Rêve nordique
Hier, sur une chaîne parlementaire, le patron du Monde interviewait un sociologue "made in sciences po" à propos de la révolte des jeunes grecs. Le "spécialiste" vantait le "modèle des pays nordiques" où le taux de chômage des jeunes est plus faible que sous nos latitudes. La Scandinavie, peu peuplée, et à maints égards bien peu comparable aux pays du bassin méditerranéen, fut toujours citée en exemple par nos élites : aux grandes heures de la socialdémocratie comme, dans les années 1990, quand elle a opté pour le libéralisme. Il n'y a guère que lorsque certaines de ses nations comme la Norvège disent "non" à l'Union européenne qu'elle ne nous intéresse plus.
Pourtant il est aussi des caractéristiques peu connues des pays du grand froid. Il y a peu, le journaliste norvégien Espen Løkeland-Stai, me disait que le quotidien Klassekampen ("Lutte des classes") auquel il collabore, quotidien de gauche, antiimpérialiste, touchait 90 000 lecteurs - ce que confirme une article sur http://homefront.homestead.com/Norway.html. Rapportons cela à la population du pays (4,5 millions d'habitants). C'est comme si le quotidien L'Humanité en France touchait 1 million de lecteurs ! En Norvège aussi un éditeur radical (équivalent du Temps des Cerises) a les moyens de payer des missions à l'autre bout du monde à ses auteurs. Quel éditeur alternatif peut-il se permettre cela en France ?
Or c'est bien de cela dont nous aurions besoin ici. En réponse au commentaire argumenté sur ce blog de M. Cheikh Kassé à propos du Zimbabwe (http://delorca.over-blog.com/article-25952493-6.html#anchorComment), je faisais remarquer qu'il faudrait qu'un organe anti-impérialiste indépendant puisse envoyer un journaliste en mission à Harare pour savoir exactement ce qui se passe au Zimbabwe, quelle proportion des propriétaires bénéficiaires de la réforme agraire sont effectivement des gens sans scrupule, quel niveau de corruption exact caractérise le gouvernement de Robert Mugabe et quelle part de la faillite du pays est imputable à l'embargo. Voilà sans doute ce que les Norvégiens peuvent s'offrir. Et pas les Français...
Entre deux fêtes
Mais bon : inutile d'écrire davantage sur ce sujet. Les lecteurs de ce blog et de l'Atlas alternatif savent ce que j'en pense.
L'année 2009 approche. Je crois que je serai un peu moins "militant" l'année prochaine, et un peu plus "écrivain", précisément pour les raisons que je viens d'énoncer : je n'ai plus grand chose à exprimer sur le plan politique qui ne soit déjà connu. Tout est dans l'Atlas alternatif et dans le "10 ans sur la planète résistante". Il va me falloir quelques années pour essayer de construire une vision politique et philosophique globale. C'est la meilleure chose qu'il me reste désormais à faire. Et cela ne se fait pas sur un blog. Il faut l'espace d'un livre complet.
Dans l'intervalle, j'aurai publié mon petit roman, "La révolution des montagnes", qui sortira en janvier. En guise de friandise. Je vais réfléchir à sa diffusion. Je lisais ce matin l'impressionnante revue de presse dont la journaliste Agnès Giard (une ancienne de Libé) se prévaut sur son blog à propos de son dictionnaire sur l'érotisme japonais - cf http://agnesgiard.over-blog.com/article-25579825.html. En quelques semaines elle mobilise les principaux médias. Quelle puissance de feu ! Comparez cela avec le long cheminement des outsiders qui n'obtiennent que deux ou trois recensions sur des blogs en plusieurs années... La grande inégalité d'accès au droit de faire connaître ses productions... Une affaire bien connue, et bien préoccupante...
Revue de presse
Autre nouvelle en lien avec la guerre géorgienne : Saakachvili aurait lancé son téléphone à la figure de son premier ministre Grigol Mgaloblishvili - source le journal géorgien Alia (http://en.rian.ru/world/20081225/119170881.html). La présidence géorgienne dément, mais le site vénézuélien Aporrea reprend l'info, trop content de pouvoir prouver une fois de plus la démence du président géorgien. Aporrea annonce aussi que la monnaie chinoise pourrait devenir une monnaie de réserve internationale. La Russie, la Mongolie, le Myanmar et le Vietnam ont déjà signé des accords dans ce sens (http://english.people.com.cn/90001/90776/90884/6562117.html)/ Par ailleurs la Russie a livré des batteries anti-aériennes Pechora 2-M au Venezuela. L'Egypte, la Syrie, la Libye, la Birmanie, le Vietnam, et le Turkmenistan sont aussi parmi les clients des livraisons de Pechora 2-M (http://www.aporrea.org/actualidad/n126100.html).
Le 21 décembre on apprenait que l'Iran recevra des systèmes antiaériens russes S-300 prochainement (source l'agence de presse officielle iranienne IRNA http://www.french.xinhuanet.com/french/2008-12/22/content_783950.htm), qui permettraient de sécuriser les installations nucléaires de ce pays, ce qui a suscité les protestations de l'émissaire du ministre israélien de la Défense Amos Gilad, lors de sa visite à Moscou. Le 23, sans doute après des tractations en coulisse entre Israël et la Russie, le ministre iranien démentait la livraison des S-300 (http://news.xinhuanet.com/english/2008-12/23/content_10544758.htm). L'Iran devra donc se contenter des Tor-M1. La Russie avait aussi fait marche arrière le 20 novembre dernier sur la question de la vente de missiles Iskander SS-26 Stone à la Syrie, aux Emirats arabes unis et à l'Inde après un voyage éclair d'Ehud Olmert à Moscou en octobre pour contrecarrer le projet de contrat russo-syrien intitalement destiné à équiper les bases russes sur la côte syrienne (http://www.jpost.com/servlet/Satellite?pagename=JPost%2FJPArticle%2FShowFull&cid=1226404792967).
