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"Mémoires d'Infra-tombe" de Julien Benda
Depuis un siècle et demi à chaque génération on rencontre dans le champ intellectuel une personnalité-phare qui accepte d'occuper le rôle du vieux rationaliste grincheux. Il y eut en Angleterre Bertrand Russell, en France Julien Benda (l'auteur de la célèbre "Trahison des clercs"), aujourd'hui il y a Noam Chomsky. Ces intellectuels ont été souvent isolés parce que la "mode" était la défense des passions. Chomsky l'est encore mais peut-être moins parce que l'état des sciences et de la technique aujourd'hui est de nature à susciter plus d'intérêt pour le rationnalisme et parce que les excès de l'irrationalisme a fini par épuiser la politique à la fin du XXe siècle.
Je lis Benda qui, lui, fut particulièrement isolé à l'époque des grands mouvements de masse - fascisme, communisme, mais aussi développement de la société de consommation à l'américaine.
Divers points de son petit livre, Mémoires d'infra-tombes paru chez Julliard (collection "La nef" en 1952 pour la modique somme de 360 F), un petit livre court qui renvoie à beaucoup de points déjà développés dans l'oeuvre antérieure de Benda. Plutôt que de longs discours, voici des citations de son ouvrage :
"Je n'attaque nullement l'irrationalisme. J'attaque ceux qui, sous prétexte d' 'élargir le rationalisme', Bergson avec son 'transrationalisme', Bachelard avec son 'surréalisme', Maublanc avec son rationalisme 'moderne' en prêchent la stricte négation, dont ils ne veulent convenir" p. 142
"Comment la société française, si profondément rationaliste aux XVIIe et XVIIIe siècles, qui l'est encore éminemment dans les trois premiers quarts du XIXe siècle avec son admiration pour Taine, Renan, Claude Bernard, Michelet, devient-elle soudain ivre de mysticité avec Barrès, Bergson, Péguy, Mauriac ?
L'influence allemande n'explique rien. La mysticité de l'âme d'outre-Rhin a toujours existé et les Français le savaient. La question est : pourquoi les conquiert-elle aujourd'hui ? Les romantiques de 1830 y avaient complètement échappé" p. 132
Sur Heidegger (dont Beaufret était le prophète) "M. Jean Beaufret exalte une philosophie qui, riche, dit-il de sa propre inquiétude, ne confond pas le besoin de certitude avec le souci de la vérité.
Je demande au promoteur de ces arrêts si une inquiétude qui consiste à s'agiter dans des problèmes insolubles, sur lesquels l'humanité n'a pas avancé d'un pas depuis trente siècles qu'elle s'y applique, constitue pour elle un enrichissement " p. 83
"Un de mes exégètes, M. André Thérive, a dit que j'avais la haine de la vie. Cela est vrai et elle ne me passe pas avec l'âge" p.18
"Ces publications qui procèdent par affirmation purement gratuite, au service d'une action morale - c'est le cas d'à peu près toutes aujourd'hui - ne me sont, en tant que je ne m'intéresse qu'à la pensée désintéressée, d'aucune valeur" p. 37
"Le fameux mot de Mussolini : 'Méfions-nous du piège mortel de la cohérence' pourrait être signé de tous ceux qui entendent poursuivre une oeuvre au sein de courants qu'ils ne peuvent pas prévoir. L'action n'a que faire de la vérité, et j'approuve ceux qui se moquent d'elle quand l'objet auquel ils aspirent - et c'est le cas des communistes - m'est sympathique" p. 62
"Je n'ai que mépris pour ceux qui, comme un Barrès ou un Valéry, trouvent bon que les trois quarts de l'humanité tournent la meule pour qu'ils puissent écrire une belle phrase - qui n'est même pas toujours belle" p. 64
"Pacifisme : désir de relations juridiques entre les nations" p. 69
"La croyance en un nouvel esprit humain [à venir] est un pur acte de foi - d'ailleurs pathétique" p. 91
"Le mépris des livres au nom de la vie est une ânerie du romantisme" p. 130
"Reste la satisfaction d'avoir fait une belle oeuvre. Mais alors j'aurais dû la garder dans mes tiroirs. Publier implique qu'on cherche des suffrages. L'homme qui publie un livre dont personne ne parle est toujours un peu ridicule" p. 141
"Je dois spécifier toutefois ma position en face du mystérieux. Le mystérieux ne m'importe que dans la mesure où j'ai des chances de le voir cesser de l'être, devenir explicable" p. 142
Passage extraordinaire contre Barrès p. 18-19, Jankélévitch p. 85, Breton p.95, Gide p. 145, sur mathématiques et liberté (p. 23 - avec la citation du nazi Haupt "à bas la vérité juive d'Einstein". P. 26 sur le refus de signer une pétition pour des ouvriers condamnés. Sur le caractère nécessairement terne et ennuyeux (qui plait au philosophe mais pas à l'esprit littéraire) de la démocratie p. 30 Benda favorable à Piaget p. 147
