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Le blog de Frédéric Delorca

Irène Jacob, Véronique, Esther, la Suisse, les jumeaux, le flot

30 Septembre 2014 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Cinéma

Je déconseille à mes lecteurs de prendre ce blog "trop à la lettre" (et d'ailleurs de prendre aussi sa propre vie trop à la lettre). Bien sûr quand j'essaie de synthétiser ma réflexion sur l'ingérence occidentale, ou quand je fais une mini-fiche sur socialisme et nationalisme en 1914 comme cela m'est arrivé, il y a là des éléments cognitifs que tout un chacun peut "utiliser" à des fins pragmatiques sans prendre en compte la subjectivité de l'auteur du blog, ni la sienne propre en tant que lecteur. Mais j'ai de la culture, au moins depuis ma lecture de Montaigne et de Derrida (pour ne citer que quelques jalons), une vision non utilitaire, qui admet de "laisser couler le fleuve" sans comprendre nécessairement tout de son courant, de son flux, et laisser simplement les choses entrer en résonance. Prenez donc ce blog comme il vient, n'y cherchez rien d'utilitaire, même si certaines choses peuvent vous y être utiles un jour (l'utilitarisme est davantage du côté du blog de l'Atlas alternatif, qui, pourtant, bizarrement, a chaque jour deux fois moins de lecteurs que celui-ci...).

 

Quand je vivais à Madrid, en 1994, j'y ai vu deux fois je crois "Rouge" avec Irène Jacob. Les films de Kieslowski faisaient partie de l'arrière-plan de l'époque, comme les romans de Kundera (j'ai vu qu'il vient d'en pondre un autre, qui traîne dans les halls de gares entre les mémoires d'Adriana Karembeu et les conseils pour les entretiens d'embauche). Cela faisait partie de l'ouverture à "l'autre Europe" dont parlait Rupnik.

 

Je n'ai rien retenu de ce film pourtant, sauf la présence de l'actrice, et celle de Trintignant (ach ! "Deauville sans Trintignant..."). Jacob m'a tellement remué que je me suis dit que je devais écrire un roman dont l'héroïne ce serait elle. Mais un roman sur quoi ? J'ai traîné à la Fnac de Callao (qui, à l'époque, venait d'ouvrir, la France en était fière), et j'ai vu, en format de poche pour lycéen, "Esther" de Racine. Il n'en fallut pas plus pour me convaincre de transformer le livre d'Esther (dans la Bible) en roman. L'année précédente j'avais écrit un mix de l'Odyssée et de l'Eneide dont j'avais fait un roman un peu bizarre, et j'avais même songé à faire de même avec des contes scandinaves. Là encore il n'y avait rien d'utilitariste dans cette démarche. C'étaient de purs essais imaginaires. J'ai écrit trois pages sur Esther, juste le temps d'imaginer un peu le personnage, l'ambiance de l'empire perse (où se déroule l'action) etc, puis j'ai laissé cette tentative au fond du disque dur de mon "notebook". Il n'y avait rien de profond dans tout cela. Je n'avais que 24 ans. Les choses se mettaient juste en place, comme ça.

 

C'était il y a 20 ans. Peut-être jour pour jour, qui sait...

 

Et puis, récemment, j'ai voulu revoir "La double vie de Véronique", du même cinéaste, avec la même actrice. "Revoir" parce que je l'ai sans doute déjà vu, et pourtant comme de 'Rouge", il ne m'en est rien resté. Le film parle beaucoup de gémellité, un thème qui me poursuit ces deniers temps, et pourtant je n'y avais même pas prêté attention en achetant le DVD. Il "en parle"... C'est un euphémisme. Il en parle en fait d'une façon sublime, et j'ai repensé aux écrits de Lévi-Strauss sur les jumeaux dans la mythologie, ou au fait qu'Helen Fisher s'est lancée dans la psychologie évolutionniste parce qu'elle avait une soeur jumelle. Je n'ai pourtant jamais été particulièrement attiré par le thème du "double". J'ai au contraire toujours trouvé étrange qu'on puisse s'y intéresser. Ha ha ! on vous a peut-être à tous dit un jour que vous aviez un sosie quelque part. Moi en tout cas on me l'a dit, mais cela m'a si peu intéressé que je ne sais même plus qui me l'a dit (un type qui en tout cas était persuadé de m'avoir vu ailleurs, mais bon, après tout il y a bien un clodo qui m'a dit avoir cru voir Dieu en me croisant en mai dernier...). Pour moi le double ou le jumeau est impensable. C'est peut-être un de mes défauts.

