Sarko is back, et nous que faisons nous ?
L'opposition parlementaire a haussé la voix, de M. Chevènement à M. Bianco, et obtenu... un temps de débat ridiculement court mardi prochain. M. Acoyer (je ne sais plus si son nom s'orthographie de la sorte) a ressorti le catéchisme bushiste pour justifier l'ardeur guerrière de son président - en Afghanistan il y a des talibans, des terroristes et de l'opium, les intérêts de la France y sont menacés. Il voulait dire, évidemment, les intérêts de la France comme succursale des Etats-Unis en Europe.
Les medias ont dissimulé le problème en braquant le projecteur sur le succès de Carla Bruni en Angleterre. Aucun d'entre ces nobles journalistes n'ira risquer sa peau en Afghanistan pour défendre les intérêts pétroliers étatsuniens. Il est donc tout à fait normal qu'ils aveuglent l'opinion publique avec de telles futilités et contribuent sereinement à l'engagement de la France dans les pires engrenages.
Et vous ? avez vous écrit à votre député à la veille du débat sur l'Afghanistan ? Les boîtes emails du Palais Bourbon sont ouvertes. Profitez en.
Tout cela pose la question inévitable : que faire ? Créer une fondation anti-impérialiste ? Un parti politique ? Une liste sans parti mais anti-système aux prochaines élections européennes ? Essayer de faire élire un député antisystème au Parlement comme l'ont fait les électeurs anglais de la circonscription qui a porté Galloway aux Communes ? Ce député aurait ensuite une tribune, des moyens financiers...
En attendant, certains opposants se perdent en initiatives inutiles, par exemple cette lettre au président du Conseil constitutionnel pour obtenir l'annulation de l'élection de Sarkozy : http://forums.france2.fr/france2/avousdejuger/nicolas-sarkozy-illegale-sujet_10102_1.htm. J'ignore qui a lancé cette pétition mais ils ont simplement oublié que le contrôle du Conseil s'exerce avant la proclamation des résultats, pas un an après... En outre l'argumentation de la pétition est si futile... On voudrait faire invalider l'élection d'un homme qui fut massivement élu par les Français sur le fait qu'il n'a pas décliné la totalité de son état civil !!! Ces braves internautes feraient mieux de tenter de guérir la bêtise de leurs concitoyens électeurs de l'UMP, dont Sarko n'est que l'épiphénomène... (que ces électeurs-là, s'ils se sentent de droite, votent plutôt pour Dupont-Aignan, le monde entier s'en portera mieux cf ci-dessous)
Cette pétition, comme les réactions à l'éviction du sous-préfet Guigue, montre que de nombreux opposants ne veulent pas comprendre la logique des institutions, mélangent tout, lâchent la proie pour l'ombre. Quand on leur dit qu'un souspréfet n'est pas, dans l'exercice de ses fonctions, soumis aux mêmes règles qu'un citoyen ordinaire, ou qu'une élection ne se conteste pas n'importe quand n'importe comment, ils ne veulent pas le croire. Parce que l'idée même qu'une règle puisse s'appliquer sérieusement, qu'un Etat ait une spécificité de fonctionnement par rapport à la société civile, leur est complètement étrangère. L'anti-étatisme qui travaille en profondeur l'internaute contestataire moyen le prive des instrument de réflexion et d'action qui donneraient une portée à ses actes. Les pouvoirs publics ont ensuite beau jeu de le renvoyer à la caricature du "radical " peu crédible et fantasque.
Ceci étant posé, encore une fois, il faut réfléchir au problème du "que faire ?". Selon moi, il faut partir de l'existant, analyser, dans le milieu de la contestation, les courants qui peuvent disposer de moyens humains et financiers, les groupes qui peuvent faire preuve d'efficacité, dans les partis politiques, les associations, en France, à l'étranger, voir ce qui peut être fédéré. Il faut éviter les pièges de toutes sortes : les soutiens des groupes d'extrême droite qui discréditent toute action politique, ceux d'autres personnes et groupes douteux (il en traîne toujours dans la résistance anti-impérialiste). Tout cela est compliqué à faire, mais nécessaire avant que notre monde ne bacule dans un chaos politique complet (il y est déjà largement engagé) avec la complicité active de l'establishment politique français.
