Articles récents
"Le Monde" très "impartial" sur la loi d'adoption des enfant russes
Une fois de plus "Le Monde" confond aujourd'hui éditorial et article d'information. Sous la plume d'une certaine Marie Jégo cette fois (de toute façon ils sont tous interchangeables depuis 15 ans). Son titre, à propos de de la dernière loi moscovité contre l'adoption d'enfants russes aux Etats-Unis - "Russie : bienvenue en Absurdistan" - est très clair.
Parmi les paragraphes grinçants de ce petit édito qui ne dit pas son nom citons juste celui-ci : "Les élus de la nation n'allaient tout de même pas se fendre d'un boycottage des iPhone et iPad de l'américain Apple qu'ils arborent comme des ostensoirs dans les couloirs du Kremlin, du Conseil de la Fédération et de la Douma. Cibler les orphelins (740 000 en Russie, selon l'Unicef) était bien plus judicieux. D'autant que, sur les 60 000 enfants adoptés depuis 1992 aux Etats unis, 19 sont morts de mauvais traitements. Il était urgent d'agir."
Hi hi hi! Vous avez bien souri hein ? C'était le but. Provoquer chez vous un petit rictus ironique grinçant contre le régime russe genre "ha ha ha, les connards !".Dans la droite ligne du titre évidemment, parce que tout doit concorder avec le titre, forcément. C'est ça la force d'un édito (oh pardon, d'un article "neutre et objectif"). Et c'est pour ça, mes amis, que Marie Jégo ne vous fera pas connaître le point de vue (russe) de Ria Novosti qui écrit : "Pour une raison ou pour une autre, l'origine d'un enfant défunt n'est pas révélée dans les médias, il est pratiquement impossible d'établir s'il était Russe ou non, car une fois aux Etats-Unis, tous les enfants adoptés reçoivent la nationalité américaine.l'information sur le nombre d'enfants russes victimes de leurs adoptants américains (19 mineurs depuis 1996) est loin d'être exacte, car il ne s'agit que de cas confirmés et rendus publics par les médias". Bah oui, parce que sinon ça ne cadrerait pas avec le titre, ça ne collerait pas, m'enfin ! Ni non plus cette autre information : "Selon l'American Professional Society on Abuse of Children cité par la diplomatie russe, une adoption internationale sur quatre aux Etats-Unis se solde par un échec qui cause un grave préjudice psychologique ou physique à l'enfant". Pour faire semblant d'équilibrer son article Marie Jégo a juste balancé là, dans le paragraphe suivant le point de vue d'une député (euh ? de quel parti ? et pourquoi on la cite elle ?) Svetlana Goriatcheva, mais en précisant bien que c'est "son opinion", et en rajoutant juste après qu'une majorité de russe préfèrent pas de parents du tout que des parents américains. Juste histoire qu'on comprenne bien que cette affaire n'est motivée que par la xénophobie russe, mais qu'heureusement, les "bons", "les représentants de l'intelligentsia et de la classe "créative", fer de lance de la contestation anti-Poutine" eux, restent mobilisés contre la loi scélérate.
Comprenez bien les amis : le but ce n'est pas de vous informer. Il faut juste que vous sachiez que la Russie actuelle, c'est l'Absurdistan (vi vi, c'est le mot que la petite Marie Jégo elle a trouvé toute seule), qu' "on est passé de la modernisation stagnante à l'obscurantisme dominant" (en s'appuyant sur le quotidien libéral Vedomosti pour le dire c'est encore mieux, vu que les libéraux représentent 3,4 % des voix en Russie il eût été dommage de ne pas le citer). Et pas, par exemple, que les Etats-Unis sont, avec la Somalie et le Soudan, l'un des trois pays à avoir refusé de signer la Convention de l'ONU relative aux droits de l'enfant...
Moi, franchement, je ne suis pas un fan du régime de Vladimir Poutine, je l'ai notamment bien montré dans mon bouquin sur l'Abkhazie. Mais je tiens à dire ceci à Marie Jégo : Merci ! Merci Marie de nous croire trop stupides pour nous faire une opinion par nous-mêmes ! Nous imposer ton point de vue à grands coups de marteau sur la tête (quand on sait qu'en plus c'est celui que nous bombardent tous les autres médias tous les jours) est tellement plus intelligent de ta part !
Vaccin cubain contre le cancer du poumon
Certains ont parlé il y a peu d'un vaccin contre le cancer du poumon qui aurait été découvert à Cuba l'an dernier. La nouvelle semble se confirmer, puisqu'après CIMAvax EGF enregistré en janvier à la Havane 2011, un second vaccin cubain Racotumomab a été expérimenté dans 86 pays et certifié récemment
sur la grande île selon les agences occidentales. Ce vaccin ne permet pas de prévenir la naissance des cellules cancéreuses mais d'en stabiliser le développement. Une avancée importante dans ce pays où l'on fume beaucoup et où 22 000 personnes meurent du cancer du poumon chaque année, et une source d'espoir pour les autres pays où le vaccin sera diffusé.
