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Le blog de Frédéric Delorca

Zorro défiguré

31 Octobre 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

zorro.jpgJe suis allé voir avec mon fiston un spectacle pour enfants un peu débile au Théâtre des variétés à Paris : Zorro. Que le spectacle sur veuille "actualisé", féministe, dans l'air du temps etc. Pourquoi pas ? Mais qu'il prenne de l'air du temps ses aspects les plus faciles, les plus vulgaires : les clins d'oeil aux grandes séries américaines (et aux grands produits de consommation), un petit libertarisme de bas étage qui ridiculise tout ce qui peut marquer les hiérarchies sociales (le baise-main, le salut militaire etc), et tout ce qui peut élever un peu le coeur et l'esprit (l'esprit de sacrifice de Don Diego de la Vega par exemple) je n'en vois pas trop l'intérêt.

 

La série des années 50 avait un versant libertaire (car la culture américaine a toujours joué sur cette corde pour se diffuser), mais elle ne bradait pas son esprit de rebellion. Elle ne caricaturait pas la société hiérarchique dont Zorro vengeait les injustice, et elle plaçait l'idéal de rébellion au service d'une éthique de la révolte exigeante, pas d'une petit esprit de jouissance consumériste au fond profondément essoufflé.

 

En rentrant chez moi je retournais dans ma tête cet essoufflement de notre société. Les gens n'osent plus avoir une pensée plus haute que l'autre, un mot plus haut que l'autre, un désir ou une colère plus hauts que les autres. Le règne de la fadeur partout (sauf quand les gens se font sauter dans des centres commerciaux, à défaut d'audace dans les mots certains ne savent plus en avoir que dans les gestes). Il semble que tout un chacun se sente si humilié par le système économique et social dans lequel il/elle vit, si rabaissé(e) par lui, qu'il/elle ne voit plus l'intérêt de cultiver une passion personnelle digne de ce nom, un objectif un peu ambitieux. L'idée même d'ambition est devenue risible, dans la soumission comme dans la rébellion. Pour tous il faut seulement vivoter.

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Future brain

28 Octobre 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le quotidien

De retour au nord de la Seine, j'ai avancé un peu la rédaction de mon livre de philo. J'ai aussi écrit un billet du blog de l'Atlas alternatif sur la progression de la Turquie dans les Balkans (un mouvement que l'on pressent depuis l'envoi de soldats turcs dans le contingent de la Kfor au Kosovo en 1999).

 

J'ai jeté un coup d'oeil sur l'interview de Jaron lanier dans le journal Le Monde du 22 octobre. On sent bien l'angoisse montante devant le fichage généralisé de tout le monde via les mails et Internet (heureusement révélé par Snowden) et devant l'accaparement d'un savoir gigantesque par les multinationales - ce matin Total qui a appris, on ne sait trop comment, que ma compagne va changer sa chaudière, m'envoie à mon nom (alors que rien n'est à mon nom dans ce domaine en général - qui les a informés ?) une offre d'une générosité qui m'émeut jusqu'aux larmes : on vous offre 50 euros si vous changez votre chaudière auprès de nos services. Ben voyons !

 

don_quichote300.jpg

Chères multinationales, je vous méprise ! Chers fliqueurs, scanneurs, rois du conditionnement, de la manipulation et du marketing, vous ne m'aurez pas. "Future brain, you're getting stronger, but you're to blame 'cause you don't know how stupid you are" comme chantait l'autre. Plus vos ordinateurs engrangent de la médiocrité et l'intègrent à leurs paramètres, moins vous pouvez comprendre ce que je pense, et ce que je recherche, car je puise mon eau à d'autres sources que les vôtres, en dehors de charabia planétaire que les gens produisent à longueur de journée.

