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Le blog de Frédéric Delorca

"Le confort intellectuel" de Marcel Aymé

27 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #1910 à 1935 - Auteurs et personnalités

On trouvera cela surprenant de la part d'un admirateur de George Sand comme moi (du moins de l'autobiographie de George Sand à défaut d'aimer ses romans), mais je n'ai pas peur de rechercher la vérité à travers lalecture d'auteurs opposés et incompatibles entre eux.

Je lis donc ce soir "Le confort intellectuel" de Marcel Aymé. Il y a une thèse très forte dans son ouvrage : le romantisme du XIXème siècle (jusque dans ses déclinaisons dans Baudelaire) et le culte de la poésie ont perverti la bourgeoisie au point non seulement de nourrir en elle une sympathie pour les idéologies qui veulent sa destruction comme le communisme, mais encore de lui faire perdre le sens du réel.P1000086-copie-1.JPG

Vous savez que dans "Eloge de la liberté" je me confronte à la question du romantisme et de ses formes les plus populaires présentes dans la culture de masse des années 1980, sur le rôle qu'il a joué dans mon engagement en Yougoslavie.

Je ne suis pas du tout du genre à rechercher le statu quo, et j'ai souvent salué notamment ce que le romantismefidel-castro.jpg révolutionnaire (mâtiné il est vrai de beaucoup de réalisme bureaucratique) a pu apporter à un petit pays comme Cuba en terme de dignité humaine et de progrès social.

chomskynotebook.pngMais en bon chomskyen adepte du cartésianisme (et contributeur du Cahier de l'Herne sur Chomsky, je me dois de le rappeler ici pour que mes nouveaux lecteurs aient une vision un peu complète de mes travaux), je me défie aussi de toutes les facilités intellectuelles, et de tous les "fashionable nonsenses" qui font stagner l'humanité dans des rêveries stériles. Je ne sais pas trop si aujourd'hui le romantisme travaille encore notre monde, si, par exemple, on le trouve dans l'islamisme ou dans le chavisme (je suppose que oui). Mais nul n'ignore qu'il apporta à l'humanité du bien (la révolution de 1848), comme du mal (le nationalisme allemand).

Une des forces du livre de Marcel Aymé est de montrer le romantisme (et le goût de la poésie) à l'oeuvre dans l'évolution concrète d'une famille bourgeoise de province. Une autre est de rappeler que cette révolution littéraire aurait pu être tuée dans l'oeuf, comme celle des "Précieuses" et du "roman fleuve" au XVIIe siècle. Marcel Aymé ne fut pas le premier ni le dernier à instruire le procès de cette tendance de l'histoire occidentale. Il y apporte en tout cas une pièce très importante.

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"Le Travail pornographique " de Mathieu Trachman

26 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Lectures

P1000726-copie-1.jpgPour info, Parutions.com vient de publier mon compte-rendu du livre du sociologue Mathieu Trachman "Le Travail pornographique - Enquête sur la production de fantasmes" ici.

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"L'ordre et la morale" de Mathieu Kassovitz

23 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Cinéma

Vu ce soir en DVD "L'ordre et la morale", un bon film, très prenant, très bien fait, auquel je reconnais notamment la vertu de rendre hommage aux hommes de terrains, à ceux qui font l'histoire au péril de leur vie, alors que les politiciens et les intellectuels se contentent de commenter, ou de récupérer les fruits de leur action (félicitons notamment Mathieu Kassovitz de ne pas sombrer dans un antimilitarisme sommaire, trop répandu à l'extrême gauche, et d'avoir su rendre hommages aux valeurs du soldat, même s'il est plus dur à l'égard de l'armée de terre que de la gendarmerie, l'effort de réalisme et de respect de la chose militaire tranche notamment avec la bouffonnerie d'un film comme "Indigènes" hélas bien mieux récompensé par la profession). Qui plus est ce film a eu le mérite de me rappeler le temps (dans les années 84-88, mais ce temps n'a jamais vraiment cessé) où je débordais de sympathie pour la cause kanake et suivais très assidument les "événements de Nouvelle-Calédonie", comme on disait alors.

gazBien sûr comme beaucoup de contestataires (et vous savez que j'en ai connus quelques uns, et de très près) Kassovitz a le défaut de prendre un peu trop de libertés avec la complexité du réel, et de manipuler à son tour tout en prétendant dénoncer les manipulations des puissants, et ce souvent au mépris des faits authentiques. Sans doute idéalise-t-il un peu trop Legorjus (au point d'en travestir la personnalité), et les preneurs d'otage Kanak (au point de mentir d'ailleur sur des éléments humainement importants comme le mode d'exécution de quatre gendarmes tués). Mais ce sont là des licences artistiques qu'il faut accorder à un artiste passionné qui suit son chemin propre, et utilise l'histoire au service de ses interrogations personnelles. Mais il faut admettre une bonne fois pour toute que le cinéma en particulier, et l'audiovisuel en général, ne sont pas de bons vecteurs de vérité. La vérité ce sont toujours des dossiers, avec des pièces écrites à charge et à décharge (pour autant que le réel puisse trouver son chemin dans l'écriture), et des cerveaux qui tentent des synthèses plus ou moins justes. L'image véhicule un lyrisme qui lui est propre, elle a besoin de lyrisme. Il faut laisser les créateurs suivre une inspiration personnelle à travers le langage audiovisuel, aller voir leurs films (quel dommage que le public et les médias aient largement boycotté ce film) sans jamais confondre l'artiste avec l'historien, voilà tout.

