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Le blog de Frédéric Delorca

Hypatie : l'incapacité de notre époque à penser l'ascétisme

17 Mars 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Antiquité - Auteurs et personnalités

Je vous avais promis un billet sur Synésios de Cyrène, disciple d'Hypatie d'Alexandrie. Mais n'en déplaise aux abrutis d'éditeurs qui refusent mes manuscrits, je consignerai ces considérations dans un livre plutôt que sur un blog.

 

En regardant à nouveau la bande annonce du film Agora et certains extraits (comme celui juste en dessous), je redécouvre un des aspects de ce qui ne va pas dans ce film : Hypatie enseigne dans une belle robe d'aristocrate... Or on ne sait pas grand chose sur elle mais ce qu'on sait avec certitude, c'est qu'elle portait le pallium des cyniques (un manteau qui préfigurait la bure monacale) quand elle enseignat. Peut-être ses élèves aussi. Qu'est ce que ça signifie ? Hypatie était néo-platonicienne, elle avait la chair et le luxe en horreur comme tous les philosophes de son temps. L'ascétisme était sa religion. Voilà qui l'eût rendue moins sympathique à nos spectateurs. La haine de la chair et des richesses est si peu commune de nos jours, et l'ouverture à l'altérité des autres époques (et à l'altérité tout court) si peu répandue !

 


 

 

De larges extraits du film existent aussi ici (en diverses langues)  et ici (en français).

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Que nul n'entre ici s'il n'est philosophe !

15 Mars 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

nietzsch2.jpgSavez-vous quel sera mon plus grand regret sur notre époque à part le fait que ni mes blogs ni mes livres n'aient eu de lecteurs ? Qu'on ait continué à laisser écrire des gens qui faisaient semblant d'être philosophes ou d'aimer la philosophie ! Je ne parle même pas de BHL du BHV, Onfray l'orfraie et autres publicistes qui s'autoproclament philosophes. Je pense à de bien plus obscurs dont celui dont je lis le dernier livre en ce moment et qui se pavane dans les cercles académiques en faisant "comme si" il avait compris quelque chose à la philosophie. Le type sur un sujet vaste et oiseux aligne une galerie de "prises de positions" de philosophes de Socrate à Heidegger sans même se demander si elles sont compatibles entre elles. On a l'impression qu'il les approuve toutes, sans trop savoir pourquoi. Surtout ne pas réfléchir. Son exercice d'érudition est grotesque. Il confond l'opposition heideggérienne être-étant avec l'en soi-pour soi sartrien. Vaine boursouflure. Quelle honte !

 

La philosophie, il faut l'apprendre très jeune, entre 17 et 23 ans : entrer à fond dans les livres, les polémiques, se passionner pour les questions posées, pour les combats menés (car ils se combattent tous entre eux), dans un bon cadre scolaire qui vous fasse comprendre ce qui va ensemble et ce qui est incompatible. Beaucoup d'exigences, comprendre à fond chaque concept. Lire les auteurs, pas les "digests". Ne rater aucun des 15 principaux, bien les hiérarchiser. Avoir beaucoup d'intuition. Indispensable. Ne jamais croire qu'on a tout compris, encore moins tout penWittgenstein.jpgsé.

 

Mes amis, vous avez tous le droit à 40 ou 50 ans de cracher sur les philosophes, mais faites le au nom des promesses non tenues, des amours déçues, de la trahison que vous a infligée la philosophie. Tournez-lui le dos avec la même conviction que vous avez adhéré à elle si vous le souhaitez. Mais ne laissez pas les imbéciles salir cette activité en en faisant un exercice mondain. Démasquez les, entartez les, qu'ils soient ostracisés ! Petits joueurs de la pensée hors de nos vi(ll)es pour reprendre le jeu de mot minable des jeunes gangsters. Spiel nicht mit der Anderes Tiefen !

 

 

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Qu'est-ce que le peuple en France aujourd'hui ?

14 Mars 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La gauche

Je songeais au mail que j'ai recopié cet après-midi et me demandais ce qu'était le peuple en France aujourd'hui.

 

Pour toute la pensée politique moderne (post-Machiavel) à l'exception peut-être des libéraux, le peuple n'a jamais été une population indifférenciée. C'est une subjectivité politique qui se constitue au terme de procédures particulières : l'assemblée générale, la manifestation de rue, le vote pour des délégués dans l'isoloir, parfois la guerre (Valmy...)

 

Aujourd'hui le vote s'achète, et la pensée est fragmentée par les médias.