A propos de Descartes et des tentatives de récupération par Bergson, l'existentialisme, et les marxistes : "On peut se demander si la gloire d'une philosophie n'a pas pour mesure la déformation que lui assènent tous les partis pour se réclamer d'elle". p. 139
Les phrases de Benda que je condamne : "Ils hurlent contre le colonialisme, avec raison, au nom des Droits de l’Homme, mais accepteront-ils que la France devienne une nation de troisième ordre quand elle n’aura plus de colonies ?" p.70 ou "Les femmes ne perdent pas leur temps, elles perdent le temps des hommes. La femme est chronophage" p. 58 ou encore "On se demande parfois si les Tolstoï, les Romain Rolland, les Mauriac, avec leur abaissement du juridique au nom de l'amour, n'ont pas fait plus contre la paix que l'hystérie des Nietzsche et des Hitler" p. 32.
"La démocratie des crédules" de Gérald Bronner
Ci-dessous mon compte rendu du livre de G. Bronner publié sur Parutions.com
Chacun pourrait en convenir : plus le niveau culturel et la diffusion de l’information augmentent, plus les excès de la culture du soupçon hyperbolique (moins constructif que le doute hyperbolique de Descartes) peuvent être une source d’anomie, spécialement dans une démocratie libérale où la légitimité du pouvoir repose plus qu’ailleurs sur l’opinion commune et où la course effrénée au scoop dans les grands médias est loin de servir systématiquement les intérêts de la raison.
En militant dévoué de la cause de l’intelligence critique mais structurée, le sociologue Gérald Bronner entreprend donc de combattre cette dérive et, pour ce faire, nous propose un ouvrage intéressant qui décrit finement les processus de la tromperie, dissèque des cas, invente des catégories ou les reprend à d’autres travaux universitaires (le biais de confirmation, effet Werther, effet râteau, etc.), fondés sur des tests de logique ou des expériences de psychologie sociale (qui laisseront le lecteur plus ou moins sceptique suivant les cas). Un des grands mérites du livre est de montrer comment Internet amplifie les travers habituel de la psychologie des foules, en favorisant notamment la diffusion des idées des plus motivés au détriment des esprits modérés qui sont pourtant, bien souvent les véritables «sachants» (notamment dans les polémiques scientifiques, sur le nucléaire, les OGM, etc.). Le texte de Bronner comme tous les travaux inspirés est d’une lecture agréable et pourrait susciter l’adhésion pleine et entière si toutefois il ne pêchait par deux carences graves.
La première tient à une certaine fragilité de forme et de fond. La forme, ce sont les nombreuses coquilles très surprenantes chez un grand éditeur universitaire. Non moins étonnantes sont les insuffisances de fond : ainsi, est-il possible qu’un chercheur relu par un comité de lecture écrive : «la vision biblique du monde qui avait prévalu pendant près de trois mille ans» (pp.23-24) ? Faut-il lui rappeler que cette «vision» ne «prévaut» dans le bassin méditerranéen que depuis 1600 ans, et ailleurs depuis bien moins longtemps ? L’erreur ne serait qu’étourderie si elle ne trahissait un réel manque de profondeur historique. Par exemple quand l’auteur feint de croire que c’est la première fois que le complotisme se dirige contre les pouvoirs en place et non contre les déviants : cette thèse, pour être convaincante, devrait procéder d’une comparaison minutieuse avec des cas anciens de paranoïa contre les pouvoirs dominants, par exemple contre Marie-Antoinette reine de France juste avant la Révolution française ou contre le pouvoir «papiste» aux grandes heures des guerres de religion. De même, pour convaincre de ce qu’il y a de vraiment nouveau dans le refus parmi ses fans de croire en la mort de Michael Jackson, il faudrait le comparer avec d’autres hallucinations collectives similaires, comme celle selon laquelle l’empereur Néron n’est pas mort en 68 de notre ère, croyance qui, paraît-il, connut un grand succès en Asie Mineure à l’époque de la rédaction de l’Apocalypse de Jean. Lorsque Bronner avance que les technologies accélèrent la diffusion des erreurs, voire leur invention, l’énoncé serait plus acceptable s’il faisait l’effort de mieux démontrer en quoi les biais que suscitent Internet et les vidéos par exemple n’existaient pas déjà par le passé. Et l’argument selon lequel les égarements d’aujourd’hui peuvent être déclarés absolument nouveaux et sans aucun rapport avec l’obscurantisme d’autrefois du fait de notre haut niveau d’éducation ne peut être pris pour argent comptant que si l’on oublie que les fables les plus invraisemblables écrites par le passé l’ont été par des esprits hautement cultivés (par exemple la Vie d’Apollonios de Tyane sous Caracalla, à laquelle visiblement son auteur très cultivé croyait dur comme fer).