Quant à Mathieu Kassovitz j'espère qu'il reprendra bientôt la voie de la fiction, qui, à mon sens, est la voie la plus noble pour faire entendre la vérité dans l'art.

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Réforme cantonale : le redécoupage technocratico-féministe

22 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca

Encore une mesure qui tourne délibérément le dos à deux siècles d'histoire de notre pays au nom d'une conjugaison d'impératifs technocratiques et de combat pour la révolution des rapports entre les "genres" : le nombre de cantons en France va être divisé par deux pour permettre la mise en place d'un scrutin binominal paritaire, c'est à dire l'élection systématique d'un homme et d'une femme comme "conseillers départementaux", nouveau nom des conseillers généraux. Un délire de plus qui va nécessiter des redécoupages aventureux d'entités territoriales qui existent depuis le consulat.

 

hollandeEvidemment un scrutin proportionnel départemental aurait mieux valu si l'on voulait valoriser les grandes villes et servir la cause de l'engagement politique des femmes (quitte ensuite à ce qu'on attribue dans chaque canton rural à un maire élu la fonction de conseiller consultatif : cela au moins eût maintenu une réalité physique aux entités cantonales sans coûter plus cher à la République). C'est au nom de l'attachement à la proportionnelleque le PC s'est abstenu au Sénat (les radicaux ne prenant pas part au vote), ce qui a fait échouer le vote en première lecture. Il a bien fait.

 

La base technocratique projet avait été posée par la droite, puis teintée de féminisme par la gauche à l'issue d'états généraux de la démocratie locale dont personne n'a entendu parler. Le projet est en débat cette semaine à l'assemblée nationale.

 

En pratique  la création d'un binôme égalitaire de deux élus sur un même territoire laisse sceptique : qui gérera quels dossiers ? Et si les deux ne s'entendent plus ? Quelle légitimité si l'un est vice-président du Département et pas l'autre ?

 

1couv_montagnes-copie-1.jpgDans mon département c'est l'occasion de rallumer la guerre entre Basques et Béarnais. Le canton basque de Saint-Palais, à l'issue de la publication d'une simulation dans le journal La République des Pyrénées du 22 janvier dernier s'insurge à l'idée de pouvoir fusionner avec Iholdy (basque), mais aussi avec les cantons béarnais de Sauveterre-de-Béarn et Navarrenx. Mëme crainte de regroupement dans les deux cantons de Soule (Mauléon et Tardets).

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Histoire locale, morale et politique, questions diverses

19 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Quelques séries de questions que je me pose aujourd'hui et que je vous pose :

lh-copie-1.jpg- Vous êtes vous demandé déjà qui vivait à l'endroit où vous habitez il y a cent ans, quel était le paysage dehors à ce moment-là ? ce qu'on y faisait ? Les fous se prennent plus souvent pour des réincarnations de Napoléon ou d'un pharaon, pas de l'arrière grand père d'un voisin. Est-ce qu'on se soucie de l'histoire d'un lieu auquel on est étranger ? Dès lors est-il utile qu'un journal municipal de banlieue parle chaque mois de l'histoire d'une ville dont la moitié de la population vivait ailleurs dix ans plus tôt ? est-il légitime et utile que l'Agence nationale de la rénovation urbaine ait une ligne de crédit pour l'histoire des HLM ? Les gens ont-ils besoin de ça ? L'histoire locale est-elle un moyen de donner des lettres de noblesse au vécu ordinaire des gens ou juste une façon de combler l'insuffisance du "grand récit national" (sa crise, en quelque sorte) et de tous les autres grands récits ?

 

csto-copie-1.png-  Questions autour de ce mot d'un ami tantôt : "je lis actuellement un ouvrage d'Henri Chambre (jésuite) sur le marxisme en Union soviétique (sa thèse principale : le poids majeur de la superstructure et de l'idéologie dans un système issu d'une "philosophie" mettant l'accent sur l'infrastructure économique). C intéressant de voir les répercussions de la transposition du marxisme dans une société donnée : disparition de la propriété privée au profit du concept de propriété individuelle, disparition de toute référence directe à la morale dans le code pénal : la responsabilité y étant exclusivement légale et sociale (où le juste et le bien cèdent le pas devant le socialement utile ou néfaste)..."