 

valmy_.jpgOù est le peuple, et où se constitue-t-il ? Quand le Front de gauche parle du peuple, évoque-t-il ces jeunes près à se vendre à n'importe qui pour des vacances au ski ? Non, il parle du peuple qui se construit dans ses meetings et ses manifestations.

 

Celui-ci a-t-il plus de légitimité à se considérer comme "le peuple" que les franges de population qui se rendent au meeting de M. Bayrou ou de Mme Le Pen ? Nous répondrions avec certitude que oui si nous pouvions affirmer que ces gens sont réellement porteurs d'une perspective historique pour le pays et ne sont pas qu'un simple club égoïste de défense des avantages acquis au milieu de la tempête comme les en accusent leurs adversaires, tandis que les autres membres des assemblées bayrouistes ou lepennistes ne sont que des citoyens aveuglés.

 

S'il est vrai - ce que je crois - que la "tempête" n'est que le résultat d'une dérégulation mondiale voulue par les oligarques et sur laquelle il faut revenir, et que la défense des droits acquis peut déboucher sur une réelle amélioration de la condition et de la conscience collectives pour peu qu'elle s'enrichisse d'un surplus à la fois de rationalité et d'imagination, la frange des électeurs du FdG, éventuellement élargie à l'aile gauche du PS et aux trotskistes, peut être reconnue comme le véritable peuple. Mais si elle est le peuple, puisqu'elle seule passe par un processus de "conscientisation" qui la rend porteuse d'une perspective historique que les autres n'ont pas, pourquoi s'embarrasse-t-elle d'une entrée dans les jeux médiatiques, et dans le respect des procédures électorales ? Pourquoi ne prend-elle pas directement le pouvoir ?

 

On retrouve ici la vieille interrogation qui traverse la gauche depuis deux siècles (et qui l'a notamment travaillée quand le suffrage universel a consolidé le pouvoir de Napoléon III). La réponse est assez simple aujourd'hui : parce qu'elle n'aurait pas les moyens de gagner une guerre civile avec l'autre partie de la population (majoritaire en nombre) en cas de prise du pouvoir par la force. Autrement dit, faute d'effectifs suffisants, la seule frange de la population qui pourrait prétendre être le peuple doit se résigner à ce qu'il n'y ait pas de peuple en France (pas de subjectivité politique capable de porter une perspective d'avenir) et à ne rester qu'un lobby de défense du service public et des droits sociaux, plus ou moins entendu par la bourgeoisie au pouvoir.

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Sur la dépolitisation des banlieues

14 Mars 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Débats chez les "résistants"

Un jeune cadre communiste d'une ville d'Ile de France m'écrit :

 

0013.jpg

"Hier soir, réunion de campagne où j'ai assisté (je dis "assisté" car je me suis senti plus spectateur qu'acteur ) à la confrontation des anciens et des modernes : le fait que le député sortant ait mis comme président de son comité de soutien dans notre ville un jeune issu de l'immigration a le mérite d'attirer les moins de trente ans mais pour le meilleur et pour le pire. Car ce sont exclusivement des jeunes des quartiers populaires d'origine immigrée qui ont une approche tout autre de la politique, où la fidélité et la reconnaissance envers une personne (et particulièrement pour service rendu) l'emporte sur la fidélité sur les principes et projets politiques. Et ces jeunes ont pour ambition de convaincre d'autres jeunes, issus des mêmes milieux, les plus loin de la politique, et qui, de leurs propres constats, seraient prêts à voter Le Pen si celle-ci leur garantissait un séjour au ski... Je pense que si nous avons parfois tendance à surpolitiser l'opinion, autant dire que là, c'est l'inverse... Bilal a bien résumé la chose en proclamant : "nous sommes des commerciaux". Autant dire que certains anciens ont été quelque peu désabusés par cette réunion..."

