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Le blog de Frédéric Delorca

Articles avec #peuples d'europe et ue tag

Kotor (Montenegro) au temps de Pierre Loti

23 Novembre 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Lectures, #XIXe siècle - Auteurs et personnalités, #Peuples d'Europe et UE, #Les rapports hommes-femmes

A 30 ans, en 1880, Pierre Loti, alors lieutenant e vaisseau, arrive à Kotor/Cattaro (Montenegro) :

"Par le dédale des petites rues de Cattaro, nous nous dirigeons vers L'albergo del Cacciatore (l'hôtel du Chasseur). — Dans quelque quartier de cette ville que l’on soit, on est toujours sûr, en regardant en l’air, d’apercevoir sur sa tête, par-dessus les maisons, à des hauteurs extraordinaires, un mélange de nuages et de rochers qui grimpent dans le ciel et semblent prêts à s’effondrer sur le public ; — cela donne à ces vieilles rues étroites un caractère étrange. Dans une maison ancienne, qui a dû être aussi autrefois une habitation de riche Vénitien, se tient une table d’hôte où se parlent plusieurs langues : c’est L'albergo del Cacciatore. — Nous y entendons le slave, l’italien, — et l’allemand lourd de quelques officiers autrichiens causant avec de grosses personnes blondes qui ont des têtes de Gretchens trop mûres et des toilettes cocasses. Le déjeuner, mangé de très bon appétit, se termine par un dessert local : cela s’appelle un jardinetto (petit jardin). — Jardin où poussent toute sorte de choses ; grand plat où sont plantés pêle-mêle des fromages, des gâteaux et des fruits. Après le jardinetto, nous voyons entrer de grands diables de Monténégrins, sales et dépenaillés, ayant des boucles d’oreilles et des mines de bandits, avec un arsenal de poignards et de pistolets à leur ceinture. — Ce sont nos guides que M. Ramadanovilch nous envoie. — Otant très humblement leur bonnet rouge, ils nous préviennent en italien que nos chevaux nous attendent à la porte de Cattaro et qu'il faut nous hâter de partir.

Nous trouvons, en effet, à la porte de Cattaro quatre chevaux qui nous attendent, et, quand nos guides ont amarré en croupe notre mince bagage avec le leur, nous nous mettons en route. Eux se proposent de nous suivre à pied. On ne s’imagine pas en France ce qu’un Monténégrin est capable de faire de ses jambes; hommes et femmes, dans ce pays, peuvent trotter du matin jusqu’au soir, avec la même allure allongée de chat maigre, sans éprouver la moindre fatigue. C’est la seule qualité que nous reconnaissions à ce peuple."

On est dans les Balkans d'avant Zora la Rousse, un univers à la Tintin. Étrange mélange d'Italie, d'Autriche et de monde slave. Loti n'est pas tendre avec ses hôtes. Pourtant il aura une petite passion avec une jouvencelle du coin, Pasquala Ivanovitch. Une plaque à Baosici en célèbre le souvenir depuis 1934 paraît-il.

"La vue de Loti, écrira Risto Lainovic de l'université de Nis, était diamétralement opposée aux panégyriques exagérés que les écrivains du XIXe siècle consacraient à ce peuple épris de liberté, pour lequel la lutte contre les Turcs était devenue, avec les siècles, presque une manière de vivre". Il ajoutera que Loti cependant reconnaissait aux Monténégrins une belle authenticité et leur prédisait un avenir glorieux, et qu'il avait aussi un jugement dur contre les Serbes pendant la guerre contre les Turcs, mais allait ensuite s'en repentir et aider Belgrade autant qu'il pouvait.  C'était dans la "Revue Pierre Loti" du 1er avril 1981. Car à l'époque il y avait une Revue Pierre Loti (il n'y aura jamais de Revue Frédéric Delorca).

Risto Lainovic avait soutenu en 1977 une thèse de doctorat à la Sorbonne Nouvelle (Paris III) sur "Les thèmes romantiques dans l'oeuvre de Pierre Loti". En 1980, dans la presse de Titograd (aujourd'hui Podgorica), il avait rappelé le centenaire du passage de Loti à Kotor.

