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Hong Kong stars
Il a raison Jean-Pierre Page, l'ex responsable des relations internationales de la CGT, de râler contre son syndicat qui appuie la révolte des étudiants de Hong Kong. Même si on ne sait pas si ces étudiants sont manipulés ni par qui, nous avons assez l'expérience désormais de ces mouvements de jeunesse trop bien planifiés et en tout cas trop facilement récupérables (à Kiev, à Caracas etc) pour ne pas rester sur nos gardes. Après tout cette "révolution des parapluies" ne mobilise qu'une infime partie de la population. Bien sûr tout n'est pas à jeter dans les "révolutions de couleur" comme l'a noté l'ethnologue anarchiste David Graeber (que j'ai rencontré par le passé), ni à fortiori dans le mouvement hong-kongais dont on sait peu de choses. S'insurger contre la corruption ou l'autoritarisme est légitime. Mais il faut garder un oeil suspicieux sur le cadre global dans lequel tout cela peut être récupéré...
"Même Le Pen" de Jean-Luc Le Ténia
En "feuilletant" ce qui s'était fait sur Irène Jacob sur You Tube, j'ai découvert Jean-Luc Le Ténia, dont je n'avais jamais entendu parler auparavant (honte à moi). Wikipédia m'apprend que Didier Wampas l'a proclamé « meilleur chanteur français du monde », ce qui n'est pas étonnant car il y a une parenté de style, et qu'il s'est suicidé en 2011, ce qui n'est pas surprenant non plus.
C'est une heureuse découverte car j'aime bien sa façon de composer des chansons courtes, "minimalistes" comme disent ses commentateurs, et sa révolte entre en écho avec la mienne... (une révolte, notez le, qui, chez ce chanteur, va de la pornographie - voyez sa chanson Sciences Po, une façon jouissive de "niquer" les élites - à l'hommage relativement élégant, ou du moins retenu, à la délicatesse - voir la chanson "Irène Jacob").
J'aime par dessus tout sa chanson "Même Le Pen" à laquelle, je crois, 80 % des hommes hétéros peuvent adhérer, même ceux qui vivent en couple, même ceux qui sont amoureux. D'une part parce qu'elle est assez représentative du répertoire du chanteur dont elle reflète certains thèmes traités dans d'autres chansons, et, d'autre part, parce qu'elle pousse ces thèmes plus loin me semble-t-il : c'est la meilleure chanson, voire le meilleur texte que je connaisse sur la condition du citoyen mâle dans la société contemporaine.
Je ne cèderai pas à la facilité féministe d'y voir une image de la masculinité déchue, car je pense que même le mâle dominant du Ier siècle avant Jésus-Christ ou de l'époque de Châteaubriand en son for intérieur aurait pu souscrire dans une certaine mesure aux paroles de cette chanson. "Même le Pen" est la chanson du citoyen mâle, parce qu'elle exprime un trait fondamental de la virilité, qui est le manque de femme (ou de Femme). Pour autant de présence féminine dont il soit entouré, le mâle est par essence en manque d'un quelque chose de féminin qu'il ne peut pas s'empêcher d'appeler "une femme" (et qui probablement en fait n'est pas du tout une femme, mais bon...). Rappelez vous Nietzsche dans "Crépuscule des idoles" (pardon de toujours citer cet auteur) : "Pour comprendre l'histoire de la philosophie, cherchez la femme, vous ne chercherez jamais en vain".