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Des sujets qu'on ne traitera pas ici

13 Mars 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Je pourrais évoquer beaucoup de choses ce soir sur ce blog.

 

P1010968L'étrange façon dont B92 met en exergue le 37ème anniversaire du décès du prix Nobel Ivo Adric, comme si 37 ans était un compte rond, la tentative d'assassinat du président Ankvab en Abkhazie et la façon stupide dont le magazine TV l'Echappée belle a tenté de parler de ce pays il y a quelques jours, les nouvelles épouvantables que je lis sur le sort des Noirs en Libye et dont il va falloir que je parle sur un autre blog (après vérification des infos bien sûr, mais les éléments commencent à concorder), puisque cela n'intéresse pas nos médias ; et puis la sage décision du Conseil constitutionnel qui a censuré la loi "mémorielle" écrite pour le lobby arménien, et la honteuse attaque qu'elle provoque de la part de M. BHL du BHV qui fulmine une fois de plus contre nos institutions, et encore ce film de Woody Allen de 2010 que j'ai vu ce soir en DVD ("Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu") sur l'insignifiance de la vie et les illusions, qui finalement met en valeur l'art du récit comme opérateur d'une sorte de "oui dionysiaque à la vie" (et ça, ça me renvoie mine de rien à la passion du récit chez Marguerite de Navarre), et encore, puisqu'on parle de dionysisme, le bon article du Monde diplo de ce mois-ci contre le Enième livre caricatural d'Onfray (livre pour Camus et contre Sartre cette fois-ci), c'est le seul article que je lise dans ce numéro du journal, tout le reste m'indiffère.

 

Beaucoup de sujets mais le temps fait défaut. Bientôt minuit. Oublions donc ce blog pour quelques heures.

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La dynamique du vote Mélenchon

13 Mars 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La gauche

Puisque ce blog sert un peu aussi à prendre date, je voudrais ici reprendre le commentaire que j'ai posté en réaction à un article d'un ami anti-européiste de gauche, Edgar, qui, sur son blog "La lettre volée" a posté une critique que le PC grec adresse à son homologue français sur la question europénne (une critique qui fait suite à beaucoup d'autres critiques que ce blogueur a adressées à Mélenchon sur cette même question).

 

Je me suis indigné du caractère répété des attaques de ce blog contre Mélenchon parce qu'à la longue elles s'apparentaient vraiment à une tactique de déstabilisation pour dire "surtout ne votez pas pour le Front de Gauche". Bien sûr on critique principalement les gens dont on est proche - je comprends qu' "Edgar" ne dénigre pas autant Bayrou ou Joly avec qui il n'a rien en commun. Mais voila qui me paraît très pervers, car cela revient à détourner les lecteurs de son blog de l'option la plus crédible parmi les moins éloignées de leurs convictions. Je vois la même attitude chez des communistes orthodoxes anti-front de gauche, et des "antiimpérialistes" sectaires qui se répandent en insultes parce que Mélenchon n'a pas été assez clair sur la non-ingérence. Ces gens font ainsi le jeu de François Hollande (un européiste otaniste), c'est quand même beau...

 

Bien sûr comme tout le monde je répère ce qui "cloche" chez Mélenchon, sur la question du protectionnisme européen, du vote de la Russie et de la Chine au conseil de sécurité de l'ONU sur la Syrie, sur la Côte d'Ivoire, sur l'héritage de Mitterrand et tant d'autres sujets. De même que j'ai dénoncé parfois son style trop agressif, machiste, maladroit, approximatif (alors qu'il sait aussi être érudit, précis, subtil, et charmeur avec ses interlocuteur quand il s'en  onne la peine). Mais il faut avoir une vision large et stratégique des choses.

 

mélenchonMélenchon fait un boulot très difficile : ramener au vote beaucoup de gens aigris et dépolitisés. Il leur réapprend toutes sortes de données basiques qu'ils ont perdues de vue. Cela lui demande une énergie folle d'autant qu'il se bat contre un système idéologique qui lui est très défavorable. Je ne suis pas du tout convaincu qu'il ferait mieux en brandissant le drapeau français un peu plus haut, en annonçant la rupture avec l'Europe etc, car quoi qu'on en dise, beaucoup de gens n'ont pas du tout les idées claires sur l'Union européenne, même parmi les nonistes, et trouveraient le leader du Front de Gauche "rouge-brun" s'il allait trop loin sur ce terrain.

Je ne crois pas non plus que les ouvriers abandonneraient le Front national simplement parce que Mélenchon serait plus dur contre l'Europe. Ainsi mon père,ouvrier à la retraite, ne vote pas Front national, mais est convaincu que le RER à Paris fonctionne mal "à cause des syndicats". Le divorce entre le Front de Gauche et les ouvriers du privé ne tient pas seulement à l'Europe.

Les gens comme Edgar sont trop polarisés sur le vote et les programmes, et pas assez sur les dynamiques historiques. Mélenchon défend une culture de la VIe république, de la mobilisation des masses etc. Cette culture, si elle arrive à se développer, entrera d'elle même en conflit avec l'oligarchie européiste. Il est dommage de cherche à l'entraver.

