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Le blog de Frédéric Delorca

Articles avec #colonialisme-imperialisme tag

Actualités françaises, et une réflexion sur le bellicisme américain

2 Novembre 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

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Mélenchon propose sur son blog d'intégrer le POI au FdG en reconnaissant qu'ils ont rallié beaucoup de militants à la manif du 30 septembre contre le traité budgétaire européen. Elément intéressant, et qui prouve peut-être que le POI n'est pas associé dans l'imaginaire de la gauche à l'initiative du "Comité Pas en notre nom" qui se fait tirer dessus sur le Net.

 

L'actualité n'est pas passionnante en ce moment. Les déboires du gouvernemant Ayrault en ce moment sur tous les fronts seraient drôles si l'addition n'allait pas être à la charge des Français. Comment ont-ils pu ne pas anticiper le fait qu'ils seraient mis en minorité au Sénat sur la programmation budgétaire ? Cela dépasse l'entendement - voir ausi le bon article du Diplo sur Hollande et la Palestine.(Et pendant ce temps M. Sarkozy vend ses talents d'ex-président sur le marché des conférenciers à 100 000 euros la conférence, voir un repotage récent d'Envoyé spécial - n'en doutons pas, le cynisme des puissants n'a pas de limite... et cependant vous verrez qu'une majorité de Français votera bientôt à nouveau pour eux).

 

centcom-copie-1.jpgAujourd'hui Russia Today (dont un lecteur a rappelé récemment à juste titre sur ce blog qu'elle avait des penchants complotistes, mais je crois qu'on peut la regarder en triant soi-même le bon grain de l'ivraie) comme toujours faisait flêche de tout bois pour construire une contre-propagande. Mais cela tombait un peu à plat (comme souvent). Un argument contestable entre mille que j'entends chez eux (et chez beaucoup de militants alternatifs) : avec les millions de dollars dépensés dans les opérations d'Afghanistan et du Pakistan, qui tuèrent des civils et ravagèrent ces pays, les Etats-Unis auraient pu financer des services publics chez eux et à l'étranger. C'est un argument que nous avons nous-mêmes utilisés dans l'Atlas alternatif mais, avec le recul, je le trouve très naïf, car pas assez Clausewitzien. On ne peut pas dire que l'argent dépensé en opérations militaires qui ont échoué est perdu, et qu'il aurait été plus utile employé ailleurs. Parce qu'une opération militaire, même ratée, joue un effet dissuasif. Si vous vous abstenez d'engager vos soldats là où on s'attend à ce que vous le fassiez, quelqu'un d'autre (notamment vos riivaux actuels, ou vos adversaires potentiels), vont interpréter cela comme un signe de faiblesse, et engageront contre vos intérêts des actions qu'ils n'auraient pas osé mettre en oeuvre si vous aviez déployé vos forces. Et le fait d'encourager le rival à agir contre vous peut avoir un coût économique supérieur à celui d'engager la force en premier.

 

Autrement dit on ne peut pas raisonner sur de l'économie virtuelle. Je ne dis pas que les USA ont eu raison d'engager la force en Afghanistan. Il y a parfois de très bonnes raisons politiques de refuser d'engager la force, y compris du point de vue de la Realpolitik (par exemple, comme le fait la France en refusant de reconduire les accords militaires hérités du gaullisme qui prévoyaient un recours automatique à la force quand les intérêts français en Afrique ou ceux de dictateurs alliés, pour leur substituer une logique de coopération plus pacifique et égalitaire). Je dis juste que l'économie (fondée sur des évaluations virtuelles) n'est pas un argument solide pour disqualifier le bellicisme.

 

L'argument "encore plus à gauche" selon lequel, "à long terme" le développement des services publics rend les gens plus intelligents et moins belliqueux, de sorte que tout renoncement au recours à la force est positif pour l'humanité sur une génération, tient encore moins selon moi. Car d'une part il n'est pas sûr que les services publics forts rendent les peuples pacifiques (l'éducation et la santé gratuite dans le Caucase soviétique n'a pas empêché les peuples de se ruer les uns sur les autres à la fin de la guerre froide), et de toute façon ils ne rendent pas plus pacifique l'adversaire.