L'histoire des revirements de Loti sur la question balkanique est belle. Le patron du Figaro Calmette estimait que la turcophilie initale de Loti (qui allait faire des foules d'émules) était due à sa passion de 1877 pour une odalisque circassienne Hatice/Hakidjé/Aziyadé, qui appartenait au harem d'un dignitaire turc qui mourut de chagrin après son départ, comme il l'apprit dix ans plus tard... L'ancien cœur d'artichaut que j'ai été ne peut pas ne pas être sensible à cette belle histoire.

Le huguenot suisse Guy de Pourtalès (1881-1941) raconta d'ailleurs une étrange histoire de fantôme qui se produisait dans la maison de Loti à Rochefort (Charente maritime) et que l'écrivain lui a rapportée directement :

« Voici, dit-il, la stèle d’Aziyadé ; cette pierre dressée où brûle une petite lampe de verre. Il y a bien des années qu’elle est morte, Aziyadé ; mais est-on sûr de mourir ? Pour moi, je pense qu’il v a des êtres qui, même vivants, sont pourtant morts, et certains morts qui vivent toujours. Sachez donc qu’il se passe ici, toutes les nuits, une chose étrange. Vers dix heures, chacun de nous se retire dans sa chambre. La mienne est là, attenante à cette salle et je suis seul, seul sur cet étage. Je ferme les portes moi-même ; je verrouille celle de ma chambre, cadenasse l’entrée de la mosquée qui n’a pas d’autre accès. J’entre chez moi pour travailler au « journal » que j’écris depuis tant d’années, ce journal de ma vie d’où, l’un après l’autre, sont tirés tous mes livres. Puis je m’endors. Au matin, c’est moi le premier qui pénètre ici et m’assure que la porte est toujours verrouillée. Eh bien ! tous les matins, il y a sur le marbre, devant ce bassin, l’empreinte humide d’un petit pied de femme. Dans cette vasque, quelqu’un se baigne et je n’entends rien, pas un rire, pas un soupir, même pas les éclaboussures de l’eau où le fantôme de la jeune fille vient tremper ses pieds d’enfant... Vous croyez que j’invente, peut-être ? Ou bien vous vous dites que je suis le jouet d’hallucinations extravagantes... Patience. Demain, je vous ferai voir les pas d’eau sur les dalles » Il semble que Loti n'ait point tenu parole le lendemain, mais je suis convaincu que l'amour nostalgique peut engendrer ce genre de "matérialisation".

Le béarnais Louis Barthou avait le roman tiré de cette histoire d'amour dans sa bibliothèque. Il préfaça un livre sur Loti en 1924 un an après sa mort. Il compare beaucoup Loti à Chateaubriand (un lieu commun de l'époque semble-t-il), tout en ajoutant que le doute métaphysique de ce fils de protestant hanté par la fuite du temps était plus pénible que la désespérance de l'auteur du Génie du Christianisme.

Mais revenons au Montenegro. En 1984 Risto Lainovic était entré dans une fière polémique contre Danilo Lekic sur la monténigrophobie de Loti. Ce Danilo Lekic (1910-1992), homonyme d'un diplomate yougoslave connu, n'était pas doté du même capital universitaire que Lainovic. Né dans le petit village de Seoca, diplomé de la fac de philosophie à Belgrade en 1935, puis, enseignant au lycée de la ville portuaire de Bar, il avait alterné son métier avec des formations en France, à Grenoble et Dijon. Puis devenu après guerre cadre du ministère de la culture et directeur du Théâtre national de la République du Monténégro, il se posa en spécialiste du regard des Français sur son pays. Lekic était allé jusqu'à penser que Pasquala Ivanovitch n'a jamais existé.

Grave erreur. Le récit de Loti à son sujet est des plus réalistes :

13 octobre 1880 : " Pasquala Ivanovitch reste d'abord longtemps étendue sur la mousse, la tête sur mes genoux, faisant semblant de dormir. Et je sens son cœur battre très fort contre ma main, et je vois bien quelle ne dort pas. Je lui parle tout doucement en italien, et elle me répond en slave, par mots entrecoupés, comme quelqu'un de mal éveillé.

Pasquala Ivanovitch, en comptant sur ses doigts, dit qu'elle a dix-neuf ans; c'est bien l'âge que je pensais, car elle est déjà formée; pourtant, quand elle parle, on. dirait une voix de petite fille.