 

Accessoirement le film montre la gare Saint-Lazare de 1990, comme Depardon a montré celle de 1996. Cette gare n'est pas n'importe quelle gare parisienne, croyez moi. Elle est chargée de présence. Voyez ce que Breton en dit dans Nadja.

 

C'est curieux mais ce matin, j'ai regardé une interview d'Irène Jacob. Nul n'aime voir vieillir les actrices de sa jeunesse. A ce propos Sophie Marceau m'inquiète. Irène Jacob n'est plus la Véronique de 1991, mais elle n'a pas encore les joues creusées de Sophie Marceau. En l'entendant parler, j'ai eu un sentiment étrange qui ne m'était jamais venu auparavant : elle n'est pas française. En 2011, j'étais souvent interviewé par des journalistes suisses d'un journal genevois, et j'ai même enregistré une séquence de 20 minutes pour la RTS (radio télévision suisse) - en fait l'interview avait duré une heure au jardin des Tuileries. Pour une raison obscure, j'intéragis beaucoup avec la périphérie de l'espace francophone (Belgique, Suisse, Québec). La journaliste elle aussi était une Véronique, Véronique Marty, et en entendant Irène Jacob, je retrouvais non seulement des intonations, mais aussi des expressions du visage, de Véronique Marty. Après vérification sur Wikipedia j'apprends qu'en effet Irène Jacob a grandi à Genève.

 

Est-ce que cela a de l'importance qu'elle soit suisse alors que cela ne se ressent pas dans le film "La double vie de Véronique" ? Je n'en sais rien. D'ailleurs peu importe que cela ait de l'importance sur un plan utilitaire ou pas (encore que, si je me souviens bien, "Rouge" se passe en Suisse, et on ne fait pas le même film à Paris qu'à Genève). Est-ce que cela a de l'importance que le seul commentaire élogieux (trop élogieux) au cours des trois derniers mois sur ce blog provienne d'une citoyenne suisse ? Je ne sais pas. En tout cas, il est étrange que "l'helvéticité" d'Irène Jacob me saute au visage aujourd'hui.

 

A 24 ans, je m'intéressais surtout beaucoup à la culture juive (ce qui en un sens a préparé m'a rencontre avec la juive serbe d'origine hongroise dont je parle dans "Eloge de la liberté"... tiens hier il y avait une magistrate hongroise à notre table tout l'après midi). C'était en partie lié à mon séjour en début d'année 1994 à Troyes, qui est un foyer important (mais oublié) du judaïsme médiéval en France. Et curieusement, comme j'étais aussi superficiel dans mon approche de la Bible que dans celle de l' "helvéticité" d'Irène Jacob (ou de Jean-Jacques Rousseau), je n'ai absolument RIEN compris au livre d'Esther à ce moment-là. Le type qui m'a ouvert les yeux au printemps dernier sur Esther, c'est un prof français qui enseigne à Cracovie (la ville où se passe une partie de la "Double vie de Véronique") quand il a pondu un article sur le lien Ishtar-Esther-Marie-Madeleine-Etoile du Berger. Son article recèle l'idée que le Livre d'Esther porte en fait la trace d'éléments très difficiles à exhumer de la vieille mythologie astrologique chaldéenne.

