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Le blog de Frédéric Delorca

Frédéric Delorca au salon du Premier roman à Draveil

9 Novembre 2009 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La Révolution des Montagnes

Frédéric Delorca sera au salon du Premier roman à Draveil avec "La Révolution des Montagnes" (Editions du Cygne)

samedi 14 novembre 2009
Heure : 14 h à 18 h

Théâtre Donald Cardwell
1   allée de Villiers 
91210  DRAVEIL
Tel: 01 69 40 95 00
Fax: 01 69 03 10 67

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Un témoignage sur les dissidents en Pologne

8 Novembre 2009 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE

 

Je recevais récemment le témoignage suivant d’un militant de gauche polonais :

 

"On peut réfléchir sur le cas de X (un dissident polonais célèbre) qui dirige la cellule du Parti communiste à la section parisienne de l'Académie polonaise des sciences dans les années 1960, en charge donc de surveiller les intellectuels et scientifiques polonais en séjour à Paris, et qui, par le biais de ses contacts avec l'EHESS (créée par des financements US pour contrer l'influence "communiste" du CNRS et où officie jusqu'au début des années 1960 Negroponte chargé du ...recrutement du personnel), passe petit à petit vers l'anticommunisme, officialisé en 1968, ...ce qui va lui assurer de meilleurs revenus. Toucher des honoraires en devises pour des bouquins ou interviews qu'on donne à l'ouest grâce à ses relations, fait de chaque Polonais dans ce cas un quasi millionnaire avec le change parallèle ...et si en plus on a l'auréole du martyr tout en s'achetant maisons, bagnoles, etc !!!

La question est pourquoi les pouvoirs polonais acceptent cela et ne le licencient pas de ses postes universitaires en Pologne, ou ne le marginalisent pas au moins, ce que l'URSS ou la RDA vont pratiquer plus longtemps.


Je ne suis pas un adepte de l'histoire policière pour expliquer les processus historique, mais je ne peux nier qu'ils ont été accompagnés par des agents qui ont pu appuyer ces processus sociaux.


Et cela donne sans doute en partie raison à Staline (pas sur les méthodes certes, mais sur l'analyse des phénomènes et l'omniprésence d'ennemis là où ils pouvaient se manifester). Il connaissait bien aussi, et pour cause, l'immense servilité des intellectuels. Et comme "patron" recruteur, les USA avaient plus de moyens que l'URSS, et ont donc pu mieux jouer sur la servilité de ceux qui, étant connus "mondialement" (grâce à qui ???), ne pouvaient pas subir de vraies répressions, à la différence des petits opposants.

 

Il faut savoir que, dans le cas de Solidarnosc par exemple, il y a quand même des flots de dollars qui ont afflué. Il était plus rentable économiquement pour un Polonais de se voir publier entre 1982 et 1989 par les éditions clandestines qui assuraient des droits d'auteur que par les éditions officielles. J'ai été témoins de ces conversations avec des universitaires de Cracovie à l'hôtel cinq étoiles Cracovia en 1983 ...et ces universitaires étaient admiratifs devant les "capacités d'organisation de ces clandestins qui organisent des maisons d'édition professionnelles et qui payent mieux que les éditions d'Etat" ...naïveté ??? l'argent tombait-il du ciel ou simplement des ventes. Ils semblaient le croire !!!!

 

J'ai une amie de Poznan médecin émigrée en France qui m'a dit qu'elle a décidé d'émigrer, dégoûtée, quand elle est arrivée à Varsovie au milieu des années 1980, dans le cadre de ses activités clandestines à Poznan et qu'elle a débarqué dans un milieu dissident d'une richesse incomparable, avec celui des classes moyennes polonaises. Elle a compris alors qu'elle s'était faite avoir en trimant la nuit à sortir des tracts au nez de la police, et qu'il y avait beaucoup d'argent à Varsovie chez ses chefs, que les grands pontes de la dissidence se le partageaient ...sous les regards de la police d'Etat qui en récupérait aussi une partie à l'occasion de certaines fouilles, mais sans tuer la poule aux oeufs d'or, la source occidentale : CISL-AFL/CIO-NED-CIA."