Elle sent le foin fauché, l'étable, le, serpolet de la montagne, et un peu aussi les moutons qu'elle garde. Au grand jour, son voile blanc et son corsage paraîtraient éraillés, fanés, salis par la terre des chemins; la nuit, tout cela est joli, tout cela sent bon les herbes et la campagne.

Quand elle remue la tête, on entend un petit bruit de paillettes de cuivre, à cause des bijoux grossiers, des épingles à pendeloques qui tiennent son voiler au drap de son béret rouge.

Elle a dû avoir plus d'une aventure avec les bergers de Baozich, et certes elle a livré déjà son corps qui brûle.

Elle a des naïvetés et des effronteries de petit enfant. Elle est bien belle, et sa taille est pure comme celle d'une statue.

On est bien dans ce bois d'oliviers. Par terre, il y a de la mousse sèche, du lichen, des feuilles mortes. Il y fait nuit noire; pourtant on sent qu'on est dans un lieu très élevé, qu'on domine de haut la mer,"

"Vendredi 15 octobre. Pasquala a un grand frère que je n'avais pas encore vu. Il arrive à l'improviste et me jette un mauvais regard de méfiance. Sur une explication que j'aurais déliré comprendre, donnée en slave par Pasquala, il sourit et me tend la main.

Il est habillé en paysan dalmate. Il s'appelle Giovanni, batelier à Rizano. Il a la même figure que sa sœur, les mêmes grands yeux gris, le teint bronzé et les cheveux blonds comme elle, sa moustache se détachant en clair sur le fauve de ses joues. Giovanni Ivanovitch m'accompagne jusqu'au bord de la mer. Il a l'air très étonné de cette chose qui nous est familière, l'embarquement d'un officier dans son canot les honneurs du sifflet, les matelots se précipitant pour offrir la main, pour étendre le tapis traditionnel, etc. II parait en conclure que je suis un très grand seigneur."

Puis un rêve dit à Loti, toute la vanité des escapades qu'il fait avec cette chevrière herzégovienne : "Un rêve de cette nuit : J'étais mort. J'étais dans un cimetière, assis sur la pierre de ma tombe, au crépuscule d'un soir d'été. Il y avait dans l'air dés rondes de phalènes et de moucherons, et des fleurs partout, parmi les tombeaux et l'herbe haute des cimetières.

Je reconnaissais ce lieu; c'était bien celui où dormaient mes grands-parents morts; il avait cette horreur particulière qui me glaçait, quand on m'y conduisait le soir, dans mon enfance, pour y porter des couronnes; un genre de tristesse, un genre d'horreur qui ne peut pas s'exprimer avec des mots humains.(...) Fantôme, je sentais que j'allais disparaître. "

Les bourgeois lettrés des années 1960 se précipitaient à Istanbul  en quête de la tombe de l'odalisque circassienne que Loti aima tant. Ils n'allèrent pas au Montenegro chercher celle de Pasquala. La pastourelle les faisait moins rêver sans doute. Elle se trouve peut-être sous la chapelle de Baosici où la bergère lui montra un ossuaire.

Je conseille à mes lecteurs de jeter un oeil à ce petit roman, écrit avec le style simple qui a fait la renommée de ce brillant académicien. Il nous rappelle combien le coeur d'une femme, même une petite bergère, peut faire aimer à un homme un pays. C'est par Pasquala que Loti apprit à apprécier ce carrefour de Français, d'Italiens, d'Allemands, de Russes, d'Autrichiens et de Slaves du Sud qu'était la côté monténégrine des années 1880. Elle lui en fait entrevoir l'histoire immémoriale, humer les parfums de fleurs, percevoir différemment l'eau de pluie.

Moi aussi j'ai connu un temps où la pluie sur mon visage n'était pas celle des jours ordinaires. C'était sur le Pont des Chaînes de Budapest, avec une autre fille des Balkans, en 1999...

Mais pour Loti les histoires d'amour se téléscopent. Et quand un Albanais lui fait ses adieux en turc, cela lui rappelle Stamboul "comme une note lugubre, comme un appel lointain du passé, comme un reproche"... Toujours son Aziyadé...