 

J'ai entendu Mitt Romney répéter récemment le catéchisme américain selon lequel le rôle de défenseur de la liberté qui revient aux Etats-Unis les oblige à ne pas diminuer le budget militaire. Je comprends cet argument et d'une certaine façon je compatis parce que c'est un argument de détresse. D'une certaine façon les USA sont pris dans un piège. Les circonstances historiques sur un siècle en ont fait une superpuissance mondiale bardée de discours messianiques (je fais l'impasse sur la petite parenthèse isolationniste post-wilsonienne des années 20), situation dont ils ont retiré beaucoup de privilèges économiques (et un droit de tirage monétaire sur le reste de la planète), mais qui aujourd'hui les piège complètement. Obligés par la dette à réduire leur potentiel militaire, ils ne le peuvent pas. De toute évidence il leur faudrait recalibrer leur puissance, devenir moins omniprésents partout, moins flamboyants, mais ils ne peuvent le faire sans encourager leurs rivaux à avancer contre eux (ceux que la Russie et la Chine par exemple font depuis dix ans de façon très visible). Les USA ne peuvent se réformer, ni se redimensionner, comme leurs comptes budgétaires l'impose. Ce qui laisse redouter un atterrissage très douloureux chez eux, et peut-être très irrationnels (sauf bien sûr révolution technologique au profit des Etats-Unis dans les domaines civils ou militaires ce sur quoi pariaient les neocons autour de Rumsfeld en 2002).

 

On peut aussi se demander du reste si le continent européen peut se réformer. Non pas se transformer en "Europe sociale" comme on dit au Front de gauche ce que je ne crois pas, mais, même si un retour aux nations se produit, trouver le moindre sens à cette recalibrage national des espaces publics. Je crains que le seul sens que nous puissions lui trouver demeure dans la perpétuation d'un état de vassalisation à l'égard de la puissance américaine. Et les discours des partis "nonistes" (les "nonistes" de 2005) ne me laisse rien entrevoir de sérieux à ce sujet.

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Que se passe-t-il à Alep ? / Que faut-il espérer pour l'Asie ?

30 Juillet 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

Vous savez, vous, ce qui se passe à Alep ? Depuis un an je refuse de gober le mythe des "gentils opposants syriens pro-démocratie aidés par le Qatar et la Turquie contre le méchant régime baasiste aux abois qui ne doit sa survie qu'à la Russie". Bon, mais après ? Le mythe est ridicule comme tous ceux que nous montons contre nos ennemis depuis depuis deux siècles, mais le réel, quel est-il ?

 

Ce matin Ria Novosti nous expliquent que les rebelles syriens, dirigés par un général fêlon (on n'est plus au niveau des colonels comme en janvier, les armées ennemies ça s'achète, comme on l'a vu à Bagdad et à Tripoli), ont conquis un poste de contrôle de contrôle stratégique dans la deuxième ville du pays dont ils veulent faire leur "Benghazi". Quoi, Ria Novosti serait-elle pro-Occidentale ?

 

Les médias pro-Assad et leurs partisans en France avec la finesse stylistique qu'ils avaient déjà déployée à l'époque de la guerre de Libye démentent en bloc, et proclament qu'au contraire les déserteurs sont mis en déroute. Qui croire ?

 

jeu_dames.jpgLes analystes de géopolitique se font des frayeurs : le Liban va éclater, la guerre civile va s'installer en Syrie car les Alaouites tiendront la montagne et le pays deviendra une constellation de principautés comme les néoconservateurs en ont rêvé (le coup de l'explosion complète du pays on nous l'a déjà fait sur la Serbie, l'Irak et la Libye, mais ça ne s'est pas produit, que je sache). Israël va gagner sur  toute la ligne en renversant Assad disent certains, il n'y aura plus d'obstacle à la guerre contre l'Iran (personnellement je n'en suis pas du tout convaincu, car l'Iran se rapproche du Pakistan et peut nuire à l'équilibre du Yemen, donc la chute du baassisme syrien ne serait qu'une bataille perdue pour eux, pas la fin de la guerre).

 

Bref, les gens cogitent dans tous les sens, élaborent des scénarios. Certains pas forcément pro-américains ni enthousiastes de la médiacratie occidentale se disent qu'un nouveau régime, plus ou moins teinté d'idéologie des Frères musulmans, ne serait pas nécessairement néfaste à l'avenir de ce pays. Pour ma part je ne sais que penser. Les dictatures nationalistes moustachues ne correspondent plus aux attentes de la jeune bourgeoisie urbaine, même sous les traits relativement souriants du Docteur Assad. Un régime barbu ne serait pas nécessairement nihiliste, il y aurait  sans doute des arrangements pluralistes pour plaire aux bailleurs de fond qui eux-mêmes ont des intérêts divergeant (Américano-euro-israéliens, saoudiens et qatariens n'ont pas tout à fait les mêmes intérêts dans ces affaires, idem qu'en Egypte). Je continuerai de faire de l'information alternative sur ce pays, mais tout en demeurant résolument sans opinion sur ce qui est bon pour son avenir.