La force de Jean-Luc Ténia dans cette chanson, c'est d'exprimer la déréliction masculine non seulement sur le thème du "je cherche la femme", mais dans un jeu de miroirs kaléidoscopiques qui met l'humain mâle aux prises avec une galerie de fantômes épouvantables : ses congénères (en ce sens la chanson est politique, et pousse l'ontologie de la virilité sur le terrain de la citoyenneté). Il passe en revue les pires, les plus absurdes, les plus improbables, de Le Pen à Bokassa, de Bernard-Henri Lévy à Johnny Hallyday. Comme tous les inventaires à la Prévert (ou à la Montaigne) l'énumération crée un effet d'exposition de la diversité humaine qui donne le vertige, et dans ce musée des horreurs ou du non-sens, celle-ci ne ferait qu'accroître le côté angoissant du "je cherche la femme", si l'angoisse ne se tournait en dérision et en rire. C'est à tort, bien sûr, que l'énumération fait croire que toutes ces personnes ont une femme (et à la fin on le voit bien quand Edith Cresson ou une carpette trouvent leur place dans cette foire aux vanités). En fait, elle ne sert à montrer que la solitude du citoyen (citoyen de la France et du monde) dans sa frustration sexuelle et ontologique, dans son impuissance politique autant qu'existentielle (car c'est la capacité de respirer qui est en jeu) à vivre dans un monde qu'il voudrait à son image et qui ne l'est pas. Cette citoyenneté solitaire, minable, tout juste bonne à traîner dans les bistrots est l'envers de la citoyenneté aristocratique, courageuse et stoïque d'un Caton d'Utique, tout en en étant aussi la condition nécessaire (César ne traitait-il pas Caton d'Utique d'ivrogne ?). "Ils ont tous une femme sauf moi" et "tous les guignols ou tous les monstres ont une femme" mais pas moi, n'est certes pas la preuve que je ne suis pas un guignol ou un monstre. C'est juste le signe que je me sens plus écrasé qu'eux, qu'il faudrait que je me mette en branle (pas en branlette), en mouvement - comme dans sa chanson "Quitter le Mans" où il voit bien qu'il faut qu'il change de ville, même s'il ne sait pas pourquoi, et même si ça ne sert sans doute à rien (je repense à la chanson des Innocents "Un homme extraordinaire" - "Sans connaître les raisons qui ont poussé cet homme à vivre dans une autre ville..."). Même les pires des pires ont une femme, et pas moi. Je suis donc le pire, je dois bouger, et cependant je sais que si les pires ont une femme, c'est que les femmes méritent le pire, ou alors qu'il est faux qu'ils aient "plus" une femme que moi... tout cela n'est qu'illusion... sauf la nécessité de rechercher, d'agir, d'avancer, parce qu'il y a du manque, du manque-à-être, la blessure originelle... Il y a tout cela dans cette chanson qui, à mes yeux, relève du pur génie.
Aura charismatique
Un commentateur sourit à la lecture de mes précédents posts sur Irène Jacob et me le fait savoir par mail ce soir. Si je voulais rationaliser un peu ma fascination pour certaines célébrités populaires au delà de mon côté enfantin, je dirais quand même ceci : un jour que je parlais avec Nathalie Cardone, elle m'expliqua comment en tant que chanteuse elle avait parfois le sentiment d'absorber toute l'énergie (elle disait "tout l'amour" sans doute bien plus justement) qu'un public de quelques centaines ou milliers de personnes pouvaient investir sur elle dans une salle de concert et le leur renvoyer ensuite par son investissement dans son art vocal. J'ai eu le sentiment en l'écoutant parler qu'en devenant une icone pour son public, elle recueillait en elle une sorte de "mana" (appelons le comme ça - Marcel Mauss disant que "mana" est un mot aussi polysémique et neutre que "machin" ou "truc"), ou d'aura qui provenait de la foule et finissait par rayonner autour d'elle. Je pense que le même phénomène se produit sur toutes sortes de vedettes du grand et du petit écran (c'est pourquoi largement celles-ci ne s'appartiennent plus, et cela parfois peut d'ailleurs les abîmer psychiquement). Et si l'on a gardé une petite part de puérilité (indispensable au salut, le "Dionysos enfant" de Nietzsche), suffisante pour avoir un enthousiasme sincère pour quelques acteurs ou actrices, on peut, à travers cet enthousiasme, percevoir ce phénomène assez mystérieux de captation-renvoi du "mana" qui, au fond, contribue aussi à ressouder la solidarité de notre espèce, refonder son "contrat social" de temps en temps. Si on n'a pas communié à ça, on ne peut pas comprendre tous les phénomènes charismatiques dont parle Max Weber qui, bien qu'aux antipodes de la rationalité pragmatique, sont tout aussi constitutifs du fonctionnement de notre espèce.
Pure événementialité
Un lecteur de ce blog que j'ai déjà rencontré il y a quelques années m'écrit, après avoir parcouru mon post du 30 septembre, qu'il est le cousin germain d'Irène Jacob...