Il est dommage qu'aujourd'hui on puisse penser au Montenegro sans l'associer à Loti et sa Pasquala Ivanovitch. Il y a dans cette histoire quelque chose du rapport éternel du voyageur à la bergère, quelque chose qui remonte à Henri IV, à Virgile, et bien plus loin encore. Ce n'est pas de la prostitution, n'en déplaise aux féministes d'aujourd'hui (Pasquala Ivanovitch refuse avec colère qu'on lui donne de l'argent). C'est d'un autre ordre. C'est indicible. C'est peut-être néo-païen. Ca a peut-être à voir avec les forces invisibles de la nature. Il n'est pas à recommandé de le vivre, mais ce n'est pas pire que les immenses paquebots touristiques qui polluent maintenant la côte monténégrine ou la conquête de ce pays par les armées de l'OTAN. Je préfère encore associer cette région aux points d'interrogations dont notre écrivain entourait les robes usées de la pastourelle, qu'aux images actuelles.

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Ordo ab chao espagnol et européen

18 Novembre 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Espagne, #La gauche, #La droite, #Peuples d'Europe et UE, #Débats chez les "résistants"

La politique d’instabilité et de confrontation se poursuit dans le monde occidental pour fragiliser les opinions publiques et provoquer la mise en place d’une dictature mondiale.


On a vu des stratégies du choc être mises en place depuis quelques années avec la « guerre contre le terrorisme », la crise sanitaire de 2020, la guerre d’Ukraine, et récemment le « 11 septembre israélien ». Par ailleurs des combats « sociétaux » totalement artificiels sont suscités sur l’avortement, l’euthanasie, l’identité de genre etc pour fragiliser le sens de l’identité de tout un chacun et hystériser les rapports sociaux. La politique migratoire a aussi été instrumentalisée dans ce but à l’échelle même des continents (on a vu récemment l’action de Soros au Guatemala pour relancer les migrations vers les Etats-Unis, ou son lobbying au sein de la Cour européenne des droits de l’homme).


L’Espagne a été un « terrain de jeu » particulièrement privilégié pour cela. Tirant profit d’un certain enthousiasme des Espagnols pour le « progressisme » après la dictature franquiste, les mondialistes ont tiré à boulets rouges sur toutes les institutions morales de ce pays en faisant avancer des agendas pro-avortement, pro-transgenre etc, avec un pendant migratoire qui a permis de faire monter, en réaction, un groupe d’extrême droite, dont j’ai démontré sur ce blog les origines dans des milieux sectaires mexicains, et, du coup, probablement chez certains oligarques mondialiste nord-américains.


Ce groupe d’extrême-droite est largement instrumentalisé pour empêcher un processus d’alternance qui ramènerait les conservateurs au pouvoir, mais ce n’est pas tout : le socialiste Pedro Sanchez pour garantir sa reconduction à la tête du gouvernement après des élections qui plaçaient le Parti Populaire en tête n’a pas hésité à signer un pacte impliquant une amnistie avec le mouvement indépendantiste catalan qui a organisé un référendum insurrectionnel illégal en 2017 – j’ai montré dans mon livre « Les Régimes Populistes » et dans des billets de ce blog que ces indépendantistes étaient en fait eux aussi très liés à Soros et aux travaillistes israéliens.


Ce pacte s’accompagnait d’un discours populiste qui prétendait que les institutions judiciaires espagnoles étaient engagées dans un « lawfare » contre l’indépendantisme. Lawfare est un terme emprunté à la gauche latinoaméricaine pour stigmatiser une utilisation du droit à des fins de persécution politique. Il a soulevé une levée de bouclier dans les milieux juridiques espagnols (de droite comme de gauche), mais aussi une très forte mobilisation des conservateurs, qui étaient près d’un million à défiler dans toute l’Espagne il y a cinq jours (sous les ricanements de l'ambassadrice d'Allemagne), et qui sont encore très nombreux aujourd’hui, sur des slogans politiques très durs, après le vote d’investiture de Pedro Sanchez aux Cortes.


