Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Frédéric Delorca

"Sous les bombes"

8 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Souvenirs d'enfance et de jeunesse

Arte rediffusait ce soir "Sous les bombes", film franco-libanais de 2008. Certains passages me rappelaient mon histoire serbe de 1999-2000, que j'ai relatée dans "Eloge de la liberté". Il y a des moments dans la vie qui transcendent tout. Celui-là a cassé ma vie en deux. La force de ce moment-là ne tenait pas à toute cette comédie que nous menions autour d'Internet, des salons de Régis Debray, des bières bues avec Jean Bricmont. Bien évidemment non. Ca ce n'était que l'écume des choses, comme n'est qu'écume aujourd'hui tout ce blabla actuel entre intellos autour des guerres de Syrie, du Mali, de la crise de l'euro etc. La vérité était dans le vécu, dans toit ce désarroi des gens au milieu de la quasi-dictature, de la guerre, des mensonges, du chaos social. Dans les points de fuite qui avient pour noms pour moi Belgrade, Budapest et Düsseldorf. Ces fuites qui en vérité ramenaient toujours à l'essentiel.

 

p1000118.jpgOn ne sait jamais vraiment pourquoi les moments de transcendance transcendent tout. D'une certaine façon, on ne veut pas le savoir, et l'on ne veut même pas se souvenir d'eux. On sait qu'il y avait une vérité très forte en eux, une vérité dont on n'a entrevu que des lambeaux, et dont on n'a pas su restituer la densité dans l'écriture (Colette Lambrichs de La Différence tu me le reprochas si violemment), mais tant pis. Cela a été, on le sait. Peu importe pourquoi et comment.

 

Dans cette histoire de femme qui, à l'arrière d'un taxi, part en quête de son fils dans le Sud-Liban détruit de 2006, je retrouve ma Serbie de 1999. Peut-être juste à cause de la guerre et du chaos. De ce que ces derniers mettaient dans nos coeurs, dans nos têtes à l'époque, là-bas, loin de tout, sous l'embargo, sur les bords de la Sava...

Les guerres révèlent l'humanité sous un certain angle, non seulement l'humanité mais le monde, et les mondes possibles. C'est impossible à faire comprendre aux gens accaparés par la routine d'un pays en paix.

Lire la suite

Pétition des descendants de républicains espagnols, Corcuff, mort de Chokri Belaïd, actu perso

7 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

Bon, on se promène un peu dans l'actualité ? Quelques petits sujets au hasard.

 

republica-espanola

Tenez par exemple cette pétition née dans le Tarn-et-Garonne pour répliquer à des propos idiots de M. Harlem Désir, secrétaire national du PS, sur la France "terre d'accueil" des Républicains espagnols en exil. En tant que petit fils de républicain, j'approuve à 300 % bien sûr.

 

Un sujet encore plus petit : le départ de Corcuff du NPA. Ce parti lui avait offert une revue (comme le PCF avait offert "Regards" à Autain), les gens qui ont connu les journaux "PLPL" et "Le Plan B" se souviennent de leurs comptes-rendus amusés des analyses très superficielles de Corcuff et de ses reniements périodiques. L'homme poursuit sa route vers d'autres horizons, mais, comme Onfray, sans que cela n'intéresse plus grand monde.

 

Plus grande histoire : L'UGTT appelle à la grève générale demain en Tunisie pour les funérailles de Chokri Belaïd, secrétaire général du Parti des Patriotes démocrates unifiés et leader du Front de Gauche, de tendance marxiste et panarabe, qui avait refusé la formation d'un gouvernement de "technocrates", assassiné par balles hier. Il y a cinq jours Chokri Belaid, avait accusé des éléments appartenant à la mouvance salafiste et des nahdhaouis d’avoir attaqué la réunion de son parti au Kef. Le choc entre laïques et islamistes devient de plus en plus frontal dans tous les pays arabes.

 

Bon, je vous parle un peu de mon "actu" personnelle ? La revue jésuite Etudes vient de refuser de publier une petite main tendue que j'avais adressée aux catholiques sur la base d'un texte de Pasolini. Cela ne m'étonne guère. Je publierai peut-être ici ce texte à l'occasion, c'est philosophique à souhait.pasolini.jpg

 

Le responsable d'une collection sociologique chez L'Harmattan me renvoie un de mes manuscrits : "Pas assez sociologique". Je lui écris : "Mais ce n'était qu'un petit compte-rendu d'expérience personnelle, il y a bien des collections consacrées aux témoignages chez vous non ?" Réponse : "Ah oui, mais vous auriez dû l'indiquer sur l'enveloppe". Je découvre que j'ai perdu 2 occasions de publication en 12 mois parce que je n'ai pas spécifié une collection-cible sur mes enveloppes, et que les manuscrits ne sont pas transmis en interne d'une collection à l'autre. C'est rageant. On perd une énergie folle avec ces bêtises bureaucratiques. Vous allez me dire que l'enjeu est faible puisque les livres publiés chez l'Harmattan restent confidentiels. Mais il est vital pour moi, à 42 ans,de placer tous mes écrits avec un numéro ISBN, et qu'une ou deux biblis universitaires ou autres les achètent. Je n'aurai pas ça avec Edilivres.