Quand je faisais de la philo, on parlait de la "pensée de la pure événementialité", pensée du surgissement, qui est typique du courant Héraclite-Nietzsche-Heidegger (au fait, encore des révélations terribles sur le nazisme de ce philosophe autour de la publication de ses carnets, Books ce mois-ci et Finkielkraut dans Répliques en parlent, mais bon ça cela concerne sa vie "non philosophique"). Un lecteur qui vous dit "je suis le cousin d'Irène Jacob", c'est de l'événementialité pure, comme quand un médium vous sort dans un café "ton grand père est mort quand tu avais 14 ans" parce que cela fait "voir" qu'on est dans un monde où rien n'est prévisible, où toutes sortes de réalités cachées peuvent surgir sur un mode très étrange au moment où on s'y attend le moins.
Ce matin, je regardais un docu sur les médiums ici qui disait que ce sont surtout les femmes qui vont voir les médiums, par exemple celles qui viennent de perdre un enfant, et qu'elles obtiennent des résultats (l'enfant leur parle). Le commentateur disait que c'est parce qu'elles ont un rapport plus viscéral et intime à la vie que les hommes. C'est possible. Je me demandais pourquoi les intellectuels, eux, ne prennent pas la peine d'aller comme moi prendre une bière avec un médium et laisser les révélations se révéler... Pour mille raisons bien sûr, différentes d'un individu à l'autre. Une d'entre elles est que l'intellectuel est dans la "mécanique", l'enchainement causal rationnel. Je repensais à Nietzsche qui disait quelque part que les événements d'un intellectuel, ce sont les idées (Deleuze eût dit "les concepts") qui viennent le frapper par en haut, par en bas. Ca ne peut pas être un événement extérieur, sauf quand ils en viennent à étrangler leur femme comme Althusser ou attraper le choléra comme Hegel ("le grand Hegel frappé par le choléra", grand thème kierkegaardien). Il faut juste être crétin comme moi pour aller prendre un verre avec un médium, recevoir un événement "extérieur" de lui, et vouloir en faire un livre.
Mais que l'événement soit intérieur ou extérieur, sa force vient toujours du fait qu'il vous prend du côté où vous vous y attendiez le moins. Je m'attendais plus à ce qu'un émir me propose 600 000 euros qu'à ce que ce lecteur soit le cousin d'Irène Jacob. L'événementialité du réel est source d'espoirs, ou de peurs terribles (en ce moment, c'est plus la peur qui me gouverne que l'espoir), ou encore d'un grand sentiment d'impuissance. Sur le versant "cousin de la grande actrice", c'est plus l'impuissance qui s'impose : l'événement est énorme, mais on ne peut rien en faire, il est juste là pour vous signifier que tout est possible et rien n'est possible.
La première fois que j'ai vu une médium, c'était le 25 juin 2011. Comme avec le type qui m'a parlé de mon grand père, à l'époque je ne croyais pas du tout en ces phénomènes paranormaux. J'ai eu recours aux services de cette fille en croyant qu'elle pratiquait la sophrologie. Si j'avais su qu'elle était médium, je me serais enfui en courant... Et j'ai finalement eu recours à nouveau à ses services (avec succès) pour renaître de mes cendres cet hiver 2013-2014... comme quoi...
A l'époque donc, en 2011, si je n'ai pas donné suite à ses pseudo-séances de sophrologie c'est parce que j'étais aspiré par toutes sortes de projets que j'avais avec la chanteuse Nathalie Cardone (elle aussi une fille "inspirée" dans tous les sens du terme). Comme le fait de connaître le cousin d'Irène Jacob, le fait de prendre un pot de temps en temps avec Nathalie Cardone relevait pourtant de la même événementialité qu'on pourrait qualifier d' "anti-pragmatique". Une événementialité qui n'est là au fond que pour vous montrer qu'il n'y a rien à faire, qu'il ne faut rien essayer de faire, sauf ressentir le côté étonnant, improbable et imprévisible de se trouver à prendre une bière avec quelqu'un ou d'avoir une possibilité d'avoir un autographe de quelqu'un qu'on n'aurait statistiquement jamais dû croiser, le ressentir et s'en réjouir. Pour ma part je suis d'autant plus content de connaître le cousin d'Irène Jacob (et d'apprendre aujourd'hui qu'il l'est) que le souvenir de cette actrice dans mon esprit est associé à deux films très liés au monde des médiums... Cela tisse une trame imaginaire où tout renvoie à tout. C'est agréable...
