Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Frédéric Delorca

Les militants, les pays arabes, le Mpep, news de la semaine, la morosité estivale

13 Juillet 2011 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Le monde autour de nous

CIMG1218.JPGLe Dissident internationaliste me disait hier qu'il a failli être eurodéputé communiste, et même conseiller technique de la ministre Voynet à un moment où il était verdisant. Tout cela lui serait arrivé et bien d'autres choses, si la France (y compris la gauche de la gauche), sous l'empire de médias, n'était pas hypnotisée par les valeurs euro-atlantistes.  Moi, j'aurais pu faire carrière aux Affaires étrangères, où j'ai un peu bossé, et mes livres n'auraient pas été boycottés comme ils le sont partout. Si l'on faisait le compte de ce qu'ont sacrifié tous ceux qui dans les années 2000 ont osé défendre des convictions hétérodoxes, ça fait froid dans le dos.

 

Les seules bonnes nouvelles politiques sont le fait que la guerre en Libye va définitivement s'enliser dans le mois du Ramadan si l'on en croit les analystes, et puis cette interview de Nikonoff dans Libé qui se rallie sans équivoque à la sortie de l'Union européenne par l'article 49-1 du traité de Lisbonne en donnant le modus operandi (et le fait que les européistes de Libé lui tendent un micro est le signe que ça sent le roussi pour eux). Le Mpep a quand même une cohérence et une honnêteté intellectuelle (qui d'ailleurs les pousse à critiquer vertement le programme du Front de gauche sur leur site). On regrette qu'ils n'aient pas plus d'influence à gauche.

 

A part cela donc me voilà installé dans un été bien morne. Mes dernières prises de contact - y compris avec des gens connus - ne devraient pas donner de résultat avant quelque mois, s'ils en donnent. Donc pour le moment rien, rien de rien, comme tous les étés ou presque.

 

Ma petite camarade Michèle Brand publie ses analyses sur la Biélorussie dans Counterpunch. Elle peut au moins se distraire avec ça. Moi, en mai, je suis resté sur le carreau : l'ombre d'une invitation à Minsk, puis plus rien. Pas plus mal sans doute, je ne suis plus preneur de tourisme politique. Je ne sais pas si l'article de Michèle Brand est très objectif. En 2008 elle m'avait traité avec arrogance parce que j'avais dit sur le blog de l'Atlas alternatif qu'il y avait eu 2 000 morts dans la guerre d'Ossétie du Sud. Selon son article dans BRN il n'y en aurait eu que 500-900. "Moi, je cite les chiffres de Chomsky" m'avait-elle lancé, et, in cauda venenum, "je ne suis dans la main d'aucune propagande". Personnellement je continue quand même de penser que Chomsky n'est pas forcément plus fiable sur le Caucase qu'il ne le fut sur le Kosovo. Cette bataille de chiffres avait de l'intérêt car ils étaient l'indice de la violence réelle ou supposée de l'attaque de Saakachvili. Mais compter les morts est une tâche ardue.

 

Michèle à demi-mot me jugeait à l'époque "dans la main" de la propagande russe. Qui sait si elle n'est pas aujourd'hui dans celle de la Biélorussie. Je n'en ai pas la moindre idée. De la Biélorussie je ne sais que ce que m'a dit une jeune enseignante universitaire de Minsk sur Facebook et qui est aux antipodes de ce qu'en dit Michèle Brand. Mais n'y étant pas allé, je me garderais bien de juger. Après tout qui peut même savoir si cette enseignante existe réellement ou si ce n'est pas un type de la CIA qui écrit sur Facebook en son nom ?