Lire la suite

A propos d'une attaque contre Samir Amin sur le Mali

7 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

Juste un billet rapide que j'ai envoyé à la revue Utopie critique qui demandait  des textes sur le Mali - mais ils ne l'ont pas publié car visiblement ils espéraient sans doute plutôt des textes allant contre la position de Samir Amin et ne souhaitaient pas instaurer un débat pluraliste. Allant dans le sens de BD et JPP il y a aussi ça. Je me rends compte que l'attaque de BD et JPP contre Samir Amin est relayée par moins de cinq sites sur la toile. J'aurais donc pu éviter d'écrire cette petite synthèse contre un billet qui n'aura aucun impact, mais bon elle m'a au moins permis de résumer mes écrits des deux dernières semaines sur le Mali.

 

------------------------------------------------------------------- 

Raptor.jpgDans une tribune presque exclusivement consacrée à contester la position de Samir Amin, l'historien BD et le syndicaliste JPP se posent en gardiens du temple de l'anti-impérialisme face à tous ceux qui soutiennent l'intervention militaire française au Mali, immédiatement suspectés d'opportunisme et de trahison. Leur conclusion en dit long sur la hauteur de leurs prétentions : "À l'apparence que semble procurer à certains la recherche de succès politiques ou médiatiques éphémères, nous préférons pour notre part la défense de principes.".

 

Mais comme toujours les docteurs de la loi avec leur fantasme de pureté ne font que révéler par leur intégrisme dogmatique une forme d'auto-enfermement psychologique qui les coupe du réel et voue leur position à la dérive groupusculaire.

 

Bien sûr au Mali comme ailleurs en Afrique l'impérialisme est à l'arrière plan dans les rapports politiques et culturels au quotidien. Dans les rapports économiques aussi, et principalement. Ce que l'on dit des vues de nos multinationales sur le sous-sol sahélien est vrai.

 

Mais dans la séquence qui va précisément du 10 janvier à aujourd'hui l'ingérence française va plutôt à contresens des intérêts capitalistes qui, dans l'Hexagone, misaient plutôt sur la restriction des moyens bugétaires de l'Etat français (et des effectifs de son armée) et sur le développement d'un "soft power".  Il y a fort à parier que par exemple Total qui a le Qatar parmi ses actionnaires aurait préservé ses intérêts sous le joug d'Ansar Dine comme sous tout autre régime.

 

Pour prouver qu'il ne s'est agi que d'une manoeuvre impérialiste il faudrait démontrer qu'il n'y a pas eu d'attaque islamiste contre le Sud du Mali ni d'invasion de Konna, ou que cette attaque ne présentait aucun danger ou qu'elle a été provoquée par les Occidentaux (comme Racak prétexte à la guerre du Kosovo ou les armes de destruction massive de Saddam Hussein prétexte à celle d'Irak étaient des montages). Force est de constater qu'aucun journaliste n'a avancé une de ces trois hypothèses, pas même le spécialiste des "médiamensonges" Michel Collon.

 

Aux donneurs de leçon il faut demander : quelle option réaliste s'offrait aux peuples à ce point précis de l'histoire ? la résistance populaire des Maliens face à l'ingérence d'AQMI, du Mujao et d'Ansar Eddine n'était pas une option crédible car les Maliens n'avaient pas d'armes. Pas plus qu'en Somalie ou en Afghanistan. elle ne pouvait aboutir. Et ni la CEDEAO, ni l'Union africaine, ni l'Algérie n'étaient désireuses de s'interposer, et en tout cas elles n'avaient pas les moyens militaires de le faire en temps utiles. Fallait-il se résigner, au nom de la pureté des principes de la non-ingérence, à ce qu'une bande de 4 000 fanatiques brisent définitivement la tradition musulmane éclectique et libérale qui caractérise le Mali depuis des siècles, écrasent les coutumes et l'identité de ce peuple, en instaurant qui plus est un régime oppresseur et mafieux, dont les plus pauvres n'auraient tiré nul avantage et qui par ailleurs eût ensuite déstabilisé le Niger et la Mauritanie  ? Quand un Etat n'a plus aucun moyen d'autodéfense et devient la cible de simples pillards qui ne sont même pas une force politique endogène au pays (ou ne l'est que faiblement), les principes de la non ingérence n'ont plus de sens. N'oublions pas que les Vietnamiens tous marxistes qu'ils furent et en dépit des antécédents quasi-coloniaux qui les opposaient aux Cambodgiens n'ont pas hésité naguère à entrer militairement chez leurs voisins pour les débarrasser des Khmers rouges