Sur le blog de l'Atlas alternatif
Je profite d'un passage en Béarn ce weekend pour faire un tour d'horizon de l'actualité que je reporte sur le blog de l'Atlas alternatif. Je fais un point sur les accusations de Cristina Kirchner sur le risque qu'elle soit assassinée parla CIA (je ne sais pas quoi en penser), la conquête de Sanaa au Yémen par les chiites. Je n'ai pas écrit sur Hong Kong pour le moment. Il me semble qu'il esttrop tôt pour parler de "révolution colorée" à son sujet (l'abus du terme est toujours une façon d'infantiliserles peuples). Il est clair en tout cas que le mouvement "Occupy center" semble avoir été bien planifié. Est-il financé ? on ne sait pas. Et ces mafias qui ont été violenter les étudiants : des complices de Pékin ou des agents provocateurs destinés à radicaliser les contestataires ? Tout cela est bien obscur.
Mon projet de livre collectifsur l'Ukraine est un peu retardé. Une chance que la "pax porochenka" là bas stabilise un peu les événements. Je regardais un reportage assez triste cette semaine sur la petite joie qui enveloppe la Birmanie après son ouverture à l'Ouest. Triste parce qu'on pressent que le pays ne va pas en bénéficier longtemps. Je ne voudrais pas qu'il devienne une nouvelle Thaïlande, et pourtant c'est ce que le capitalisme mondialisé souhaite. La jeune birmane élue Miss Asie-Pacifique au printemps qui s'est enfuie avec sa couronne parce qu'on voulait lui faire porter de faux seins et servir d'escort girl aux millionnaires incarne à elle seule la réalité de ce danger.
Les saints patrons des pharmaciens belges...
Je fêtais mon anniversaire la semaine dernière. Et c'est aujourd'hui en parcourant une (très mauvaise) BD sur les Borgia que j'apprends que les deux saints de ce jour-là (cela m'a toujours surpris qu'ils soient deux), étaient des guérisseurs "anargyres" (qui refusaient le paiement) ... et des jumeaux...
Irène Jacob, Véronique, Esther, la Suisse, les jumeaux, le flot
Je déconseille à mes lecteurs de prendre ce blog "trop à la lettre" (et d'ailleurs de prendre aussi sa propre vie trop à la lettre). Bien sûr quand j'essaie de synthétiser ma réflexion sur l'ingérence occidentale, ou quand je fais une mini-fiche sur socialisme et nationalisme en 1914 comme cela m'est arrivé, il y a là des éléments cognitifs que tout un chacun peut "utiliser" à des fins pragmatiques sans prendre en compte la subjectivité de l'auteur du blog, ni la sienne propre en tant que lecteur. Mais j'ai de la culture, au moins depuis ma lecture de Montaigne et de Derrida (pour ne citer que quelques jalons), une vision non utilitaire, qui admet de "laisser couler le fleuve" sans comprendre nécessairement tout de son courant, de son flux, et laisser simplement les choses entrer en résonance. Prenez donc ce blog comme il vient, n'y cherchez rien d'utilitaire, même si certaines choses peuvent vous y être utiles un jour (l'utilitarisme est davantage du côté du blog de l'Atlas alternatif, qui, pourtant, bizarrement, a chaque jour deux fois moins de lecteurs que celui-ci...).
Quand je vivais à Madrid, en 1994, j'y ai vu deux fois je crois "Rouge" avec Irène Jacob. Les films de Kieslowski faisaient partie de l'arrière-plan de l'époque, comme les romans de Kundera (j'ai vu qu'il vient d'en pondre un autre, qui traîne dans les halls de gares entre les mémoires d'Adriana Karembeu et les conseils pour les entretiens d'embauche). Cela faisait partie de l'ouverture à "l'autre Europe" dont parlait Rupnik.