Le fossé entre les deux Espagnes n’a jamais été aussi profond depuis cinquante ans. Les conservateurs voient dans la démarche anti-institutionnelle de Pedro Sanchez une forme de chavisme qui menace la paix civile dans le pays, une importation des pratiques venezuéliennes. Or si le chavisme a pu avoir une légitimité du temps où ce pays (dans les années 2000) était un vassal des Etats-Unis soumis aux pires diktats du Fonds monétaire mondial, il en a perdu depuis quelques années maintenant qu’il est délibérément asservi aux intérêts des oligarques des BRICS contre son propre peuple comme on l’a rappelé récemment ici.  Et surtout, importer en Espagne une démarche chaviste  (sans les mesures sociales qui peuvent aller avec vu que l’Union européenne et l’OTAN verrouillent tout à ce niveau) peut être très dangereux car, cibler les institutions espagnoles comme l’autorité judiciaire c’est menacer directement l’unité du pays. Et beaucoup ont d’ailleurs fait remarquer que la prochaine cible sera probablement la monarchie accusée par les indépendantistes d’avoir été complice du « warfare » contre eux.


Or, ne nous y trompons pas : si Soros et certains milieux mondialistes associés ont soutenu l’indépendantisme catalan comme ils ont soutenu l’extrémisme des combats « sociétaux », ce n’est pas spécialement par amour pour les « idéaux de gauche ». C’est parce que, comme en ex-Yougoslavie ou en ex-URSS, ils savent que si le chaos que cela provoque ne débouche pas sur des guerres ouvertes, cela risque de provoquer par retour de bâton des dictatures militaires. Ainsi si Sanchez ne va pas au bout de la création d’une sorte de république confédérale « néo-chaviste » anomique en Espagne, il y aura un retour de bâton sous la forme d’une dictature militaire d’extrême droite dans ce pays qui fera aussi le jeu de l’oligarchie mondialiste internationale : la liberté des citoyens en sortira perdante quoi qu’il advienne, d’autant que les créanciers du pays sont déjà là à frapper à sa porte pour demander toujours plus de mesures d’austérité.


A côté de cette tragédie espagnole, la comédie de la démission d’un autre gouvernement de gauche, celui du Portugal, pris en flagrant délit de corruption grossière, ferait presque rire, si son résultat ne devait pas être, là aussi, une fragilisation des institutions et une plus grande latitude d’action contre elles du futur gouvernement mondial.


On cherche vainement quel pays parvient à échapper en Europe au vacillement général : l’Allemagne et le Royaume Uni déclinent économiquement, l’Italie est totalement aux ordres du Parti démocrate américain malgré une devanture « de droite », la Pologne bascule dans le camp des eurocrates alors que le parti de droite jusque là au pouvoir jouissait encore du plus grand nombre de suffrages.


La France ne fait pas exception où sont désormais mélangés les pires aspects à la fois de la IVe République (le fait que les centristes occupent la totalité de l’espace politique rejetant dans des impasses l’opposition de gauche et de droite) et ceux de la Ve République (l’autoritarisme d’un président immature).
Les petits jeux de ralliement du Rassemblement national et de LR n’intéressent plus personne dans ce dispositif où les alternatives sont de toute façon interdites.


J’ai été frappé de voir cette tempête dans un verre d’eau qui a éclaté cette semaine dans les seuls milieux qui pourraient desserrer l’étau globalistes dans notre pays : les souverainistes. Le premier à ouvrir le feu fut le nihiliste Asselineau qui a accusé F. Philippot (l'homme qui met du orange partout - "orange en gematria = 33), JF Poisson et N. Dupont Aignan de s’être rendus à un happening des Républicains américains à Paris le 10 novembre dernier. Asselineau, admirateur des divinités hindouistes comme ses alter égos du CERN, et qui confond les Actes des Apôtres et les Epitres de Paul (ça c’est pour l’inculture spirituelle, mais mine de rien cela compte dans la façon de se positionner en politique) reproche à ses pairs souverainistes d’avoir « servi la soupe » aux zemmouriens en se rendant là-bas. Ce à quoi Philippot lui a répondu non sans raison qu’il ne s’agissait que d’un colloque, ce qui n’engage à rien.


