".

Ou encore on y lit à la date du 24 janvier 1999 que la femme de Kundera, Vera au restaurant sortit un pendule en présence de Sollers pour juger le repas. Sollers voulut en rire, Kundera fit les gros yeux. Quelques jours plus tard rebelote chez les Kundera : Vera sort le pendule sur la bouteille de Château d'Yquem. Sollers devra la jeter. Ambiance glaciale pour le reste de la soirée. Commentaire d'Henric "J'aimerais que notre ami Philippe Muray, spécialiste des mages et de la théosophie (...) nous explique  comment son très admiré Kundera en est arrivé là". Je regrette de n'avoir pas connu cette anecdote quand j'ai écrit mon livre sur Prague.

Des échos de la guerre de Serbie cette année là bien sûr. Henric soutient Sollers contre Debray mais dit du bien de la revue d'extrême droite Eléments. Puis il juge "insensée" la position (anti-OTAN) de son ex-camarade maoïste Badiou, juge Debray "influencé par la propagande serbe" et son article dans Marianne "assez nul" - normal : cet Henric aimait tant Saint Germain des Prés et hurler avec les loups. Il fait de même ensuite aux côtés de BHL sur la Tchétchénie. Il nuancera un peu son jugement sur Debray en 2000 quand celui-ci lui dédicacera son livre L'Emprise. Des pages de l'affaire Renaud Camus dont je me rappelle qu'elle avait été au menu de mon dîner chez Elisabeth Lévy.

Amusantes ses attaques contre Baudrillard pour défendre Catherine Millet en 2001, puis sur le même sujet contre Elisabeth Lévy "dévouée et très énamourée admiratrice" de Philippe Muray son coach. Etrange description d'un spectacle de l'ex- strip-teaseuse Rita Renoir le 4 décembre 1972. L'auteur lisait aussi les mystiques chrétiens, mais apparemment sans profit.

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Annie Ernaux sur mon livre, De Maximy en ex-Yougoslavie

2 Mars 2025 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Actualité de mes publications, #Ecrire pour qui pour quoi, #Peuples d'Europe et UE, #Souvenirs d'enfance et de jeunesse

Il est intéressant pour moi de constater que des gens hier ont consulté ma page sur mon livre sur Cuba ou celle sur le gilet jaune à la fête de l'Huma. J'ai très peu de lecteurs et il est bon que ceux qui me suivent ne se focalisent pas sur un seul aspect de ce que je fais.

Je n'ai pas encore poussé le vice jusqu'à demander à ChatGPT ce qu'il dit sur mon compte. Ce n'est sûrement pas élogieux.

Cette semaine j'ai reçu une petite carte d'Annie Ernaux, en réponse au livre sur Prague que je lui ai adressé en janvier. Depuis que je lui ai écrit en 2002 à la mort de Bourdieu (et cela continué même après ma conversion malgré mes désaccords avec elle sur des sujets comme le libéralisme politique ou l'avortement) elle répond toujours à mes lettres, et même elle lit les livres que je lui envoie et les commente. Je n'ai jamais cherché à en profiter en vue d'obtenir son appui spécifique pour me faire davantage connaître. Certains de mes lecteurs de temps en temps m'ont écrit "faites en plus pour qu'on diffuse vos livres". J'ai tendance à répondre "à quoi bon ?" car je suis de plus en plus sceptique sur le rôle des intellectuels dans la société actuelle, je préfère laisser Hanouna et Sandrine Rousseau faire la pluie et le beau temps dans l'opinion publique. Et puis que les abonnés de ce blog commence à mettre des étoiles à mes ouvrages sur Amazon ce sera déjà bien.

Sa carte était élogieuse pour mon " Prague, une ville au service de l'Empire". Je l'ai scannée et envoyée à mon petit éditeur (qui n'a pas les moyens ou pas la volonté de faire la promo des livres au delà de sa page Facebook). Il m'a répondu : "Je voudrais la publier sur mes réseaux sociaux. J'ai donc dû écrire à nouveau à la Prix Nobel pour lui demander l'autorisation. Je pense qu'elle ne répondra pas, car il est plus compromettant de dire du bien d'un livre en public qu'en privé. De toute façon mon éditeur ne doit avoir que quelques dizaines de followers à informer.