Je n'ai rien retenu de ce film pourtant, sauf la présence de l'actrice, et celle de Trintignant (ach ! "Deauville sans Trintignant..."). Jacob m'a tellement remué que je me suis dit que je devais écrire un roman dont l'héroïne ce serait elle. Mais un roman sur quoi ? J'ai traîné à la Fnac de Callao (qui, à l'époque, venait d'ouvrir, la France en était fière), et j'ai vu, en format de poche pour lycéen, "Esther" de Racine. Il n'en fallut pas plus pour me convaincre de transformer le livre d'Esther (dans la Bible) en roman. L'année précédente j'avais écrit un mix de l'Odyssée et de l'Eneide dont j'avais fait un roman un peu bizarre, et j'avais même songé à faire de même avec des contes scandinaves. Là encore il n'y avait rien d'utilitariste dans cette démarche. C'étaient de purs essais imaginaires. J'ai écrit trois pages sur Esther, juste le temps d'imaginer un peu le personnage, l'ambiance de l'empire perse (où se déroule l'action) etc, puis j'ai laissé cette tentative au fond du disque dur de mon "notebook". Il n'y avait rien de profond dans tout cela. Je n'avais que 24 ans. Les choses se mettaient juste en place, comme ça.
C'était il y a 20 ans. Peut-être jour pour jour, qui sait...
Et puis, récemment, j'ai voulu revoir "La double vie de Véronique", du même cinéaste, avec la même actrice. "Revoir" parce que je l'ai sans doute déjà vu, et pourtant comme de 'Rouge", il ne m'en est rien resté. Le film parle beaucoup de gémellité, un thème qui me poursuit ces deniers temps, et pourtant je n'y avais même pas prêté attention en achetant le DVD. Il "en parle"... C'est un euphémisme. Il en parle en fait d'une façon sublime, et j'ai repensé aux écrits de Lévi-Strauss sur les jumeaux dans la mythologie, ou au fait qu'Helen Fisher s'est lancée dans la psychologie évolutionniste parce qu'elle avait une soeur jumelle. Je n'ai pourtant jamais été particulièrement attiré par le thème du "double". J'ai au contraire toujours trouvé étrange qu'on puisse s'y intéresser. Ha ha ! on vous a peut-être à tous dit un jour que vous aviez un sosie quelque part. Moi en tout cas on me l'a dit, mais cela m'a si peu intéressé que je ne sais même plus qui me l'a dit (un type qui en tout cas était persuadé de m'avoir vu ailleurs, mais bon, après tout il y a bien un clodo qui m'a dit avoir cru voir Dieu en me croisant en mai dernier...). Pour moi le double ou le jumeau est impensable. C'est peut-être un de mes défauts.
Accessoirement le film montre la gare Saint-Lazare de 1990, comme Depardon a montré celle de 1996. Cette gare n'est pas n'importe quelle gare parisienne, croyez moi. Elle est chargée de présence. Voyez ce que Breton en dit dans Nadja.
C'est curieux mais ce matin, j'ai regardé une interview d'Irène Jacob. Nul n'aime voir vieillir les actrices de sa jeunesse. A ce propos Sophie Marceau m'inquiète. Irène Jacob n'est plus la Véronique de 1991, mais elle n'a pas encore les joues creusées de Sophie Marceau. En l'entendant parler, j'ai eu un sentiment étrange qui ne m'était jamais venu auparavant : elle n'est pas française. En 2011, j'étais souvent interviewé par des journalistes suisses d'un journal genevois, et j'ai même enregistré une séquence de 20 minutes pour la RTS (radio télévision suisse) - en fait l'interview avait duré une heure au jardin des Tuileries. Pour une raison obscure, j'intéragis beaucoup avec la périphérie de l'espace francophone (Belgique, Suisse, Québec). La journaliste elle aussi était une Véronique, Véronique Marty, et en entendant Irène Jacob, je retrouvais non seulement des intonations, mais aussi des expressions du visage, de Véronique Marty. Après vérification sur Wikipedia j'apprends qu'en effet Irène Jacob a grandi à Genève.
Est-ce que cela a de l'importance qu'elle soit suisse alors que cela ne se ressent pas dans le film "La double vie de Véronique" ? Je n'en sais rien. D'ailleurs peu importe que cela ait de l'importance sur un plan utilitaire ou pas (encore que, si je me souviens bien, "Rouge" se passe en Suisse, et on ne fait pas le même film à Paris qu'à Genève). Est-ce que cela a de l'importance que le seul commentaire élogieux (trop élogieux) au cours des trois derniers mois sur ce blog provienne d'une citoyenne suisse ? Je ne sais pas. En tout cas, il est étrange que "l'helvéticité" d'Irène Jacob me saute au visage aujourd'hui.