Notez cette remarque amusante dans le Christian news from Jerusalem :
"While some Israeli leaders, including president Shimon Peres, predicted that falling oil prices would inhibit the two radical allies’ arms shopping plans, our military sources note this paradox: Iran has scarcely been affected by the international financial crisis because international sanctions have long isolated its financial system from international banking and taught the Islamic republic to live with an economy on the ropes" (http://www.thejerusalemgiftshop.com/israelnews/conflict/82-conflict/324-russian-missiles-for-syria-may-be-payback-for-us-fbx-t-radar-to-israel-.html)
Chomsky et Cie
Aminata Traore à propos de Mugabe
" L'économie zimbabwéenne était florissante et Robert Mugabé fréquentable tant que la minorité de fermiers blancs d'origine britannique pouvaient faire travailler des centaines de milliers d'ouvriers agricoles noirs sur les millions d'hectares de terres agricoles qui étaient en leur possession. Le héros de l'indépendance, est devenu l'homme à abattre à partir du moment où face au refus de Tony Blair de respecter les termes de l'accord de Lancaster House, il a dû récupérer les terres des fermiers blancs. Tout a depuis lors été dit à propos de la
redistribution de ces terres qui n'aurait profité qu'aux proches de Robert Mugabé. La réalité est toute autre. Des milliers de familles sans terre jouissent aujourd'hui de leur droit à ce moyen de production. L'irrigation, les fertilisants, les prêts et la mécanisation sont autant d'efforts fournis dans le cadre de cette réforme agraire,avec les maigres moyens de l'Etat la priorité étant la couverture des besoins nationaux par l'agriculture nationale.
L'Europe, l'Amérique du Nord, l'Australie, la Nouvelle Zélande ont réagi dès la première procédure de retrait des terres, en 1997. Le dollar zimbabwéen a commencé à chuter et les sanctions économiques à pleuvoir : privation du pays de toute aide extérieure, de crédit, d'assistance de la part des institutions financières internationales et l'interdiction d'échanges commerciaux avec les entreprises américaines. Le pays de Robert Mugabé n'a bénéficié d'aucune aide en matière de balance des paiements depuis 1994 alors que jamais auparavant, il
n'avait été privé d'apports extérieurs. Il a fallu, faute de prêts assortis de conditions favorables procéder à des émissions monétaires.
L'ingérence et la subversion à la base consistent dans ces circonstances à créer la pénurie en privant l'Etat souverain de moyens et à soutenir des ONG et des opposants politiques qui s'attirent la sympathie des populations auprès desquelles ils interviennent.
Les conséquences de l'embargo et des sanctions économiques ont été aggravés par des sécheresses autrefois cycliques (à peu près tous les dix ans) mais désormais fréquentes du fait des perturbations climatiques."
La suite est sur http://www.letemps.sn/index.php?option=com_content&view=article&id=512:robert-mugabe-&catid=36:contribution&Itemid=62
Le lanceur de chaussures
Voici la photo de l'homme qui a lancé ses chaussures à Bush, Mountazer al-Zaïdi, un des visages de la résistance irakienne. Image de celui qui n'a plus que s'est godasses pour crier sa haine contre l'arrogance des puissants, imbéciles, qui ont détruit son pays. Ce journaliste, qui a déjà été tabassé par la sécurité irakienne après son geste, encourt aujourd'hui 7 ans de prison. Maxime Vivas (http://bellaciao.org/fr/spip.php?article76343) écrit à l'officine pro-américaine Reporter sans frontière pour lui demander de défendre cet homme (comme jadis on demandait en vain à Reporter sans frontière de réagir à la mort des journalistes de la TV serbe tués par les bombes de l'OTAN). Vous pouvez jouer au jeu (mo score perso : 13) "Sock and awe" (http://www.sockandawe.com/) où les scores sont répertoriés par pays (Aporrea se réjouissait hier que le Venezuela soit 25 ème). Une pétition de soutien au journaliste circule sur http://www.ipetitions.com/petition/iwffomuntatharalzaidi/?e. Aux grands hommes l'humanité reconnaissante.
Notez que les services américains se sont appliqués à détruire les chaussures, sachant qu'elles étaient désormais devenues un symbole - comme ils avaient fait exploser la tombe de Michel Aflak, père du baasisme et figure respectée du nationalisme arabe - après avoir envahi l'Irak. L'image restera néanmoins : Bush sort de l'histoire et quitte la scène internationale sous le jet des chaussures d'un Irakien dont c'est la dernière arme.
Paris by night
A la fin du repas, une jeune femme un peu "outspoken" qui dînait avec une sienne amie à une table voisine, a tenu à nous faire la bise à tous les quatre en disant que nous étions de fort beaux hommes et qu'elle avait été impressionnée de nous entendre si bien parler à cette table. Nous ignorions que nos conversations produisaient cet effet. Nous remplaçons peut-être avantageusement les télévisions ou les radios. Nous devrions nous reconvertir là dedans : l'animation des restaurants. Un nouveau job à créer de toute pièce. En tout cas, pour une fois que nos échanges de vues ne nous attirent pas des insultes, l'anecdote méritait d'être relevée.