Encore une fois tout cela n'a pas grande importance. Je crois que notre époque a déjà tout ce qu'il lui faut en termes de sources d'information et de philosophes (avec l'indispensable dose de désinformation et de sophisme qui va avec), mes petits ouvrages avec leur dose de coquilles et de références littéraires obscures ne sont qu'un petit ingrédient dans la marche du monde, un ingrédient dont je laisse le soin à la Providence de doser la quantité. C'est mon côté "quiétiste" si l'on veut. De toute façon ce n'est pas aux créateurs qu'il appartient de faire leur propre publicité, ce serait trop immodeste.

A part ça cette semaine je regardais une petite émission sur une exploration de la Serbie (cf ci-dessous). J'y retrouvais l'ex-Yougoslavie comme je l'ai aimée, avec la part de folie douce qui l'a toujours caractérisée. En 1999 c'était sur fond de résistance à l'OTAN et à la bêtise de notre monde. Cette résistance ajoutait quelque chose de très spécial bien sûr à la découverte de cette culture. En regardant la vidéo j'essayais de me remémorer "comment dit oui et non, merci de rien, bonjour, bonne nuit, en serbe ?" Tout cela semble si loin, et ce même si je suis entretemps retourné à Belgrade en 2006. 2006 est plus proche de 1999 que de 2025... Il paraît qu'il y a un grand mouvement populaire en Serbie en ce moment, "contre la corruption". Novi Sad en est le point névralgique. Les autorités parlent évidemment de "révolution de couleur", ce qui est devenu un automatisme à chaque mouvement de rue à Belgrade désormais. Je n'ai pas spécialement creusé le sujet, mais j'observe en tout cas que Vujic a fait voter la Serbie contre Poutine et Trump cette semaine sur l'Ukraine. Belgrade reste donc toujours bien arrimée à Bruxelles, quoi qu'on en dise...

Je n'ai pas non plus creusé ces derniers temps la situation de l'Est du Congo, ni la partition de fait du Soudan. On y reviendra peut-être ultérieurement.

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Souvenir du 26 avril 2007 - rencontre avec un contributeur de l'Atlas

15 Décembre 2024 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Au coeur des mouvements anti-guerre, #Souvenirs d'enfance et de jeunesse

Une rencontre le 26 avril 2007 avec l'économiste communiste Rémy Herrera, contributeur de l'Atlas alternatif sur Cuba et le Venezuela. Je pense que le progressiste japonais dont il est question dans ce compte-rendu est Paulo Natanaki. On y évoque aussi le journaliste militant Miguel Urbano Rodriguez (1925-2017), Cuba, la Corée du Nord, l'Atlas alternatif, la situation politique du PCF après l'élection de Sarkozy. Je verse ici les pages de mon journal de l'époque, au cas où cela serait utile à quelque historien du mouvement communiste.

Souvenir du 26 avril 2007 - rencontre avec un contributeur de l'Atlas
Souvenir du 26 avril 2007 - rencontre avec un contributeur de l'Atlas
Souvenir du 26 avril 2007 - rencontre avec un contributeur de l'Atlas
Souvenir du 26 avril 2007 - rencontre avec un contributeur de l'Atlas
Souvenir du 26 avril 2007 - rencontre avec un contributeur de l'Atlas
Souvenir du 26 avril 2007 - rencontre avec un contributeur de l'Atlas
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Les palombes de la Saint-Luc

18 Octobre 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Béarn, #Divers histoire, #Souvenirs d'enfance et de jeunesse

"Saint Luc lou gran truc" disait-on autrefois dans les Landes, mais aussi en Béarn. Le 18 octobre, c'est le jour du pic de passage des palombes.

Le Mémorial des Pyrénées du 25 octobre 1895 en parlait :

"La campagne se poursuit pour nos chasseurs, comme toujours, avec des chances diverses, mais un écart considérable existe pour tous entre les prises actuellement faites et celles de période correspondante de l’an dernier. Cependant, le passage semble devoir bientôt prendre fin ; les froids sont arrivés. les grues ont commencé leur migration et les meilleures chasses n’ont pas encore la moitié de leur contingent habituel de palombes. La semaine dernière la majeure partie des vols sont passés avec les vents du nord, à perte de vue et en rangs serrés. Jeudi et vendredi jour de la Saint-Luc, ils se sont succédé sans interruption, mais sauf pour quelques chasses exceptionnellement situées, ces palombes passaient sans paraître voir les appeaux.