A part cela, la revue Commune a bien voulu me demander récemment un article sur ce que je pensais de la notion de "socialisme" et de sa place dans le monde actuel. Je lui enverrai mon papier dès que possible, et ne manquerai pas de vous tenir au courant.
------------------------------------------------------------------
Modèle de mail à envoyer à votre député avant mardi prochain (aménageable à votre guise, bien sûr)
Monsieur le député,
L'actuel président de la République, aux ordres des néo-conservateurs étatsuniens, veut engager davantage la France dans la guerre d'Afghanistan dont de nombreux pays cherchent plutôt à s'extraire. En soutenant inconditionnellement la position étatsunienne sur la Palestine, le Kosovo, en proposant l'entrée de la France dans l'OTAN et en arrimant toujours plus la position française à "l'Occident" contre les intérêts du Tiers-Monde, M. Sarkozy éloigne la France des velléités de non-alignement qui avaient caractérisé certains aspects de sa diplomatie depuis le général de Gaulle. Cette évolution n'est pas profitable à l'équilibre à long terme de notre planète ; elle ne l'est pas non plus, même à court terme, aux intérêts de notre pays qui en retirera plus d'inconvénients que d'avantages.
Je vous demande donc d'user de tous les moyens que vous confère votre fonction d'élu du peuple pour vous opposer à cette dérive de la politique étrangère française. Vos électeurs ne se désintéressent pas tant des relations internationales que les médias veulent le faire croire. En leur nom, et au nom de l'intérêt général dont vous êtes le mandataire, il vous appartient d'agir, et de rendre compte de ce que vous aurez fait pour éviter que notre pays ne participe à la logique du pire.
D'avance je vous remercie.
Conseils de lecture - Rancière
Je peux, je l'espère, ici conseiller un petit livre, celui de Jacques Rancière, "La Haine de la démocratie", publié aux éditions La Fabrique en 2005, un livre qui se dévore, et un plaidoyer convaincant pour le tirage au sort et ce que la démocratie véritable peut avoir de subversif et de déstabilisant pour l'humain.
En revanche on pourra se dispenser de lire "Pourquoi Bourdieu" de Nathalie Heinich, même si son auteur cite quelque part le Cahier de l'Herne de Chomsky (vous savez ? celui que tout le monde a boycotté). Le livre synthétise seulement les griefs bien connus qui circulent contre Bourdieu dans les laboratoires de recherche en sociologie, avec, en prime, de déplorables dérapages sur les volets politique et épitémologique. Il semble que seules des dames ces derniers temps se laissent aller, depuis le décès du "grand maître", à écrire des livres sur leur amour déçu pour sa sociologie. Mme Heinrich avoue que son éditeur l'y a poussé. "Si si, très chère, écrivez sur votre passion déçue". Curieuse incitation, pour ne pas dire plus. Il faut enterrer toujours plus profond le cadavre du contestataire. France Culture aux avants-postes pour promouvoir le livre. Evidemment.
Eteignez vos postes de radio et de télévision, laissez ce genre de livre chez les libraires serviles qui les entassent sur leurs étals. Il y a bien mieux à faire.
A propos d'une danse ouzbèke
On sait par exemple combien il a conduit à mépriser certains arts. Que l'on songe par exemple à la hiérarchie des arts telle qu'elle figure dans L'Esthétique de Hegel et quel sort dérisoire elle réserve aux arts corporels.
Je vous livre ici des images prises à l'occasion de Navruz (le Nouvel An persan) et qui nous montre des danses ouzbèkes.
La vidéo n'est pas de bonne qualité, ses couleurs sont plus ternes que la réalité, et surtout, il est impossible de restituer les effets d'une danse sur un écran. Je la glisse cependant dans ce blog.
Un savoir académique empêche d'apprécier à sa juste valeur la danse que montre ses images, et par là même, je pense, la culture qui la porte : la culture ouzbèke. Car il se peut bien que la danse soit ce que la culture ouzbèke recèle en elle de meilleur (encore que je ne sousestime pas bien sûr toutes les productions littéraires qu'elle engendre par ailleurs). On sent à travers les gestes, les expressions qui ponctuent ces danses de Samarcande, non seulement les influences culturelles multiples de la Perse, de l'Inde, de la Chine, de la Russie, mais encore une perception de la vie, une manière de la mettre en scène, qui se nourrit de millénaires de cultures, une sensibilité travaillée par tant d'influences contradictoires, complémentaires, et qui font l'immense richesse de ce pays.