 

Une amie m'a un peu peiné hier en me disant : "Quand on lit ton blog on a l'impression d'un type en colère qui distille son venin dans son coin. Alors que quand tu produis des billets vidéos dans ta série 'Association d'idées', on comprend mieux ton regard qui est celui d'un juge qui pèse les arguments à charge et à décharge". Vraiment ? Serais-je plus nuancé seulement à l'oral parce que je manque de temps pour l'écriture ? Allez savoir...

 

Mon associé dans la métaphysique de la vision, et l'ontologie artistique, Guillaume Poli, vient d'obtenir le feu vert d'un site de haute volée pour la publication de ses photos sur l'Abkhazie. Une bien bonne nouvelle.

 

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Deux extraits de mails que j'ai envoyés cette nuit

28 Octobre 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

A une commentatrice d'un de mes blogs qui faisait l'apologie de "l'empathie humaniste"

 

"Je comprends que vous ayez apprécié mon appel à l'humilité dans mon petit billet sur Schopenhauer de 2007 (merci au passage de l'avoir exhumé, je l'utiliserai pour mon livre d'histoire de la philo, j'en avais oublié l'existence). On ne cesse jamais de se ressourcer dans l'humilité intellectuelle et morale.

 

Cependant il est un point auquel il faut prendre garde : celui du relativisme (ou pire encore de la perte de vue complète de ce qu'il faut faire pour améliorer les choses à force d'être hypnotisé par les souffrances dont on est témoin). Vous disiez récemment que les dirigeants devraient être dans l'humain. C'est exact. Mais l'humain, ne doit pas nous faire perdre de vue (et ne doit pas faire perdre de vue aux dirigeants) les hiérarchies politiques qui s'imposent. Le devoir qui incombe au citoyen à l'égard de son pays et du monde n'est pas seulement un devoir d'empathie, mais aussi un devoir de hiérarchisation des problèmes et des solutions à proposer, ce qui suppose de ne pas tout mettre sur le même plan.

 

Voilà pourquoi par exemple je n'adhère pas aux emballements médiatiques pour tel ou tel malheur particulier d'un individu, ou d'un groupe humain saisi avec empathie, au détriment d'une identification claire de l'agresseur et de l'agressé et d'une réflexion globale sur l'équilibre politique souhaitable pour une région ou pour l'ensemble de la planète. Cette empathie humanitaire nous a déjà menés à provoquer beaucoup de guerres, ne tombons plus dans ce genre de facilité."

 

A un élu communiste d'une grande ville :

 

" Je pense qu'il serait intéressant qu'un jour le PCF ajoute à son programme municipal un point en faveur d'une coopération décentralisée résolument tournée vers la paix dans le monde, incluant, outre la coopération avec la Chine qui existe déjà, une politique de solidarité avec les pays émergents  du groupe des Brics (Brésil-Russie-Inde-Chine-Afrique de Sud), et des gestes symboliques forts dans la politique culturelle en direction de zones de conflit ouvert (Proche-Orient, Grands lacs africains), de conflits gelés (Moldavie, Caucase) ou même de conflits potentiels. Ce genre de politique, sans nécessairement présenter un coût financier, aiderait à la prise de conscience citoyenne de la place de nos villes dans l'espace mondialisé, et de la responsabilité de tout un chacun dans le développement harmonieux de l'humanité." 

 

 

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De Finibus (1)

25 Octobre 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Antiquité - Auteurs et personnalités

P1010391.JPGEn Béarn, je m'asseois sur un lit, et ouvre au hasard "Des termes extrêmes des biens et des maux, tome 2" (De Finibus bonorum et malorum) de Ciceron (titre qui plagie le Peri Telos de Chrysippe paraît-il). Je tombe sur le morceau où il dit que de passage à Metaponte avec Pison (livre V,II,4), il "n'avait pas voulu descendre chez son hôte sans avoir vu l'endroit où Pythagore avait rendu le dernier soupir et vu le siège où il s'asseyait".