« Mauvaise campagne ; les palombes ne veulent pas poser » ; tel est le langage que tiennent tous les chasseurs de la contrée. Est-ce l’abondance des glands qui rend la chasse difficile? Il est certain que la faim est un des éléments qui manquent cette année au succès de la chasse au filet. D’un autre côté, la plupart des chasseurs ont débuté sans avoir pu remplacer les appeaux que la maladie leur avait enlevés, et c’est là, croyons-nous, la cause la plus commune de l’insuccès relatif de la campagne.

Le roi palombe, à l’occasion du grand truc, est, dit-on, passé hier sur nos chasses, au milieu de ses bataillons; mais il n’a certainement pas entraîné à sa suite toute son armée; espérons que la réserve, une réserve sérieuse, reste encore à venir, et qu’en dépit d’un mauvais début, il y aura des palombes pour tous."

Même constat 17 ans plus tard, le 28 octobre 1912 : " Les petits oiseaux ont terminé leur passage le long de I’Adour : les alouettes leur ont succédé. Il y a eu d'assez bonnes prises. Quant aux palombes, on les voit passer, c’est tout : elles dédaignent ou négligent de s’arrêter. "

"La palombe vaut la peine qu'on la tire, lisait-on dans L'Avenir d'Arcachon 1906, c'est un mets succulent que certains amateurs mangent comme la bécasse avec une rôtie au rhum. En la préparant, on trouve parfois des glands dans son gésier, comme on rencontre des grains de genièvre dans les grives de l'Aveyron ; et le gland est un fruit salutaire puisqu'on en fait un certain café. "

Pour ma part je la dégustais dans une sauce au vin au restaurant dans mon enfance, avec des cèpes à la persillade.

Il y avait autrefois des foire de la Saint-Luc de Brionne en Normandie jusqu'à Lourdes en Bigorre. On y mangeait peut-être aussi des palombes. C'était du temps où elles n'envahissaient pas nos jardins urbains...

A propos de chasse au pigeon ramier, je tombe sur cet amusant article du Mémorial des Pyrénées du 14 février 1845, compte-rendu d'un procès aux Assises de Pau :

" Si la chasse a ses douceurs', elle à bien aussi ses dangers, surtout depuis cette malencontreuse loi du 12 mai 1844, qui est destinée à éterniser la querelle des braconniers et des gendarmes. Le dimanche, 20 octobre dernier, était jour de loisir pour les gens de Làas, canton de Navarrenx , et le beau bois de Làas devait foisonner de palombes ce jour-là. Une partie de chasse était convenue entre Larrieu père, Larrieu fils, Jean Bartholou fils, François Crampe! et François Hounloun ; et dès l'aube du jour ces cinq paysans de Làas étaient postés à la palombière, sorte de cabane aérienne, au- dessus de' laquelle s’agite une palombe-appeau, qui attire, les palombes voyageuses. Nos chasseurs attendaient les palombes; ce furent; les gendarmes qui arrivèrent. Roussel, l’un d’eux, demanda aux délinquans le permis de chasse ; ils répondirent qu’ils n’en avaient pas. Ceci était croyable. Roussel demanda leur nom ; ils répondirent qu'ils n’en avaient pas. Ceci paraissait peu vraisemblable. Et comme les chasseurs étaient perchés sur l’arbre de la palombière, Roussel grimpe au haut de l’arbre. Ils se dispersent comme des oiseaux et disparaissent dans les branches ; l’un d’eux , cependant, Larrieu père, plus intrépide que ses compagnons, s’élance comme un écureuil , saisit le gendarme à la jambe, disant : « Veux-in tomber sur les pieds ou sur la tête ? — Ce serait « une lâcheté indigne de vous, » répondit le gendarme avec sang-froid et sans s’effrayer du terrible dilemme.— Ce mot presqu’héroïque  désarma Larrieu père. Le gendarme , descend ; tous les chasseurs le suivent; une fois au bas de l’arbre, les gendarmes somment les délinquans de dire leur nom ou de se rendre devant le maire de leur commune. Les chasseurs s’y refusent. Une mêlée s’engage , et le gendarme Roussel reçoit à la tête plusieurs blessures qui l'ont retenu au lit 17 jours. Ces faits n’ont pas paru au  jury réunir les caractères du crime de rébellion. Les cinq accusés ont été acquittés."