 

mitterrand

Je pense que le lectorat très "middle class" (pour ce que je peux en deviner) du blog "La lettre volée" (comme du mien) gagnerait davantage à s'ouvrir au potentiel de ce mouvement porté par le Front de gauche (petits fonctionnaires, étudiants, salariés syndiqués) et travailler avec lui, plutôt que de s'en tenir à une posture ironique et moralisatrice à son égard.

 

kim-jong-ilBien sûr on a toujours des raisons de se méfier des égarements de la gauche de la gauche. Mon propre héritage familial m'inciterait plutôt à suivre Edgar dans certaines de ses méfiances, quand je vois combien les Républicains espagnols ont été cocufiés par le Parti communiste (et, dans la branche française de mes antécédents l'anticommunisme est aussi ancré), ce pourquoi d'ailleurs dans mes jeunes années, je votais pour le Parti socialiste et non pour l'extrême gauche. Mais il faut dépasser les héritages familiaux, les nostalgies identitaires (qui poussent tant de gens dans le Sud-Ouest notamment à voter encore socialiste) et, face à la sclérose inéluctable du système actuel entièrement soumis aux intérêts des plus aisés, il faut oser l'expérience d'une poussée populaire organisée pour un changement de système, quels qu'en soient les risques, et quelles que soient les erreurs que cette poussée puisse commettre. Il faut voter Front de gauche.

 

Bon voilà qui est dit. Mais pour montrer que je ne suis pas sectaire, dans un esprit républicain de respect pour ceux avec lesquels je suis en désaccord, je termine ce petit billet en saluant les qualités de débatteur de Jean-François Coppé. Je les avais déjà constatées en d'autres occasions, je les vérifie dans la dernière "confrontation" qu'il a eue avec la journaliste Audrey Pulvar (cf vidéo ci-dessous). L'homme garde son sang froid, son sourire et sa courtoisie. C'est remarquable. La journaliste n'est pas totalement en tort : son style d'interview est fréquent dans le journalisme du monde anglosaxon, plus dénué de complaisance que le nôtre (encore qu'outre-atlantique et outre-manche il ne remettre jamais non plus en cause les cadres communs de pensée de l'intelligentsia). La journaliste a cependant le défaut de mener l'intérrogatoire à partir d'une posture trop visible de "femme de" et surtout "sympathisante de", alors que tout le monde sait qu'elle n'en ferait pas autant face à un socialiste. Donc un bon point pour M. Copé. Je ne pense pas que M. Juppé (qui est sans doute un des responsables de l'UMP que je déteste le plus, en raison de son art d'envelopper d'arrogance le cynisme le plus éhonté, dans l'affaire libyenne notamment) aurait fait aussi bien ...

 

Au fait, puisqu'on parle de M. Juppé, alors, d'après vous, M. Sarkozy a-t-il oui ou non reçu un financement de M. Kadhafi ? Et la Libye, va-t-elle éclater ? La somalisation comme modèle d'émancipation de toutes les nations des bords de la Méditerranée. Ou éthiopisation (vassalisation) ou somalisation.  De jolies perspectives....

 

 

 

 

 

 

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L'optimisme de Jean Viard dans Libé

10 Mars 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Journaux-3-2.jpgVoilà le genre de sociologue que Libération apprécie (trois pleines pages pour lui) et qui est aux antipodes de mes valeurs et de mes analyses : Jean Viard, sociologue de la "mobilité" et du bonheur écolo-libéral de centre gauche (une sorte de nouvel Alain Touraine). Partant du postulat que les trois quarts des gens sont heureux (puisqu'ils le disent dans les sondages) il entreprend de légitimer le monde tel qu'il va - "Avec Carrefour je positive". Bien sûr il ne lui vient pa à l'esprit que les gens dans les sondages disent qu'ils sont heureux simplement pour ne pas entrer dans la case des "malheureux" stigmatisée, infâmante, et qui ouvre la porte à la miséricorde paternaliste. J'avoue qu'en ce qui me concerne je répondrais "sans opinion" à ce genre de sondage tant les catégories "malheureux" ou "heureux" me paraîssent dépourvues de sens.

 

Le postulat de Viard me semble erronné : l'opinion affichée des gens n'est pas un critère de leur bien-être réel, et s'ils étaient si bien dans leur peau nous ne battrions pas les records de consommation de psychotropes.

