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Le blog de Frédéric Delorca

Articles récents

"Carnet de thèse" de Tiphaine Rivière

24 Mai 2015 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Lectures

"Carnet de thèse" de Tiphaine Rivière

J'ai raconté dans un de mes livres l'histoire de ma thèse en sociologie que j'ai faite à Paris I. Une thèse qui s'est passée dans des conditions bizarres, un peu comme tout ce que j'ai entrepris dans ma vie (mais peut-être plein de gens peuvent-ils en dire autant). A l'époque je la préparais tout en faisant l'Atlas alternatif et en bossant pour un ministère. J'étais partout et nulle part.

Cette thèse à la fois m'a servi et ne m'a pas servi. Elle fut utile à la publication de mes livres, inutile à mes affectations professionnelles. En partie parce que l'univers de la fac m'a très fortement déplu. La fac était de toute façon fortement discréditée dans le milieu des grandes écoles d'où je venais (milieu auquel je ne m'identifiais que partiellement mais bon...) et globalement dans la société aussi, mais je pense que si je n'avais pas été docteur en quelque chose en plus de mes diplômes précédents cela m'aurait vraiment manqué. Je ne sais pas trop ce que j'ai gagné en le devenant, mais je sais ce que j'aurais perdu en ne l'étant pas.

Pour le reste tout cela a glissé loin de moi désormais. J'ai donc cru que je pourrais lire sereinement la BD satyrique de Tiphaine Rivière parue au Seuil cette année "Carnet de thèse". Hé bien non, j'ai pris ça comme un grand coup de pied dans le ventre. Non pas en relation avec mon vécu propre car le sujet ne me touche plus de près, mais parce que je sais que, malgré la caricature, on ne peut s'empêcher de songer à tous ces gens qui sont abimés par la fac (et j'en ai connus). Bien sûr cela n'est rien à côté des horreurs que commet Etat islamique, du sort des migrants sur les mers, mais c'est tout de même un immense gâchis social, qui, par ailleurs, nuit énormément à la place du savoir et des humanités dans notre monde. Et ce n'est pas propre à la France : je connais aussi la misère morale des facs de lettres et de sciences humaines aux Etats-Unis. L'humain a un don particulier pour gâcher collectivement ses meilleures conquêtes.

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Old stones

23 Mai 2015 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Old stones

"Pourquoi est-ce que les vieilles pierres de Palmyre émeuvent plus que le sort des gens victimes de la guerre civile syrienne ?" demande un website français aujourd'hui.

Peut-être parce que les pierres donnent plus de repères que les gens. Pendant la guerre du Kosovo j'étais à l'écoute des Serbes bombardés qui hurlaient contre les Américains. Quand le peuple de Belgrade l'année suivante a pris d'assaut la télévision d'Etat bombardée l'année précédente, un ami communiste péruvien m'a dit : "il ne faut pas être sensible au sort des civils, car les civils changent de camp facilement". Une phrase qui m'a fait froid dans le dos car, en l'occurrence, le peuple serbe n'avait pas "changé de camp", il n'était pas devenu "pro-américain" malgré ce qu'en disaient les Occidentaux. Mais il fallait bien reconnaître que le propos sur la versatilité des peuples n'est pas faux (puisqu'on célèbre les 200 ans de Waterloo, rappelez vous les remarques pathétiques de Châteaubriand sur l'anti-bonapartisme soudain des Français après la défaite).

On ne fait pas l'histoire contre les peuples (même si la gauche de la gauche a souvent gouverné sur des bases que les peuples ne pouvaient pas suivre), mais on ne peut pas non plus avoir les émotions des peuples comme boussole.

Le repère est ailleurs, dans une Vision, du Bien et de la Justice. Une fois de plus, ma fidélité à Caton d'Utique parle ici. Des idéaux qu'incarnent mieux des pierres deux fois millénaires que les sentiments des gens.

A part ça une dame franco-polonaise véhicule un témoignage intéressant sur le Donbass en ce moment dans les milieux alternatifs, j'aimerais l'interviewer.

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Eros, Psyché, Hécate

22 Mai 2015 , Rédigé par Frédéric Delorca

Eros, Psyché, Hécate

Il est fréquent que le sentiment d'accéder à une certaine intelligence du monde (l'intelligence ne pouvant se concevoir sans le cœur) fonctionne comme une sorte de bouée de sauvetage au dessus de la méchanceté humaine.

J'ai eu par exemple ce sentiment le jour où j'ai écrit sur ce blog le billet "La statue de sel" en mars 2014. Je l'ai ressenti à nouveau dans un musée archéologique il y a peu. J'avais devant les yeux la statue d'une double Némésis d'époque romaine (oui, double...). Et puis, juste à côté, cette autre statuette d'époque romaine : Eros et Psyché. J'ai songé à une enseignante qui en décembre 2013 avec écrit à une sienne amie dont je connaissais bien la médiocrité "le tableau de Bouguereau 'Eros et Psyché' n'a rien à voir avec la pureté, puisque l'ange c'est Eros".

