"L'Assemblée des femmes" d'Aristophane
Je me plonge en ce moment dans l'Assemblée des Femmes d'Aristophane, une comédie à côté de laquelle les sketches de Bigard sont d'un niveau de langage très raffiné. La pièce traite du communisme, aussi bien sexuel qu'économique, après que les femmes aient pris le pouvoir à Athènes. Outre que c'est une mine pour mes travaux d'anthropologie du corps (j'ai d'ailleurs été interviewé là dessus pour une émission de TV cette semaine), c'est une preuve supplémentaire de ce qu'Athènes fut un laboratoire d'idées extraordinaire, des idées à examiner de très près (y compris leur critique ironique chez Aristophane), notamment maintenant que les préjugés chrétiens s'en sont allés (en grande partie, disons). J'y reviendrai.
Les Hmongs sur Arte, diverses choses, les travaux et les jours...
De retour sur la toile après une semaine de dur labeur en Béarn, toujours sur mes trois derniers livres. J'ai surtout avancé celui que je compte consacrer à une résistante de la banlieue rouge. J'ai découvert des tas de choses sur les patronages municipaux dans la formation de l'esprit des résistants avant guerre. Pauvres gosses quand même. Souvent on rencontre ce profil : 15 ans en 36, fusillé à 22 ans en 43. Toute une époque, celle des bals musette et du style Jean Gabin.
Dans l'avion je lisais le journal. Medvedev qui nomme un superpréfet dans le Caucase-Nord (utile pour mon futur livre sur l'Abkhazie), Le Monde un peu agacé par deux militantes du Parti de gauche qui font de la propagande dans le métro parisien, les types de l'UMP qui s'excitent contre les Quick Halal (la différence ne passe pas chez les beaufs), le proviseur de lycée qui vire un ado qui porte un t-shirt pro-palestinien.
Le Wallstreet Journal hier faisait sa "Une" sur le fait que la liberté de circulation des capitaux n'était plus du tout tendance, et que les opérateurs financiers eux-mêmes demandent de plus en plus une nouvelle régulation. Les keynésiens placides peuvent donc attendre tranquillement : leur doctrines seront à nouveau en odeur de sainteté dans dix ou quinze ans. C'est quand même reposant d'être du centre-gauche. On lit gentiment Libé (qui hier disait beaucoup de bien d'une initiative du gouvernement géorgien, il faudra que je vous parle de tout ça dans mon bouquin), et l'on attend le retour de la régulation (en se disant que les lustres qu'on aura passés à s'accomoder du néolibéralisme n'auront été que des erreurs de jeunesse sans grande conséquence).
Coup d'Etat au Niger. Je ne suis pas mécontent d'avoir écrit un texte sur ce pays il y a 2 mois sur le blog de l'Atlas alternatif. Au fait avez vous lu sur le même blog le billet sur le Venezuela ? Chavez et Chevron, Casino et la Colombie... Décidément la Colombie est un pays intriguant. Mais sur l'essentiel on ne peut rien savoir. Par exemple : est ce que USAID finance vraiment des activités de paramilitaires dans ce coin ? Les chavistes l'affirment. Qui peut le prouver ?
Arte vous le dira dans 40 ans ! Un ami a attiré mon attention sur un reportage sur les Hmongs et les horribles bombardements secrets des Américains en 1971-72 au Laos, dans la Plaine des Jarres. A l'époque aucun journaliste ne s'y intéressait, malgré les efforts notoires d'un témoin occulaire étatsunien qui tenta de les alerter (dans ce genre d'affaire il y a toujours un "juste" que l'on sanctifie après coup, pour racheter la lâcheté de millions de connards indifférents). Un ami me disait qu'Arte devrait diffuser des documentaires aussi "anti-impérialistes" sur des sujets plus actuels (la situation de l'Irak par exemple dont le blog de l'Atlas alternatif parle beaucoup). Arte ne le fera pas bien sûr. Pourquoi ? Bernard Henry Lévy préside son comité de surveillance, mais ce n'est pas la seule raison.
Je continue de jouer une carte "rassembleuse" sur Facebook. Quiconque veut entrer dans le réseau Atlas alternatif est admis pour peu qu'il ne soit point lié à des mouvements trop à droite. 2300 "amis" à ce jour. Mais je doute que toutes ces personnes qui ont elles mêmes des centaines d' "amis" prêtent la moindre attention à ce que ceux-ci publient. Le piège de la vacuité des réseaux sociaux sur Internet dans toute sa splendeur;
Au miieu de tout ça, j'arrive encore à lire une ou deux pages sur le stoïcisme de temps en temps - de vieilles problématiques de mes 20 ans, que je voudrais reprendre à la lumière de l'expérience de quatre lustres. Je ne suis pas pressé. La philosophie a le temps pour elle.
Marx et l'Islam
"...Well, before entering the Jardin d'Essai' we took coffee, of course in the free air, a Mauresque 'café'. The Maure prepared it excellently, we were on a bank. On a rough table, in inclined positions, their legs crossed, half a dozen Maure visitors were delighted in their small 'cafetières',' (everyone gets one of his own) and together playing at cards (a conquest this on them of civilisation). Most striking this spectacle: Some these Maures were dressed pretentiously, even richly, others in, for once I dare call it blouses, sometime of white woollen appearance, now in rags and tatters-but in the eyes of a true Musulman such accidents, good or bad luck, do not distinguish Mahomet's children. Absolute equality in their social intercourse, not affected; on the contrary, only when demoralized, they become aware of it; as to the hatred against Christians and the hope of an ultimate victory over these infidels, their politicians justly consider this same feeling and practice of absolute equality (not of wealth or position but of personality) a guarantee of keeping up the one, of not giving up the latter.* (Nevertheless, they will go to rack and ruin without a revolutionary movement.)..."