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Le réel ne passera pas

22 Septembre 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La gauche, #Débats chez les "résistants", #coronavirus-vaccination-big pharma, #La droite, #Souvenirs d'enfance et de jeunesse

Dimanche 17 septembre 2023, à la Fête de l'Humanité, Ritchy Thibault, gilet jaune, co-fondateur du collectif Peuple révolté s'est invité au débat organisé entre le député PCF du Nord, Fabien Roussel, et Edouard Philippe ex-premier ministre candidat, actuel favori de l'oligarchie pour la prochaine présidentielle, afin de souligner que ce dernier avait "du sang sur les mains" et était un "éborgneur" (cf vidéo du Média ci-dessous). Ce jeune militant a été immédiatement et brutalement exfiltré par le service d'ordre pour que les politiciens professionnels puissent débattre "entre gens de bonne compagnie".

Il ne faisait pourtant que dire la vérité, et il aurait pu ajouter aussi que le maire du Havre était co-responsable avec Macron et les oligarques internationaux du premier confinement criminel pendant la psy-op du Covid 19. Mais il ne faut pas trop souligner tout cela, même dans les milieux de gauche (qui avaient été si timidement pro-gilets jaunes, et si absents pour s'opposer au confinement), et conserver l'image d'un gentil "Doudou" avec qui on peut sagement discuter et qui aurait juste le tort d'être un peu trop "centriste" (tu parles, un vrai Adolphe Thiers oui !).

Comme je l'avais raconté dans l'Ingérence de l'OTAN en Serbie, la publiciste parisienne Elisabeth Lévy, du temps où elle m'invitait à dîner chez elle, avait pondu un article intitulé "Le réel ne passera pas" (alors d'ailleurs que ses propres amis faisaient le nécessaire pour couler la part de réel que j'avais moi-même à faire "passer" sur les Balkans en me faisait miroiter la publication d'un bouquin chez Albin Michel pour ensuite flinguer cette possibilité). Un journaliste du Monde Diplo qui m'écrivait hier pour chercher des contacts à Belgrade afin d'y enquêter sur les événements de 1999 me faisait repenser à tout cela.

En réalité, le fait que le réel ne puisse "pas passer" est une constante depuis 25 ans. Et aujourd'hui comme hier, on a le choix entre un journalisme mainstream aux ordres, et un théâtre de marionnettes de faux opposants embourgeoisés, dans les meetings soi-disant "communistes", ou, pire, dans les vidéos ridicules de YouTube (j'englobe dans cette liste les youtubeurs nombrilistes demi-habiles façon Rougeyron, Asselineau, Collon etc). Tous sont là pour normaliser, simplifier, caricaturer le réel, pas pour le faire passer. Et les gens sincères qui auront des choses désagréables à rappeler, après avoir été éborgnés, placés dans des gardes à vues arbitraires, avoir perdu leur job etc, pourront éventuellement être instrumentalisés par ces talking heads pour un ou deux coups d'éclats médiatiques. Mais, soyons en certains : le réel, lui, avec toute sa profondeur, ne passera pas.

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Crimes ancestraux

31 Mai 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Espagne, #Souvenirs d'enfance et de jeunesse, #Grundlegung zur Metaphysik

Peu après mon passage à Cienfuegos fin avril, je parlais, avec un guide cubain dont voici la photo à droite.

Je lui disais que mon arrière-grand père espagnol (à gauche ici) en 1898 s'était engagé pour aller faire la guerre à Cuba contre les Américains, dont il a d'ailleurs été ensuite prisonnier pendant plusieurs années.

"Ah ! s’il est venu à Cuba, me répondit le guide, tu dois avoir des tas de petits cousins inconnus sur cette île, vu les mœurs de l’époque", façon élégante de dire qu’il avait probablement engrossé de gré ou de force pas mal de filles créoles, noires ou mulâtres… Je lui ai raconté aussi que, de retour à son village en Aragon, il dansait la rumba d'une manière telle que les paysans pensaient qu'il était possédé. Alors le guide lâcha une bombe qui ne figurait pas dans le Guide du Routard : la rumba est au départ une danse religieuse de la santeria, en l’honneur de la déesse aquatique Yemayá. Y aurait-il donc eu de la réelle possession ou un pacte inconscient avec une mauvaise entité dans tout cela ?