La deuxième faiblesse de l’ouvrage est idéologique et elle crée un véritable point aveugle dans son raisonnement : la plupart des croyances collectives que Bronner dénonce sont l’œuvre de milieux contestataires qui s’opposent aux grandes entreprises ou aux gouvernements. Or les mensonges diffusés par ces derniers sont, eux, passés sous silence. Vainement on cherchera, par exemple, dans ce livre des démonstrations sur les massacres de Timisoara en Roumanie, de Racak au Kosovo, les «armes chimiques» de Saddam Hussein et autres inventions des propagandes de guerre diffusées à très grande échelle (plus grande bien souvent que les mythes des contestataires). Cela n’a pourtant rien d’anecdotique, car ces mensonges sont pour beaucoup dans le développement de l’esprit de défiance que l’auteur remarque et dénonce dans notre société. Une véritable dialectique existe dans les mass-media entre «mensonges d’en haut» et fantasmagorie contestataire dont le livre omet complètement d’expliciter le mécanisme. Or si la progression de l’irrationnel mérite d’être critiquée, encore faut-il le faire à partir d’un point de vue impartial qui en considère toutes les dimensions.
Et super anc petram edificabo...
Passé dans les locaux du Monde Diplomatique aujourd'hui. Discuté avec une journaliste et leur rédac chef. Puis à l'Assemblée nationale, vu une députée. J'en ai profité pour parler un peu de la Corée de ci de là. Il y a une pétition en préparation en Chine, si j'ai bien compris. Comme je l'expliquais depuis quelques mois, j'ai besoin de briser un peu l'enclavement de mes actions et de mes livres, pour trouver des pistes pour des projets collectifs nouveaux. Le bon accueil qui m'a été fait aujourd'hui est encourageant. Je pense pouvoir faire un usage utile au bien commun de ces nouveaux contacts. Je me sens somme toute assez détaché des enjeux personnels et des enjeux politiques collectifs (bien plus qu'il y a cinq ou dix ans) pour pouvoir aborder tout cela sereinement et avancer pas à pas, sans illusion excessive mais sans trop de pessimisme non plus.
Todd, le PS, la banque et l'Allemagne
Extrait d'une interview de Todd dans Marianne :
"La réforme bancaire a été neutralisée par la toute fraîche députée PS Karine Berger, qui, je cite Wikipédia, avait auparavant travaillé pour Euler Hermes, filiale du groupe allemand Allianz, aidée par son associée, Valérie Rabault, venue, elle, de la Société générale et de BNP Paribas. Ensemble, elles ont signé un livre au titre visionnaire : Les Trente Glorieuses sont devant nous.