 

Lire le livre d'Esther à l'aune de cette mythologie est en partie une erreur puisque le judaïsme s'est construit sur son déni, mais savoir qu'elle y est présente enrichit déjà cette lecture. Ce point de départ a éveillé ma curiosité, d'autant que le prof de Cracovie disait que le mot "juif" apparaît pour la première fois dans la Bible dans ce texte, qui est donc fondateur de l'identité juive, sur fond de menace de génocide (puisque c'est de cela que parle le livre). J'ai relu le Livre d'Esther et j'y ai saisi ce que ni le prof de Cracovie, ni le jeune écervelé de 24 ans que j'ai été n'y avaient compris : ce livre est sur le pouvoir magique que le divin peut donner, miraculeusement, à la parole. La reine Esther risque sa vie sur une seule parole, et Dieu, au milieu de la terreur, lui donne les mots qui, devant le Roi des rois, vont "sauver sa peau" et celle de tout son peuple.

 

Bon, dans la foulée j'ai commandé le DVD de "Par delà les nuages" d'Antonioni. Toujours vers 1992-94, mes camarades ex-khâgneux faisaient l'éloge d'Antonioni. Mais, il était déjà vieillissant, et, dans ce film où il met en scène Sophie Marceau et Irène Jacob, le seul point positif que j'y avais trouvé (mais qui m'avait paru un peu lassant à la longue, et même vulgaire), c'est qu'il dénudait beaucoup ses actrices (enfin bon, il a dénudé Marceau plus que Jacob si je me souviens bien, ce qui est en un sens "logique"...). Au fait n'entrons nous pas dans la saison où Ishtar se dénude ? Allez savoir pourquoi, je m'étais persuadé que ce film était de Oliveira. Il est peut-être temps que je le regarde à nouveau avec un regard "mûr"... Fin de cette causette du dernier jour de "mon" mois, celui de septembre... Au boulot !

 

 

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Anniversaire

29 Septembre 2014 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le quotidien

DSCN0607.JPGSeptembre fut marqué, comme tous les ans, par mon anniversaire. Les anniversaires sont un bon test de l'égoïsme des gens. Beaucoup de personnes à qui j'avais souhaité leur anniversaire (le 1er février, le 23 février etc) se sont bien gardé de me rendre la pareille. Et, comme je me suis désinscrit de Facebook fin décembre, tous ceux qui me le souhaitaient simplement "parce que ça s'affichait sur leur ordinateur" cette fois ci n'ont eu aucune machine pour leur signaler quoi que ce soit (et j'ai ainsi pu évincer la politesse mécanique). Au total cela faisait peu de monde donc pour me le souhaiter. En vérité je suis contre la célébration des anniversaire, mais je trouve que les gens qui n'ont pas la politesse de rendre un voeu d'anniversaire qu'on leur a envoyé sept ou huit mois plus tôt ont quand même un petit problème avec la réciprocité, et donc avec l'altérité...

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Védrine, Villepin et Rifkin à la TV

26 Septembre 2014 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Débat intéressant chez Taddei hier soir entre Védrine et Villepin sur l'intervention en Irak. Villepin "Il ne fallait pas d'olpération militaire, juste du politique, vous allez allumer l'incendie aux quatre coins du monde musulmans". Védrine : "Il fallait des bombes pour contenir EI, on fera du politique dans la foulée".

 

800px-Map_Non-Aligned_Movement.pngPour ma part j'observe aujourd'hui qu'on n'est plus dans le cas de 2003. Le monde entier (y compris les Russes, les Iraniens etc) voit plutôt d'un bon oeil l'opération militaire (même si Poutine a dit "n'attaquez pas Assad"). Empêcher le Kurdistan ou la Jordanie de tomber était une bonne mesure. Et aujourd'hui nous allons bien devoir remettre Téhéran dans le coup, n'en déplaise aux Israéliens. Ca a du bon (d'ailleurs Téhéran est peut être en train de faire tomber le Yémen). Bon si on pouvait profiter du grand nettoyage pour renverser le régime saoudien ce serait utile aussi... Quelqu'un a rappelé à juste titre qu'il coupait autant de têtes qu'EI (pardon, je ne dis pas Daesh, l'acronyme arabe n'ajoute rien au français, Hollande l'emploie juste pour qu'on n'entende pas "Etat" dans EI).