Voici donc ces quelques images, très en deçà hélas, comme toujours, de ce qui se donne dans l'instant du déploiement en trois dimensions.
Sur le Tibet : à propos de la violence des sécessionistes
La sociologie du lobbying politique peut trouver dans l'affaire tibétaine en ce moment un sujet d'analyse intéressant car on voit se mettre en branle divers lobbies droit-de-l'hommistes, ou pro-Dalai-Lama (certains sans doute liés aux Etats-Unis du reste) qui font pression sur un gouvernement français que les intérêts économiques poussaient plutôt dans le sens de la Realpolitik.
La courroie de transmission du message droit-de-l'hommiste passe par des voies un peu étrange : M. Moscovici, Mme Rama Yade, M. Juppé. Elle finit par atteindre les hautes sphères puisque même M. Kouchner commence à hausser le ton contre la Chine.
Dans une interview à un journal régional, une universitaire expose que celui qui contrôle le Tibet "contrôle l'Asie" à cause des ressources en uranium, et du potentiel hydraulique du pays. Le propos est sans doute excessif.
Je n'accorde pas un crédit infini aux autorités chinoises, mais je ne fais pas non plus confiance aux lobbies pro-dalai-lama dans cette affaire. Et comme on entend touours beaucoup plus les seconds que les premières, je reproduis ici un article du Quotidien du Peuple en anglais, qui insiste sur la violence des sécessionnistes tibétains. Cette violence promue paradoxalement par des autorités bouddhistes (mais on se souvient avec quelle ironie des auteurs asiatiques comme Mishima ont traité les monastrères bouddhistes) rappelle celle des moines insurgés en Birmanie l'an dernier.
Je joins aussi un extrait du courrier des lecteurs du Figaro (septembre 2000, l'auteur de la lettre n'est pas cité dans le courrier qu'on m'a transmis) et livre cela à votre sagacité.
F.
--------------------------------------------------------------
Documentary: Accusation of the victims of 3.14 Lhasa riots |
+ | - | 10:04, March 24, 2008 |
|
Le Figaro du 22 septembre 2000
LE MYTHE ET LA REALITE A PROPOS DU TIBET
(courrier des lecteurs 2000)
Clémentine A., Robert M., Bruno G.
Tout d'abord je découvre qu'un lecteur qui a cliqué sur mon blog hier avait tapé sur Google "clémentine autain nue". C'est cette recherche qui l'a conduit à mes rivages. Je dois m'excuser auprès de lui. Cher ami, Google vous a induit en erreur. Il n'y a pas de photo de Mme Autain nue sur mon blog. J'en suis désolé pour vous et sans doute pour beaucoup d'autres lecteurs. Mais j'aurais envie d'en savoir plus : pourquoi diable voulez vous voir cette Walkyrie du mouvement féministe nue ? Je crois bien deviner : le goût du paradoxe. Vous songez peut-être que cette dame qui met en avant dans sa biographie le fait qu'elle a été violée, cultive quelque part une forme d'ambiguité qui l'aurait par ailleurs poussée à exposer ses charmes pour des photos coquines. Mais vous poussez trop loin la subtilité. A mon avis cette personne est faite d'une pièce comme on dit, et elle ne fera jamais le contraire de ce qu'elle dit sur un tel sujet.
Autre nouvelle amusante, le secrétaire général de l'officine mainstream Reporters sans frontière Robert Ménard est inculpé par la justice grecque pour offense au symbole olympique. Il a déclaré à propos des douze mois de prison que lui et ses compagnons pourraient encourir : "on ne les fera pas, évidemment"... "évidemment"...
Un ami hier me communiquait des statistiques de consultation d'un petit blog français sans envergure. Le gouvernement états-unien figurait parmi ses lecteurs réguliers. "Big Brother is watching you". Je ne puis effectuer la vérification sur mes blogs : les origines des adresses IP ne sont pas recensées.
