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Le blog de Frédéric Delorca

Articles avec #ecrire pour qui pour quoi tag

La lenteur des esprits

4 Mai 2009 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Ecrire pour qui pour quoi

J'ai mis ce matin en ligne sur le blog de l'Atlas alternatif une brève intervention télévisée de Jean Bricmont, préfacier de l'ouvrage, qui synthétise assez bien le point de vue de nos milieux sur le monde où nous vivons. Je trouve dommage que nous devions dépenser tant d'énergie et tant de temps, pendant de années, à faire passer un message aussi simple, un message de bon sens. C'est comme notre combat pour les droits du peuple palestinien. Je ne comprends pas que les mentalités tardent à évoluer sur tous ces points, et que l'on se heurte à tant de mauvaise foi, tant de bêtise et de lâcheté aussi (je pense aux journaux qui rechignent à véhiculer nos analyses, aux petits esprits qui trouvent utile de diffamer en catimini nos amis pour empêcher la publication de nos ouvrages). Nos sociétés ne sont que très peu démocratiques. Les censures, les refus d'analyser et de discuter honnêtement y sont les réflexes dominants. Chomsky a bien analysé le rôle des propagandes dans les sociétés où l'autorité ne vient plus d'en haut. On crée des réflexes grégaires à coup d'images réductrices et d'informations fausses, et cela crée le même obscurantisme que dans les sociétés traditionnelles. Peut-être même un obscurantisme bien pire : chargé d'une sorte d'hystérie, et d'une peur de celui qui ne pense pas comme la majorité des grands médias, comme si le dissident était un ennemi de l'espèce humaine. Tout cet abrutissement collectif fait froid dans le dos.
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Tristesse du combat anti-guerre

3 Avril 2009 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Ecrire pour qui pour quoi, #Colonialisme-impérialisme

Vu ce soir le documentaire d'Arte sur l'OTAN. Bien pourri, bien hypocrite, bien factuellement faux, comme nous savons les faire. Factuellement faux ce qui est dit sur la Yougoslavie, y compris le bilan des morts de la guerre de Bosnie. Hypocrite, insidieuse, la façon de parler des Grecs qui demandent qu'on épargne leurs usines en Serbie en 1999 (au lieu de parler des usines qu'on a bombardées uniquement pour des raisons sordides), la manière de parler de la guerre d'Ossétie (on parle des Géorgiens qui quittent l'Ossétie, pas des Ossètes qui furent chassés par l'offensive géorgienne, d'ailleurs les Géorgiens ne sont pas présentés comme des agresseurs). Tout le documentaire était à vomir.

A vomir toutes ces Otâneries.

Les jeunes anti-OTANs ce soir parqués dans une banlieue de Strasbourg. Devant se battre pour être visibles dans la ville. Exposés aux violences policières. A vomir.

A vomir mon impuissance. Mon incapacité à exprimer toute cette abjection dans mes écrits et à en faire un combat à la fois efficace et sincère. Au mieux j'en aurai fait un combat bureaucratique.

Une amie me disait en 2007 que nous les gens dont les ascendants avaient été touchés par les guerres (elle et moi étions des enfants de réfugiés républicains espagnols) ressentions les guerres différemment des autres. Elle disait avoir ressenti physiquement, à Paris, les bombardements de Bagdad en 1991 comme des échos à ceux de Bilbao, qu'elle n'avait pourtant pas connus (sa mère les avait connus). Je pense que j'ai ressenti moi aussi une empathie spéciale avec la population de la République fédérale de Yougoslavie en 1999. C'est pourquoi le cynisme de cette guerre, les mensonges autour d'elle m'ont touché particulièrement, et c'est pourquoi me touchent encore des reportages odieux comme celui que nous présente Arte ce soir.

Mais si j'ai échoué à faire passer cela dans mes livres, cet échec se double de celui des autres "résistants", par exemple de cette amie berbère que je connais et qui n'arrive pas à parler de son vécu, de la guerre d'Algérie, de la guerre qu'elle a dû mener dans sa tête, avec et contre l'Occident, pendant plusieurs décennies. Nous sommes tous dans l'échec, le silence. Chaque parole que nous faisons sortir contre les immondices du discours dominant est facilement retournée contre nous pour que nous ne puissions même pas supporter ce que nous aurions à dire.

Pendant ce temps, la bêtise triomphe. La bêtise chargée de son vide abyssal. "Le gentil Obama". "Nicolas Sarkozy et Barack Obama réconciliés". "Le retour logique de la France dans le commandement intégré". Tout ce blabla abject, blabla qui n'a pas de sens, sauf celui de rendre tout le monde complice de toute cette abjection.
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Einsamkeit

19 Mars 2009 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Ecrire pour qui pour quoi

Il faut peut-être revenir à la radicale solitude de l'acte d'écriture. Avoir cet orgueil là de n'écrire que pour soi-même. Mais alors n'est-ce pas une vaine masturbation ? Se construit-on encore dans l'écriture quand on approche de la quarantaine ? Et si l'on se construit, pour quoi faire ? se construire pour se construire ? se construire juste pour avoir un regard de vérité ? avoir été une vérité sur son monde, un vérité plus juste, plus documentée, plus pertinente que toutes les demi-vérités voire tous les mensonges qui traînent partout ? Ecrire, écrire dans un monde qui lit et lira de moins en moins, et surtout de moins en moins bien. Ecrire pour avoir donné sens à son parcours sur terre par cette forme. Quoi de plus solitaire que ce choix là ? Qui peut ensuite supporter cette solitude d'où procède ce choix et à laquelle celui-ci conduit ?

J'ai écrit à 25 ans un texte qui s'appelait Les Fondateurs. Il s'inspirait de l'Odyssée et de l'Enéide. C'était un texte très gratuit, et, en un sens, bien plus libre que ce que je pourrais écrire aujourd'hui, car en ce temps je n'avais pas peur du ridicule. Est-ce un texte ridicule ? Je ne saurais trop dire. Je n'ai guère le loisir de m'y replonger. Je me souviens juste du plaisir que j'avais eu à l'écrire. Plus que du plaisir. C'avait été une étape importante de mon existence à l'époque, quelque chose qui m'aidait à vivre. Aujourd'hui je serais bien tenté de le ressortir de mes cartons. En même temps je redoute tout ce qu'il peut y avoir d'académique et d'au fond très potache dans ce genre de texte, un peu comme une blague des Monthy Python. Je crois quand même que c'était plus que cela.

Le plus tentant dans la reprise de ce livre, c'est qu'elle serait absurde, et donc presqu'aussi libre et gratuite que sa première écriture. Ma problématique personnelle va au delà  de cette question éditoriale. Il s'agit simplement d'évaluer si le choix de la solitude dans l'acte d'écriture peut être assumé, répété, contre vents et marées, à 25, 40, 70 ans.

C'est une question aussi pour ce blog : dois-je continuer à le tenir ? si oui, est-ce pour y délivrer des infos d'actualité (comme tant le font), pour faire signe vers des bouquins qui sortent (plus structurés que mes billets rapides), ou pour tout autre chose, quelque chose de personnel ? Je me rappelle cette réflexion de Derrida à propos de l'idiome pur (idios = particulier en grec). Ce serait une langue dont seul le locuteur aurait la clé, une langue inintelligible par autrui. Le sens de l'écriture ne résiderait-il pas par excellence dans cette absurdité finale, pie que le carré blanc sur fond blanc dans l'ordre des arts visuels ? Faut-il rechercher cela : le sollipsisme de la métaphysique ?
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