Les mots de la guerre
Tout le monde n'a pas les mots justes pour décrire la guerre. Vous voulez vous en convaincre ? Allez lire ce texte qu'une certaine Peggy Sastre (à la demande de qui ?) a eu la mauvaise idée de traduire en français. Tout le mauvais goût et la lourdeur américains sont là-dedans.

Ce n'est pas affaire de positionnement politique (pour ma part je ne suis ni pour les Assad ni pour les islamistes qui les affrontent), c'est une affaire de sensibilité : notre époque met à l'honneur les propagandes les plus lourdingues. L'intelligence n'en sort pas grandie. Que tous ces gens aillent voir avec quels mots nos écrivains de l'entre-deux-guerres décrivaient les horreurs dont ils furent témoins, cela avait une autre allure. Pourquoi ? Parce que ces hommes avaient le sentiment d'écrire pour un public exigeant, qui avait besoin tout autant de ressentir que de réflechir. Ces auteurs savaient qu'on ne leur verserait pas 100 000 dollars pour simplement écrire "beurk c'est moche, y a du sang et des ruines, c'est la faute de ce salaud de dictateur".
Je lis des anecdotes amusantes en ce moment, sur Jaurès déclarant au lendemain de la condamnation de Dreyfus que le capitaine a bénéficié d'un "privilège de classe" parce qu'il fut exilé dans une île confortable quand de pauvres pioupious de base étaient condamnés à mort pour avoir jeté un bouton au visage d'un officier. Le genre de déclaration qu'il a dû regretter puis gommer de son histoire officielle comme Philippe Seguin se repentant dans l'AFP d'une autre phrase de bon sens contre l'attaque de la Serbie par nos bombardiers en 1999. Sur ces Républicains espagnols qui n'étaient pas fondés à se plaindre de ce que les généraux leurs fissent ce qu'ils avaient fait au régime monarchique cinq ans plus tôt. Tant d'autres choses. Et puis notre Georges Clemenceau national ("carabin provincial aux paumettes de mongol" comme disait la droite) n'était-il pas le Bernard Tapie de son époque ? Notre monde a toujours été gouverné par quelques aventuriers rocambolesques qui s'imposaient sur le terreau d'une lâcheté très largement partagée. Et il n'y a que quelques anarchistes dans notre littérature qui aient pu révéler tout le grotesque de cette comédie humaine...
Les individus...
Les hommes, les hasards de leur vie individuelle, l'impact sur le collectif. Chavez avec ses complications respiratoires, suite à une opération longue à Cuba, Chavez entre la vie et la mort. La révolution vénézuélienne peut-elle survivre à ça ?
Dans l'histoire de notre République, nos "grands hommes" vus par l'écrivain de droite que je lis en ce moment (un écrivain monarchiste, qui croit en son ieu en son roi), pour qui ceux-ci ne sont que de cyniques aventuriers : Gambetta (le "pirate"), Clemenceau (le "carabin provincial", "dandy nihiliste aux paumettes de Mongol") etc. Sous un certain angle la IIIe République etait un régime héroïque, seule république d'Europe, qui éduquait ses masses etc, sous un autre un ramassis de corrompus prêts à tous. Le sort de tout régime, de toute aventure humaine, individuelle ou collective. Sous un certain angle méritant, sous un autre fautif et dérisoire.
La vie privée des gens
Une fille m'écrit ceci :
"J'ai une vie très bizarre depuis deux ans. Après 17 ans de mariage j'ai un matin de juillet 2011 - mes filles étaient en vacances en bretagne - quitté le domicile conjugal, selon l'expression consacrée. Parce que ma vie marchait sur la tête... Je souffrais et mes filles souffraient et c'était la seule solution intelligente que je pouvais prendre. Je ne suis jamais revenue et ne le regrette pas. J'ai refait ma vie, mes filles sont heureuses et moi aussi. Mais... Hé oui, toujours un mais sinon la vie serait trop facile. Je vivrai jusqu'à la fin de mes jours avec la culpabilité d'avoir brisé un homme qui n'a toujours pas compris. Qui pleure encore chaque fois qu'il m'a au téléphone. Qui a réussi à faire de mon bonheur nouveau un chagrin continuel qu'il ne puisse exister sans faire le malheur d'un autre."