Cependant Asselineau n’a pas tout à fait tort : si les Trumpiens s’intéressent aux Patriotes ou à Debout la République, c’est qu’il y a quand même anguille sous roche. Et je ne donne pas cher de la capacité de Philippot qui déjà fait l’éloge du bilan de Trump (sans percevoir son propre potentiel antéchristique et mondialiste caché, notamment du côté de la reconstruction du Temple à Jérusalem) face à Biden, ou de Dupont Aignan (« young leader d’un jour, young leader toujours ») à s’opposer au magnat américain s’il revenait aux affaires. Si un jour Marine Le Pen accablée par les affaires judiciaires cède le pas comme plan B des mondialistes, tout comme Zemmour qui de toute façon n’a aucune popularité en France, je ne pense pas que ces zozos là pourraient incarner la moindre résistance au rouleau compresseur washingtonien ; l’égocentrique Asselineau non plus d’ailleurs…

Et la gauche française dans tout ça ? me direz-vous... Tant que sa priorité reste d'inscrire le droit à l'IVG dans la constitution, et à se quereller autour du leadership de Mélenchon, on peut parier qu'elle ne va nulle part.

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Dérens sur le Kosovo

7 Novembre 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La gauche, #Peuples d'Europe et UE

Depuis 25 ans que j'écris sur la Serbie, je croise fréquemment le nom de Jean-Arnaud Dérens, fils de Jacqueline Dérens, militante communiste spécialiste de l'ANC. Jamais il n'a été très brillant. Ses articles égrainent toujours sur un mode assez banal et bien pensant les "calamités du nationalisme", sans originalité et sans grande rigueur. Dans un article du Monde Diplomatique de juillet 2006, il confondait même  - je le prouve ici avec ces captures d'écran à partir de Calameo (voyez le dernier paragraphe du second document ci dessous) le SPS (parti socialiste serbe) avec le SRS (l'extrême droite) qui lui seul avait un organe de presse appelé Velika Srbija (Grande Serbie), même une personne vaguement intéressée par la Serbie n'aurait à l'époque jamais commis de confusion entre un parti de gauche et un parti d'extrême droite.

Mais que voulez-vous, avoir un "beau nom" permet d'occuper le terrain, ce qu'il fait en dirigeant "Courrier des Balkans" depuis deux décennies, pour le meilleur et pour le pire, le pire étant bien sûr le pouvoir de censure : en avril 2009 il avait refusé d'écrire une recension de mon livre sur la Transnistrie parce qu'un enseignant de l'INALCO qui m'accompagnait (membre aussi du parti communiste) était selon lui antisémite (sic!), ce que l'intéressé a toujours nié... Ca en dit long du niveau du débat à gauche à l'époque (et ça ne s'est pas amélioré depuis lors).

Pas de surprise donc de retrouver dans l'Humanité Magazine du 2 au 15 novembre 2023 à nouveau l' "immense" Dérens qui s'exprime sur le Kosovo, dans un article co-écrit avec une certaine Julie Chauvin, journaliste de Pristina, intitulé "Au Kosovo les rêves brisés d'une jeunesse divisée"

Ce qui l'intéresse, ce ne sont pas les provocations du gouvernement de ce pseudo-Etat à l'encontre de la minorité serbe, provocations qui indignent même des députés de Die Linke en Allemagne (mais dans ce pays la gauche a un regard un peu plus profond sur les Balkans qu'en France...). D'ailleurs il commence à donner la parole à Erona Haxhimehmeti, une Albanaise rousse de 29 ans, de la partie Sud de Kosovska Mitrovica (le ord est resté serbe grâce à nos gendarmes français intégrés à la Kfor en 1999, ce qui avait fait grincer des dents à gauche notamment dans Le Canard Enchaîné). Il reprend ses doléances contre le fait qu'il y ait une obligation de visa pour l'émigration en Europe (sans préciser que Macron l'a maintenue parce que le gouvernement kosovar n'a pas tenu parole sur l'organisation de l'autonomie serbe, un peu comme Zelensky avec le Donbass). Puis c'est le tour d'un certain Bujar Gara qui  a trouvé un job dans une entreprise de technologie américaine, puis un serbe, Dino Muric qui rêve d'émigrer. Toujours pas un mot de la politique anti-serbe et des manifestations qu'elle a suscitées. Un coup de chapeau aux "féministes", à un "transgenre de 21 ans, aux roms, une tirade contre le nationalisme.