 

Bien sûr il est regrettable que ce soit l'ex-puissance tutélaire française responsable du renversement de Modibo Keita, mais aussi, plus près de nous, du désastre libyen, de la folle alliance avec le Qatar et de la militarisation du Sahel qui, aujourd'hui, qui joue les pompiers (pour la simple raison qu'elle était la seule techniquement à même de le faire).

 

On peut le regretter, et l'on peut aussi souhaiter - et même l'on doit souhaiter et exiger - qu'elle se retire au plus vite dès que les villes maliennes seront libérées et dès qu'une force d'interposition africaine les aura sécurisées. On doit combattre résolument la sotte ambition du gouvernement français d'éradiquer  les foyers de guérillas dans les montagnes, qui est la véritable porte ouverte à une recolonisation sournoise du pays.

 

Mais pour ce qui concerne la séquence particulière qui va de la reconquête de Konna à celle de Kidal, s'enivrer de principes sans analyse précise des faits et des possibilités d'actions qui étaient ouvertes ou non aux peuples d'Afrique sahélienne conduit simplement à une intellectualisme stérile, qui condamne ses adeptes à l'impasse.


------------------------
Frédéric Delorca a dirigé divers sites anti-impérialistes sur Internet depuis 1998. Auteur de divers romans, essais et récits de voyages, il a coordonné aux Editions Le Temps des Cerises "Atlas alternatif : Le monde à l'heure de la globalisation impériale"

Lire la suite

Lisez ceux qui ne pensent pas comme vous

2 Février 2013 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Débats chez les "résistants"

Je le dis, et je le répète, à mes lecteurs, notamment les plus jeunes : lisez les médias qui ne pensent pas comme vous. C'est une bonne école de liberté et d'intelligence, car cela vous force aussi bien à vous rapprocher des faits qu'à améliorer la cohérence de vos grilles de lecture.

 

engrenage.jpgLisez par exemple cet article dans Haaretz où l'on apprend que le ministre des affaires étrangères turc en visite en Serbie a reproché au président syrien Assad de ne pas avoir répliqué militairement au bombardement israélien sur son territoire cette semaine. Les pro-palestiniens qui aiment le régime d'Assad vont avoir du mal à expliquer après ça que l'opposition armée syrienne aidée par le gouvernement turc fait le jeu d'Israël. Sauf à prouver que le ministre turc a tenu ce discours uniquement pour créer un rideau de fumée alors qu'il serait au fond de mèche avec Netanyahu (mais alors n'a-t-il pas pris un risque à l'égard de l'opinion publique israélienne ? D'autant plus qu'il l'a fait à l'occasion d'une visite dans un pays ami d'Israël, la Serbie... et à l'heure où l'OTAN, elle aussi amie d'Israël, arme la Turquie de missiles Patriots). Et les pro-palestiniens proches de l'opposition syrienne peineront à comprendre pourquoi Israël attaque un gouvernement (celui de la Syrie) que la Turquie accuse d'alliance secrète avec Tel-Aviv. Le propos sur la Syrie est-il simplement outrancier (car après tout, comment Damas peut-elle répliquer militairement quand elle doit affronter une guerre civile sur son territoire ?), et si oui, pourquoi oser une énormité au risque de se dicréditer, pourquoi celle-là, et pourquoi maintenant ? L'Orient devient décidément de plus en plus compliqué... et la Turquie en particulier...

 

Dans un ordre plus anecdotique mais toujours dans la rubrique des écrits des gens qui ne pensent pas comme nous, je trouve, sur un site dont je ne partage pas du tout les idées, une remarque amusante sur un de mes anciens éditeurs. Le petit problème que pointe l'article avait déjà nourri des discussions aigres dans la mouvance "anti-impérialiste" dans les années 2000. Il n'est d'ailleurs amusant qu'à moitié car, au fond, il pose la question très sérieuse des conditions de fonctionnement des petits éditeurs alternatifs, et de leur capacité d'articuler grands idéaux et "éthique de la responsabilité", pour parler comme Weber, une articulation à laquelle j'accorde personnellement beaucoup de prix, mais dont on connaît toute la difficulté.

Lire la suite
<< < 1 2 3