 

Mais pourquoi personne n'est il passé par une résolution du conseil de sécurité de l'ONU ?

 

Just a question.

 

Militairement on n'ira pas très loin contre EI, mais au moins elle sera endiguée. Mais ça peut durer des années si l'on n'a pas les moyens de corrompre les tribus comme la CIA l'a fait avec les seigneurs de la guerre afghans (au fait le régime de Karzaï qui vient de passer le relai à un successeur a bien bien tenu face aux talibans malgré le retrait US, n'en déplaise aux antiimpérialistes dogmatiques, et malgré les 100 morts de cette semaine). Ensuite, il faut peut-être penser la recomposition du Proche-Orient... Bien sûr c'est aux peuples eux-mêmes d'en décider, pas aux Occidentaux, mais par quelles voies les peuples de là bas peuvent-ils parler ? les Etats en place sont des structures d'opérette. Même la Syrie n'a presque plus d'Etat.

 

Après le débat sur le Proche-Orient, les considérations de Rikin sur le coût marginal "zéro" et l'économie "participative" qui renouvellera le capitalisme dans 40 ans, avec les imprimantes trois D, les éoliennes, la mise en réseau. Sûrement prophétique sur certains points, mais dans quelle proportion ? 20 % ou 80 % de la vie de nos enfants ? Des spéculations optimistes en tout cas.

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L'URSS et les mineurs des Asturies

26 Septembre 2014 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Espagne

spain2Paul Morand, 13 février 1970 : "Il faut être naïf comme un philosophe (Garaudy) pour s'étonner que l'URSS envoie du charbon à l'Espagne pour briser la grève des mineurs asturiens : les deux derniers pays de droite, les deux régimes absolus qui restent : Espagne, URSS s'entr'aident."


poupées

Ca rappelle Cioran sur les deux pays les plus mystiques d'Europe - Russie et Espagne.

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Crimée, Irak, Yémen

26 Septembre 2014 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme, #Barack Obama

RaptorQuoi ? vous croyiez que les Russes étaient ant-musulmans et qu'ils persécuteraient les Tatars de Crimée ? Je vous avais bien dit, moi, que les républiques russes musulmanes comme le Daghestan envoyaient des vivres aux rebelles anti-Maïda, en Ukraine. Cette semaine on apprend que Poutine subventionne le Hadj des Tatars à la Mecque (cf ici). Acte de propagande ? Sûrement... Mais l'info mérite d'être remarquée...

 

Comme le disait le communiqué du parti communiste russe en août, la Russie serait tellement plus attractive pour les Ukrainiens si elle était un "véritable Etat-Providence"... Certes... Mais il ne faut pas en demander aux petits gars de Gazprom qui dirigent ce pays.

 

Quid du Proche-Orient ? Comme Cockburn dans The Independent (mais c'est intuitif, je n'ai pas étudié la question plus que cela) je pense que nos frappes ne serviront qu'à empêcher de nouvelles conquêtes par EI (Etat islamique), mais ne le feront pas reculer. Y avait-il autre chose à faire ? Il aurait fallu de pas envahir l'Irak en 2003, forcer Maliki à s'ouvrir aux sunnites en 2011, ne pas empêcher Assad de négocier en 2013... Aujourd'hui on ne peut que limiter la casse... Les Emirats arabes unis mettent à l'honneur une pilote femme sunnite qui va bombarder EI : l'Islam tel que vous en rêvez.

 

Je crois que les USA vont tenir parole et n'attaqueront pas l'armée d'Assad du côté irakien au passage. La mise en garde que Poutine leur a adressée la semaine dernière était claire (l'Iran a fait de même), et l'Oncle Sam n'a pas intérêt à se mettre "en plus" les chiites à dos. Vous avez vu ? Même la prise de Sanaa (au Yémen) par les chiites houtis n'ont pas trop ému Barack Obama qui, officiellement, soutient le processus de leur intégration dans le gouvernement yéménite... même s'ils continuent de crier "à bas les USA !" Entre eux et Al Qaida ou EI...

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