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Les derniers cagots de Luz-Saint-Sauveur
Hier un de mes oncles qui vit en Béarn et qui a passé une partie de son enfance à Luz-Saint-Sauveur en Bigorre me disait se souvenir d'y avoir vu une famille de cagots qui vivaient derrière l'église, des personnes de petite taille, qui avaient une entrée spéciale dans les édifices religieux. Il paraît que France 2 en a parlé récemment en ressortant un reportage effectué par Le Figaro dans ce village en 1964. Les cagots, qui étaient rémunérés en nature surtout pour des travaux qu'ils faisaient pour les institutions chrétiennes, sont un peuple mystérieux qu'on a parfois dit descendant des wisigoths, parfois des extraterrestres (et examinés par certains savants comme Ambroise Paré, avec parfois des résultats étranges qui ont nourri le fantasme) ! Traités en parias au Moyen-Age, ils obtinrent l'égalité des droits avec les autres Français à la Révolution, puis disparurent progressivement. Ils étaient particulièrement nombreux en Béarn (2 500) mais il y en avaient aussi quelques uns dans d'autres régions y compris en Bretagne.
Sur le sujet on peut aussi se reporter à cet article et celui-ci. J'avais vaguement eu connaissance de sujet à 20 ans, mais je n'en avais pas mesuré toutes les dimensions, loin de là, et j'ignorais que des gens de ma famille en avaient connus.
Premier tour de la présidentielle - Remarques à chaud sur les résultats
Les estimations de 20 h en France - que les Belges nous ont communiquées auparavant montrent une avance de François Hollande sur Nicolas Sarkozy, ce qui est de bon augure pour le second tour. La France dans quelques semaines sera sans doute une fois de plus le pays le plus à gauche d'Europe (du fait qu'il aura voté contre la droite en pleine crise de la dette, et que le PS français reste plus à gauche que ses homologues européens), mais ça ne garantit nullement qu'il aura les moyens de résister aux puissances financières pour imposer une politique keynésienne (dont M. Hollande ne parle même pas).
Le FdG serait à quelques points derrière le FN. Jean-Luc Mélenchon pendant cette campagne aura fait sauter beaucoup de tabous autour des thèmes que soutient sa mouvance et qui sont maintenant mieux compris dans l'opinion publique. Selon un article du Canard Enchaîné de jeudi il n'attendrait pas grand chose des législatives (qui sont verrouillées pour que le FdG n'ait pas plus de 25 députés) mais espèrerait être premier aux élections européennes devant le PS (profitant sans doute du mécontentement que les hésitations de M. Hollande provoqueront), ce qui le placerait en bonne position pour la prochaine présidentielle.
L'UMP risque de rester tiraillée entre son aile droite et son aile gauche, Bayrou n'ayant pas disparu du paysage politique, et connaître une traversée du désert sur fond de guerre des chefs. Les Verts sans doute se referont une santé à la législative grâce à l'accord avec le PS mais leur indépendance en a pris un tel coup - car ils ne se sauvent que grâce au PS - qu'on peut se demander si leur électorat leur fera encore confiance (d'autant qu'ils ont sacrifié au passage une bonne partie de leur programme). Le FN a réussi la transition du père à la fille, et reste un problème dans le paysage électoral français car il tire l'UMP vers la xénophobie et entretient une partie de l'électorat dans l'illusion que les problèmes viennent des étrangers. Je crois que Mme Le Pen par tempérament est moins xénophobe que son père, mais le fond du discours reste ultrasécuritaire et fondé sur le refus d'altérité culturelle (celle de l'islam, même s'il est vrai que c'est un sujet complexe). Certains diront que l'européisme relatif (même si c'est un "altereuropéisme") du FdG contribue à empêcher l'électorat FN de rejoindre celui de Mélenchon. C'est un sujet assez compliqué. Mais en l'occurrence il faut voir aussi que, si le phénomène vote utile n'avait pas joué en faveur d'Hollande pour créer une dynamique anti-sarkozy dès le premier tour, le FdG aurait sans doute récupéré plus de voix ouvrières qui allaient autrefois au FN et à l'UMP et à l'abstention, tout cela indépendamment de la question de l'Europe sur laquelle les électeurs n'ont en général pas les idées claires. Il faut dire aussi qu'il y a eu une grande habileté de Mme Le Pen à se positionner en candidate anti-système financier dans la conjoncture actuelle. Le FN restera peut-être un problème pour longtemps encore.