Ben voyons, non bien sûr. Ca n'a rien à voir avec la pureté puisque c'est Eros et pas un ange ! Voilà comment réfléchissent les esprits modernes, les cerveaux qui n'exigent rien d'eux-mêmes sauf des "réformes de l'éducation" qui aligneront le monde entier sur la médiocrité. "Eros et psyché", les amis, est un récit qu'on trouve dans l'Ane d'or d'Apulée, le conte le plus néo-platonicien, et le plus pythagoricien (ça allait ensemble) de son temps (l'âne qui se baigne sept fois dans la mer pour suivre le précepte de Pythagore avant l'apparition d'Isis)...

Bien sûr que la montée au ciel de Psyché dans les bras d'Eros est une image de pureté, comme le suicide de Sappho dans la mer représenté dans la chapelle néo-pythagoricienne de la porte majeure à Rome ! (j'ai été très content de retrouver récemment une référence à Sappho dans la vie d'Apollonios de Tyane). C'est même un topos (un lieu de référence, un lieu identitaire) du pythagorisme tardif ! Oh bien sûr ce n'est pas la pureté chrétienne. C'est une autre pureté, c'est différent, c'est dur à comprendre pour notre époque, mais c'est de la pureté quand même, de l'élévation de l'âme. Très loin du scepticisme des connes, et des esprits modernes épris de "déconstruction" et de "démystification" agressive.

Je trouve aussi des trucs extraordinaires dans le traité de Plutarque sur les visages de la Lune en ce moment. Notamment une opposition géniale entre la terre et le feu. Toujours en suivant ma méthode de lecture des pages au hasard. Savez vous que contrairement aux bêtises que vous autres les intoxiqués d'Internet pouvez trouver sur votre écran d'ordinateur préféré Hécate n'est pas traditionnellement chez les Grecs une déesse lunaire (Wikipédia a tout faux là dessus) ? Selon les hellénistes érudits qui ont commenté le traité de Plutarque c'est lui et lui seulement qui fut le premier, à un moment très tardif de l'Antiquité (l'époque de l'empereur Trajan, deux siècles avant la victoire complète du christianisme) à connecter cette déesse à la Lune... Jamais pendant les huit siècles précédents aucun Grec n'aurait lié Hécate au satellite de la Terre.

Ach ! toute une culture à refaire !!!

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Palmyre et le pessimisme politique

20 Mai 2015 , Rédigé par Frédéric Delorca

Palmyre et le pessimisme politique

C'est donc confirmé : les troupes d'Assad se battent contre celles d'Etat Islamique dans les ruines de Palmyre. Autant dire, que ce site archéologique est condamné. Il faut se faire à l'idée sans doute que beaucoup d'autres sites encore vont être détruits par ces cinglés d'EI, peut-être un jour tout le Proche-Orient sera privé des signes visibles de son passé antique.

Moi qui étais à Ephèse en Turquie récemment je ne suis plus du tout enclin à faire preuve d'optimisme.

Si dans les années 2000 je modérais les craintes de mes amis anti-impérialistes qui craignaient que Bush ne bombarde les centrales nucléaires iraniennes ou qu'un coup-d'Etat d'extrême droite n'ait lieu à Washington (certains le croyaient sur la foi d'un article de Paul Craig Roberts), en cette nouvelle décennie, je crois qu'il faut se préparer de plus en plus à des choses graves, tant de la part de nos dirigeants (dans leur politique pyromane à l'égard de la Russie par exemple, surtout si c'est Mme Clinton qui est élue à Washington) que de la part des divers groupes extrémistes qui ne peuvent plus voir l'Occident en peinture. Nous n'en avons pas fini avec le complexe de la forteresse assiégée.

Et comme le niveau culturel de la société ne monte pas (la réforme des collèges en ce moment pour niveler à un degré inférieur les connaissances est une reconnaissance institutionnelle de l'échec en la matière), on ne peut pas compter sur la capacité des gens à résister.

Bien sûr ça ne veut pas dire qu'il faille baisser les bras, et notamment il ne faut pas renoncer à aider les gens qui dans le monde ne se résolvent pas à être gouvernées par des cinglés.

Mais il faut vraiment se préparer au pire.

D'autant que les opposants à l'ordre actuel n'ont pas une grande carrure. J'ai dénoncé il y a quelques mois la grandiloquence de Mélenchon quand il parle de l'Allemagne (et d'autres sujets aussi) : il avait qualifié Merkel de "danger pour la civilisation" ce qui est tout de même fort de café. Son dernier livre est dans la même veine, et même si Duflot a tort de mon point de vue de défendre une "république verte sans frontières", sa façon de tirer la sonnette d'alarme est juste. J'ai moi-même souvent plaidé pour la lucidité et un discours de vérité sur l'Histoire (cachée par de nombreux médias, Arte en particulier) par exemple sur la responsabilité de l'Allemagne dans le déclenchement de la guerre de 14-18. Mais multiplier les pamphlets contre notre voisin quand on est un dirigeant politique de premier plan n'est pas une stratégie très recommandable. Il y a d'un côté le devoir des intellectuels de dire le vrai, de l'autre celui des politiques qui est de savoir prévenir l'utilisation des vérités à des fins haineuses.