Voilà, rien d'autre. Un reportage sur place qui occulte le principal : ce qui est en train de transformer depuis plusieurs mois le Kosovo en poudrière au risque d'en faire une sorte de nouveau front anti-russe (par les Serbes interposés), comme dans le Caucase à travers les Géorgiens. Au prix où sont les billets d'avion, M. Dérens aurait mieux fait de rester à Paris.

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Michel Collon chez Rémy Watremez

31 Octobre 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Divers histoire, #Débats chez les "résistants", #Peuples d'Europe et UE

Il m'est arrivé notamment pendant la crise sanitaire de regarder sur You Tube "Juste Milieu" la chaîne de Rémy Watremez. Ce n'est pas à proprement parler une chaîne d'information alternative, plutôt de divertissement, équivalent dans l'ordre contestataire de ce qu'est par exemple "Le Quotidien" du côté des mainstream. Il y a quatre jours le Youtubeur interviewait Michel Collon, l'homme que je surnommais "Le Missionnaire" dans mon livre "L'ingérence de l'OTAN en Serbie" où j'évoque notamment mes échanges avec lui à l'époque.

Je n'ai pas tout écouté, seulement la façon dont le journaliste belge présentait son itinéraire. C'est amusant la façon dont un homme de 77 ans résumé son engagement devant un youtubeur de 29... Le jeune ne connaît pas vraiment le contexte politique des années 1990-2000. Donc le vieil homme peut aisément présenter les choses comme cela l'arrange. Dans un sens il n'a pas le choix : il ne dispose que de 5 minutes. Mais la synthèse, la cristallisation, produisent un effet curieux. Comme si tout était naturel, linéaire. Collon était fils de bourgeois, mais il a découvert la gauche, l'usine, puis "Manufacturing consent", puis la propagande de guerre, et puis il y a eu Internet, et l'altermondialisme etc... La jeunesse gobe ces mots comme elle lirait un livre d'histoire. Tout cela est finalement bien abstrait.

Le récit gomme tout ce qui n'allait pas de soi. Les coups de poignards, contre les ennemis, mais aussi contre les alliés, et surtout contre la vérité, à chaque étape - c'est embêtant de la part de gens qui s'érigent en professionnels de la lutte contre le mensonge. De vrais "saint Jean de la Croix" du combat pour la vérité (pour reprendre le mot de Sartre qui comparaît Fidel Castro à ce mystique). En réalité tout est bien plus complexe, mais qui se soucie de la complexité ? La complexité est dans les livres. Il faut aller les trouver chez des éditeurs confidentiels, les livres sont longs à lire.

Moi qui suis aussi un ancêtre (quoique plus jeune que Collon), astreint à ce titre au devoir de mémoire, je n'ai pas oublié. Ce qu'était la République fédérale de Yougoslavie à l'été 2000 quand Michel Collon organisait des visites à Belgrade alors que les opposants (de gauche et de droite) étaient en tôle. L'histoire de la création du portail Internet qui n'a jamais vu le jour au début des années 2000 voulez-vous que je vous la raconte ? Et la façon dont Taddei cooptait les opposants légitimes (Collon-Bricmont) pour l'émission "Ce soir où jamais" à l'époque où le socialisme de Chavez était à la mode ? Chaque fois qu'un opposant crée son petit "business de la vérité" et joue des coudes pour être reconnu, il en écrase une vingtaine d'autres, mais surtout, il écrase aussi beaucoup d'aspects de la vérité qui auraient gagné à être compris et qui auraient dû être portés par ceux qui ont glissé dans l'oubli. Je ne parle pas de moi : je n'avais pas la "gnaque" pour devenir un porte-drapeau, mais de beaucoup de gens de trente ou quarante ans plus jeunes que Collon auxquels celui-ci n'a pas fait la courte-échelle, qu'il a utilisés pour vendre ses cassettes, ses livres, et qui ont pâti de ne pas avoir plus d'espace pour s'exprimer et devenir à leur tour de bons journalistes alternatifs.