 

D'une manière générale je reste très agnostique sur le destin du continent eurasiatique. En ce moment on parle de l'adhésion du Vietnam à l'union douanière Russie-Kazakhstan-Biélorussie alors que Hanoï s'oppose amèrement à Pékin sur le conflit territorial de la mer de Chine méridionale. Les Russes, comme les Chinois cherchent à s'implanter en asie du Sud Est et le Pacifique - ils vendent des armes à l'Indonésie, ont de bonnes relations avec la Thaïlande, ont poussé Nauru à reconnaître l'abkhazie
 
A terme il y aura des tensions entre Moscou et Pékin, c'est déjà le cas au Turkéménistan, très pro-chinois qui s'oppose à Moscou sur les projets de consortium gazier.
 
Pour ces deux grands pays le diable américain est une chance car il joue un role fédérateur (celui du fédérateur négatif comme le barde Assurancetourix dans Astérix). Le jour où l'Oncle Sam se retirera d'asie il se feront une guerre froide.

 

La France historiquement a vocation à rester neutre entre les puissances atlantiques (anglo-saxonnes) et les forces continentales de Russie et de Chine.

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Russell n'était-il pas quand même "un peu trop" pacifiste ?

27 Juillet 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

russellDédicace spéciale à Jean Bricmont et aux petits gars du « BRrussells tribunal »

« [Durant la crise d’Ethiopie en 1935] Le pacifisme, un pacifisme absolu, régnait dans les communautés britanniques et reliées à l’Angleterre. (…) Si Huxley partageait la richesse mondiale et disposait de l’Empire britannique, acceptant comme argent comptant  l’accusation fasciste qui représente la SDN comme un syndicat de nations monopolisatrices,  Bertrand Russell devait aller un pas plus loin, et disposer de l’Angleterre elle-même. A supposer que le pis en vienne en pis, dit-il un an plus tard, Hitler et ses troupes envahiraient l’Angleterre, on devrait les accueillir comme des touristes et les saluer amicalement. « Quelque dommage que nous puissent alors faire les Allemands, ce ne serait pas pire que le dommage qui résulterait du combat, en admettant que nous l’emportions. Les nazis trouveraient, j’imagine, quelque intérêt à notre façon de vivre et l’on pourrait guérir de leur raideur. » Il est éminemment heureux que ces personnalités remarquables aient plus de crédit dans le monde de l’archéologie, de l’imagination créatrice ou des mathématiques que dans la politique à proprement parler. Si le contraire était vrai, rien ne serait plus favorable à Hitler et Mussolini. » (G.A. Borgese, Goliath, La marche du fascisme, Editions Desjonquères, 1986, p. 153-154, version anglaise 1938)

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André Gide sur les mérites de l'Islam en Afrique

18 Juin 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

Tunisie-132.jpg"Au contact de l'Islam ce peuple [dans la région de Fort-Archambault] s'exalte et se spiritualise. La religion chrétienne, dont ils ne prennent trop souvent que la peur de l'enfer et la superstition, en fait trop souvent des pleutres et des sournois." (André Gide, Voyage au Congo Folio p. 223)

 

Notons que l'expression un peu généralisante de Gide qui aujourd'hui passerait pour raciste est à remettre dans la contexte des analyses du Voyage au Congo qui n'essentialisent pas les défauts des peuples que l'écrivain croise : il les attribue surtout à la surexploitation coloniale qui en fait comme il dit de "tristes troupeaux humains sans bergers". La christianisation participe à ses yeux à l'avilissement de l'Afrique là où l'islamisation la "tirait vers le haut", pour ainsi dire.

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A propos de la Lettre des relations internationales du PCF de mai 2012

3 Juin 2012 , Rédigé par Frédéric Delorca Publié dans #Colonialisme-impérialisme

Voici la lettre des relations internationales (LRI) du PCF de mai 2012 et mon commentaire critique juste en dessous (critique constructive car j'aime bien le Front de gauche).

 

 

 

- Sur l'Algérie la phrase "le moment n'est il pas venu de sortir de cette période postcoloniale" est pour le moins inopportune. Imaginons en 1936 : le nazisme menace toute l'Europe centrale. Qu'aurait-on dit alors si un auteur allemand non-nazi mais disons proche de l'ex-Zentrum (le parti centriste interdit par Hitler mais qui n'a jamais été très clair sur l'impérialisme allemand), avait choisi ce moment là pour dire aux Tchèques et aux Serbes "Les amis, le moment n'est il pas venu de sortir de la méfiance à l'égard du pangermanisme et de virer les gouvernements anti-allemands que vous avez à la tête de votre pays ?"