Le climat est devenu franchement détestable sur l'ensemble de notre continent. A part la peur (souvent ouvertement raciste) de l'Islam, plus rien ne soude les peuples d'Europe. Voyez la situation du Royaume-Uni : il envisage de sortir de l'Union européenne par référendum, mais les Ecossais en son sein rêvent eux aussi d'organiser un référendum (le second en deux ans), mais pour le quitter... Et des gens à Liverpool et Manchester demandent à rejoindre le sécessionnisme écossais - car bien sûr le nationalisme n'a jamais de limite, rappelons nous ces Basques qui plantaient un drapeau de leur nation sur le Pic du midi d'Ossau en Béarn.

On ne peut pas dire que tout cela soit très réjouissant. Et la décennie suivante, qui sera peut-être celle des grandes pénuries énergétiques, donc des plus grands égoïsmes, nationaux ou tribaux, des plus grandes tentations guerrières, des plus grands fichages des "ennemis de l'intérieur" et de tous les citoyens, pourrait s'avérer bien plus noire encore. Il va falloir s'habituer à l'obscurité...

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Actualités

19 Mai 2015 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme, #Revue de presse

Assad repousse ISIS loin de Palmyre, mais les troupes d'élite irakienne perdent la bataille de Ramadi et abandonnent des centaines d'armes américaines sur le terrain. Lavrov accuse les USA de provoquer une révolution de couleur en Macédoine, le Vatican hisse le drapeau palestinien à pour accueillir l'autorité palestinienne, des dizaines de milliers de Japonais manifestent pour la fermeture de la base US d'Okinawa, le secrétaire général de l'OTAN met en garde contre la présence possible de terroristes parmi les migrants d'Afrique, le Vietnam achète des armes américaines...

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Nationalismes est-européens

16 Mai 2015 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Transnistrie

Nationalismes est-européens

Alors que des excités albanais, encouragés par les propos des dirigeants de Tirana sur la Grande Albanie, tirent sur des policiers en Macédoine (je sais, cela n'a pas intéressé les journaux autant que les folies de Mme Dati épinglées par la Cour des Comptes), et que le président de Transnistrie Evgeni Chevtchouk se recueille pieusement au mont Athos en Grèce, des milliers de manifestants à Chisinau demandent l'Anschluss avec la Roumanie à l'occasion du 203 ème anniversaire du traité de Bucarest entre la Russie et la Turquie (sic). L'Europe c'est la paix, mais oui mais oui...

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Ben Laden, l'exécution au canon etc

16 Mai 2015 , Rédigé par Frédéric Delorca

Ben Laden, l'exécution au canon etc

Seymour Hersh le dit : Ben Laden n'a pas été jeté dans la mer, et le récit héroïque de son arrestation était bidon. Il aurait été juste bestialement flingué à la demande des Saoudiens suite à une dénonciation aux USA par un employé des services secrets pakistanais (Hersh a à son actif la révélation de l'existence de la prison d'Abu Grahib, celle du bidonnage de la Gouta en Syrie, et des thèses moins sûres sur le boeing sud-coréen abattu en 1984). Et il est peu probable que, contrairement à ce que vous ont raconté Libé et d'autres médias débiles cette semaine un haut dignitaire nord-coréen ait été flingué au canon anti-aérien (même délire que l'histoire de l'oncle de Kim Jong Un dévoré par les chiens - les journalistes qui colportent ce genre de rumeur sont des abrutis doublés de grands malades).

L'intox fonctionne aussi chez les anti-systèmes : ceux qui dépeignent les Houthis comme un grand mouvement national yéménite qui ne doit rien au soutien militaire et financier de l'Iran, et ne roule pas pour le régime des Ayatollahs, sont soit des naïfs soit des plaisantins.

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La "Mècheroutiette"

16 Mai 2015 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #1910 à 1935 - Auteurs et personnalités

Avant guerre, en 1913, paraît à Paris, le mensuel la "Mècheroutiette", sous-titre "Constitutionnel ottoman, organe du Parti Radical Ottoman, consacrée à la défense des intérêts politiques et économiques et des droits égalitaires de tous les Ottomans sans distinction de race ni de religion". Son directeur politique est Chérif Pacha, ancien saint-cyrien, grand officier de la légion d'honneur, ex général divisionnaire et ambassadeur de Turquie à Stockholm. Il habite 115 rue de la Pompe à Paris. Adversaire des Jeunes turcs du Comité Union et Progrès, Chérif Pacha se disait ami de Paris et de Londres et capable d'empêcher le partage de l'Anatolie après celui de la Turquie d'Europe. On trouvera dans sa brochure un remarquable panorama de l'empire ottoman et de ses enjeux à la veille de la première guerre mondiale, du temps où les Occidentaux menaient des expéditions militaires au Venezuela au soutien des créances de leurs banques, et où la Turquie rêvait encore d'unifier sous son drapeau les peuples slaves des Balkans (une cause soutenue par Chérif Pacha, ouvert à toutes les confessions)

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