Je reçois beaucoup de mails sur ce sous-préfet limogé pour propos anti-sionistes (il a été placé sur un poste d'administrateur civil au ministère de l'intérieur). Il y a un peu trop d'excitation dans cette affaire, car chacun sait que le devoir de réserve est strict pour de nombreux hauts fonctionnaires, spécialement un sous-préfet qui, par délégation du préfet peut avoir à autoriser ou interdire des associations, superviser des élections, prendre diverses mesures relatives à l'ordre public. Il n'est pas bon qu'un tel rouage de l'Etat fasse connaître en public, sous son vrai nom, ses opinions privées sur les grands sujets de notre temps.Lui-même connaissait ces règles du reste. Quand on sait comment fonctionne le ministère de l'intérieur, il est même étrange qu'il les ait oubliées. Il est sans doute vrai que des opinions plus conformes à l'orientation diplomatique de notre gouvernement lui eussent valu une suspension de fonctions moins rapide. Mais il est bon dans l'absolu qu'un grand commis de l'Etat ne puisse pas en son nom propre. Cela ressemble fort à une tempête dans un verre d'eau. Mais le mécontentement des antisionistes reflète une exaspération plus générale, et légitime, devant la censure implicite qui pèse sur eux dans notre pays. Il est vrai que l'atmosphèredes années 2000 est de plus en plus lourde. Je découvre d'ailleurs à l'occasion de cette nouvelle l'existence d'un Bureau national de vigilance contre l'antisémitisme (BNVA) qui parait constitué sur le modèle du Bureau de vérification de la publicité (c'est à dire une fédération d'organes privés qui peut éventuellement être investie de missions publiques). Ledit bureau dans ses déclarations aux agences de presse ne semble pas hésiter à confondre l'antisionisme et l'antisémitisme, ce qui est un procédé habile et courant de nos jours pour criminaliser par assimilation à l'incitation à la haine raciale ce qui, au départ, est une position politique d'opposition un projet politique - celui du mouvement sioniste (à mon avis l'antisionisme, s'il est parfois antisémite, peut aussi bien être philosémite et judéophile, car on peut tout à fait soutenir que le meilleur service à rendre à la culture juive pour sa survie et sa gloire dans l'humanité de demain est de la dissocier du projet sioniste israélien). Cette institution récente constitue un sujet intéressant pour les sociologues indépendants et courageux qui, je n'en doute pas, dans nos chères universités s'empareront prochainement du sujet comme certains de leurs homologues le firent de l'AIPIAC aux Etats-Unis. L'organigramme de ce Bureau disponible sur son site fait apparaître la présence de professionnels de la sécurité à sa tête, ce qui, je suppose, se justifie par sa vocation à secourir les victimes. Son intervention contre le sous-préfet Guigue est assez insolite car on ne voit guère ce qu'il y eut d'antisémite dans son propos, ni quelles "victimes" il a pu faire en France en manifestant une sympathie pour les victimes palestiniennes. Mais nous savons désormais que les choses se passent ainsi de nos jours. Le climat de notre République n'est plus très bon. Comme dirait un ami, on attend avec impatience que soient restaurés dans leur pleine dimension les mots "liberté, égalité, fraternité".
Afghanistan
M. Jack Lang, qui est un atlantiste notoire, et qui aspirait il y a peu à travailler avec M. Sarkozy, a eu l'excellente idée aujourd'hui, il faut le reconnaître, de demander que le Parlement soit consulté à propos du projet présidentiel d'envoyer 1000 soldats français supplémentaires en Afghanistan.
On laisse entendre que notre pays s'apprêterait à envoyer 1.000 militaires supplémentaires en Afghanistan" alors que "les opérations de l'OTAN dans ce pays sont un demi échec", écrit Jack Lang au Premier ministre aujourd'hui.
"On pourrait, à raison, s'interroger sur l'efficacité et la légitimité de renforts militaires français supplémentaires au moment même où d'autres pays tels l'Allemagne ou la Turquie entreprennent de se désengager", estime-t-il. "La représentation nationale devrait pouvoir être consultée au cours des prochains jours sur l'Afghanistan" (source AP).
Il faut rappeler que l'emploi de soldats français dans le bombardement de la République fédérale de Yougoslavie en 1999, ou encore de nos troupes dans le cadre d'une force multinationale au Liban l'an dernier n'ont fait l'objet d'aucune approbation par le Parlement français. Il est donc louable que l'ancien ministre de la Culture se préoccupe du rôle de la Représentation nationale dans l'envoi de troupes au service de l'impérialisme américain. Nos citoyens devraient à cette occasion écrire à leurs députer pour les inciter à agir contre l'envoi de nos troupes.