A 24 ans, je m'intéressais surtout beaucoup à la culture juive (ce qui en un sens a préparé m'a rencontre avec la juive serbe d'origine hongroise dont je parle dans "Eloge de la liberté"... tiens hier il y avait une magistrate hongroise à notre table tout l'après midi). C'était en partie lié à mon séjour en début d'année 1994 à Troyes, qui est un foyer important (mais oublié) du judaïsme médiéval en France. Et curieusement, comme j'étais aussi superficiel dans mon approche de la Bible que dans celle de l' "helvéticité" d'Irène Jacob (ou de Jean-Jacques Rousseau), je n'ai absolument RIEN compris au livre d'Esther à ce moment-là. Le type qui m'a ouvert les yeux au printemps dernier sur Esther, c'est un prof français qui enseigne à Cracovie (la ville où se passe une partie de la "Double vie de Véronique") quand il a pondu un article sur le lien Ishtar-Esther-Marie-Madeleine-Etoile du Berger. Son article recèle l'idée que le Livre d'Esther porte en fait la trace d'éléments très difficiles à exhumer de la vieille mythologie astrologique chaldéenne.
Lire le livre d'Esther à l'aune de cette mythologie est en partie une erreur puisque le judaïsme s'est construit sur son déni, mais savoir qu'elle y est présente enrichit déjà cette lecture. Ce point de départ a éveillé ma curiosité, d'autant que le prof de Cracovie disait que le mot "juif" apparaît pour la première fois dans la Bible dans ce texte, qui est donc fondateur de l'identité juive, sur fond de menace de génocide (puisque c'est de cela que parle le livre). J'ai relu le Livre d'Esther et j'y ai saisi ce que ni le prof de Cracovie, ni le jeune écervelé de 24 ans que j'ai été n'y avaient compris : ce livre est sur le pouvoir magique que le divin peut donner, miraculeusement, à la parole. La reine Esther risque sa vie sur une seule parole, et Dieu, au milieu de la terreur, lui donne les mots qui, devant le Roi des rois, vont "sauver sa peau" et celle de tout son peuple.
Bon, dans la foulée j'ai commandé le DVD de "Par delà les nuages" d'Antonioni. Toujours vers 1992-94, mes camarades ex-khâgneux faisaient l'éloge d'Antonioni. Mais, il était déjà vieillissant, et, dans ce film où il met en scène Sophie Marceau et Irène Jacob, le seul point positif que j'y avais trouvé (mais qui m'avait paru un peu lassant à la longue, et même vulgaire), c'est qu'il dénudait beaucoup ses actrices (enfin bon, il a dénudé Marceau plus que Jacob si je me souviens bien, ce qui est en un sens "logique"...). Au fait n'entrons nous pas dans la saison où Ishtar se dénude ? Allez savoir pourquoi, je m'étais persuadé que ce film était de Oliveira. Il est peut-être temps que je le regarde à nouveau avec un regard "mûr"... Fin de cette causette du dernier jour de "mon" mois, celui de septembre... Au boulot !
Anniversaire
Septembre fut marqué, comme tous les ans, par mon anniversaire. Les anniversaires sont un bon test de l'égoïsme des gens. Beaucoup de personnes à qui j'avais souhaité leur anniversaire (le 1er février, le 23 février etc) se sont bien gardé de me rendre la pareille. Et, comme je me suis désinscrit de Facebook fin décembre, tous ceux qui me le souhaitaient simplement "parce que ça s'affichait sur leur ordinateur" cette fois ci n'ont eu aucune machine pour leur signaler quoi que ce soit (et j'ai ainsi pu évincer la politesse mécanique). Au total cela faisait peu de monde donc pour me le souhaiter. En vérité je suis contre la célébration des anniversaire, mais je trouve que les gens qui n'ont pas la politesse de rendre un voeu d'anniversaire qu'on leur a envoyé sept ou huit mois plus tôt ont quand même un petit problème avec la réciprocité, et donc avec l'altérité...