Le propos est banal. Des milliers de gens peuvent raconter ce genre de truc. En même temps, pas besoin d'être grand clerc pour se rendre compte que ces phrases sont parfaitement cinglées. "Je suis heureuse mais je ressens une culpabilité" : ah bon on peut être heureux dans la culpabilité ? Comment peut-on aligner "heureuse" "heureuses" sur trois lignes, et parler de "chagrin continuel" à la sixième ? Le mot bonheur sent la satisfaction animale dont on s'enivre pour ne surtout pas avoir à se poser de question (mais dans ce cas mieux vaudrait prohiber ce mot débile, qui est l'alcool idéologique de trois quarts de nos concitoyens).
Non décidément ces phrases ne tiennent pas debout. Cela sent la démence affective des paumés. Et pourtant cette fille est des plus "socialement" normales - une juriste d'entreprise, qui mène une bonne petite vie bourgeoise après avoir réussi ses études - et, je le répète, même ses phrases parfaitement incohérentes sont en soi, archi-banales et pourraient être signées par des millions de personnes dans le monde.
Et il y aurait sans doute autant à dire de la folie du bonhomme qui depuis deux ans accable son ex-compagne de sa dépression d'après-rupture. Tout cela sent à plein nez - chez elle comme chez lui - une dépendance immodérée à l'égard des affects les plus impulsifs et les plus contradictoires, sans guère aucun horizon intellectuel supérieur (une vision plus haute de soi-même et du monde, de soi-même dans le monde) capable de mieux structurer les choses. C'est du désordre à l'état pur.
Alors quoi, que faut-il penser de cette démence affective ? Seulement qu'elle est le lot des trois quarts de l'humanité. Oui, l'humanité est faite comme cela, d'une sorte de folie douce des pulsions, quelque chose qui ne tient absolument pas debout, par quelque côté qu'on le prenne, et sur la base de quoi malgré tout les gens fondent leur vie.
Les philosophes antiques, avec leur franc parler et leur art d'aller au but sans détour, en avaient pour la plupart conclu qu'il fallait tout simplement mépriser les sentiments humains, ou au mieux - dans le Banquet de Platon - utiliser leur pouvoir de fascination pour stimuler des fonctions plus nobles en nous comme la recherche du Beau, du Bon et du Vrai... Nos fausses pudeurs modernes nous empêchent de sauter à des conclusions aussi radicales, tout comme elles nous empêchent de considérer, ainsi que le remarquait jadis Nietzsche, l'ensemble de l'humanité comme des esclaves au sens premier du terme, ce qui était pourtant, là aussi, l'opinion la plus répandue chez les philosophes antiques. Pourtant il faut bien se rendre à cette évidence : oui, la plupart des gens dans leur façon de vivre leurs affects sont parfaitement cinglés, ils sont esclaves, enfants (là encore un terme qu'utilisaient les penseurs antiques à l'endroit de leurs contemporains), incohérents et égarés (et qui plus est capables de professer et proclamer cette folie comme si elle était parfaitement raisonnable). Comment peut-on après cela prendre qui que ce soit et quoi que ce soit au sérieux ?
Le pénultième jour
Ceux dont je parlais hier vont-ils tenir le choc de la célébrité si, comme c'est annoncé, TF1 leur consacre un reportage de 30 mn, ou finiront-ils mangés tout crus comme José Bové ? Difficile de marcher sur les fils de la renommée.
Les Femen ouvrent une succursale en Egypte (mais un islamiste, Mahmoud Abderrhamane, a demandé que leur tête de proue soit déchue de sa nationalité et soit interdite d'accès au territoire), les Indiens se passionnent pour un viol. Il semble que l'avenir du monde tienne de plus en plus à l'émotion que suscite la condition féminine. Les mornes fondés de pouvoir qui font office de chefs de l'Exécutif français, encaissent une rebuffade du Conseil constitutionnel sur la question fiscale et font toujours aussi peu rêvé le "peuple de gauche", qui l'oubliera en ce jetant sur les tables de réveillon demain (du moins ceux qui ont assez de pouvoir d'achat).
Pour ma part j'observe que beaucoup de lecteurs ces derniers temps me lisent de Sotchi, ville à laquelle sont rattachés les serveurs Intenet abkhazes. Le résultat sans doute de la publication de mon interview dans la Chegemskaya Pravda. Je regrette de ne pouvoir offrir grand chose à ces lecteurs zélés. Je ne peux donner aucune "visibilité", comme on le dit aujourd'hui, à leur riante contrée, étant esseulé à l'extrême dans la petite sphère "alternative".
Peut-être se passera-t-il quand même quelque chose en 2013. Pas seulement la publication de mon interview dans la revue Jineps. J'ai par exemple repéré une vilaine foire prévue dans quelques mois. Il faudrait faire quelque chose. On en reparlera peut-être.