En tout cas, sur le volet tout simplement de la mémoire familiale des traumatisme et des crimes, certes le bisaïeul est rentré en Espagne anti-militariste et professait des idées de gauche (si bien que toute sa famille fut républicaine en 1936-1939 et contrainte à l'exil), mais cela ne le blanchit pas pour autant de tout ce qu'il a pu faire sur la grande île. Ai-je à effectuer un tiqqun, une réparation sur ce plan là ?

J'ai repensé à cela en regardant cette émission sur une Alsacienne qui porte la culpabilité d'un oncle criminel de guerre.

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L'admirateur secret de Bourdieu dans le Caucase

3 Mai 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Abkhazie, #Souvenirs d'enfance et de jeunesse, #Le monde autour de nous

J'ai déjà évoqué dans un de mes livres ma rencontre avec Bourdieu en 1990, comment elle m'a donné envie de faire un doctorat de sociologie. Ceux qui ont lu mes ouvrages savent aussi qu'en 1999-2000 j'ai tenté de pousser cette sommité du collège de France à s'engager sur les Balkans un peu au delà des positions trostkystes de Catherine Samary. Je renvoie aussi ceux que ça intéresse à mon vieil article sur Bourdieu et Chomsky. Or, juste après la publication du livre de Békir Ashuba sur l'Abkhazie que je viens de préfacer, je découvre un travail singulier qui fait le pont entre Bourdieu et le Caucase, ouvrage écrit par un prof arménien d'une antenne de l'université de New-York à Abou Dhabi, Georgi M. Derluguian, intitulé Bourdieu's Secret Admirer in the Caucasus: A World-System Biography (Presses universitaires de Chicago, 2005).

Il convient donc que j'en dise ici un mot.

Le livre tourne autour du "cas" de Musa Shanib (Moussa Chanib en translittération française)  chef nationaliste circassien dont Bourdieu eut le portrait dans son bureau au Collège de France.

Charib est né à Natchiv, République de Kabardino-Balkarie. Destiné à devenir un fonctionnaire provincial (il a été procureur dans sa ville), il avait déjà orienté ses études sous Khrouchtchev dans un sens anti-stalinien en choisissant comme sujet de mémoire l'application de l'Etat de droit dans un cadre socialiste. Face à une sorte de nomenklatura locale qui contrôlera les pouvoirs des années 1950 aux années 2000, Chanib (à l'époque Chanibov) se range en 1968 du côté du socialisme à visage humain. Il est un équivalent des soixante-huitards français, ce qui lui confère dans l'URSS brejnévienne de quasi-dissident ou du moins d'empêcheur de prévariquer en rond...

Le livre a beaucoup vieilli sur le volet théorique - par exemple les débats autour de Wallerstein, star de l'altermondialisme des années 2000-2005. Du coup, je crois qu'on peut ne retenir de ce livre que le matériau empirique réuni dans le premier chapitre.

Derluguian qui a quitté le Caucase à 16 ans (en 1977) pour aller étudier à Moscou, puis pour aller travailler en Afrique enracine son matériau dans la réalité ethnographique locale à l'égard de laquelle il estime avoir une réflexivité suffisante du fait de son propre déracinement qu'il compare à celui de Bourdieu à l'égard du Béarn (p. 31).  Il analyse cependant les limites de ses propres possibilités d'investigation. Par exemple le fait qu'il soit un homme dans une société très patriarcale l'a empêché d'interviewer les femmes. Et puis, dans le Caucase, selon le proverbe, l'invité est le prisonnier de son hôte, ce qui limite les possibilités d'interroger les gens en cuisine par exemple. Il essaie de compenser cela par la lecture d'enquêtes de femmes journalistes comme Anna Politovskaïa.

En 1997 juste après les premiers revers russes l'auteur était à Grozny/Djohar-kala (le nom que lui attribua Yandarbiyev) avec un anthropologue. Il décrit un meeting politique sur la place centrale, le cadre visuel de la ville avec l'avenue Gorbatchev, la place Khroukhchtchev (parce que celui-ci avait abrogé le décret stalinien de déportation des Tchétchènes) ou une affiche qui disait "Les QG du bataillon islamique sont maintenant rue Rosa Luxembourg".