Problème des égos. Problèmes des idéologies aussi. Collon me hérisse à chaque fois qu'il affirme que les guerres impériales sont faites pour le pétrole. Il ose le répéter aujourd'hui à propos de la Palestine. On sait pourtant que l'ampleur du problème est plus vaste. Elle est spirituelle. Mais parler de pétrole simplifie le débat, comme lorsque les gens à l'époque du Covid croyaient avoir atteint le sommet de l'esprit critique quand ils disaient "c'est une question de pognon". Raisonner de la sorte arrange bien tout le monde.

Allez, je vous montre ce qui fut malgré tout le meilleur côté de Collon à mes yeux : Les damnés du Kosovo. Car avec ce film là, tourné quelques années après l'entrée de la KFOR dans la province serbe, il avait quand même le grand mérite de traiter un sujet qui n'intéressait plus personne dans les grands médias : la persécution des minorités non albanaises.

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Les votes à l'ONU sur Gaza et l'Europe

30 Octobre 2023 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Peuples d'Europe et UE, #Proche-Orient, #Colonialisme-impérialisme, #Le monde autour de nous

La bande de Gaza (2,5 millions d'habitants), privée d'eau et d'électricité, subit maintenant un blackout total téléphonique et sur Internet, ce qui revient à donner un permis de tuer absolu à la soldatesque israélienne à l'abri de tout regard. Certains bons esprits demandent à Elon Musk d'activer Starlink pour les Gazaouis comme il l'a fait pour les Ukrainiens en 2022. Mais, malgré les manifestations massives à Londres et Berlin (alors que Macron interdit toujours massivement toute expression démocratique dans la rue sur le sujet), on peut parier qu'Elon Musk ne lèvera pas le petit doigt.

Il suffit de regarder ce que donne le signe du réseau social X (ex-Twitter) pour comprendre à qui Elon Musk obéit.

Le 27 octobre l'Assemblée générale une majorité de pays ont voté pour une trêve humanitaire à Gaza, sauf la poignée de pervers impérialistes habituels, Etats-Unis en tête, avec leurs alliés anglo-saxons (Australie, Canada-Royaume-Uni) qui se sont lâchement abstenus (et l'Inde aussi au sein des BRICS).

Si vous zoomez sur l'Europe, vous verrez que la France, l'Espagne (où une ministre a appelé à suspendre les relations diplomatiques avec Tel-Aviv), la Belgique et le Portugal sont encore un peu dans le camp de la compassion pour les civils. Mais une grande majorité de pays se sont abstenus, dont l'Allemagne, la Pologne, la Roumanie, la Grèce, les Pays Baltes et l'Italie, avec un vote "contre" régime de droite anti-immigrationnistes (assimilables à nos zemmouriens) : la Hongrie, l'Autriche, la République tchèque, la Croatie (presque tout l'ex empire austro-hongrois). Ces gouvernements ont donc voté en conscience pour la famine et la diffusion des maladies dans la bande de Gaza (où déjà 3 400 enfants sont morts).

Songez à ce que cela aurait donné si les fédéralistes européens menaient à bien ce qu'ils ont proposé encore cette semaine (le 25 octobre):  à savoir que l’environnement et la biodiversité relèvent exclusivement de la compétence de l’Union et surtout que "les compétences de l’UE en matière d’affaires étrangères, de sécurité et de défense extérieures ainsi que d’infrastructures transfrontalières, entre autres, soient également considérablement élargies". (Voir le rapport adopté par les eurodéputés de la commission des Affaires constitutionnelles - AFCO -). Suivant cette logique les pays membres perdraient leur droit de véto en matière de politique étrangère, et se serait soit la Commission, transformée en Exécutif européen (sous la houlette de la très corrompue Von der Layen, ou d'un de ses successeurs et clones, Emmanuel Macron ou un autre) soit un Conseil européen où le droit de véto aurait disparu (comme c'est la volonté des fédéralistes, cf encore Von der Layen récemment) qui déciderait en lieu et place de la France, en vertu de la majorité simple des pays membres. Or quelle est la tendance majoritaire des pays de l'Union européenne à l'ONU sur la trêve à Gaza en ce mois de septembre ? L'abstention.

Autrement dit être européiste aujourd'hui vouerait la France à accepter que l'Union européenne à notre place s'abstienne lorsqu'il s'agit de demander que les civils de Gaza puissent ne pas mourir de faim et de maladie, et bénéficier d'une trêve humanitaire. Voilà à quel niveau de honte nous en serions.

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