On pourrait aussi citer des gens comme Emmanuel Macron, jeune secrétaire général adjoint de l'Elysée, venu de la banque Rothschild. Le passé de ces personnes, et sans doute leur avenir, à partir de 2017, quand il n'y aura plus qu'une poignée de députés PS à l'Assemblée, sont dans le système bancaire. L'opération « mains propres » est donc un scandale. (...) L'incarnation totémique du système français, c'est Michel Pébereau, devenu le parrain de ce petit monde. "
En revanche je suis en désaccord complet avec Todd sur l'Allemagne, à la fois quand il présente Merkel comme une simple fondée de pouvoir des banques (c'est une fondée de pouvoir de son électorat) et quand il lance des anathèmes délirants du genre "La social-démocratie allemande, historiquement et géographiquement, est dans la continuité du protestantisme, donc du nationalisme.", ou "Mais l'Allemagne, qui a déjà foutu en l'air deux fois le continent, est l'un des hauts lieux de l'irrationalité humaine. Ses performances économiques « exceptionnelles » sont la preuve de ce qu'elle est toujours exceptionnelle. L'Allemagne, c'est une culture immense, mais terrible parce que déséquilibrée, perdant de vue la complexité de l'existence humaine."
Armée et progressisme dans le Tiers-Monde selon Vijay Prashad
J'ai déjà dit du bien sur ce blog du livre de Vijay Prashad "Les nations obscures" (éditions Ecosociété). Et ce n'est pas parce que Prashad fut contributeur de l'Atlas alternatif (car je peux le dire aujourd'hui nous eumes aussi des contributeurs mauvais). Son livre apporte un éclairage de gauche, c'est à dire du point de vue de l'appropriation du pouvoir par le peuple, de la construction des nations du Tiers-Monde et c'est très précieux, car il se nourrit aussi aux sources de combattants de la liberté (comme les communistes sud-africains) aujourd'hui trop souvent oubliés.
A la différence d'Alan Blum, Prashad ne met pas sur le dos de l'impérialisme extérieur les échecs du Tiers-Monde. Il appelle aussi à une analyse des rapports de classes dans chaque pays et pour lui un Mobutu ou un Pinochet sont des éléments de l'impérialisme aussi, pas seulement ses jouets (et il insiste sur le fait que ceux-ci n'étaient pas seulement instruments des Etats-Unis mais qu'ils instrumentalisent aussi Washington).
Je recommande à ceux qui le liront les analyses de Prashad sur les coups d'Etat. Il montre notamment comment le rôle de l'armée dans les pays du Sud fut pensé par les hauts fonctionnaires comme un facteur de modernisation et de progrès pour renforcer des Etats archaïques. C'est très important car comme aujourd'hui, dans les années 50-60, ce n'était pas seulement une stratégie brutale et cynique du capitalisme qui était à l'oeuvre sous la houlette du Pentagone, il y avait aussi une forme d'aveuglement sur ce qu'était réellement le progrès social.
Prashad distingue finement les coups d'Etat de colonels et ceux de généraux, et montre comment des pays comme Cuba ou la Libye s'en sont protégés avec des systèmes de milices, qui ont à la fois diminué les risques de putsch (c'est le côté positif) et diminué le pluralisme de la société civile (ça c'est le négatif).
A l'heure où la France va dimininuer de 20 000 ses postes dans l'armée et où certains évoluent dans un imaginaire paramilitaire il est bon de s'en souvenir.
Je ne suis pas d'accord avec tout ce qu'écrit Prashad (certains détails sur la politique de l'URSS et de la Chine par exemple), mais il faut reconnaître que son livre est foisonnant et brillant. Je l'approuve aussi, bien sûr, sur la question des imaginaires racialistes et religieux qui aujourd'hui viennent suppléer le capitalisme. L'odieuse manifestation de 200 000 personnes au Bangladesh à l'appel d'Allama Shah Ahmad Shahi, pour réclamer notamment une nouvelle loi sur le blasphème, pour que «les athées soient pendus» le 5 mai, alors qu'on se serait plutôt attendu à une manif contre le patronnat onze jours après l'effondrement du Rana Plaza , l'a encore illustré récemment, voyez là-dessus l'article de Nazim Rochd dans Le Jour d'Algérie.
Por el suelo
Les exemples de traitement abject de l'actualité sont nombreux chaque semaine. On perdrait son temps à les relever. Mieux vaut détourner son regard, car la fange pousse vers la fange, et nous en sommes entourés de tous côtés. Quand on sait ce qu'est la Libye aujourd'hui, quand on sait ce que nous en avons fait, et ce que cela a provoqué tout autour de ce pays (au Mali notamment), on se dit qu'on n'aimerait pas être Charles Carrasco et avoir écrit cet article là sur Aïcha Kadhafi le 13 avril dernier. Il y a des façons de s'acharner, et de s'acharner lourdement en feignant d'ignorer l'arrière-plan, qui ne sont pas belles, pas belles du tout, qui ne grandissent ni une profession ni une époque. Les Charles Carrasco d'aujourd'hui sont les Piotr Smolar d'hier, les Alexandre Adler, Nathalie Nougayrède et Christophe Châtelot d'avant hier. Toujours différents et toujours les mêmes, d'un lustre à l'autre. Il manque à tout ces gens un "je ne sais quoi", comment dire ? Allons, parlons d'autre chose, on abime son clavier à parler de cela.