 

 

 

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Les ex-dissidents d'Europe de l'Est et le Tiers-monde

8 Novembre 2009 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Débats chez les "résistants"

Quelqu'un me demandait ce matin pourquoi les ex-dissidents du bloc de l'Est, alliés aux "réformistes" gorbatchéviens sont tous devenus les pires laquais du néo-conservatisme américain au point de se faire les zélateurs de la guerre en Irak. N'est-ce point le signe, me demandait-il, qu'ils étaien déjà objectivement dès 1970-75, les alliés objectifs du capitalisme états-unien (même si beaucoup se croyaient de gauche) ? 

Pour ma part je ne suis pas convaincu que tous les dissidents aient basculé dans le camp pro-Occidental ou anti-communiste. Un type comme Alexandre Zinoviev par exemple n'a pas basculé dans ce camp (même si son itinéraire n'est pas forcément très glorieux). Piotr Ikonowicz que je cite dans mon livre sur la Transnistrie a ussi gardé une position intègre.
 
Mais il y a un phénomène de génération qui fait que ce qui s'énonçait dans les années 70 dans les formes du libertarisme, se formule trente ans plus tard dans les mots du néo-libéralisme. A ce phénomène s'ajoute un mécanisme de vieillissement et d'embourgeoisement des individus qui, à force de fréquenter les salons littéraires occidentaux, se laissent contaminer par leurs idées. Seule une minorité peut rester, passée la cinquantaine, éthiquement pure et ostracisée par le reste des élites.
 
Je ne pense pas qu'on puisse en déduire a posteriori que ces mouvements étaient déjà capitalistes ou néo-libéraux dans l'âme. Parce qu'alors raisonner de la sorte (avec une anachronisme rétrospectif) reviendrait à condamner comme potentiellement capitaliste toute critique libertaire du socialisme autoritaire depuis Bakounine jusqu'au Black block d'aujourd'hui.

Et puis il y a une particularité de l'Europe de l'Est. Des processus culturels très complexes y sont à l'oeuvre. Rien n'est binaire. Il y a d'abord leur extrême fascination pour l'Europe de l'Ouest et leur frustration d'en avoir été coupés. C'est un mécanisme psychologique puissant qu'on trouve même chez les poutiniens et les partisans de Milosevic.
 
En outre il existe un racisme profond à l'égard du Tiers monde (des Chinois, des Noirs, des Arabes) qui les fait facilement basculer dans le camp des "valeurs occidentales", y compris du sionisme en tant qu'il se pense comme avant-garde de ces valeurs (et ce malgré e vieux fond antisémite qui travaille ces pays). En 2000 l'opposition serbe faisait campagne sur le thème "nous sommes plus proches de Badgad que de Londres "et "les Chinois nous envahissent".
 
Ce n'est pas un hasard si Balkans Infos, tout anti-américain qu'il fût, ait en grande partie basculé comme leur ami Jean Robin dans le camp sioniste (un de ses journalistes m'a reproché de m'allier "aux pires ennemis des serbes" parce que, après avoir combattu l'agression de l'OTAN contre la RF de Yougoslavie, je suis resté solidaire du Tiers monde), non que Balkans Infos soit à proprement parler "raciste" à l'égard des peuples du Tiers-monde, mais les guerres civiles yougoslaves les ont fait évoluer dans une ambiance islamophobe qui au final les conduit à se sentir beaucoup plus proches de fervents défenseurs d'Israël que des chantres de l'esprit de Durban. Là encore même les poutiniens jouent un jeu très ambigu entre Arabes et Israéliens. Il n'est pas étonnant que ces tropismes qui affectent les parties les plus anti américaines de ces sociétés aient a fortiori fonctionné sur les "dissidents" qui fréquentaient les salons littéraires du quartier latin voire du Figaro Magazine.