Sur l'extrême gauche pas grand chose à dire, puisque la dynamique Mélenchon a phagocyté largement l'électorat d'LO et du NPA. DLR de M. Dupont-Aignan continuera sans doute à tenter d'occuper l'espace laissé par la disparition de ses rivaux (villiéristes, asselinistes etc) mais son chef manque de charisme (il se force à jouer les tribuns sans succès), baigne un peu trop dans l'improvisation (cf par exemple son ralliement à la sortie de l'UE en bout de course) et garde un discours trop à droite pour être rassembleur (cf par exemple ses sorties anti-chinoises sans aucune hauteur de vue à l'automne).
Tout au long de la campagne, je trouve que Mélenchon aura réussi une belle expérience alchimique. Il a composé une union de la gauche anti-libérale qui a plus de souffle que son homologue espagnole (que je connais bien) parce qu'elle puise aux racines d'une tradition républicaine révolutionnaire qui parle encore beaucoup aux Français (cf la thématique de la VIe République et son bonnet phrygien). Cela donne au mélange écologie-socialisme-république une consistance intéressante, avec des ouvertures sur la démocratie directe. Un effet de contagion sur l'Allemagne via Die Linke peut accentuer la crédibilité de son discours européen, à condition que les deux partis puissent coordonner une option d'Europe alternative crédible. A défaut de ce prolongement allemand, le FdG sera sans doute conduit - les crises de l'euro et la récession aidant - à se rapprocher du M'PEP. Pour le moment on est à la croisée des chemins.
Après le meeting Porte de Versailles
Voilà, le meeting Porte de Versailles est fini. J'étais bien content d'y être au fond. J'ai aussi signé le formulaire appelant à voter Mélenchon. Ce soir encore beaucoup d'idées fortes et généreuses ont été mobilisées pour remuer le coeur des gens. Mélenchon a beaucoup de souffle.
Du coup je dois dire que je suis déçu par les lecteurs de mon blog. A part Hadria, aucun depuis 3 mois n'a pris la peine de laisser un commentaire favorable à Mélenchon. Je pense que la proportion des commentaires défavorables à Mélenchon, et de non-commentaires est assez révélatrice du profil des lecteurs moyens de ce blog (comme d'ailleurs des gens que j'ai croisés dans mon combat anti-impérialiste) : des gens qui au fond n'aiment pas beaucoup le peuple, ne sont pas sensibles à ses grands élans, préfèrent rester dans leur singularité et leur prudence.
Ils font des procès au Front de Gauche sur la question de la nation, de l'Europe etc parce qu'ils ne veulent pas voir les dynamiques qu'il peut porter et les effets de contagion possibles (or en ce moment beaucoup de gens hors de nos frontières commencent à regarder vers la France avec intérêt). Cet excès d'intellectualisme et de prudence me paraît irresponsable à l'heure où des enjeux très importants se présentent comme l'anéantissement électoral du Front national et la construction d'une véritable alternative au capitalisme mondial. Je ne comprends pas l'égoïsme de ceux qui sont restés murés dans leur scepticisme à un moment si important de l'histoire collective. Mais c'est sans doute le sort d'un blog où l'on parlait de géopolitique et de Marguerite de Navarre que de n'attirer que des gens trop centrés sur eux-mêmes, et, au fond, pas militants pour deux sous. Ce blog se déploie dans un monde virtuel assez glacé à l'image des pires aspects de notre époque. C'est dommage.
En tout cas, voilà, le premier tour approche. Un Mélenchon au dessus de 20 % serait la source d'une dynamique importante pour les législatives et la dynamique sociale ultérieure. A15 % ce ne serait déjà pas si mal (n'oublions pas qu'il était donné à 6 % il y a 6 mois). A suivre...
dernier meeting de meluche
NOUVELLE EXPERIENCE BLOGUESQUE. J ECRIS UN BILLET EN DIRECT DU MEETING DE MELENCHON PORTE DE VERSAILLES. LE CANDIDAT PARLE DANS UNE HEURE. LES LECTEURS PARISIENS QUI SOUHAITENT QU ON CAUSE 2 MN PEUVENT M ENVOYER UN MAIL (FORMULAIRE CONTACT EN BAS) AVEC LEUR TEL ET VENIR. ON S Y VERRA. L AMBIANCE EST CHAUDE. ET MUSICALE. DRAPEAUX FRANCAIS, GRECS ET REPUBLICAINS ESPAGNOLS EN PLUS DE CEUX DES PARTIS
Le quart d'heure pour rire
J'espère, chers lecteurs que vous êtes tous admiratifs devant l'esprit de discipline et de sérieux avec lequel je défends, contre vents et marées depuis plusieurs mois, la candidature de Jean-Luc Mélenchon à l'élection présidentielle, me faisant toujours plus d'ennemis parmi ceux qui se veulent "vraiment anti-impérialistes", "vraiment républicains", etc.