Agenda personnel, Bangladais et Rohingyas
J'ai renoncé à mon projet de voyage en République populaire démocratique de Corée cet été, que je remplace par la rédaction d'un ouvrage de philosophie inspiré par mes amis chomskyens sur Facebook. Un livre testament - je passe mon temps à écrire des testaments dans tous les domaines depuis cinq ans. Je me fous du qu'en-dira-t-on plus qu'il y a 3 ans, et m'en foutrais encore plus si mon livre bilan sur 15 ans d'activiste n'était en attente de publication chez 4 éditeurs (Losange, Amsterdam, Delga, et un quatrième dans l'Ouest de la France dont j'ai oublié le nom), et mon bouquin sur mes trois dans en Seine-Saint-Denis chez deux éditeurs (Michalon et Forges de Vulcain). Pour rendre service à un pote journaliste j'ai demandé à Parutions.com de commander "Le vilain petit Qatar" et je leur ai demandé aussi "La théorie du drone" et "Virgules en trombe" d'une écrivaine algérienne.
Je tâte un peu le terrain pour une candidature aux municipales en Béarn (ça c'est mon daimon politique voire politicard, pour reprendre une métaphore socratique, qui me tire par les pieds, comme dirait Annie Cordy). J'ai toutefois conscience que mes chances sont fragiles, surtout dans une région si peu sensible aux mouvements du monde. Ce serait purement donquichottesque, mais à 43 ans il faut bien s'amuser un peu.
J'ai échoué à sensibiliser mon entourage au problème de la position de l'OFPRA sur la question des réfugiés bangladais. Le drame du Rana Plaza, si bien commenté par l'immense Vijay Prashad (contributeur de l'Atlas alternatif) aurait pourtant pu y aider. Les gens ne saisissent l'enjeu que sous l'angle du consumérisme. Le commentaire le plus con dans cet optique je l'ai trouvé sous la plume d'un avocat francilien sur Facebook : "Payons nos jeans plus cher, pour avoir la garantie que les salariés bangladais seront mieux protégés". Quelle ineptie ! Les vêtements Benetton sont chers ! Payer cher ne garantit rien du tout.
Enfin quand même le Bangladesh second exportateur de textile du monde, ça laisse rêveur... Le Bangladesh grande usine à ciel ouvert. Les libéraux diraient : voilà la prospérité d'une nation en marche, à la génération suivant ils seront riches ! Sans doute. Si leurs syndicats, comme chez nous dans les années 30, font ce qu'ils faut pour exiger la redistribution. Donc plutôt que d'attendre que nos multinationales donneuses d'ordres aillent fliquer leurs soustraitants aidons plutôt les syndicats bangladais à agir ! N'est-ce pas Mme Quitterie de Villepin ?
Tenez puisqu'on parle de l'Extrême-Orient, un type pas très sérieux que j'ai interviewé du temps de la mobilisation en France pour les Rohingyas de Birmanie l'an dernier m'a envoyé un SMS. Voilà qui m'a rappelé que ce peuple "le plus mal traité du monde" selon certains experts n'émeut toujours personne dans l'intelligentsia française...
Le 9 mai à Soukhoumi
Hier en Abkhazie, on fêtait le 9 mai, anniversaire de la victoire du monde sur le régime national-socialiste allemand. Il y avait une banderole près de la statue du Soldat inconnu qui disait "les héros de cette guerre nous n'oublierons jamais" et des vieux vétérans de la seconde guerre mondiale (dans ce pays du Caucase qui se vante de battre des records de longévité). Il y avait une petite fille à moitié turque qui donnait une fleur aux anciens combattants.
A Tbilissi, capitale de la Géorgie qui prétend reconquérir la province sécessionniste abkhaze, le 9 mai fut aussi fêté. Avec plus de ferveur ou moins ? Je ne sais pas.