Le regard de Derluguian sur les chefs tchétchènes comme Doudaïev, Yandarbiyev etc est assez drôle. Je note que sur Chamil Basaïev (dont Bekir Ashuba parle en détail dans son livre) il note que "sorti de l'université de Moscou, il a démontré sa capacité de brillant autodidacte de la guérilla à défaut d'autre chose". Il nous apprend qu'Ichkeria (le nom islamiste de la Tchétchénie sous lequel l'Ukraine en ce moment la reconnaît) veut dire seulement "l'endroit là bas" en kumyk, qui fut avec le tatar, la lingua franca du nord-caucase comme le swahili en Afrique de l'Est. Le nom fut appliqué par des Russes à une partie de la Tchétchénie (le mot Tchétchénie lui-même étant un nom colonial extrapolé de celui d'un village - p. 36). Le nom est devenu exotique et repris dans un poème de Lermontov (1814-1841) admiré par Doudaïev. La Tchétchénie n'avait ainsi aucun nom propre indépendamment des dénominations coloniales, et dans la recherche d'originalité qui caractérisait tous les territoires en rupture avec le passé soviétique, parmi celles-ci, c'est Ichkeria qui fut préférée.

Derluguian fournira une comparaison intéressante entre les processus du Nord-Ouest de l'URSS, ceux du Caucase Nord, et ceux du Caucase Sud. Il montre par exemple qu'alors que dans la partie européenne des intellectuels de renom ont dirigé l'opposition et négocié la sécession, en Arménie comme en Azerbaïdjan les intellectuels organiques qui sont très russifiés, tout comme les secrétaires généraux des partis, paralysés par les hésitations de Gorbatchev lui-même sous l'épée de Démoclès des Brejnéviens, sont débordés par une intelligentsia périphérique, qui s'appuie sur un jeune sous-prolétariat à qui la cause nationaliste fournit une promotions sociale inespérée.

 

 

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Angélique et le Roy

9 Avril 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Cinéma, #Le monde autour de nous, #Les rapports hommes-femmes, #Grundlegung zur Metaphysik, #Divers histoire, #Souvenirs d'enfance et de jeunesse, #Colonialisme-impérialisme

Je regardais tantôt, en déjeunant, sur Paramount TV, un morceau d' "Angélique et le Roy", charmant petit film des années 1960 qui rappelle le temps où la France avait encore une culture sûre d'elle, qu'elle mettait même en scène dans ses bleuettes pour caissières de Prisunic.

On ne se torturait point l'esprit, en ce temps là, avec le "wokisme"(une idéologie qui n'a cependant pas que des défauts, même si elle en a beaucoup). On mettait en avant un féminisme de pacotille, qui servait plus à jouer avec le mâle qu'à le haïr. Et bien sûr il y avait alors un dedans et un dehors : dehors se trouvait le barbare - cet ambassadeur de Perse qui n'est bon qu'à violer. Les frontière entre les deux comme entre le haut et le bas étaient très claires, et, de ce fait, on pouvait s'amuser à tenter (mais tenter seulement) de les transgresser parfois.

L'ouvrier devait rêver (mais rêver seulement , en salle obscure) de marquisat. "Vous me trouverez à la cour, dont je suis" lance la marquise à l'ambassadeur après qu'il eût tenté de jouer avec elle. Dont je suis, dont vous n'êtes pas... et dont le téléspectateur n'est pas non plus.

Le film ne dit rien de la France de Louis XIV, et tout du regard que la bourgeoisie parisienne (ou parisianisée) des années 1960 portait sur elle, ou ce qu'il pouvait en rester à son époque... dans cette France qui se voulait encore un peu au dessus du monde...

Cette bourgeoisie qui commandait encore au pays en 1980 et 1990 n'était bien sûr pas disposée à m'intégrer en son sein. J'ai eu beau avoir ses diplômes, je n'ai jamais maîtrisé ses codes (ses manières, son accent), ni sa tournure d'esprit.

Il n'y a par exemple jamais eu la moindre familiarité entre moi et les lieux de la noblesse du bassin parisien comme Reims, Versailles ou Senlis, lieux dans lesquels nos bons bourgeois projetaient leur imaginaire (je suis un homme des périphéries, voyez ce livre, comme l'amusant et chaotique Juan Branco qui disait il y a cinq jours avoir défendu face à Mélenchon la grandeur de Louis XIV, mais lui a grandi à Paris et dans les jupons occultistes de Catherine Deneuve... pas moi).