Rempli du sens du devoir, je ne faiblis pas ; je n'aurai pas une parole qui puisse affaiblir le FdG en ce moment, et surtout pas à trois jours de l'élection, même s'il y a ici et là, heum heum, des choses qui me froissent (tenez, par exemple la haine de Mme Autain à l'égard de l'hymne révolutionnaire qui fit la gloire de notre pays chez tous les opprimés du monde pendant des siècles - voyez dans Le Monde ici -, mais bon ce n'est que Mme Autain...)
Mais quand même m'autoriserez-vous à rire un peu en publiant cette brève interview d'un polémiste de droite connu pour sa défense de l'Education nationale, Jean-Paul Brighelli ?
Vous savez que je suis attaché aux humanités et à beaucoup d'aspects de la vieille école républicaine, même si un vieux fond rebelle en moi m'a toujours poussé à la combattre quand j'y étais (et me pousse encore à en désapprouver rétospectivement bien des aspects). Donc je ne peux que sourire en écoutant les détracteurs de l'école actuelle, comme je me réjouis toujours quand j'entends des gens trouver du mal à dire de journalistes sans cerveaux comme Pascale C., ou Marie D. ou encore de ce rappeur dont j'ai oublié le nom qui dans Paris Match la semaine dernière décrivait Juliette Greco et Marie D. justement comme des sortes de "pères spirituels" (vu que les pères sont souvent des mères maintenant)... enfin bref...
Voulez que je vous parle du Sciences Po de Richard Descoings auquel l'auteur fait allusion ? Je ne l'ai pas connu. De mon temps feu-Descoings n'était "que" directeur adjoint. On évoquera peut-être une autre fois ce sujet à vrai dire assez peu palpitant.
Bon, puisque l'heure est au sourire, encore un type de droite : Laurent Gerra. Il n'est jamais très subtil, mais sa petite imitation d'Haroun Tazieff (vulcanologue décédé il y a 14 ans que les jeunes ne peuvent connaître) m'a paru fort drôle, car elle résume à peu près tout ce que la gauche révolutionnaire suscite comme fantasmes (et bien sûr les fantasmes ne sont jamais complètement faux). Gerra a en plus des intonations justes pour imiter Hollande.
La fin des anti-impérialistes
Entendu Mélenchon à Marseille. Pas très convaincant sur l'histoire du lieu (ses envolées lyriques sur Marseille terre de mélanges depuis 2 600 ans - alors qu'on sait que les Grecs qui fondèrent et administrèrent cette ville pendant au moins six siècles furent toujours le peuple le moins enclin aux mélanges ethniques, à la différence des Romains), mais plus persuadif sur le présent : son thème de la coopération avec le Maghreb, sur le refus d'une France "occidentale" et sur la nécessité de chasser la flotte de guerre américaine en Méditerranée (qui redeviendrait le mare nostrum des Européens et des Africains - mais il n'a pas parlé des Russes, qui envoient un navire de guerre en Syrie en ce moment alors que les bruits de bottes contre l'Iran reprennent).
Peut-être un cycle est-il en train de se refermer. Le petit groupe que les historiens nommeront peut-être les "anti-impérialistes" qui, de 1990 à 2010 en gros, tenta d'incarner à gauche une forme de résistance intransigeante face à l'expansion de l'OTAN, est peut-être aujourd'hui en passe d'être dépassé par les accents un peu néo-gaulliens (y compris dans les intonations lors des meetings) de Mélenchon et le monde qu'il draine avec lui. Ce sera peut-être là que les choses se joueront. Dans la capacité ou non du Front de Gauche à infléchir la politique de Hollande à l'égard des Etats-Unis, du Qatar etc.
Pas sûr que la tentative d'inflexion aboutisse car la société française reste très américanophile et très effrayée par les puissances continentales eurasiatiques (Chine et Russie). Nous verrons bien.
En tout cas, je ne crois pas que les "anti-impérialistes" (Bricmont, Collon etc) joueront un rôle quelconque dans ce processus. En partie par leur faute d'ailleurs, puisqu'ils ont préféré être les prophètes au désert, y compris en s'arc-boutant sur des thématiques un peu glissantes comme le sionisme qu'ils ne traitaient pas toujours avec pertinence.