Ce facteur culturel va de pair avec l'influence matérielle des réseaux (par exemple le rôle de l'EHESS comme trait d'union entre les dissidents et l'Oncle sam). Cette profonde "déconnexion" pour parler comme Samir Amin entre les ex-dissidents d'Europe de l'Est et les causes progressistes du Tiers-monde, n'est qu'une exagération d'une autre déconnexion très profonde entre les sociétés de ces pays et celles d'Asie ou d'Afrique. Si bien qu'il me semble que les nouvelles alliances entre Poutine et Chavez, ou même sur un mode plus ambigu entre Moscou et Pékin - alliances dont se réjouissent les tiers-mondistes - participent davantage de froids calculs géopolitiques au niveau des Etats que d'un réel rapprochement entre les peuples. Ce froid calcul bismarckien est toujours réversible et peut se retourner en sainte-alliance russo-occidentale contre le reste du monde, si les Etats-Unis cessaient de jouer la carte de l'encerclement de la Russie (ce qu'une partie de l'administration Obama semble prête à faire mais que la partie la plus belliciste des élites étatsuniennes s'emploiera toujours à contrecarrer).

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Lévi-Strauss, 11 novembre, mur de Berlin

6 Novembre 2009 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Divers histoire

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Lévi-Strauss et Bourdieu

5 Novembre 2009 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Pour répondre à JD, et parce que la Levistraussmanie répandue de l'Humanité au Figaro Magazine m'énerve à peu près autant que l'Obamamanie, et tous les phénomènes grégaires de notre époque (engouements de gens paresseux qui manifestent leur unanimisme autour de vieilles valeurs scolaires mal digérées), je dirai un mot sur Lévi-Strauss et Bourdieu (après tout, j'ai écrit sur Bourdieu et Chomsky dans le Cahier de L'Herne Chomsky alors pourquoi ne pas poursuivre dans les grandes comparaisons ?).

En effet Lévi-Strauss a influencé Bourdieu. Mais il faut voir comment Bourdieu fonctionnait. Au début des années 60, il est un jeune normalien agrégé de philo spécialisé dans l'épistémologie (formé par Bachelard). C'est un homme qui aime la polémique autant que les dissertations brillantes (comme les gens formés par son école) qui ne rechignent pas devant certains effets de manche. Il partage un mélange d'admiration et d'esprit de rivalité à l'égard des stars du monde intellectuel de son époque (notez que je n'emploie pas de vocabulaire bourdieusien pour décrire le phénomène, alors que je le pourrais). Sartre est une de ces stars qu'il admire et veut en même temps renverser (Frantz Fanon est dans un rapport voisin à l'égard de Sartre, mais avec moins de chances de notoriété dans le milieu intello parisien - Foucault aussi est dans ce rapport). Lévi-Strauss en est une autre. Bourdieu fait le choix des sciences humaines contre la philosophie, et plus précisément de l'ethnologie contre la philosophie sartrienne, et il choisit la Kabylie comme terrain d'observation, comme Germaine Tillon (notez que je cite toujours des cas "comparables" parce que les bios officielles oublien toujours les comparaisons).

Dans le cadre de son travail ethnologique, Bourdieu reprend les techniques lévistraussiennes de comparaisons des structures de parenté (qu'il développera dans sa thèse, puis dans son fameux Bal des Célibataires sur le terrain béarnais). Mais comme il n'est pas homme à singer bêtement son maître, et comme, ainsi que le remarque JD, il n'est pas issu du même milieu social que Lévi-Strauss, Bourdieu remarque que les stratégies matrimoniales sont l'occasion de mobilisations de capital, et de pratiques corporelles qui diffèrent beaucoup en fonction du positionnement hiérarchique des candidats au mariage. On a là les prémices de ce qui va être sa théorie de l'habitus et du capital.

Je me souvient qu'il disait au collège de France que la découverte en Kabylie de cet aspect éclairait à ses yeux son vécu social en Béarn et qu'elle le bouleversa très profondément. Il l'a d'ailleurs redit, je crois, dans son livre autobiographique posthume.