Qu'aujourd'hui cette bourgeoisie en ait enfanté une autre qui a vendu l'âme de la France à l'empire américain et à son élite sataniste et globaliste est son problème plus que le mien. Asselineau a beau agiter les grigris eurasiatiques pour rompre cet envoûtement, ce n'est pas par cette voie qu'il arrachera sa terre au purgatoire.

La bourgeoisie des années 1960 avait préparé le chemin, non seulement en s'apprêtant à voter pour Giscard et Mitterrand dix ans plus tard, mais déjà en méprisant le christianisme et les racines spirituelles profondes de l'hexagone. Dans Angélique on vénère les richesses matérielles, les belles robes, le sexe de la femme que les nobles se disputent... et l'on cherche des substances alchimiques pour acquérir des pouvoirs magiques.

Comme dans Pif Gadget (alors communiste), Dieu est absent.

Aujourd'hui Pif Gadget interviewe Macron. Si la Marquise des Anges reprenait vie, elle aurait maintenant les traits d'un "transgenre" amoureux de notre président, dans un monde sans frontière (plus de haut, plus de bas, plus de nous et plus d'eux, plus de mâles ni de femelles, plus de bien plus de mal), et sans l'artifice de l'élégance versaillaise, même une élégance kitsch, pour dissimuler la chute du pays.

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Nos Frangins de Rachid Bouchareb

24 Décembre 2022 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Souvenirs d'enfance et de jeunesse, #La gauche, #Cinéma, #Béarn

Sur les conseils d'un ami béarnais avec lequel je manifestais dans les rues de Pau en 1986 contre la loi Devaquet, je suis allé voir le film "Nos frangins" de Rachid Bouchareb  sur les affaires Oussekine et Benyahia qui ont éclaté au milieu de notre mouvement.

Je n'ai pas regretté d'être allé le regarder. C'est un bon film documentaire même si, comme le relèvent les critiques, cela manque un peu de ressort dramatique. J'ai été de ceux qui ont manifesté en hommage à Malik Oussekine, et pourtant il y a des choses que je ne connaissais pas à son sujet, notamment sa conversion au christianisme. Je n'avais pas non plus entendu parler de l'affaire Benyahia. En tout cas, elle ne m'a pas marqué. Je ne savais pas non plus que les voltigeurs des la police ont été réintroduits en 2018 au moment de la crise des Gilets Jaunes. L'ex-patron du Raid devenu Macronien en mai 2019 avait lui même télescopé les deux époques d'une manière sensationnelle... Il y avait un gros problème de racisme dans les forces de l'ordre en 1986... et il a perduré...

Le dimanche 7 décembre 1986, 254 114ème jour de ma vie (j'avais fait le décompte), j'écrivais : "La tournure que prennent les événements est préoccupante... Avec une incroyable intransigeance , nos dirigeants ont attendu que le mouvement s'essouffle de lui-même.

Hélas jeudi soir les manifestants pacifiques des universités ont été débordés par des éléments extrémistes qui ont enclenché un cycle de violence dans le cadre des grèves ; les forces de l'ordre ont adopté une attitude totalement indigne, à la limite de la barbarie. Les seules victimes de la répression furent évidemment les étudiants non-violents, tandis que les marginaux se sont appliqués à entretenir durant tout le weekend un climat insurrectionnel dans la capitale.

Pendant ce temps, les grévistes modérés qui portent le deuil d'un des leurs tué par un policier dans la nuit de vendredi à samedi radicalisent leurs positions tandis que le gouvernement se refuse toujours à retirer le projet de loi qui a suscité l'apparition du mouvement contestataire il y a plus de dix jours.

En jouant la politique de l'attente sereine, le gouvernement prenait le risque de voir les jeunes grévistes politiser leur action ou même rejoindre l'état d'esprit de mai 68." Je noircissais ensuite quelques pages dans un style un peu convenu sur la jeunesse qui ne veut plus des sacrifices ni du désengagement de l'Etat.

En novembre 86 j'avais aussi tenu la chronique de ma participation aux grèves et aux manifestations dans mon lycée. L'adolescent que j'étais n'avait visiblement bien écouté les informations, puisque je prenais Malik Oussékine pour un gréviste alors qu'il ne périt que comme un passant qui s'est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Les réalités parisiennes, à ce moment-là, étaient à 900 km de mon quotidien...

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