L'argument selon lequel le soviétisme a aboli le sens moral des russes et les a rendus utilitaristes est très répandu chez les anticommunistes, et j'y ai remarqué un fond de vérité quand je suis alléeen russie. Mais il est toujours dur de savoir si les causalités sont politiques ou anthropologiques. A propos de la Russie, on peut aussi soutenir qu'un pays de serfs jusqu'en 1880, qui a connu tant de guerres (avec le phénomène des veuves qui élèvent leurs enfants seules dans le dépit et la nécessité) ne peut pas se forger de grandes morales familiales bien ancrées et bien transmises. Il faudrait comparer cela avec Cuba par exemple. En tout cas évidemment je conçois qu'on se demande (sans jamais pouvoir trouver de réponse claire) quelle part un système politique peut jouer dans la disparition d'une morale, directement,ou indirectement par les guerres civiles qu'il provoque (je pense notamment à la Chine, où là aussi l'utilitarisme est roi, d'où la nécessité de retourner parfois à de vieilles morales confucéennes plus désintéressées). Le moralisme assumé du républicanisme français, lui, limite peut-être le risque de la dérive utilitaire, mais le moralisme produit aussi de l'anti-moralisme réactionnel, source d'anomie. Et puis les réacs façon Bernanos diraient que le moralisme républicain est un moralisme au rabais parce qu'il valorise les combines plus que l'héroïsme, à la différence de la sainte monarchie traditionnelle. Y a-t-il une morale politique qui puisse vraiment le sortir de l'utilitarisme sans l'asservir à du pharisianisme ?

Au fait en parlant des réacs vous avez vu comme on essaie de nous vendre en ce moment l'idée d'un retour de la monarchie en Libye ?Les années 60 dans le monde arabe avec leur élan socialiste sont vraiment mortes. Cela dit je veux bien croire que les monarchies sont plus inoffensives aujourd'hui qu'hier parce qu'elles ne sont plus solidaires des féodalités locales (encore que, en Libye, cela tende à revenir). Mais bon, une monarchie vaut mieux qu'une dictature clanique qui surfait sur l'héritage de la rhétorique socialiste pour imposer un règne du n'importe quoi (la libéralisation arbitraire de l'économie sans les garde-fous de l'Etat de droit).

 

- Gérard Filoche, de l'aile gauche du PS, pleure sur la mort annoncée de l'inspection du travail sous la forme d'une réforme vendue à Sapin par le haut fonctionnaire social libéral directeur du travail qui était déjà en poste sous Sarkozy. Comment diffuser cette idée ? Autre nouvelle : Julian Assange croit échapper à l'encerclement londonien en se faisant élire député en Australie. N'est-ce pas tout de même un peu naïf ? Mais il est vrai que ce garçon n'a pas 10 000 cartes à jouer... ni la protection active de Correa (brillamment réélu en Equateur) ni les frappes dans le dos amicales mais inutiles de Mélenchon ne peuvent le sortir de sa sourcière...

Bon allez assez de questions pour aujourd'hui. Je ferme la boutique jusqu'à demain.

 

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"La Bataille d’Alep" de Pierre Piccinin da Prata

15 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Lectures

books.gifA propos de la guerre en Syrie, on peut lire sur Parutions.com mon compte-rendu du livre-témoignage de Pierre Piccinin da Prata, publié chez L'Harmattan, en ligne ICI.

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Bras de fer : Afghanistan, Mali, Corée du Nord, Syrie

13 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme, #Proche-Orient

Pas terrible les infos de ce jours. Des reliquats des années 2000 qui tournent en bras de fer aux quatre coins du monde :

 

L'Agence russe d'exportation d'armements (Rosoboronexport) livre des systèmes de défense antiaérienne à la Syrie, apprend-on dans la presse russe aujourd'hui. Sans doute une conséquence du raid israélien.

 

La Corée du Nord effectue un essai nucléaire. Moscou, tout en condamnant, fait remarquer à juste titre qu'on n'en serait pas là si Washington n'avait cessé de menacer ce pays (et d'autres "Etats voyous").

 

CSONU.jpgAu Mali les islamistes se sont infiltrés à Gao en traversant le Niger à la faveur de l'obscurité, les insurgés ont combattu toute la journée de dimanche les troupes maliennes et françaises, preuve que le scénario que j'envisageais (un retrait de la France avant même la reconquête des montagnes du Nord-Est) n'est même plus envisageable puisque l'arrière de la ligne de front n'est pas sécurisé. Vraiment mauvaise pioche pour la France. Où en est le projet d'interposition des forces africaines ? Si j'étais M. Hollande je pense que j'investirais davantage sur le dialogue bilatéral avec les seuls pays à même de fournir des contingents pour sécuriser le Mali : les trois puissances militaires que sont le Nigéria, l'Afrique du Sud et l'Angola. Ou peut-être même, si nécessaire, avec la Russie, qui avait proposé ses avions de transports de troupes. Bon le revers de la médaille nous le connaissons : quand on partage le fardeau il faut aussi partager les ressources : et donc l'uranium du Niger, il faudrait aussi songer à le partager... Et les mouvements progressistes maliens, quelle stratégie alternative proposent-ils pour reconquérir leur souveraineté, aussi bien face aux islamistes, que face à la CEDEAO et à la France ?