 

Bel exemple de pietas intellectuelle (comme celle de Stefan Zweig, sauf que Zweig dans ses écrits s'excuse presque de ce genre de fétichisme), et une preuve de plus de l'importance de Pythagore dans l'histoire dela pensée occidentale. Ce livre un ami me l'avait offert en 1994 quand je bossais à Madrid, mais je ne l'ai jamais ouvert. Un certain snobbisme philosophique nous faisait snobber Cicéron comme simple plagiaire des Grecs à l'époque (mais forumaujourd'hui nous sommes si en deça des Grecs et des Latins qu'on ne peut que rougir devant la grandeur de cet auteur qui à l'époque nous semblait risible. Ce livre, "Des termes extrêmes" est un peu étrange, inspiré de Platon dans la forme (comme tant de travaux philosophiques). Je trouve amusante l'idée de mettre en scène ses amis. Là c'est Marcus Pison, Quintus Tullius (frère de l'auteur), l'épicurien Titus Pomponius Atticus, l'auteur lui-même et Lucius Cicéron son cousin qui sont campés dans les jardins de l'Académie à Athènes.

 

Ce livre eut un succès énorme jusqu'à Montesquieu qui renonça à écrire un traité de morale estimant qu'il ne pouvait pas rivaliser avec cet ouvrage de Cicéron. Celui-ci l'a écrit l'année de la mort de Caton d'Utique en pleine défaite des pompéiens. Il est moins tardif donc que le De Officiis qui m'avait beaucoup impressionné (pas seulement pour son bel hommage à Marseille). J'espère en parler un peu plus sur ce blog ultérieurement...

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Imago mundi

23 Octobre 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Ecrire pour qui pour quoi

magasin.jpgL'image a une valeur très importante, pour nous primates dont 80 % de l'information sensorielle cérébrale provient de la vue. Une image arrêtée peut condenser une univers entiers, un ensemble de rapports et de rapports de rapports comme disaient les structuralistes (mais chassez vite la référence structuraliste de vos esprits, ce n'était qu'un clin d'oeil humoristique).Elle peut même prendre vie (songez aux travaux de cet anthropologue sur la hantise de l'Afrique du Nord depuis le néolithique de voir les images s'animer, bien avant Galatée).

 

D'où la nécessité qu'il y en ait peu. Notre société démultiplie l'image, comme elle démultiplie l'offre de nourriture, l'offre sexuelle etc. Tout se dénature en se démultipliant.

 

creation.jpg

L'image peinte ou dessinée a une valeur subjective, charnelle. C'est une main d'os, de muscle, de sang qui l'a composée, c'est un cerveau. Elle est le réel, et autre chose : un regard sur le réel. C'est moins évident avec la photographie, où la médiation de le machine est très (trop ?) présente. Et cependant l'assistance de la machine (qui se vérifie aussi de plus en plus dans les autres arts) aide encore à saisir autre chose du réel que l'oeil du peintre. La froideur de la machine, sa "neutralité", son extranéité en tout cas, apportent une "information" supplémentaire sur ce que le monde offre, sur la façon dont on peut le voir.

 

Une image peut être un support extraordinaire de réflexion, de rêverie, de méditation (faut-il oser le mot ?), et soutenir une sorte de mysticisme laïque auquel, malgré tout, je tiens (et qui n'est pas antagonique de la rationalité scientifique, bien au contraire). On me propose de travailler avec de la photo, sur de la photo, et avec le talent (ou le génie, qui sait ?) d'un homme qui a un sixième sens pour ça. Je suis partant. Bourdieu a fait de la photo, Pasolini aussi. J'en ai glissé quelques une (purement informatives, sans visée artistique) dans mon livre sur la Transnistrie naguère. Mon "oui dyonisiaque" à la photographie, pour parodier Nietzsche, ne sera pas un "yes we can", ni un "yes we scan" (comme disent en ce moment les amis de Snowden). Ce sera un choix de rependre le chemin "malgré tout".

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