Ras le bol
Ethnies/lutte des classes
J'ai bien aimé sa réponse : "Il y a un exemple encore très clair. Celui de l'Afrique du sud. Là-bas, sous l'apartheid, le clivage de race était un fait objectif. Pourtant le parti noir "racialiste" Congrès pan-africain (pro-chinois par ailleurs) a fait de la surenchère avec le slogan "one white, one bullet" tandis que l'ANC, malgré la situation objective a toujours considéré que c'était le clivage de classe qui était fondamental, même si des ouvriers blancs ne suivaient pas la lutte de classe mais qu'on décelait l'émergence d'une bourgeoisie noire clientélisée. Et c'est finalement ce parti (avec le PC intégré dedans) qui a obtenu l'appui réel des masses. Et en France, nous ne sommes tout de même pas sous un régime d'apartheid. L'idée raciale est une idée de petit-bourgeois qui veulent "monter", ce ne peut pas être une idée de masse. La race, comme la question du sexe, des générations, des régions, des religions, etc, doit être pris en compte, mais la base matérielle reste le socle sur lesquelles toutes ces contradictions se développent. C'est à la gauche blanche de parler plus de race et à la gauche bigarrée de parler plus de classe. Pour créer un climat de confiance."
Personnellement, vous le savez, je ne suis pas matérialiste à la manière dont le sont les marxistes, et donc je ne pense pas que la "base matérielle" soit un socle si fondamental, même si elle pèse très lourd dans la balance (parce qu'en fait je ne suis pas pour l'argument du "en dernière analyse" ). Mais je crois tout de même que dans l'action politique il faut d'une manière ou d'une autre que la question des classes sociales ne soit pas éclipsée par celle des identités culturelles. J'ai bien aimé la conclusion de mon ami : "C'est à la gauche blanche de parler plus de race et à la gauche bigarrée de parler plus de classe. Pour créer un climat de confiance."
Personnellement je ne lui donnerais pas le même sens (implicite) que lui peut lui attribuer, à savoir créer un climat de confiance "pour la lutte des classes" car je refuse le finalisme. Je pense qu'il faut effectivement que nous autres petits bourgeois blancs intégrions davantage la problématique du racisme (de l'intolérance culturelle, du néo-colonialisme etc) simplement par devoir moral, parce que c'est la seule façon d'être juste à l'égard de notre époque et d'y tenir une présence digne de ce nom.
Une soirée-débat en banlieue
"Frédéric, Tu as dû voir ce débat stupide entre le NPA et le PG à propos de la candidate voilée des listes du NPA. Il en dit long sur l'état "régressif" de la gauche de la gauche française qui se voit dicter ses thèmes par Sarko and co.
J'étais hier à XX mais Y a eu un problème familial et n'a pu venir. Beaucoup de jeunes (le groupe Frantz Fanon), des militants PCF et PG "issus de l'immigration"... Je ne sais pas comment ils se retrouvent dans ce contexte au PG. ...Et surtout pour combien de temps ?J'ai entendu aussi en attendant les conversations de militants PCF et PG et je vois bien que dans chaque section du PCF, la situation est totalement différente... Et Alima Boumedienne a de la tribune laissé entendre qu'il en allait de même pour son parti, les verts et qu'il fallait devoir regarder qui a pris quelle position sur Gaza et le hamas pour savoir pour qui voter...
Le MIR/PIR distribuait des tracts à l'entrée. le CBSP lié à l'UOIF avait un stand et son représentant, un Palestinien, est intervenu de la salle (eux sont divisés entre une direction qui ne veut faire que de l'humanitaire apolitique et une base qui veut faire de la solidarité avec les Palestiniens !). les militants PG et PCF n'avaient comme attitude que d'aborder leurs voisins, pour essayer de faire passer leurs messages, sans intervention publique ou distribution de tract. On sentait comme un clivage entre eux et les organisateurs des trois assoc dont Frantz Fanon qui avaient fait venir Nadine Rousso, Alima Boumedienne (sénatrice du parti Vert), le réalisateur du film Gazastrophe, le représentant de la commission des droits de l'homme auprès de l'ONU. Leurs interventions étaient assez radicales.
Le cercle Frantz Fanon a réussi à trouver un conseiller municipal qui va faire voter sur la résistance palestinienne et la suppression du Hamas de la liste des organisations terroristes et appelé à venir assister en masse au conseil municipal et noter qui vote en faveur et qui vote contre cette résolution pour ensuite aux régionales et plus tard à appeler au boycott de ceux qui auront voté contre la résolution.
Bref, une nouvelle fracture semble apparaitre... à gauche. Triste...
Donc partout on nage dans le flou et les intercourants d'un parti à l'autre. Et la question "raciale" traverse chaque parti. Ce qui rend l'américanisation de la société française de plus en plus plausible. La faute à qui ?Aucun parti n'a plus de cohérence. Combien de temps de telle machines peuvent elles survivre ? "
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NB : lexique pour comprendre ce texte
NPA = Nouveau parti anti-capitaliste
PG = Parti de gauche
PCF = Parti communsite français
Groupe/cercle Frantz Fanon = une association locale inspirée par le penseur anticolonialiste Frantz Fanon
MIR/PIR = Mouvement/parti des Indigènes de la République
UOIF = Union des organisations islamiques de France
CBSP = Comité de Bienfaisance et de Secours aux Palestiniens