 

Pour vous persuader de l'inanité des thèses de ce sociologue, lisez ce paragraphe :

 

"La discontinuité des pratiques sociales est la règle de nos sociétés. On vit désormais des séries de vies. Avant, on pouvait dire que l’on avait réussi sa vie lorsque tout le quartier se pressait à l’enterrement. Aujourd’hui, ce qui est important, c’est de pouvoir raconter cette vie : «Il a travaillé à Libé, après il a fait un élevage de chèvres, il a trouvé une nana absolument géniale, puis il a été cinq ans en couple homosexuel - on n’aurait jamais cru ça de lui.» Du coup, tout ça devient passionnant. Au risque d’insister, avant, on faisait l’amour 1 000 dans sa vie. Maintenant, c’est 6 000 ! Et si vous le faites 6 000 fois de la même manière, ça devient ennuyeux à mourir. D’où les films érotiques, les pratiques différentes, les aventures…"

 

Voilà encore un publiciste qui oublie de réfléchir. Faire l'amour 6 000 fois, comme une gymnastique, parce que les sexologues disent que c'est bon pour la tension artérielle, quel intérêt ? (à part enrichir les coach, les fabriquants de viagra, et culpabiliser les abstinents ?). Est-il si formidable d'avoir "trouvé une nana géniale" puis de l'avoir perdue ? Si elle était si géniale c'est un drame. Si ce n'est pas un drame c'est qu'elle n'était pas géniale. Et voyez l'envers de cet énoncé : il a bossé à Libé, puis il a élevé des chèvres, il a eu une nana, puis il a été homo, ça veut dire : il n'avait pas de raison de prendre son job au sérieux puisque c'était provisoire, il savait que sa relation sentimentale n'allait pas durer, puisque ce n'était qu'une séquence de vie, il savait qu'elle le plaquerait ou qu'il la plaquerait, que c'était juste affaire de consommation, et de contrat à durée déterminée. L'éphémère autrefois subi avec un brin de mélancolie, aujourd'hui érigé en norme et source de "bonheur" (bonheur de pacotille bien sûr). Société de la "résilience" : n'aimer personne, ne s'attacher à rien, ne jamais être triste, ne pas s'investir, jamais, zapper, toujours zapper, ne jamais être fiable, ne pas être la personne sur qui on peut compter, parce que soi même on ne compte sur rien, et donc on ne compte pour rien.

 

Cet éloge de la "discontinuité" est un pur nihilisme totalitaire... à l'image du journal qui en est le support.

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Femmes, révolutionnaires et aristocrates : Heilwige Bloemardinne

8 Mars 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Les rapports hommes-femmes

bruegelNe soyons pas chiches en cette Journée de la Femme, dans l'évocation de ces femmes étonnantes qui furent à la fois aristocrates (ou grandes bourgeoises) et révolutionnaires, et qui, du fait du cumul de ces qualités antogonistes se ménagèrent une sorte d'immunité qui leur permit de mourir de leur belle mort. Nous avons cité Alexandra Kollontaï un peu plus bas. En voici une autre que l'historien Raoul Vaneigem dans un livre de 1986 sort heureusement de l'oubli : Heilwige Bloemardinne (ou Bloemart).

 

Bruxelloise, née vers 1265, morte 70 ans plus tard, elle est comme beaucoup d'hérétique surtout connue par un de ses détracteurs, Henri Pomerius. Selon lui cette dame, sans doute fille d'un échevin, siégeait sur un fauteuil d'argent qui fut offert à la duchesse de Brabant à sa mort. Les gens la croyaient entourée de séraphins quand elle allait communier et après son trépas "les estropiés touchèrent son corps défunt en pensant ainsi recouvrer la santé".

 

Pourtant Bloemardinne, comme beaucoup d'hérétiques, réhabilitait les bas plaisirs. Elle soutenait qu'en faisant preuve d'une absence totale de volonté (d'agir, d'aimer, de prier, de connaître etc), dans une sorte de pure passivité, et d'oisiveté radicale, on accédait à l'innocence et à l'union complète à Dieu qui fait qu'ensuite il n'y a plus de faute, même à s'abandonner à ses plus vils instincts.

 

Vaneigem raconte que l'Inquisition n'osa pas intervenir en 1529 contre les Alumbrados de Séville parce que des membres de grandes famille en faisaient partie. 300 ans plus tôt cette béguine dissidente radicale qui rejette l'Eglise, les prêtres et les jours saints, aurait elle aussi échappé à l'Inquisition grâce à son rang social et à ses soutiens chez les riches bruxellois.

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