Visite du village d'Emmaüs Pau-Lescar
J'étais hier de passage chez Emmaüs Pau-Lescar, des "compagnons" très engagés dans les luttes sociales qui refusent la "gestion de la pauvreté" et ont transformé, à l'occasion de leurs 30 ans d'existence, leur communauté en un village écologique et égalitaire. A l'entrée la fresque qui alignant Sankara, Che Guevara, Gandhi et Mandela sous le titre "Oser, risquer l'utopie avec et pour l'homme" - fresque autrefois dessinée sur le mur de la mairie de Billère en solidarité avec les sans-papier - en dit long sur l'ampleur du projet. Ici on se donne les armes pour construire une société alternative.
J'ai été accueilli par la chargée de communication Cécile Van Espen et par le directeur Germain Sarhy, 58 ans, qui se considère comme le "préfet" du village (lequel élit par ailleurs un maire et un "conseil municipal"), et nous avons déjeuné ensemble. Il m'a ainsi longuement expliqué le fonctionnement de sa communauté et les principes qui la régissent -formulés dans le journal local le 9 janvier 2012 : "Le compagnon qui vient dans la communauté est nourri, logé, blanchi et il participe à l'activité de la communauté qui est à la base la récupération, en fonction de ses capacités physiques et intellectuelles. Nous ne sommes pas dans une logique de production mais dans une politique participative.Ils perçoivent un "pécule" autour des 450 euros par mois d'argent de poche. Faites le calcul par rapport au smic. On cotise aussi à l'Urssaf et chaque compagnon a droit à la couverture sociale et à la retraite." Le statut est régi par la loi sur l'accueil en organismes communautaires et d'activités solidaires.
Germain Sarhy insiste sur le fait que sa structure ne perçoit aucune subvention et ne vit que des ressources de la récupération. Il se sent ainsi libre à l'égard des pouvoirs locaux dont nous parlons en détail (leur attitude en période électorale, en dehors des élections etc, Emmaüs).
A notre table un jeune Malien compagnon pour un temps de la communauté : l'occasion d'un échange intéressant avec un homme attaché à d'autres valeurs (l'islam, les hiérarchies aristocratiques du Mali) et qui au nom de ça à quelques problèmes avec certains aspects de la vie du village comme le calendrier de nus et le tutoiement immédiat de tous (mais néanmoins le cadre égalitaire et l'esprit d'accueil du lieu permet de gérer la différence de valeurs sans conflit).
Après le repas je visite avec Germain le village. Il me montre les constructions de pavillons pour les personnes présentes depuis deux mois qui pourront bientôt accueillir environ 80 personnes au total (ce qui fera environ 200 pensionnaires avec la partie réservée aux jeunes visiteurs) . Ces pavillons suivent les normes de l'habitat écologique (écohabitat), autosuffisants en énergie, d'une grande élégance esthétique (car Emmaüs est attaché à ce que la pauvreté n'empêche pas la qualité de vie, l'attachement au beau, alors que le village donne sur la chaîne de montagnes).
Emmaüs veut s'ouvrir sur l'extérieur avec une ferme qui met en valeur les espèces locales, l'épicerie qui devrait ouvrir au printemps. il veut aussi se doter d'une école sur le modèle du Colibri. On me montre aussi le champ de blé bio dont le village tire sa farine fabriquée dans un moulin basque de 1885.
La culture ici n'est pas considérée comme un luxe, et on l'a place au centre du devenir des compagnons. Déjà le site accueille en juillet le principal festival musical de la région (10 000 personnes chaque année). En marge du festival l'an dernier ils organisaient des conférences dans le cadre du forum mondial de la pauvreté, en partenariat avec Paul Ariès et le journal « Le Sarkophage ». Cette année ce sera sur le "buen vivir" (good living/bien vivre). Je parviens sans peine à convaincre Germain de lancer un salon du livre des éditeurs indépendants comme cela existe à Paris où il n'y aurait pas à engager des sommes pour louer les stands. Il envisage aussi la mise en place d'une librairie permanente.
Sensible à la solidarité internationale, Emmaüs Lescar est en contact avec la Bolivie, et le Burkina Faso (via l'association AIDIMIR) sur des projets de reboisement. De ce côté là aussi il y aurait des choses intéressantes à envisager.
Evidemment ce genre de visite vous redonne de confiance dans l'aventure humaine. A Emmaüs-Lescar vie au grand air, liberté anti-conformiste et sens de la solidarité et de la justice se conjuguent à un point d'harmonie qu'on n'aurait plus cru guère possible sous la dictature des banques, des multinationales, et de la bêtise lâche et égoïste de nos contemporains. Un autre quotidien est possible !