C'est exactement ce que fait la LRI. Le PCF fut longtemps ambigu face au nationalisme algérien, il n'a pas été en pointe pour le soutenir dans les années 50, c'est le moins qu'on puisse dire (et souvenons nous qu'en 45 il qualifiait les manifestants de Sétif de doriotistes - ce sont surtout certains militants de base qui dans les années 60 ont été efficaces dans le soutien au FLN... quand d'autres rejoignaient l'OAS). Aujourd'hui le néo-colonialisme est partout en Afrique, du nord au sud, et le PCF arrive la bouche en coeur "hey les mecs, si on  sortait du post-colonialisme et du vieux ressentiment contre la France", pour convaincre les Algériens de virer le FLN... Il n'a aucune légitimité pour ça.

 

Bien sûr qu'on me comprenne bien, l'analogie que je cite ici ne cherche pas à tracer une égalité entre néo-coloniaisme et nazisme, ni non plus à dédouaner le FLN de ses propres travers et fautes. Si je choisis la comparaison avec l'Europe des années 30, c'est uniquement parce que l'exemple parle à tout le monde. Je pourrais aussi parler de traités imposés par la République romaine aux derniers souverains séleucides, mais cela parlerait moins aux gens. Je veux juste montrer ici qu'on ne peut pas recommander à un peuple qui a eu des centaines de milliers de morts dans une lutte de libération nationale de virer le parti qui a incarné cette libération, alors qu'on appartient soi-même à un parti qui n'a pas été à 100 % investi dans la lutte.

 

- Sur Borat, je suis en désaccord avec le billet de M. Streiff, "politiquement correct", sans humour. Je ne vois pas le rapport entre les parodies de Borat et "Maréchal nous voilà". C'est juste un billet d'indignation à deux centimes sans intérêt.

 

- Sur la Syrie "plan Annan mis en danger par la répression massive du régime et les affrontements armés". Phrase idiote. On a l'impression que les affrontements "tombent du ciel", voire qu'ils sont le résultat de la répression. Pas un mots sur les livraisons d'armes qatariennes, le rôle d'A Qaida, celui d'autres alliés de Washington dans l'encadrement des "forces syriennes libres". Toujours la même bouillie avec des concepts abstraits "la répression" "l'engrenage de la violence", sans pointer du doigts les amis de nos gouvernants et les lobbys qui les financent. Bien sûr il y a des choses à reprocher au régime d'Assad et le drame syrien ne provient pas uniquement des ingérences étrangères loin s'en faut, mais pourquoi le silence du PCF sur les manoeuvres de l'autre camp ?

 

- Sur le Soudan, je ne vois pas en quoi le fait que le gouvernement soudanais, menacé par la CPI, ait fait des concessions aux USA en les laissant construire une grande ambassade à Khartoum en 2010 et en reconnaissant le sud-soudan en échange de leur retrait de la liste des Etats terroristes (promesse d'ailleurs non tenue par l'Oncle Sam) serait le signe d'un terrain d'entente "paradoxal ou peut-être cynique" comme le dit l'article. Lorsque les colonisateurs anglais imposaient aux chefs de tribus africains ou à l'empire chinois au XIXe siècle, les socialistes européens auraient ils été assez idiots pour dire que cette humiliation est "paradoxalement ou peut-être cyniquement" le signe d'une "entente" entre ces protagonistes ?

 

A propos de la politique étrangère du Front de Gauche, signalons le bon papier sur le blog de Jean-Luc Mélenchon contre l'alignement atlantiste de M. Hollande... mais il est dommage que cela vienne au moment même où son auteur s'engage à ne jamais voter une motion de censure contre ce gouvernement. Là encore imaginons, je ne sais pas, Jean Jaurès en 1905 qui dirait "je condamne la politique du gouvernement qui augmente le budget militaire, mais je ne voterai jamais pour sa destitution"... Bizarre... Pour le reste je continue à encourager mes lecteurs à diversifier leurs lectures sur le Net sur tous les dossiers du brûlants du moment (par exemple la Syrie) et à garder leur esprit critique à l'égard de toute forme de prêt-à-penser, qu'elle vienne des pouvoirs dominants ou de leurs adversaires.

 

Je voudrais aussi dire un mot des propos intelligents de Moisés Naïm dans le revue Books sur la malédiction du pétrole. Il y souligne combien cette source d'énergie qui permet de réaliser des profits exponentiels voue tous les régimes (sauf les vieilles démocraties à la norvégienne) à la corruption, en citant les exemples du Vénézuela (d'avant Chavez) et de la Russie actuelle. Il n'y a pas que le problème souvent soulevé par les anti-impérialistes que le pétrole suscite les convoitises du Pentagone. La difficulté est bien plus profonde, hélas...

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