 

Apparemment sécuriser une zone menacée par des islamistes n'est pas une tâche insurmontable. L'ennui est qu'on ne sait jamais ce qui se produira quand les occupants se seront retirés. L'Afghanistan est typique de cette problématique. En ce moment les Américains l'occupent avec 68 000 hommes, et jurent que les forces afghanes assurent 90 % des opérations militaires (on aimerait pouvoir en dire autant des forces maliennes). Obama promet d'en retirer 34 000 d'ici février 2014. Ce qui n'en laisserait que 34 000 pour contrôler le pays pendant l'élection présidentielle d'avril, puis quelques milliers en 2015, mais il semble que beaucoup de généraux ne croient pas que 34 000 hommes suffisent pour sauver le régime de Karzaï... Là comme ailleurs l'Occident cherche à sauver les meubles, à un coût qu'il peut de moins en moins payer. Et personne ne se prépare mentalement au grand rééquilibrage du partage des ressources auquel il faudra bien songer quand Paris, Londres, Washington devront partager avec Moscou, Pékin, Prétoria et Brasilia le coût de la répression des milices rebelles sur tous les continents...

 

Je voyais récemment une étude sur le gaz de schiste réalisée par un think tank américain qui concluait approximativement "grâce au gaz de schiste les USA alliés à l'Australie reprendront un jour le leadership mondial" (car ces deux pays seraient les plus gros détenteurs de réserve). On ne peut jamais exclure qu'une nouvelle donne au niveau des matières naturelles ou des technologies inverse soudainement les rapports de forces, mais pour l'heure on est encore loin du compte...

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L'esthétique de la rupture responsable

13 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Philosophie et philosophes

Un type comme moi, vous ne le verrez pas à la TV, ni chez Taddeï ni ailleurs, parce que je ne cherche pas à écrire des livres de spécialiste qui éclairent un sujet à un moment donné. J'essaie de dessiner une trajectoire qui puisse faire sens sur 20 ou 30 ans comme illustration de ce que pourrait être une façon raisonnable de se tenir dans une époque comme la nôtre. Par conséquent tous les livres que j'ai écrits forment une seule et même oeuvre, où les parties se renvoient les unes aux autres. Je pense qu'on le voit bien dans le livre sur le stoïcisme où l'on passe pour ainsi dire de Belgrade à la Stoa sans transition. J'ai essayé de ne négliger aucun aspect important (les relations internationales, la technologie, les moeurs intimes etc). Et j'ai en permanence précisé ma position à l'égard des diverses modes - celles des dominants : de BHL à Caroine Fourest - celles des opposants - de Meyssan à Bouteldja - pour éviter aux lecteurs les contre-sens sans pour autant passer mon temps à me définir par rapport aux uns et aux autres.

 

J'ai défendu des options de rupture, mais toujours responsables, en tenant compte du réel, des faiblesses de la société humaine, de la nécessité de garder, au moins à titre provisoire - mais peut-être pour certaines à titre définitif - des institutions solides, des systèmes de défense etc (je pense par exemple que vous aurez trouvé dans ma prise de position sur le Mali par exemple un aspect de ce souci de responsabilité, parce qu'il faut toujours chercher à rester crédible, penser en l'air, au milieu de fantasmes personnels, ne mène à rien).

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Pour des raisons structurelles (j'avais écrit "structurales", mais abandonnons le langage des années 60) liées à mon itinéraire et à ma personnalité (les deux s'influençant mutuellement), je ne pouvais pas gagner à ma vision des choses un public large. Et, parce que mon public était restreint, je suis demeuré dans une spirale descendante : une vie professionnelle extrêmement aliénante, des petits éditeurs confidentiels etc. Et cette conjoncture négative était entretenue par la structure terriblement moutonnière de nos sociétés qui condamnent tous les opposants à une marginalité stérile (si je prends le cas des "anti-impérialistes" par exemple, ce ne sont plus aujourd'hui que des individualités isolées et fragiles qui se font la guerre entre elles).

 

Aujourd'hui j'ai encore 3 ou 4 manuscrits à caser chez des éditeurs du type L'Harmattan. Il faudra peut-être quatre ou cinq ans avant que je parvienne à les publier chez cet éditeur ou chez un autre, et je sais que chacun aura au maximum trente lecteurs. Le temps où je plaçais un livre par an chez des éditeurs est révolu, et je ne fais d'une certaine façon que conclure cette phase-là en terminant par ces 3 ou 4 livres.