Cette sensibilité aux pratiques corporelles et aux inégalités était, disait-il, un moyen d'ancrer le structuralisme de Lévi-Strauss dans la chair, de le sortir de son abstraction de simple jeu d'études conceptuelles de systèmes de signes an-historiques. Il allait l'élaborer théoriquement encore plus par des emprunts à la linguistique pragmatique anglo-saxonne (Austin) qui pouvait déplacer l'intérêt pour le langage de la structure des signes vers les paroles en acte (voir Ce que Parler veut dire publié au début des années 80)

La transposition des études structurales du langage à l'anthropologie (Lévi-Strauss), à la psychanalyse (Lacan), au marxisme (Althusser), exerça une fascination profonde sur la jeunesse des années 60, et donc aussi sur Bourdieu qui avait ce tropisme du Quartier latin (malgré des tendances anti-intellectuelles fortes). Mais comme Bourdieu dut tenter de faire survivre son système aux critiques acerbes du structuralisme (qui apparaissent dans les années 1970), il va prétendre non seulement que son structuralisme est plus ancré dans la chair que celui de Lévi-Strauss, mais aussi qu'il permet de dépasser ce qu'on reproche le plus au structuralisme lévistraussien : son an-historisme. Avec la théorie de l'habitus et des luttes pour la domination symbolique, on peut expliquer, dit Bourdieu, comment on passe d'un système symbolique dans un autre, c'est à dire comment les valeurs dominantes des champs et des espaces sociaux évoluent dans le temps. Ainsi Bourdieu appellera-t-il sa théorie "structuralisme génétique", parce qu'il réintroduit de la genèse (ce qui a aussi quelque chose à voir avec les thèses de Piaget, si je me souviens bien, qui était aussi dans une démarche très "ontogénétique" d'étude des stades d'évolution des schèmes de perception chez le jeune enfant - toute la conception piagetienne et néo-kantienne des schèmes est importée dans la notion d'habitus).

Toute cette construction théorique est extrèmement scolastique et a nourri des débats à n'en plus finir sur l'habitus bourdieusien, ses conditions de formation et d'évolution, débats absolument dépourvus de base empirique évidemment.

Mais on voit bien là la dette à l'égard de Lévi-Strauss.

La dette s'inscrit en positif et en négatif. Je dois dire que je suis très sensible au versant négatif du structuralisme, car il a imprimé un style de réflexion anti-scientifique (sous couvert d'ailleurs de prétention à 'hyperscientificité par moments, Lévi-Strauss proclamant même sa volonté de chercher une mathesis universalis des mythes) qui pollue encore aujourd'hui le débat intellectuel. Le structuralisme repose sur un amour des grandes spéculations gratuites (en ce sens il  a prolongé l'hégélianisme et le marxisme) qui a nui à la pensée du XXème siècle.

En ce moment on m'objecte que Lévi-Strauss a eu le mérite d'abolir l'évolutionnisme raciste qui voyait dans l'homme blanc l'oméga de l'histoire humaine. Je pense que ce travail de conquête de l'universalité du regard par l'ouverture à d'autres peuples avait déjà été entrepris par le maître de Lévi-Strauss (et neveu de Durkheim) Marcel Mauss, qui avait eu le mérite de l'inscrire dans un intérêt empirique pour les pratiques corporelles que le logocentrisme du structuralisme a oblitéré. Et c'est vrai Lévi-Strauss avait un côté grand bourgeois qui l'a fait débuter à la SFIO (comme Mauss), et terminer sa carrière dans une sorte de relativisme conservateur à la Montaigne (sauf que le relativisme de Montaigne était encore subversif au 16 ème siècle, et ne l'était plus au 20 ème) A côté de cela il gardait pas mal de préjugés de sa caste ou de sa culture d'origine, par exemple sur l'Islam.

Des esprits comme Lévi-Strauss, Bourdieu ou Sartre sont des particularités typiquement françaises, des produits de l'aristocratisme intellectuel français. Produits de grandes écoles où le savoir littéraire est sacré, ils se pensent eux-mêmes comme des grands prêtres. Ils puisent dans ce statut l'énergie de réaliser d'immenses synthèses de connaissances diverses cueillies ici et là. Des synthèses qui s'enracinent dans des intuitions originales, mais qui se montent comme de grandes cathédrales systématiques fascinantes, susceptibles de nourrir des exégèses complexes quand on les considère de l'intérieur, mais finalement assez fragiles et biaisées quand on les regarde de l'extérieur.

Trop de système tue le système.
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