 

Tout est possible dans le monde factice où nous vivons, comme par exemple de mettre un check point israélien à Roissy (ça s'est passé le weekend dernier), d'adopter à onze députés une carte d'identité biométrique qui rend le gouvernement garant de vos transactions commerciales (et assimile votre citoyenneté et votre statut de consommateur dans un joyeux flicage généralisé) et tant d'autres choses qui ne nous seront révélées que dans dix ans (au fait, avez vous vu sur LCP l'émission sur la Françafrique ? Marrant comme dans les documentaires après coup la poudre aux yeux tombe et on en vient à appeler un chat un chat, mais cela vient toujours bien tard, et dans des médias si confidentiels que l'ordre du monde n'en sera point troublé).

 

Tenez, dans la série morose aussi, jetez un oeil à l'interview de M. Piccinin sur les succès de Washington dans la neutralisation des Pritemps arabes. Voilà au moins quelqu'un qui ne s'embarrasse pas de préjugés médiatiques. Notamment dans son analyse de l'Iran.

 

J'envie - en le relisant - Romain Gary. Son idéalisme, ses histoires d'amour, sa recherche de l'excellence humaine. Peut-être fut-il trop instable, mais nous nous sommes devenus trop prévisibles, nous tous qui, lorsque nous aurons mal tourné, serons traités par les travailleurs sociaux avec des thérapies comportementalistes (lisez les remarques d'un travailleur social sur une émission de téléréalité à ce sujet). Un bon médicament, une bonne autosuggestion, beaucoup d'hypnose médiatique, et une puce électronique dans le cerveau, voilà : vous êtes enfin conformes à ce que l'on attend de vous !

Lire la suite
Lire la suite

L'essence de la capitulation

12 Juillet 2011 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Lectures

goya.jpgExtrait de Romain Gary, La promesse de l'aube, Folio Gallimard p. 283 (1e édition 1960)

 

" Je suis sans rancune envers les hommes de la défaite et de l'armistice de 40. Je comprends fort bien ceux qui avaient refusé de suivre de Gaulle. Ils étaient trop installés dans leurs meubles, qu'ils appelaient la condition humaine. Ils avaient appris et ils enseignaient "la sagesse", cette camomille empoisonnée que l'habitude de vivre verse peu à peu dans notre gosier, avec son goût doucereux d'humilité, de renoncement et d'acceptation. Lettrés, pensifs, rêveurs, subtils, cultivés, sceptiques, bien nés, bien élevés, férus d'humanités, au fond d'eux-mêmes, secrètement, ils avaient toujours su que l'humain était une tentation impossible et ils avaient donc accueilli la victoire d'Hitler comme allant de soi. A  l'évidence de notre servitude biologique et métaphysique, ils avaient accepté tout naturellement de donner un prolongement politique et social. J'irai même plus loin, sans vouloir insulter personne : ils avaient raison, et cela eût dû suffire à les mettre en garde. Ils avaient raison, dans le sens de l'habileté, de la prudence, du refus de l'aventure, de l'épingle du jeu, dans le sens qui eût évité à Jésus de mourir sur la croix, à Van Gogh de peindre, à mon Morel de défendre ses éléphants, aux Français d'être fusillés, et qui eût uni dans le même néant, en les empêchant de naître, les cathédrales et les musées, les empires et les civilisations.

 

Et il va sans dire qu'ils n'étaient pas tenus par l'idée naïve que ma mère se faisait de la France. Ils n'avaient pas à défendre un conte de nourrice dans l'esprit d'une vieille dame. Je ne puis en vouloir aux hommes qui, n'étant pas nés aux confins de la steppe russe d'un mélange de sang juif, cosaque et tartare, avaient de la France une vue beaucoup plus calme et beaucoup plus mesurée."