 

La nouvelle phase d'écriture qui s'ouvre à moi aujourd'hui est une phase plus complexe. Je vais tenter d'écrire une sorte de livre ultime que je rédigerai dans une indifférence totale à l'égard des perspectives de publication et du lectorat potentiel. Cette écriture devrait avoir pour finalité de préparer ma rupture personnelle définitive à l'égard de mon mode de vie et du milieu où j'évolue. Pourquoi le faire avec et par l'écriture ? Parce que l'écriture est une garantie d'universalité et de responsabilité. Quand j'écris pourquoi et comment je veux rompre, je m'assure la garantie que cette rupture reste en phase avec l'idée de l'humanité que je me fais, que je ne suis pas dans le caprice superficiel. Ce travail de rupture, je souhaite l'élaborer à travers une réflexion sur un philosophe antique, pas n'importe lequel (et cependant je suis prêt à parier qu'aucun d'entre vous n'a jamais entendu son nom car notre époque ne lui fait aucune publicité, pour des raisons que je serai amené à décrire sans doute). La philosophie ne sert à rien si elle ne débouche pas sur des actes, et, réciproquement, il faut croire qu'il n'y a pas d'acte véritable possible sans recherche philosophique. J'entends aujourd'hui entrelacer pensée et acte autour de la rédaction de ce livre tout au long des cinq ans qui viennent. Voilà comment je compte donc préparer mon entrée dans la vieillesse, dont j'espère qu'elle sera aussi une entrée dans la rupture finale.

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Les temps difficiles de la lutte anti-ingérence

10 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Débats chez les "résistants"

Vous voyez où en est la Tunisie ? Avec la gauche qui crie "Au secours la France" et les islamistes "France Dégage" ? Ily a une séquence de l'impérialisme qui s'est ouverte avec la guerre de Bosnie et qui s'est close avec la guerre de Libye.

 

Pendant cette phase s'opposer à la violation de la souveraineté des peuples, au détournement des résolutions de l'ONU etc était un combat juste pour défendre les Etats issus de la victoire sur le nazisme (la Yougoslavie) ou de la décolonisation (tant pis d'ailleurs pour ceux qui - c'est à dire là grande majorité des gens - ont vécu cette période sans comprendre qu'il y avait un enjeu important à prendre fait et cause contre les excès des Occidentaux). La phase actuelle (qui en réalité a été préparée depuis 2005 par la montée en puissance des pays émergents, l'arrivée au pouvoir des islamistes en Afrique du Nord etc, les équations sont devenues terriblement complexes. Cette complexité, je l'ai souligné dans mes livres, existait avant aussi, quand par exemple en 2000 l'opposition serbe à Milosevic nous mettait en garde contre un soutien trop actif aux simplifications de Michel Collon par exemple. Mais aujourd'hui, où, en Egypte, en Tunisie et sans doute ailleurs vous aurez une moitié de la population, au pouvoir, qui suivra les journ-e-de-la-jupe.jpgprédicateurs du Qatar et d'Arabie Saoudite, quand une autre priera Saint Obama ou Saint Hollande pour sa survie, il sera difficile de crier "non ingérence", "non ingérence". Bien sûr on pourra toujours pointer le double jeu de l'Occident, son soutien caché à certains islamistes, ses simplifications sur la situations sociales des pays, son action globale qui affaiblit les Etats du Sud, etc. Mais des problématiques très compliquées, comme celles de la laïcité, de la libération des femmes, etc, qui sont des problématiques philosophiques, nées de mauvaises directions prises par toute une époque, l'imbrication entre le sort des pays d'Afrique et celui des diasporas en France, toute cette évolution typique des années 2010 vont nécessairement retenir l'ardeur des opposants aux ingérences, sauf bien sûr la frange complotiste et délirante pour qui, évidemment, tout n'est que théâtre d'ombre (et donc tout est facile à vomir et à rejeter).

 

Pour avancer sur un sol plus solide, il faudrait que les pétromonarchies disparaissent (encore que M. Guaino nous dira qu'elles stabilisent un jeu qui serait autrement dangereux s'il n'y avait que des bandes rebelles livrées à elles-mêmes de la Mauritanie au Pakistan). Il faudrait surtout que l'Occident repense les droits des individus, les rapports hommes-femmes etc, pour ne plus donner prise à l'opposition modernité-tradition, laïcité-religion. Ne plus investir de réflexes arrogants, d'esprit de croisade, dans notre défense des "droits de l'homme", dont d'ailleurs le contenu lui aussi serait à revoir. Le pouvons-nous ? Il n'est pas trop tard pour s'y mettre, en tout cas.

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Infidélité et ingratitude en politique : Loïk Le Floch Prigent et Tarek Aziz

10 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

A Pau, lorsque je montais des bandes informatiques sur les gros ordinateurs du centre de recherche d'Elf Aquitaine (très puissant dans la région) en 1989 pour financer mes leçons de permis de conduire, pendant les vacances, je me suis trouvé, en fin de stage, à serrer la paluche d'un certain Loïk Le Floch-Prigent, PDG du groupe à l'époque, qui rendait visite aux locaux palois. On connaît les démêlées judiciaires que le personnage a affrontées en France du temps où Mme Joly enquêtait sur l'affaire Elf (une affaire de corruption terrible, qui, nous assure-t-on, appartient définitivement au passé, mais je soupçonne la République d'avoir été encore touchée de la même façon par les pétrodollars de Libye puis du Qatar).