Actualité de la semaine : Kosovo, Transnistrie, Zimbabwe, communautarisme
Les statistiques de fréquentation de ce blog étant en chute libre, je puis plus librement commenter l'actualité de la semaine passée, sans l'angoisse du "bon sujet" et de la "bonne manière" de le traiter.
Un ancien fonctionnaire du Département de la défense états-unien John Zavales a déclaré le 18 novembre qu'au total le nombre de pays qui reconnaissent le Kosovo ne devrait pas dépasser les 50 à l'AG des Nations unies, c'est à dire moins d'un tiers des pays de la planète (http://www.kosovo.net/news/archive/ticker/2004/November_18/8.html). Une défaite pour les Etats-Unis selon lui. Cela ne semble pas inciter Washington au compromis, puisque les Etats-Unis se sont prononcés à nouveau hier contre une partition du Kosovo (http://www.b92.net/eng/news/politics-article.php?yyyy=2008&mm=03&dd=23&nav_id=48716). Ils ont par ailleurs annoncé qu'ils armeraient leurs protégés albanokosovars.
Les Etats-Unis bénéficient toujours d'une sorte de passivité et de faiblesse des peuples susceptibles de s'opposer à leur arrogance. Voyez par exemple le caractère très modéré de la réaction de la Serbie à la déclaration d'indépendance de Pristina, mais aussi des Serbes des autres pays : en Bosnie par exemple, on aurait pu s'attendre à une sécession unilatérale de la Republika Srpska. Il semble plutôt que les autorités de cette entité s'évertuent à modérer les élans de leur base. Personne n'a envie d'en découdre.
Grande modération des Russes aussi. D'une manière générale les Russes et les Chinois sont extraordinairement conciliants avec les USA et leurs alliés sur tous les sujets qui fâchent : voyez avec quelle amabilité ils ont voté les résolutions validant l'invasion éthiopienne de la Somalie l'an dernier, ou l'intervention française eu Tchad au début de cette année. Moscou serait même prêt à accepter d'envoyer des troupes en afghanistan aux côtés des Etats-Unis en échange d'un petit accord avec Washington sur le radar anti-missiles (http://fr.rian.ru/world/20080318/101590531.html).
On s'attendait à une reconnaissance unilatérale de l'Abkhazie, de l'Ossétie du Sud et de la Transnistrie par Moscou en représaille contre la reconnaissance du régime de Pristina. On a eu droit à une simple "levée" de quelques sanctions contre l'Abkhazie, et quelques déclarations de solidarité. Même la Douma qui aurait pu être plus radicale que le Kremlin (puisqu'elle n'a pas de pouvoir effectif en politique étrangère) aurait pu voter un texte offensif. Or sa résolution sur les entités autoproclamées est "mi-chèvre mi-chou", voulant, disait un responsable ne pas "gèner" la diplomatie de Medvedev. Du coup, la pilule est amère pour Tiraspol. Le président Smirnov et son ministre des affaires étrangères font leur mea culpa dans le Tiraspol Times cette semaine et se reprochent de n'avoir point suffisamment misé sur d'autres pays que la Russie (http://www.tiraspoltimes.com/news/igor_smirnov_we_have_not_worked_enough_with_other_countries.html_0, et http://www.tiraspoltimes.com/news/pmr_parliament_to_take_foreign_minister_to_task_for_failings.html).
La vérité est que depuis que Moscou s'est réconcilié avec Chisinau, le meilleur allié de la Transnistrie devient ... la Maison Blanche !!! On l'avait vu avec la visite de l'ambassdeur états-unien à Tiraspol l'été dernier. Aujourd'hui on apprend qu'un rapport Cheney prône une solution à deux Etats en Moldavie (http://www.tiraspoltimes.com/node/1663). Dans ce cas les USA feront rebelotte en reconnaissant la Transnistrie, nouveau Kosovo dans le pied de la Modalvie, aux portes de l'Ukraine...
Que vous dire encore ? Ah oui : le Monde continue de s'exciter contre le Zimbabwe de Mugabe. Voyez la collection de photos qu'il publie aujourd'hui dans un des ses blogs associés (Le Monde2). Le 10 mars, il s'énervait contre la Loi d'indigénisation et d'habilitation économique qui donnait le pouvoir aux Noirs dans diverses entreprises. Beaucoup de gens épris d'universalisme en France n'ont pas de sympathie pour Mugabe parce qu'ils trouvent sa démarche communautariste, voire raciste. Le même grief est d'ailleurs parfois adressé à Chavez, qui a de la sympathie pour Mugabe, et qui lui aussi a beaucoup mis en avant la question des couleurs de peau dans le débat politique. Cette thématique pose la question compliquée du communautarisme.