En ce qui me concerne, je ne pense pas non plus avoir de véritable rôle à jouer dans ce nouveau cycle qui s'ouvre. J'ai rédigé le programme de politique étrangère dont je parlais récemment, mais je prévois qu'il ne trouvera aucun écho dans les appareils du Front de Gauche. Je l'ai fait plus par acquis de conscience qu'autre chose.
Je crois que ceux qui, comme moi, ont combattu l'atlantisme au cours des douze dernières années, ont surtout eu un rôle de témoignage sur la possibilité de garder une forme d'intransigeance face aux discours lénifiants, et sur la nécessité de fournir une information alternative. Nous eûmes, au fond, surtout une fonction morale, plus que politique.
Il faut maintenant songer à s'effacer du paysage. Et c'est pourquoi aussi je rechigne à écrire encore aussi bien sur ce blog que sur celui de l'Atlas alternatif (alors pourtant qu'il y aurait des choses à raconter, sur le Mali, sur la Syrie etc.). Si demain une guerre éclatait, par exemple contre l'Iran, des forces plus considérables que des petits blogs se déchaîneraient dans le sens des Etats-Unis et contre eux, aussi bien dans le monde (des experts sur Ria Novosti ce matin disaient que Moscou aiderait peut-être Téhéran) qu'en France. Je pense que, quelle que soit l'hostilité (en grande partie justifiée) des dirigeants du FdG à l'encontre du régime des mollahs, la conscience des enjeux géostratégiques y serait malgré tout assez élevée pour provoquer un mouvement anti-guerre (même si, c'est vrai, ce mouvement a fait défaut sur la Libye), et le succès électoral prévisible de Mélenchon aiderait à son développement. Et si, dans la pire des hypothèses, le FdG malgré sa nouvelle sensibilité géopolitique capitulait devant le discours médiatique dominant (ce que je n'ose croire), ce ne sont pas, de toute façon, les petits blogs isolés qui rattrapperaient la déroute. Quoi qu'il en soit et quoi qu'il advienne, donc, les grands mouvements sont sur les rails, et la fonction morale symbolique des petits blogs "anti-impérialistes" est désormais dépassée.
Voilà qui personnellement m'autorise à lever un peu le pied sur Internet, à disparaître de cette scène où mes propos risqueraient fort sinon de n'être plus qu'un radotage solitaire...
Les îles du Pacifique et l'Abkhazie
A signaler (et c'est d'une importance capitale pour la France !!!!!) une interview du ministre des affaires étrangères d'Abkhazie dans Ria Novosti aujourd'hui.
On y apprend que Nauru, Tuvalu et Vanuatu ont reconnu l'Abkhazie et que les îels Fidji pourraient suivre (notez que l'évolution de ces pays est très étrange, Fidji en ce moment fait l'objet de très forts investissements chinois, je me demande si l'Oncle Sam n'est pas en train de perdre le Pacifique). On y apprend aussi que les négociations sont plus difficiles avec les pays de l'Alba (seuls le Venezuela et le Nicaragua avaient franchi le cap en 2009)
Bon qui est volontaire pour aller mener une expérience politique utopique au Vanuatu ou à Nauru ?
Le contrôle citoyen sur l'appareil de défense et la politique étrangère
L'association Initiative citoyenneté défense a bien voulu me demander de fournir mon analyse des programmes électoraux des principaux candidats à l'élection présidentielle en matière de défense nationale et de lien entre les citoyens et l'appareil de défense. Malheureusement il me semble que la demande arrive un peu tard, à huit jours du scrutin, et je ne serai sans doute pas en mesure de fournir un travail pertinent en temps utile.
Je trouve cependant l'idée très bonne et il est clair qu'il faudra continuer à soumettre nos politiques à un contrôle rigoureux sur ce thème, même après les élections.
En ce moment je tente de transmettre aux cadres du Front de gauche, mes propositions de politique étrangère. Sans doute sont-ils trop occupés pour les lire en ce moment, mais j'aimerais quand même que ce texte se fraie un chemin après le scrutin car je crois que certains paragraphes posent quelques problèmes nouveaux, des questions auxquelles la gauche républicaine se doit de répondre.
Tout cela est dans le droit fil de ce que je fais depuis sept ans dans le cadre de l'Atlas alternatif et que j'avais notamment formulé dans un article paru dans l'Humanité Dimanche le 16 mai 2007 (cf ci -dessous). Les choses n'avancent que très lentement, mais il faut garder le cap.