 

Aujourd'hui j'apprends que cet homme, dont je ne sais rien à part ce qu'on lit dans la presse, atteint d'un cancer de la peau à l'âge de 69 ans, vient d'être incarcéré dans un poste de gendarmerie au Togo (une grand démocratie issue de la Françafrique...) dans le cadre d'une sombre affaire d'escroquerie d'un riche émirati. Certains opposants togolais crient à la mascarade. Un comité de soutien appelle à ce qu'il bénéficie de la même sollicitude de la part de M. Hollande que Florence Cassez. En France une petite partie de la presse de droite critique la façon dont le nouveau gouvernement pour des questions d'image, de pub, renie ses anciens amis (car Le Floch Prigent était un pur mitterrandien) au mépris des considérations humanitaires les plus basiques.

 

Cela rappelle les conditions dans lesquelles les chiraquiens dans les années 2000 ont laissé tomber leurs anciens amis du Baas irakien, notamment Tarek Aziz, condamné à mort en 2010 alors qu'il n'a jamais eu de responsabilités directes dans les crimes de Saddam Hussein. Victime de deux crises cardiaques, il a demandé en 2011à être exécuté, puis à nouveau en ce début d'année. Les cercles français dénoncés à Bagdad comme autrefois proches du régime baassistes sont restés muets. Chevènement et Galloway lui avaient été plus fidèles.

 

Tout cela a un côté un peu romain. On s'attendrait à lire ces histoires indécente d'infidélité politique dans la chronique des règnes des julio-claudiens de Suétone. Mais notre époque est aussi faite de ce bois-là...

 

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"Sous les bombes"

8 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Souvenirs d'enfance et de jeunesse

Arte rediffusait ce soir "Sous les bombes", film franco-libanais de 2008. Certains passages me rappelaient mon histoire serbe de 1999-2000, que j'ai relatée dans "Eloge de la liberté". Il y a des moments dans la vie qui transcendent tout. Celui-là a cassé ma vie en deux. La force de ce moment-là ne tenait pas à toute cette comédie que nous menions autour d'Internet, des salons de Régis Debray, des bières bues avec Jean Bricmont. Bien évidemment non. Ca ce n'était que l'écume des choses, comme n'est qu'écume aujourd'hui tout ce blabla actuel entre intellos autour des guerres de Syrie, du Mali, de la crise de l'euro etc. La vérité était dans le vécu, dans toit ce désarroi des gens au milieu de la quasi-dictature, de la guerre, des mensonges, du chaos social. Dans les points de fuite qui avient pour noms pour moi Belgrade, Budapest et Düsseldorf. Ces fuites qui en vérité ramenaient toujours à l'essentiel.

 

p1000118.jpgOn ne sait jamais vraiment pourquoi les moments de transcendance transcendent tout. D'une certaine façon, on ne veut pas le savoir, et l'on ne veut même pas se souvenir d'eux. On sait qu'il y avait une vérité très forte en eux, une vérité dont on n'a entrevu que des lambeaux, et dont on n'a pas su restituer la densité dans l'écriture (Colette Lambrichs de La Différence tu me le reprochas si violemment), mais tant pis. Cela a été, on le sait. Peu importe pourquoi et comment.

 

Dans cette histoire de femme qui, à l'arrière d'un taxi, part en quête de son fils dans le Sud-Liban détruit de 2006, je retrouve ma Serbie de 1999. Peut-être juste à cause de la guerre et du chaos. De ce que ces derniers mettaient dans nos coeurs, dans nos têtes à l'époque, là-bas, loin de tout, sous l'embargo, sur les bords de la Sava...

Les guerres révèlent l'humanité sous un certain angle, non seulement l'humanité mais le monde, et les mondes possibles. C'est impossible à faire comprendre aux gens accaparés par la routine d'un pays en paix.

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Pétition des descendants de républicains espagnols, Corcuff, mort de Chokri Belaïd, actu perso

7 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Bon, on se promène un peu dans l'actualité ? Quelques petits sujets au hasard.

 

republica-espanola

Tenez par exemple cette pétition née dans le Tarn-et-Garonne pour répliquer à des propos idiots de M. Harlem Désir, secrétaire national du PS, sur la France "terre d'accueil" des Républicains espagnols en exil. En tant que petit fils de républicain, j'approuve à 300 % bien sûr.

 

Un sujet encore plus petit : le départ de Corcuff du NPA. Ce parti lui avait offert une revue (comme le PCF avait offert "Regards" à Autain), les gens qui ont connu les journaux "PLPL" et "Le Plan B" se souviennent de leurs comptes-rendus amusés des analyses très superficielles de Corcuff et de ses reniements périodiques. L'homme poursuit sa route vers d'autres horizons, mais, comme Onfray, sans que cela n'intéresse plus grand monde.

 

Plus grande histoire : L'UGTT appelle à la grève générale demain en Tunisie pour les funérailles de Chokri Belaïd, secrétaire général du Parti des Patriotes démocrates unifiés et leader du Front de Gauche, de tendance marxiste et panarabe, qui avait refusé la formation d'un gouvernement de "technocrates", assassiné par balles hier. Il y a cinq jours Chokri Belaid, avait accusé des éléments appartenant à la mouvance salafiste et des nahdhaouis d’avoir attaqué la réunion de son parti au Kef. Le choc entre laïques et islamistes devient de plus en plus frontal dans tous les pays arabes.