Il est bien évident que toute démarche de gauche doit être universaliste. Reste que le communautarisme est en ce moment perçu comme le seul bouclier des faibles lorsque les forts ont refusé de prendre en compte leurs problématiques. J'ai vu cela chez les régionalistes naguère, aujourd'hui chez les Serbes, chez les Musulmans, chez les Noirs. "Regroupons nous sur des critères de langue, de religion, de couleur de peau, disent-ils, puisque c'est en fonction de ces critères que les dominants nous excluent et nient notre histoire".
Le communautarisme est une plaie pour la définition d'un avenir commun de l'humanité. C'est à cause de lui notamment que beaucoup de militants d'origine musulmane bornés refusent de voir l'injustice faite aux Serbes dans les Balkans, ou qu'à l'inverse beaucoup de Serbes éprouvent une sympathie indue pour le régime israélien par exemple.
Mais le communautarisme est une réalité avec laquelle il faut composer, faute de mieux. Et il faut reconnaître qu'il produit des effets non négligeables en termes de correction des injustices. En Afrique australe, entre les mains de Mugabe, qui reste aussi populaire voire plus que Mandela, il permet de tenir tête à des grands bourgeois néocolonialistes anglais (la plupart d'ailleurs affiliés au Parti travailliste), et de sauver un peu d'honneur dans cette région dévastée par la misère. Même si cet honneur se paye de difficultés économiques comme se plait à le souligner la grande presse européenne, et même si le régime zimbabwéen a beaucoup de défauts (quel gouvernment n'en a-t-il pas surtout dans des conditions aussi difficiles ?) je crois bien que le jeu en vaut la chandelle. La dignité est une denrée rare de nos jours.
Spéculations post-électorales
Comme on pouvait s'y attendre, les spéculations vont bon train après les élections municipales.
Les classes moyennes, qui font et défont les gouvernements dans ce pays, après s'être portées sur la droite, corrigent le tir et soutiennent le centre-gauche. Le président de la République, toujours autiste, feint de croire que la défaite de son camp est due à la trop grande lenteur de ses réformes, et veut surenchérir dans le bougisme (la seule chose qu'il sache faire de toute façon).
Les opposants spéculent. Pour certains, le cynisme de PS de Seine-Saint-Denis et des Verts (qui ont pris deux municipalités au PC avec les voix des électeurs de droite) pourrait accélérer la création d'un grand parti de la gauche alternative à l'allemande, auquel se rallierait l'aile gauche du PS - et ce d'autant plus facilement que l'extrême-gauche a fait de bons scores. On peut en douter cependant. La LCR n'est pas le genre d'associé fiable, comme cela s'est vérifié au cours des trois dernières années, et, au sein du PS, la marginalisation de Ségolène Royal (partisane d'alliances infructeuses avec le Modem), au profit de nouveaux chouchoux des médias (et du suffrage universel) comme Delanoe et Aubry (des gens moins ouverts aux centristes), pourrait regauchiser (au moins sur un plan rhétorique) le parti, et soulager les frustrations de la tendance Mélenchon. Donc la perspective du "Die Linke" français reste assez improbable (et quand on songe aux déconvenues du "Die Linke" espagnol, Izquierda unida, on comprend aussi pourquoi).
A droite, les esprits sensibles aux enjeux géopolitiques espèrent que les élus de l'UMP effrayés par la "vague rose" vont miser sur un Dominique de Villepin ce qui permettrait du même coup de modérer l'atlantisme forcené des autorités françaises - voir l'article http://www.alterinfo.net/COMMENT-FAIRE-TOMBER-SARKOZY-_a17853.html. Mais là aussi la prudence s'impose, d'une part parce que la politique étrangère pèse toujours fort peu sur le équilibres intérieurs français, d'autre part parce que Villepin est loin d'en avoir fini avec ses démêlées judiciaires. En outre, il se peut que Sarkozy garde Juppé dans sa manche pour reconquérir le contrôle et la confiance de sa majorité.
On ne voit donc pas encore très bien d'où les changements pourraient provenir.