Lire la suite

Béarn-Irlande

12 Juillet 2011 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Béarn

vall-e-d-ossau.jpgExtrait de Pierre Bourdieu, Esquisse pour une auto-analyse, Raisons d'agir, 2004 (ouvrage publié post-mortem), p.114 :

 

"J'ai découvert peu à peu, surtout peut-être à travers le regard des autres, les particularités de mon habitus qui, comme certaine propension à la fierté et à l'ostentation masculines, un goût avéré de la querelle, le plus souvent un peu jouée, la propension à s'indigner "pour peu de chose", me paraissent aujourd'hui être liées aux particularités culturelles de ma région d'origine(*) que j'ai mieux perçues et comprises par analogie avec ce que je lisais à propos du "tempérament" de minorités culturelles ou linguistiques comme les Irlandais. Ce n'est en effet que très lentement que j'ai compris que si certaines de mes réactions les plus banales étaient souvent mal interprétées, c'était peut-être parce que la manière - le ton, la voix, les gestes, les mimiques, etc. - dont je m'exprimais parfois, mélange de timidité agressive et de brutalité grondeuse, voire furieuse, pouvait être prise pour argent comptant, c'est-à-dire, en un sens, trop au sérieux, et qu'elle contrastait tant avec l'assurance distante des bien nés parisiens qu'elle menaçait toujours de donner des allures de violence incontrôlée et querelleuse à des transgressions réflexes, et parfois purement rituelles, des conventions et des lieux communs de la routine universitaire et intellectuelle".

 

(*) le Béarn.

Lire la suite

Des nouvelles de Mélenchon

11 Juillet 2011 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #La gauche

Lisez toujours le blog de Mélenchon. Vous avez le droit de ne pas aimer le personnage, de le trouver trop modéré sur certains points, trop hargneux sur d'autres, pas assez stratége, parfois de mauvaise foi, parfois confus, trop francmaçon, trop mitterrandien, trop européiste, trop que-sais-je encore... Mais il faut lire son bloc-note, car il y traite de tous les sujets importants de notre époque, notamment au niveau des aberrations économiques que vote le Parlement européen. C'est à travers lui par exemple que j'ai pris connaissance de la proposition inacceptable d'Hollande de donner force de loi aux conventions collectives. Mélenchon renseigne sur ce que les médias "omettent" de présenter ou présentent de biais, et il le fait avec une certaine élégance. Qu'on aime ou non sa rhétorique, force est de constater qu'elle lui sert plus d'une fois d'armure (un peu comme pour moi les références historiques et la philosophie), et qu'elle joue un rôle structurant pour maintenir sa réflexion au niveau qu'on attend d'un homme politique digne de ce nom.

 

Il ne manque dans ses dernières livraisons (sauf erreur de ma part) qu'une mention des démêlées judiciaires de Gérard Filoche, qui sont pratiquement emblématique du sort que les libéraux réservent à toute l'inspection du travail en France.

 

Dans le blog de Mélenchon je trouve deux points sympathiques :

- Ce passage : "je suis heureux que l’on me compare à De Gaulle l’orateur. J’ai eu ma période Malraux si vous voulez savoir, celle où pour d’autres raisons tout aussi techniques d’aucuns croyaient entendre sa voix en entendant la mienne. Et ma période Badinter. Je suis une synthèse de tout cela". Il est bien d'avouer la pluralité de ses inspirations, bien qu'ensuite le plus dur soit de former une cohérence sur cette base.

- Et cet autre à propos du site Bellaciao : "Vous trouverez disproportionné que je m’intéresse à une question aussi limitée et à des gens aussi ridicules. Mais je veux quand même le faire pour renouveler les mises en garde que je formule sur ce thème à de nombreuses occasions. Il est vital pour notre gauche de ne pas sombrer dans les délires sectaires et de sanctionner ceux qui s’y abandonnent. Le dénigrement, l’insinuation, l’injure ne doivent jamais être nos méthodes. Ces lèpres ont dans le passé autorisé les crimes les plus odieux." Une mise en garde très importante à l'heure où en effet le débat politique à gauche manque souvent de tenue.

 

Les chroniques de Mélenchon étant bien documentées et à maints égards plutôt honnêtes, leur lecture peut remplacer avantageusement celle de nombreux journaux.

Lire la suite
<< < 1 2 3 4 5 > >>