 

Bon, je vous parle un peu de mon "actu" personnelle ? La revue jésuite Etudes vient de refuser de publier une petite main tendue que j'avais adressée aux catholiques sur la base d'un texte de Pasolini. Cela ne m'étonne guère. Je publierai peut-être ici ce texte à l'occasion, c'est philosophique à souhait.pasolini.jpg

 

Le responsable d'une collection sociologique chez L'Harmattan me renvoie un de mes manuscrits : "Pas assez sociologique". Je lui écris : "Mais ce n'était qu'un petit compte-rendu d'expérience personnelle, il y a bien des collections consacrées aux témoignages chez vous non ?" Réponse : "Ah oui, mais vous auriez dû l'indiquer sur l'enveloppe". Je découvre que j'ai perdu 2 occasions de publication en 12 mois parce que je n'ai pas spécifié une collection-cible sur mes enveloppes, et que les manuscrits ne sont pas transmis en interne d'une collection à l'autre. C'est rageant. On perd une énergie folle avec ces bêtises bureaucratiques. Vous allez me dire que l'enjeu est faible puisque les livres publiés chez l'Harmattan restent confidentiels. Mais il est vital pour moi, à 42 ans,de placer tous mes écrits avec un numéro ISBN, et qu'une ou deux biblis universitaires ou autres les achètent. Je n'aurai pas ça avec Edilivres.

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A propos d'une attaque contre Samir Amin sur le Mali

7 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

Juste un billet rapide que j'ai envoyé à la revue Utopie critique qui demandait  des textes sur le Mali - mais ils ne l'ont pas publié car visiblement ils espéraient sans doute plutôt des textes allant contre la position de Samir Amin et ne souhaitaient pas instaurer un débat pluraliste. Allant dans le sens de BD et JPP il y a aussi ça. Je me rends compte que l'attaque de BD et JPP contre Samir Amin est relayée par moins de cinq sites sur la toile. J'aurais donc pu éviter d'écrire cette petite synthèse contre un billet qui n'aura aucun impact, mais bon elle m'a au moins permis de résumer mes écrits des deux dernières semaines sur le Mali.

 

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Raptor.jpgDans une tribune presque exclusivement consacrée à contester la position de Samir Amin, l'historien BD et le syndicaliste JPP se posent en gardiens du temple de l'anti-impérialisme face à tous ceux qui soutiennent l'intervention militaire française au Mali, immédiatement suspectés d'opportunisme et de trahison. Leur conclusion en dit long sur la hauteur de leurs prétentions : "À l'apparence que semble procurer à certains la recherche de succès politiques ou médiatiques éphémères, nous préférons pour notre part la défense de principes.".

 

Mais comme toujours les docteurs de la loi avec leur fantasme de pureté ne font que révéler par leur intégrisme dogmatique une forme d'auto-enfermement psychologique qui les coupe du réel et voue leur position à la dérive groupusculaire.

 

Bien sûr au Mali comme ailleurs en Afrique l'impérialisme est à l'arrière plan dans les rapports politiques et culturels au quotidien. Dans les rapports économiques aussi, et principalement. Ce que l'on dit des vues de nos multinationales sur le sous-sol sahélien est vrai.

 

Mais dans la séquence qui va précisément du 10 janvier à aujourd'hui l'ingérence française va plutôt à contresens des intérêts capitalistes qui, dans l'Hexagone, misaient plutôt sur la restriction des moyens bugétaires de l'Etat français (et des effectifs de son armée) et sur le développement d'un "soft power".  Il y a fort à parier que par exemple Total qui a le Qatar parmi ses actionnaires aurait préservé ses intérêts sous le joug d'Ansar Dine comme sous tout autre régime.

 

Pour prouver qu'il ne s'est agi que d'une manoeuvre impérialiste il faudrait démontrer qu'il n'y a pas eu d'attaque islamiste contre le Sud du Mali ni d'invasion de Konna, ou que cette attaque ne présentait aucun danger ou qu'elle a été provoquée par les Occidentaux (comme Racak prétexte à la guerre du Kosovo ou les armes de destruction massive de Saddam Hussein prétexte à celle d'Irak étaient des montages). Force est de constater qu'aucun journaliste n'a avancé une de ces trois hypothèses, pas même le spécialiste des "médiamensonges" Michel Collon.

 

Aux donneurs de leçon il faut demander : quelle option réaliste s'offrait aux peuples à ce point précis de l'histoire ? la résistance populaire des Maliens face à l'ingérence d'AQMI, du Mujao et d'Ansar Eddine n'était pas une option crédible car les Maliens n'avaient pas d'armes. Pas plus qu'en Somalie ou en Afghanistan. elle ne pouvait aboutir. Et ni la CEDEAO, ni l'Union africaine, ni l'Algérie n'étaient désireuses de s'interposer, et en tout cas elles n'avaient pas les moyens militaires de le faire en temps utiles. Fallait-il se résigner, au nom de la pureté des principes de la non-ingérence, à ce qu'une bande de 4 000 fanatiques brisent définitivement la tradition musulmane éclectique et libérale qui caractérise le Mali depuis des siècles, écrasent les coutumes et l'identité de ce peuple, en instaurant qui plus est un régime oppresseur et mafieux, dont les plus pauvres n'auraient tiré nul avantage et qui par ailleurs eût ensuite déstabilisé le Niger et la Mauritanie  ? Quand un Etat n'a plus aucun moyen d'autodéfense et devient la cible de simples pillards qui ne sont même pas une force politique endogène au pays (ou ne l'est que faiblement), les principes de la non ingérence n'ont plus de sens. N'oublions pas que les Vietnamiens tous marxistes qu'ils furent et en dépit des antécédents quasi-coloniaux qui les opposaient aux Cambodgiens n'ont pas hésité naguère à entrer militairement chez leurs voisins pour les débarrasser des Khmers rouges

 

Bien sûr il est regrettable que ce soit l'ex-puissance tutélaire française responsable du renversement de Modibo Keita, mais aussi, plus près de nous, du désastre libyen, de la folle alliance avec le Qatar et de la militarisation du Sahel qui, aujourd'hui, qui joue les pompiers (pour la simple raison qu'elle était la seule techniquement à même de le faire).

 

On peut le regretter, et l'on peut aussi souhaiter - et même l'on doit souhaiter et exiger - qu'elle se retire au plus vite dès que les villes maliennes seront libérées et dès qu'une force d'interposition africaine les aura sécurisées. On doit combattre résolument la sotte ambition du gouvernement français d'éradiquer  les foyers de guérillas dans les montagnes, qui est la véritable porte ouverte à une recolonisation sournoise du pays.

 

Mais pour ce qui concerne la séquence particulière qui va de la reconquête de Konna à celle de Kidal, s'enivrer de principes sans analyse précise des faits et des possibilités d'actions qui étaient ouvertes ou non aux peuples d'Afrique sahélienne conduit simplement à une intellectualisme stérile, qui condamne ses adeptes à l'impasse.


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Frédéric Delorca a dirigé divers sites anti-impérialistes sur Internet depuis 1998. Auteur de divers romans, essais et récits de voyages, il a coordonné aux Editions Le Temps des Cerises "Atlas alternatif : Le monde à l'heure de la globalisation impériale"

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Lisez ceux qui ne pensent pas comme vous

2 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Débats chez les "résistants"

Je le dis, et je le répète, à mes lecteurs, notamment les plus jeunes : lisez les médias qui ne pensent pas comme vous. C'est une bonne école de liberté et d'intelligence, car cela vous force aussi bien à vous rapprocher des faits qu'à améliorer la cohérence de vos grilles de lecture.

 

engrenage.jpgLisez par exemple cet article dans Haaretz où l'on apprend que le ministre des affaires étrangères turc en visite en Serbie a reproché au président syrien Assad de ne pas avoir répliqué militairement au bombardement israélien sur son territoire cette semaine. Les pro-palestiniens qui aiment le régime d'Assad vont avoir du mal à expliquer après ça que l'opposition armée syrienne aidée par le gouvernement turc fait le jeu d'Israël. Sauf à prouver que le ministre turc a tenu ce discours uniquement pour créer un rideau de fumée alors qu'il serait au fond de mèche avec Netanyahu (mais alors n'a-t-il pas pris un risque à l'égard de l'opinion publique israélienne ? D'autant plus qu'il l'a fait à l'occasion d'une visite dans un pays ami d'Israël, la Serbie... et à l'heure où l'OTAN, elle aussi amie d'Israël, arme la Turquie de missiles Patriots). Et les pro-palestiniens proches de l'opposition syrienne peineront à comprendre pourquoi Israël attaque un gouvernement (celui de la Syrie) que la Turquie accuse d'alliance secrète avec Tel-Aviv. Le propos sur la Syrie est-il simplement outrancier (car après tout, comment Damas peut-elle répliquer militairement quand elle doit affronter une guerre civile sur son territoire ?), et si oui, pourquoi oser une énormité au risque de se dicréditer, pourquoi celle-là, et pourquoi maintenant ? L'Orient devient décidément de plus en plus compliqué... et la Turquie en particulier...

 

Dans un ordre plus anecdotique mais toujours dans la rubrique des écrits des gens qui ne pensent pas comme nous, je trouve, sur un site dont je ne partage pas du tout les idées, une remarque amusante sur un de mes anciens éditeurs. Le petit problème que pointe l'article avait déjà nourri des discussions aigres dans la mouvance "anti-impérialiste" dans les années 2000. Il n'est d'ailleurs amusant qu'à moitié car, au fond, il pose la question très sérieuse des conditions de fonctionnement des petits éditeurs alternatifs, et de leur capacité d'articuler grands idéaux et "éthique de la responsabilité", pour parler comme Weber, une articulation à laquelle j'accorde personnellement beaucoup de prix, mais dont on connaît toute la difficulté.

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